vents de Sud, & la nuit des vents de terre ou de Nord:
la brife du Sud commence ordinairement à neuf ou dix
heures du matin ;■ elle s’élève par degrés, & elle eft quelquefois
très-forte; la mer écume beaucoup au large & for la
barre: cette brife varie très-peu, du Sud-fud-eil au Sud-fod-
oueft au plus ; au coucher du Soleil, eüe commence à tomber,
& iorfqu’elle eft tout-à-fait tombée, la brife de terre lui
fuccède : celle-ci fe déclare à neuf heures, 1 dix heures ou
minuit ; ■ cette heure m’a paru dépendre de la forcé avec
laquelle la brife du Sud a. fouillé pendant le jour. La brife
du Nord eft foible , elle ne fait point moutonner la mer;
elle eft au contraire comme un étang, parce que la lame
tombe avec la brife du Sud.
La brife de terre eft ordinairement du Nord, du moins
pendant la faifon que j’ai v u e , & elle rend les nuits très-
fraîches.
C e qui fait voir que la brife du Sud de la baie d’Antongil
eft une folle-vente, occafionnée par la hauteur des montagnes,
c’eft que malgré la force de cette brife , les nuages
viennent prèlque toujours de l’Eft.
Pendant ces fortes brifes , on ne fent pas le moindre
fouille fous l’île Marotte; les Vailfeaux y fent tranquilles,
lâns le moindre mouvement, & la mer n’y a qu’une très-
foible houle : on diftingue parfaitement, de terre, la lifière
qui détermine les limites de la brife du Sud ; c’eft un
Méridien qui paiîè par la pointe de la rive gauche de la
rivière, & par le cap de l’Oueft de la grande anfe de l’île
Marotte: à i’Oueft de cette ligne, la mer moutonne, écume
même confidérabfement; à i’Eft, elle eft fans mouvement.
- 11 fuit de tout ceci, que les Vailfeaux étant mouillés fous
l’île Marotte, les bateaux ne peuvent pas à toutes les heures
de la journée, aller à la grande terre & en revenir; ils y
vont ordinairement le foir, & paffent la barre à la faveur
de la brife du Sud ; ils reftent la nuit- à terre , & repartent
le lendemain matin pour s’en retourner à leur bord, avant
que la brife du Sud fe déclare; car s’ils attendoient que cette
brife fouillât, iis ne pourraient pas franchir la barre , ni
gagner l’île Marotte : la brife de terre , quoique foible , eft
communément alfez forte pour qu’ils puilfent déployer leurs
voifes & s en fervir a la place de leurs rames.
Il fuit encore de ce que j’ai dit, qu’on ne quitte pas l’île
Marotte & qu’on ne fort pas de la Baie quand on veut:
on appareille la n u it, .& à la faveur des vents de terre ou
du Nord; ils font foibles à la vérité, mais-on s’en fert tels
qu’ils font. On eft fouvent obligé de louvoyer; on peut le
faire en toute fécurité, parce que la Baie eft faine par-tout;
avec cela, on n y trouve pas moins de vingt-deux biaifes
de très-bon fond; ainfi, 011 peut mouiller par-tout pour
efpérer la brife favorable : quelquefois, après avoir été battu
pendant plufieurs jours, 011 eft obligé de regagner le mouillage
de Marotte : ce délavantage eft tres-grand , &. le feui inconvénient
que je trouve en cet endroit; car une efeadre pourrait
être très long-temps retenue dans cette Baie.
Cependant, M. de laBourdonnaie en fortit en cinq jours
avec l'on efeadre, dont la plupart des Vailfeaux marchoient
peu & tenoient auifi mal le vent.
Ce beau pays eft inculte ; on rencontre feulement, de
place en place, quelques familles de Noirs établis fur les
bords de cette belle rivière dont j’ ai parlé; ils.cultivent à
peine du riz pour leur nourriture : le terrain eft en partie