détails; mais je croîs qu’il eft important que je rapporte ici
la traduction fidèle du texte de l’original.
« L ’ame, dit l ’auteur, dépend teljement du corps & de
» lès fenfations, que toutes les opérations de l’elprit füivent
» les diipofitions bonnes ou mauvaifes dans leiquelles le trouve
» le corps; or , les diipofitions du corps font relatives au
» climat, en forte que la différence des hommes, foit dans
» l ’habitude du corps, foit dans l’elprit, le génie, &c. vient
» des différens climats de la terre, de la différence de l’air,
» de celle de l’eau & de la nourriture, félon l’axiome natura
» fa c it habilem. De-là vient la différence que l’on remarque
» éntre les Nations éloignées ; elle eft évidente entre les
» Efpagnols & les François, les Indiens & les Allemands,
„ & entre les Éthiopiens & les Anglois ; mais fans aller chercher
» des diftances fi éloignées , cette différence fe remarque dans
» les différentes provinces de l’Eipagne.
» Aux Philippines, on peut aifément faire cette même
»remarque; ces exemples y font très-communs, à la Jource
» d une rivière on trouve une C a fle , & à l’embouchure de
» la même rivière, une autre Cafte toute différente en couleur,
» en coutume & en langage.
» Selon les expériences, continue notre Auteur, qu’un Reli-
» gieux a faites pendant quarante ans, fur le génie des peuples
» des Philippines, il eft très-difficile de définir ces peuples ; mais
» en prenant la fiibftance de ces expériences, on peut dire
» que le génie de ces Naturels des Mes eft un enchaînement
» ou labyrinthe de contrariétés & de contradiélions ; ils font
» en même temps orgueilleux & humbles, hardis pour entre-
?» prendre les crimes, lâches & poltrons comme des enfàns
pour autre chofe, cruels & compatifians, pareffeux & mous «
au travail; mais foigneux & vigilans poiir leurs affaires
particulières bonnes ou mauvaifes ; ils croyent facilement à «
des bagatelles & à mille contes puériles, & font très-difficiles «
& même inconftans fur la doéh'ine facrée, dont on ne ceife «
cependant de leur répéter la vérité ; ils font voir beaucoup «
d’inclination & d’empreffement pour aller à l’églife les jours «
de fêtes & folemnités ; mais pour ou'ir la M e fe les jours de «
préceptes, pour fe confeffer & communier lorfque lafainte Ëglife „
ïordonne, il faut employer le fouet, & les traiter comme des „
enfans à 1 école. »
C ’eft un abus qui règne dans les provinces. Les Religieux
’donnent le fouet aux filles & aux femmes avec un martinet,
même en prélence de leur mari, fans que celui-ci oie rien
dire. A Manille,' cela ne fe pratique pas , les Religieux n’y
font pas fi abfolus qu’ils le font dans les provinces, & d’ailleurs
, on peut bien quelquefois n’y pas ouïr la Meife le
Dimanche fans que cet aéle d irréligion vienne aux oreilles-
des Religieux ou des Curés.
J’ai connu particulièrement à Manille plufieurs Officiers
de Troupes avec lefquels j’étois paflé de I île de France en-
cette ville fur le Boti-confeil. Quoiqu’Elpagnois, ils ofoient
publiquement fè révolter contre cet uiàge ridicule; d autres
l’approuvent. Quelquefois les Religieux ou Padres ont leurs
exécuteurs, & l’églife eft le lieu de la fcène. Voici à cette
occafion un fait dont un hafard fingulier m’a procuré la
connoiflànce.
A une petite lieue de Manille eft une paroilîè que l’on1
nomme las Penas ( les Roches ) ; elle eft Ideffervie par un.
Prêtre léculier ; elle a une ailêz petite églife, bâtie de bambou