
s’étendoit plus fur toute l'Italie ; félon Diodore
de-Sicile * & quelques autres hiftoriens , les Pé-
lafges vinren# de la Grèce en Italie , pour s'établir
au centre de la nation des Aborigènes , trois
cens quarante ans avant la guerre de T r o ie , &
les Lydiens deux cens quarante ans après Jes Pela
fges. On a voulu prouver que dans le neuvième
fiècle après le déluge, les premiers habitans de
la Tofcane étoienc déjà maîtres de prefque toute
l ’Italie. .
Dans les fiècles qui fuivïrent la fondation de
Rome , les Etrufqu.es avoient encore douze villes'
capitales j favoir 3 Volfinii 3 Camers 3 Cïufitim 3
Cortona 3 Perufia 3 Arecium 3 F a le n i , Vdlaterra 3
RuJfelU , Vetalonium , Caere & Veji y ou bien fi
l ’on fuit le fentiment de Dempfler , Vegï, Tar-
quinii 3 Falerïi 3 Vetulonia , Populonia , Corythus^ 3
Vülfijiii 3 Caere 3 Clufium , Fcefula , Lucca & Luna.
Chacune de ces villes étoitgouvernée par un chef,
que les Etrufques noaimoient Lucumo. 11 n’étoit
élu que pour une année, & les écrivains romains
lui donnent fouvent le nom de Roi.
Les forces des Etrufques étoierit fi redoutables,
que les romains furent réduits à créer des dictateurs
pour les arrêter. Mais l’an 47 4 de Rome, ils employèrent
toutes leurs refldurces pour les fou-
mettre: & les Etrutques commandés par Elius •
Volturrenus , effuyèrent une défaite fi complette
auprès du-lac de Vadimon, ( aujourd’hui lac de
Bolfanello, dans la province du patrimoine de
Saint-Pierre , ) qu’il en relia foixante mille fur le
champ de bataille. Toute la Tofcane fut depuis
foumife aux romains. Cependant ils fie bornèrent
à envoyer leurs, préfets dans les villes de cette
province 3 leur laifîant d’ailleurs la liberté de vivre
félon leurs loix municipales 3 fous les aufpices d’un
conful élu tous les ans par le peuple. Cette forme
de gouvernement calquée fur celle de Rome, fub-
fifta piufieurs fiècles dans la plupart des villes de
Tofcane.
La Tofcane obéit à l’Empire romain jufqu’à
l ’invafion des barbares au cinquième fiècle. Sous
le règne des goths qui dominèrent environ foixante
ans , elle fut gouvernée par un préfet de cette
nation ; car on fait que le roi Théodoric la fit
régir par Théodat 3 fils de fa foeur Amalfrede,
Dans le fixième fiècle, Alboin , roi des lombards,
confia le gouvernement à ' un duc 3 , 8c déclara
cette province , duché & fief du royaume de
Lombardie. Les ducs firent régir leur diftriét par
des efpèces de receveurs, qu’ils nommoient Caf-
taldipni. Charlemagne , deftruéteur du royaume
des lombards , fournit la Tofcane à des comtes.
