dans les maifons, cette efpèce n’eft point nuifible, feulement
elle mange les poules quand elle peut les attrapper : à cela
près, ces Lézards font utiles dans les maifons, en ce qu’ils
les nettoyent & les purgent de tous les animaux nuifibles &
venimeux qui po.unoient s y trouver. On trouve encore aux
Philippines une autre efpèce de Lézard tout-à-fait fmgulière.
Je ciois qu il ne fera pas ici hors de propos que je rapporte
à ce fujet les paroles originales de l’hiftoire Efpagnole.
«Les Chacones, que quelques-uns difent être le flellion(,d),
» eû encore une forte de Lézard particulière; il a les ongles
*> fi fins qu’ils ont prife fur un miroir ; il reifemble au Lézard
» d’Elpagne; il chante pendant la chaleur, mais fon chant &
« fa voix font défagréables ; on lui entend feulement répéter
toco, toco, d’une voix allez forte. »
Je nai point vu cet animal; mais j ’en ai très-fouvent
entendu à Manille , il habite ordinairement dans les
maifons ; on lui entend d abord poulfer deux à trois cris
dune voix tremblante, à peu-près comme fait le hibou,
mais plus forte, & fuffifante pour avertir de là préfence dans
toute la maifon où il eft, quelque grande quelle foit; puis if
prononce tres-diftinéfemeni toco, qu’il répète ordinairement
fept fois de fuite, quelquefois juiqu’à onze en baiffant infen-
fiblement le ton a chaque fois, en forte que fon dernier cri
elt beaucoup moins fort que le premier, & d’un ton beaucoup
plus grave ou plus bas.: je n’ai point vu cet animal,
comme je lai dit, quoique je l’aie très-fréquemment entendu,
& on ni en 3, à la vérité, donné un delfin qui eft un vrai
(a ) Stellio îmnibus nititw ¿X rmr&ur in oedibus Régis. Proverbes,
■chap. x x x , verfet 28. 1
delfin
d a n s l e s M e r s d e l ' I n d e . 4 9
delfin de Lézard; malgré cela j’avois toujours eu beaucoup
de peine à me figurer que l’animal que j’avois entendu fût
un Lézard, parce que je ne croyois pas qu’il y eût des Lézards
qui pulfent chanter; de forte que j’étois indécis for l’ufage que
je ferois de cette obfervation. A mon retour à Paris ,
M. Daubenton, à qui j’ai parlé de cette obfervation, m’a
indiqué les anciens volumes de l’Académie, & j’y ai trouvé
cet animai, dans les Mémoires pour fervir à l’Hifloire naturelle
des animaux, drejfés par M . Perrault, & c. tome I I I l page 2.,
parmi les deferiptions anatomiques de quelques animaux,
envoyées de Siam à l’Académie en 1687, par les PP. Jéfuites
françois, Millionnaires à la C h in e , Correfoondans de
l’Académie. .
L ’animal en queltion fo trouve à Siam, & les RR. PP.
Millionnaires lui donnent le nom de toc-kaie. C ’ell exactement
le même que le toco de Manille ; & j’avouerai ici que
j ai vu avec plaifir mon obfervation de Manille confirmée.
Comme tout le monde n’a pas entre les mains les anciens
volumes de l’Académie, je vais, en faveur de ceux qui ne
peuvent recourir à l’original, rapporter ce qui eft dit du
toc-laie dans le volume que j’ai cité. -
« Le toc-kaie eft une elpèce de Lézard fort commune dans
le royaume de Siam, deux fois plus gros que les Lézards
verts qu’on voit en France ; on l’appelle de ce nom à caufe
de fon cri, car cet animai, en criant, articule très - diftinc-
tement ces deux ïyllabes toc-kaie, de la même manière que
nous appelons cou-cou cet oifeau qui ne fait chanter que
fon nom; encore que le toc-kaie ait le ton de la voix bas
& grave, il crie néanmoins avec tant de force qu’il fe fait
quelquefois entendre de plus de cent pas, ce qu’il fait
Tome II. G