de Gibraltar.. Nous- mouillâmes ce même foir à Cadiz, où j’ai é té
fort bien reçu.
J ’ai les plus grands éloges à vous faire de Don Jofeph de Cordova :
apparemment que i’ufage des vaiffeaux Efpagnols eft que l’Aumônier
foit alîis à table à la droite du Capitaine ; mais le premier
jour de notre départ , Don Jofeph de Cordova me marqua ma
place à fa droite, entre l’Aumônier & iui ; ce qui déplut un peu
à celui-ci, à ce que me dirent quelques Officiers qui n’en parurent
pas mécontens.
Le foir, M. de Cordova foupoit feuï après tout le monde : if
voulut toujours que je lui tinffe compagnie; & chofe que vous aurez
peut-être peine à croire, nos volailles fe font fi bien cùnfervées,
que nous en avons eu jufqu’en Efpagne; & depuis que nous eûmes
regagné la Zone torride jufqu’à Cadiz, M. de Cordova avoit très-
fouvent deux à trois oeufs frais , qu’ii partagoit avec moi, &c:
¡enfin, Monfieur, je ne finirois pas fi je voulois entrer dans tous
les petits détails des attentions q u e ce-galant homme a eues pour moi
dans notre traverfée. II me mena à l’île de Léon chez fon oncle,
D on Louis de Cordova, qui m’a parfaitement bien reçu.
Je fiiis venu ici par terre, après avoir trayerfé toute l’Efpagne,
car j’étois fi las de la mer que je n’ai pas voulu me rembarquer ;
mais je vous affine que j’ai fait un dur voyage de Cadiz à Bayonne.
Je ne me ferois nulle peine de m’embarquer fur les Vaiffeaux de
guerre d’Efpagne , après ies effais que j’en ai faits à.bord du Bon-
Confili & de VAJlrée ; mais de ma vie je ne voudrais faire une
feconde fois- la route de Cadiz à Bayonne par terre.
' Je vous dirai encore i c i , Monfieur, comme pour les Philippines,
que je fuis charmé d’avoir fait ce voyage ; il m’a confirmé une
¡remarque que j’avois déjà faite en petit à I’IÎIe-de-Erance.
J ’ai traverfé deux grandes chaînes de montagnes , la Syerra
Morèna ( montagne Noire ), la Syerra d’el Pyréneo ( les Pyrénées),
ôc j’ai vu une partie de la Syerra d’el Pico., où .eft i’Efcüriai ;
j’ai eu occaûon de remarquer que l’obfecvation -de M. Bourguet,
fur la correfpondance des angles rentrans & faillans des montagnes,
n’eft pas exacte ; mais j’en ferai le fujet d’on Mémoire.
Je joindrai ici, Monfieur, une Table du degré du thermomètre
que j’ai obfervé en traverlànt la zone torride; vous pouvez eomparer
cette Table à celle que je vous ai déjà envoyée pour cette même
zone lorfque je ia traverfai pour aller dans vos mers.
Ce qui eft bien à remarquer, c’eft que le thermomètre n’a prefque
pas eu de variation du foir au matin dans cette Zone torride; en
forte que la chaleur y eft allez fenfîbiemeut la même la nuit &
le jour.
Un autre fait ne me paroît pas moins fingulier ; fous le tropique
du Capricorne où j’étois le 20 de mai;Te Soleil approchant du tropique
du Cancer-, & étant par conféquent à 43 degrés de moi,
j’qbfervai le thermomètre à 16 degrés & demi pendant toute la
journée fans .variation. En continuant de me rapprocher de la Ligne
je voyois le thermomètre monter journellement ; en forte que le
jour que nous la paffames, il marquoit 21 degrés & demi, le
Soleil étant à 20 degrés environ de moi; le thermomètre continua
encore de monter jufqu’à ce que nous fuffions parvenus à 1 o degré»
de latitude boréale en nous rapprochant toujours du Soleil : à cette
latitude, il monta jufqu’à 22 degrés, le Soleil n’étant plus qu’à
1 o à 12 degrés de notre Zenith.
Mais quoique depuis cette latitude jufqu’au tropique du Cancer
nous continuaffions à nous rapprocher du Soleil, jufqu’à l’avoir
au Zenith , le thermomètre au lieu de continuer à monter comme
il aurait dû faire , rétrograda au contraire journellement à 11e
marquer plus que 19 ou au plus 19 degrés & demi, là. où nous
avions le Soleil vertical.
La raifon de cette .inégalité m ’a paru venir, Monfieur, de la-
différence des vents de Sud-eft & de Nord-eft; les vents de Sud-eft
nous accompagnèrent jufqu’au 1 o.” degrés de latitude ; & là nous
trouvâmes les vents de Nord-eft, qui font apparemment plus irai»
que ceux de Sud-eft.
Si les vents influent réellement fur le thermomètre, comme iî