dans cette maifort à quelqu’heure que ce fût de la journée,
fans la moindre inquiétude, j’y mangeois même très-fouvent,
J’ajouterai ic i, qu’ayant appris un matin, que madame Roxo
étoit accouchée pendant ia nuit, j’y aliai le même jour à onze
heures du matin, dans la feule intention d’apprendre par moi-
même de fes nouvelles : la Marquiíb de Villa-Mediana fa mère,
arriva comme je m’en retournois ; elle me demanda fi je
defirois voir fa fille ; fur ia réponfe que je lui fis, elle me
prit par ia main, me fit palier par piufieurs appartemens où
je ne voyois point, & nous parvînmes enfin dans celui de
madame Roxo, qui avoit deux bougies pour l’éclairer; je
crus la trouver dans fon lit, je ne fus pas peu furpris de
ia voir fur une »ate étendue fur le plancher, & lôn enfant
à côté d’elle fins aucune elpèce de maillot.
A r t i c l e c i n q u i è m e.*
De /'état féculicr des Philippines.
D e tous les Gouverneurs & de tous les Vice-rois qui
dépendent de la Couronne d’Efpagne, il n’y en a point de
fi abfolu, difent les Efpagnols, que le Gouverneur de Manille
& des Philippines, il n’y en a point qui ait tant d’autorité ;
lôn pouvoir, ajoutent-ils, lui vient de la diftance : il eft en
effet maître abfolu de faire une infinité de çhofes, fans
attendre l’avis & la réfolution de la Cour d’Efoagne.
Ces Gouverneurs fentant leur afcendant par l’éloignement
dont ils font de leur Cour , abufent prefque toujours de
leur pouvoir : dans ie fiècle dernier, un des Gouverneurs
de Manille ayant envoyé une expédition contre Ternate,
pour en faire la conquête ; on amena prifonniers en cette
Capitale, ie Roi de cette lile , fon fils, feul héritier de ia
Couronne, & un Chachaquil (Prince du fang royal); &
quoiqu’il vînt d’Efpagne une Ordonnance du Roi pour leur
donner la liberté, (c eq u i eût été exécuté par-tout ailleurs)
le Gouverneur prit fur lui de les retenir prifonniers : ce Roi
mourut donc en prifon, fon fils mourut également en i ;
le Prince royal qui leur fuccédoit naturellement comme le
plus près de la Couronne, refta prifonnier de guerre.
Les Gouverneurs de Manille en ont prefque toujours ufe
ainfi avec les Souverains de toutes les petites Ifles qui les
environnent, & dont l’état de foibleffe ne permettait d’autre
relfource que celle de s’en remettre à la diferétion du Vainqueur.
Quant aux autres Souverains de plus grands Empires,
toutes leurs tentatives ont été vaines-contre leurs Etats & contre
leur perfonne ; c’eft ainfi qu’ils ont, en différentes oecafions,
affujetti les royaumes de Champ a, Camboja & Mindanao’,
frontières des Philippines ; mais ces fujets ont toujours été
rébeiles, & les Efpagnols les ont enfin laiffés en repos. Les
Gouverneurs de Manille, n’ont jamais ofé tourner leurs
armes contre ia Chine -ni contre le Japon; au contraire,
ils ont toujours entretenu la bonne harmonie avec l’Empereur
du Japon ; il eft vrai que cela leur fut expreffément fignifié
par .une Ordonnance du 4 Juillet 1 éotj ; on s’eft fait des
préfens de part & d’autres jufqu’en l ’année 16 14. Cette
année, l’Empereur du Japon rompit tout-à-fait l ’harmonie,
pour raifort de religion,, & chacun eft -refté chez foi ; car
lès Japonnois ne vont point commercer aux Philippines , &
les Maniflois n’ofent plus aller au Japon.
L’harmonie -s’eft mieux confèryée avec la C h in e , & le
commerce entre cette Nation & Manille fùbfifte toujours.
dl eft vrai qti’il vint à Manille en 17(37» lorfque j’y étais,