Les derniers marquis de Tofcane furent Guelfe
le G ro s , duc de Bavière & époux de la comtelfe
Mathilde. Henri le Noir , fon frère , Henri le
Superbe, fon fils , Uldalric, qui en fut inveûi
par l’empereur Conrad I I I , Guelfe V I , iiiYelti
Ün r^ c r * Bavière. Celui-ci après la mort
de fon fils Çuelfe V I I , vendit le duché & mar-
quilat de Tofcane à d ’empereur Frédéric I vers
1160 ^ le. dernier des marquis de
Sur ces entrefaites les villes de Tofcane Soient
devenues des républiques femblables aux villes
impériales d Allemagne ; elles reconnoiffoient
plus ou moins leur dépendance de l'Empire . à
proportion de la puiïïance des empereurs , qui
■ etoit elle-meme plus ou moins redoutée félon les
circonitances, & elles payoient un tribut annuel
au cher de 1 Empire. Après s'être enrichies par
le commerce j après avoir englouti les petites fei-
gneunes voilînes, elles fongerent à le rendre in-
t dépendantes de 1 Empire. Cette ambition commença
cependant un peu plus tard en Tofcane
qu en Lombardie ; car on ne trouve le nom d’aucune
ville de Tofcane dans, la fameufe paix de
Confiance, conclue en 1 1 84 entre l'empereur Frédéric
1 & la ligue des villes de Lombardie. Mais
|5 ' ‘ 97 les Villes de Tofcane fe réunirent à
Caltel-Fiorentino, & y formèrent contre l'Empire
une ligue puiffante , à la tête de laquelle fe trouva
Florence qui tenoit le premier rang parmi
elles ; 1 îfe de fon coté , avec un petit nombre
de commîmes, fe mit à la tête de la fa&ionim-
perxale. Ces deux factions , qu’on nommoit la
guelfe & la gibelline , durèrent environ trois
liecles. j-a difcord^ & l’ambition des familles les
plus piaillantes donnèrent lieu à des guerres continuelles
entre ces villes j elles produifirent
des mafiacres entre les concitoyens des mêmes
villes , & elles causèrent enfin la ruine & la ïer-
viuide de piufieurs. Elles furent peu - à - peu fub-
juguees par les florentins, qui avoient acquis la
piepondérance, & qui par une'caufe femblable
furent eux - mêmes dépouillés de leur liberté.
Nous avons foin d’ indiquer dans cet ouvrage
les diverfes formes de gouvernement qu’ont
enayés-les peuples , & nous allons entrer dans
quelques détails fur l’ancienne république de Florence.
Lorfque les empereurs cefsèrent d^ètre maîtres
en Italie , Florence fut une des premières, villes
qui adoptèrent le régime républicain : e \ \ e fut
prife par Totila ; mais enfuite elle fe défendît
vigoureufement contre les goths , & battit même
Radagalfe en 407 ; e:lle fut cependant prife par
les goths , & reprife par Narsès , générai de-
l’empereur Juftinien , l’an 5-53 : elle fut entièrement
détruite , & fes habitans difperfés jufqu’ à
Charlemagne, qui voulut la rebâtir & la repeupler
l’an 781. Il y eut enfuite des marquis de Flo-
rence-qui exercèrent à quelques égards la fouve*
raineté : ils Habilitèrent jufqu’à la mort de la conv-
urfïe Mathilde, qui arriva au 12e. fiècle ; alors F lorence
élut des coniuls pour gouverner l’Etat «
mais les évêques'avoient une très - grande autorité.
Son gouvernement acquit de la confiftanee & de’
la force, & elle s’étendit fur fes voifins ; elle
conquit piufieurs villes & châteaux des environs :
elle fit fouvent la guèrre aux républiques de Pife,
de Lucques, de Sienne : on voit encore en forme
de trophée devant le baptiltaire & à quelques-
unes des portes de la ville , des chaînes qui fer-
voie nt à barrer le port de Pife quand les florentins
s’en emparèrent en 1406... Ces triomphes
etoient d’autant plus glorieux , que. Pife éroit une
puiffante république. Florence foutint la guerre
contre le pape , contre les véniciens, contre les
ducs de Milan , & fur-tout contre le - fameux
Galeas - Vifconti. La bataille d’Anghiari qu’elle
gagna fur Philippe-Marie V ifco n ti, fous la conduite
de Piccinino , elt repréfentée en bas-relief
dans l’églife des Carmes de Florence. Elle fut
fouvent accablée par le nombre & la force de fes
ennemis ; mais elle fe releva toujours.
La nobleffe qui gouvernoit la république de
Florence , fut fouvent. divifée , & Ton ne vit en
aucun- endroit de l’Italie autant d’agitations & de
troubles. Les blancs & les noirs formèrent deux
partis qui déchirèrent la république. Les bondel-
monti & les uberti fe difputèrent l ’autorité. Les
cerchi & les donati excitèrent de nouvelles dif-
fenfions. L’empereur 8c le pape y avoient alternativement
le defifus, & fouvent un parti chafloit
& profcrivoit l’autre. C e fut le centre des guerres
les plus horribles & des ravages les plus affreux.
