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l'argent en barres, de la poudre d’o r , des pierres
précieufes & des perles (0-
Le commerce de la mer Cafpienne étoit fort
déchu fous les règnes précédens. Mais la^fuppref*
fion des monopoles , & divers autres réglemens
utiles l’ont tellement augmenté , que dans l’efpace
de quinze ans la fomme des importations des
exportations a prefque triplé , comme on peut le
voir par le tableau que je joins ici. -
Exportations. L. ft. 3<S,iooï Total. 78,100
' ^ Importations.' Impori . 42,1003
Balance contre la Rußte. 6,000
1768
Export! Liv. fieri. 87>700l IU
Impor.t........................... 6 3 ,7 0 0 3 }
• Balancé en faveur de
la R u ß t e : .......................24,000
Export. Liv. fterL 12y,400) o
S H H . • • 6 4 ,120}
Balance en faveur de
la Ruße. \ . . . . 61,280
Commerce avec les
Georgiens & les habi-
tans du Caucafe. . . . - . . 10,009
Tlotal en 1773. ï 9 9 ,3 2 0
Le commerce de contrebande n’eft pas compris
dans ce calcul.
Commerce avec les Tartares de Buckarie & les
Chinois.
Je comprends fous ce titre de commerce avec
la Bucharie celui que. les Ruflfes font avec les
Calmoukes & les autres Tartares au-delà des
frontières de Sibérie , car ce dernier eft trop
peu important pour mériter un article à .part.
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Les Buchariens qui habitent la partie fud-oueil
de la Tartarie indépendante , font un peuple fort
adonné au commerce , leurs caravanes traverfent
tout le continent de l ’Afie , & négocient avec le
T h ib e t, la Chine , f in d e , la Perfe & la Rujße%
Il y a dans ce dernier empire plufieufs colonies
de Buchariens qui font établies dans les grandes
villes des provinces méridionales, & qui entretiennent
une communication avec les marchands
de leur pays. Les principaux marchés qu'ils fréquentent
font T om sk , Kiatka & Orembourg ;
ce dernier eft le plus confidérable, & le commerce
s'y fait fur tout avec Kaskar, Taslhkent & Khiva.
Dans les chemins qui mènent aces villes, leurs
caravanes font expofées à être infultées par les
Tartares Kirghis dont elles font obligées de tra-
verfer le pays ; elles portent en Rußte de l’or &
de l’argent, particulièrement des monnoies de
Perfe & des roupies des Indes, de la poudre
d’or (2 ) , des pierres précieufes, & fttr-tout des
rubis , du lapis-lazuli, du coton filé & non filé,
une grande quantité d’étoffes de coton des Indes
& de Bucharie , des étoffes mi-foie, du nitre,
du fel ammoniac , des peaux d’agneaux, un peu
de foie écrue, de la rhubarbe , de grands troupeaux
de brebis & des chevaux (3) 5 elles importent
de la Rußte , du drap , des cuirs de roufli,
des grains de collier , des bijoux , de la quincaillerie
, de l’indigo , de la cochenille, & c .
Le commerce avec la Chine eft fans doute la
branche la plus importante de celui que la Rujit
fait avec l’A fie \ l’entrepôt en eft aujourd’hui à
Kiatka fitué fur les frontières^des deux empires
5 nous en parlerons à l’article Sibérie : mous
nous contenterons d’obferver ici qu’en 1777 , la
fomme totale des importations & exportations en-
regiftrées aux douanes, fe montoit à cinq cents
foixante- treize mille fix cents foixante-fix livres
fterlings. Mais fi l’on y comprend la contrebande
qui eft très-confidérable > on peut évaluer la va-
: ..leur totale du commerce de la Chine en exportations
& importations à une fomme de près de
huit cents mille livres flerlings.
(1) T e l étoir l’ état général de ce commerce , lorfque M, C o x e a Voyagé en RuJJie, mais il doit d evenir plus fur & plus avantageux
lî , co'mmè on le d i t , l’impératrice a conclu un.traicé avec le Sophi a c tu e l, A ly Militad K h an , qu’ elle a foiitenu
contre fes compétiteurs. Suivant ces relations les troubles de la I'erfe f o n t , en grande paitic , appaifés ; le Sophi a envoyé mi
ambafTadeur à Pécersbourg pour ratifier le traité de commerce avec la RuJJie ; il a augmenté les privilèges des marchands
Rufles > ceux-ci fe font déjà procuté un commerce plus étendu dans l’ intérieur de la Perfe , dans l’Arménie , & dans lit
p rovinces voifines de l’Afie. Voye% lé Journal polir, de.Hambourg pour l’ année 1782..
Les détails qu’ on vient de lire fu t le commerce de la mer Cafpienne font tirés principalement des relations de Hatway,
de P a lla s , de Gmelin $ic de Guldcn/tedr.
( i ) Cette poudre d’or fe tro uve dans le fable des rivières de Bucharie ; ce fu t le défit de s’en procuret qui engagé
principalement des marchands Anglois à entreprendre de naviger fur la mer Cafpienne pour aller en Bucharie. Pierre-«*
Grand y envoya des marchands Ru (Tes dans le même but.
( 3) M. P allas (tom e 1 . ) nous apprend dans fes voyages que les brebis & les chevaux y font conduits pat les Tariar65
k irg h is , & qu’il fe vend annuellement ,à Orembourg plus de foixante mille brebis de de dix mille chevaux.
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Pu commerce de la mer Noire, de fes ports , exportations
& importations.— Ports & territoires cedes
par les Turcs à la Ruflie, navigation du Don 6
du Dnieper ; tentatives des Ruffes pour commercer
par les Dardanelles avec la Méditerranée ,- fréquences
interruptions & état précaire de ce commerce.