La république de Florence fut d’abord arifto-
cratique , excepté dans de courts intervalles où
le peuple s’empara de l’autorité j ( 1 ) mais à la
fin les divifîons continuelles des nobles fortifièrent
le parti du peuple , & conduifirent Florence à la
démocratie. La'ville fut divifée en arts ou communautés;
on tiroit tous-les ans de chaque art
des magiftrars appellés gouverneurs , & un gon-
falonier. qui changeoit tous les deux mois. Les
nobles fe trouvèrent exclus du gouvernement,
& n’eurent, pour y entrer, d’autre moyen que de
fe faire enregiftrer dans, les communautés d’ar-
tifans.
L’ art de la laine étoit le plus confidérablè & le
plus riche : il comprenoit lui feul trois communautés
; la maifon de Médicis fut une de celles
qui fe diftinguèrerit le plus dans le commerce des
laines. Dès l’an 1378. il y eut un Sylveftrede Médicis
, qui fut nommé gonfalonier de Florence,
& fon efprit infirmant & fa générofité lui acquirent
un très-grand crédit parmi le peuple. Jean
de Médicis , avec un Caractère suffi doux & au fil
bienFaifatit, parvint aufli à la dignité de gonfa-
lonier ; il mourut en 1418 : ce fut le père de
Corne le grand.
Il y a-voit long tems que le commerce de Florence
s’étoit étendu au levant & dans l’Afie. Les
richeffes qui en furent le fruit entraînèrent anffi
la chute _de là république , ainfi que cela étoit
21 nve a Rome; mais il faut convenir que ce fut
par la douceur les bienfaits , & non point
par des guerres , des profcriptions & des crimes,
que changea la forme du .gouvernement de Florence
; ce fut un citoyen q ui, en méritant le fur-
nom de' pere de la patrie , en devint prefque le
fou ver a in y je parle de Corne de Médicis, appelle
quelquefois Corne lé grand. , Côme le vieux _, Corne
pere de la patrie.
Il éroit fils de Jean de Médiçis , & naquit en
1399 : ce Hit lui qui donna le plus d’éclat à cette
maifon , par la fortune immenfé que lui procura
fon commerce avec toutes les parties du monde .
& fur- tout par le bon ufage qu’il en faifoit dans
fa patrie. C etoit une chofe aufli admirable qu’é-
loignee de nos moeurs , de voir ce citoyen toujours^
livre au commerce , vendre d’une main les
.denrees du levant, & foutenir de l’autre le fardeau
de la république; entretenir des fadeurs &
recevoir des amba(fadeurs ; réfilter au pape, faire
la guerre & la paix, être l ’oracle des princes ,
cultiver les belles-lettres , donner des fpedacles
au peuple, & accueillir tous les favans grecs de
L-onltantinopIe.
D es ennemis jaloux de fon bonheur 8c de f a
gloire parvinrent à le faire exiler : il fe retira à
Venife, mais il fut rappellé à Florence un an
aPïes,-’ ll jouit de fa fortune & de fa gloire
jufqu a 1 ânnee 16 64, qu’il mourut: il fut fur-
nomme père de la patrie ,. & il fut aufli le père
des lettres , car il raflémbla les favans, & les protégea
de la manière la plus marquée. L’académie
platonique de Florence lui dût fa première origine
, & il forma une des plus belles bibliothèques
de l’Europe.
Lorfque la maifon de Médicis eut donné das
papes a 1 églife , & que par leur médiation elle
eut formé des alliances avec la France-, fon autorité
s accrut : les Médicis s elevèrent au-deffuS
de tous les autres rivaux. La bataille de Marone
que Côme premier gagna contre les S tro z z i, &
ceux de leur parti , le mit au-deffus de tous fes
ennemis. Le pape Pie V lui donna le titre de
grand-duc en ryéÿ , & il régna jufqu'en i ; 74.
Il tranfmit fes Etats à fa poftérité 3 qui en a
( , ) O n trouvera dans le fupplément de cet ouvrage une a n a l,fe tris-détail!ée d e s-d iv e r fes formes de eouy,ruemvnt
^•adopta la repubbq ue de Florence; co u s indiquerons toutes les variations qu’il éprouva en fi peu de tems.