Pierrele-grand eft le premier fouverain de la
Ruffie qui ait tenté de s’ouvrir la navigation de la
mer d’A zo f & du pont Êuxin , & d’exporter les
produftions de fes Etats par ce canal. C e projet
Favori fembloit fur le point de fe réalifer au moyen
des viaoires qu’ il avoit remportées fur les Turcs ,
dé la conquête d’A z o f , & de la conftruaion de
la fortereffe de Taganrog ; lorfque tous ces grands
deffeins furent anéantis par la malheureufe campagne
d e '17 H , qui fe termina par la paix du
Pruth , paix achetée par la ceffion d’A z o f & de
Taganrog , & par l’abandon du commerce de la
mer noire. Dè s-lor s les Turcs ont refufé aux
Rudes avec une grande jaloufie de partager avec
eux la navigation de leurs mers, 8t cette ÿnter-
diéüon afubfifté jul'ques au règne de Catherinell,
qui a terminé, une guerre heureufe contre, les
Turcs, par la glorieufe paix de 1774- Cette Paix
a valu aux Ruffes la libre navigation dans toutes
les mers de la Turquie , le droit de paffer par les
Dardanelles, toutes les franchifes relatives au commerce
que les Turcs accordent aux nations qu ils
favorifent le plus , la pofféflion d A z o f , de T a ganrog
, des trois fortereffes de Kinburn, Kertsh,
& Yenioalé , & un terrein très-étendu entre le
Bog & le Dniéper : elle a obtenu depuis la C r imée
, le Cuban 8e l’ille de Taman.
On a fait beaucotîp de fpéculations fur l ’étendue
& la.valeur du commerce que la RuJJie pourra
faire dans la mer N o ire , 8e fur la révolution
quifera la fuite de ce déplacement d’une partie
du commerce de la Baltique en faveur des
ports de la Méditerranée. On regarde comme une
chofe sûre que les provinces méridionales de
RuJJie auront par ce moyen un débouché -pour
exporter le fuperflu de leurs productions, que les
vaiffeaux Runes s’ouvriront un commerce avantageux
avec la Crimée, avec les provinces autrichiennes
par le moyen de Kilia Nova , avec les
Turcs à Conftantinople , avec les Grecs dans le
Levant ; que les fers de Sibérie, les- grains, le
chanvre , le lin de l’Ukraine & des provinces voi-
fines arriveront dans les ports de la mer Noire ,
8e de-là par les Dardanelles dans ceux de la Méditerranée
, 8e qu’ai’nii la France 8e l’Efpagne fe
fourniront de munitions navales bien plus aifé-
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méat & à meilleur marché que par la route de
la mer Baltique & de l’océan du nord.
Mais comme l’accompliffement d’ un projet lî
vafte ne peut être que l’ouvrage du tems, & qu’il
dépend d’ un grand nombre d’accidens qu’il eft
difficile de calculer , nous ne prétendons point
décider de la probabilité de fon fucces , mais
feulement répandre une plus grande lumière fur
un lujet aufli compliqué, en propofant des obfer-
vations empruntées principalement de l’effai de
Guldenftædt fur les ports des mers Noire & Blanche
& de la# mer d ’Azof.
I. Du commerce de la mer de Turquie avant
la paix de 17 7 4 , avec un état des ports & des
marchandifes qu’on en exporte.
C e commerce étoit principalement entre les
mains des Grecs , des Arméniens & des Turcs ,
& comme les Ruffes n’avoient point de p o r t, ni
fur la mer d’A z o f , ni fur la mer N o ire, Tcher-
k ask , capitale des Cofaques du Don , étoit le
lieu où les productions de la RuJJie & de la Turquie
étoient échangées. Les marchands Grecs &
Arméniens alloient par mer à Taganrog , où ils
faifoient la quarantaine. D e -là ils fe rendoient
avec leurs marchandifes àTcherkask- Cette ville
étoit aufli le marché où fe rendoient les marchands
du Kuban, de la Crimée & de la RuJJie. On y
portoit fur-tout des vins grecs , des raifins , des
figues , des amandes , de l’huile, du ris , du
fafran , des toiles peintes , des étoffes de coton.
| On y achetoit des peaux, des cuirs , des toiles
groffières , de la quincaillerie , du caviar. En retournant
à-Conftantinorle les Grecs & les Arméniens
fourniffoient les ports d’A z o f & de la
mer Noire des marchandifes de la RuJJie & de
l’Europe.
Les ports de la mer Noire les plus fréquentés
par les marchands Grecs & Arméniens étoient
ceux de la Crimée , Yenikalé une des fortereffes
cédées à la RuJJie, Balaklava , Kosiof & Caffa.
On charge en Crimée des vins , des grains , de
la laine , de belles peaux d’agneaux noires & gri-
fes , & du fel. On y porte toutes fortes de marchandifes
de la RuJJie & de l’Europe.
Le port de Taman eft fitué vis-à-vis de celui
de Yenikalé à l’extrémité du détroit de Caffa ,
fur une petite ifle qui eft à l’embouchure du
Cuban. Il appartenoit au Khan de la Crimée (1).
11 fe fait dans ce port un commerce étendu avec
les Circafliens du mont Caucafe , les Cofaques
habitans des bords des rivières qni fe jettent dans
le Cuban , & les Tartares du défert entre lé
(ï) I l n’eft pas befoin d’avertir le le&eu r combien coût ceci eft changé , depuis 1a foumiftion des Tartares de la Crimce Ce
d’une patrie du Cuban à l’ impératrice de RuJJie.
(BIcon, polit. & diplomatique, Tom. IV . S