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quatre cents quatre-vingt-dix-huit livres j en productions
a huit cents cinquante & un mille lept
cents foixante-cinq livres,'en tout quatorze millions
neuf cents-trente-neuf mille foixante-neuf livres.
L'article des denrées fut formé 'par quatre mille
huit cents-quatre-vingt quintaux de cacao , dont
la valeur fut en Europe de cinq cents neuf mille
fept cents foixante livres. Par cinq cents quatre
vingt quintaux de quinquina , dont la valeur fut de
deux cents mille huit cents quatre-vingt livres. Par
dix-fepc quintaux de laine de Vigogne , dont la
valeur fut dç^ douze mille quatre cents foixante-
quatorze livres. Par un quintal 8c demi de vanille,
dont la valeur fut de quatre mille fix cents
quatre-vingt-dix-huit livres. Par quinze quintaux
de nacre de perle, dont la valeur fut de mille
fept cents une livres. Par feize quintaux de baume,
dont la valeur fut de dix-huit mille neuf cents liv.
Par deux mille trente quintaux de brefillet, dont
la valeur fut de vingt-neuf mille deux cents quatre-
vingt- quinze livres. Par deux mille cent cuirs en .
p oil, dont la valeur fut de trente-quatre mille
vingt livres. Par quarante-deux quintaux de fang
de dragon, dont la valeur fut de deux mille
trois, cents quatre-vingt-neuf livres. Par fix quintaux
d'huile marie, dont la valeur fut de deux
mille fept cent livres. Par fept quintaux de falfe-
pareille, dont la valeur fut de neuf cents foixante-
douze livres. Par un quintal d’ivoire , dont la
valeur fut de trois cents quatre-vingt-huit livres.
Enfin par cent quatre-vingt-huit quintaux de co*
to n , dont la valeur fut de vingt-un mille fix
cents livres.
Dans ces retours, où il n'y eut rien pour le
gouvernement, & où tout fut pour le commerce,
le territoire de Canhagéne n'entra que pour quatre-
vingt-treize mille deux cents quarante-une iivres,
Voye^les articles Espagne , M exique, Pérou,
C h ily , & les articles particuliers, des diyerfes
poffeffions efpagnoles en Amérique.
CLERG E . Nous pourrions dans cet article
traiter une multitude de qnellions intéreffantes î
nous nous bornerons à indiquer Jci les effets de
la propriété 8c de la fortune indépendante de
ce coips de l’Etat j qu'elle eft relativement à la
richeffe 8c à la profpérité des nations, l'influence
du fyftême que fuivent la plupart des gou-
▼ ernemens à l ’égard du clergé, comment les progrès
des arts , des manufactures & du commerce,
détruifent peu- à-peu l’autorité abufive du clergé *
quel eft le point de la fortune du clergé-, le plus
favorable aux moeurs des eccléfiaftiques , 8c à
l'attachement & au refpeCt du peuple pour eux 5
comment le. revenu du clergé, eft une partie du
revenu général de l’E tat, qui ne contribue pas
à la défenfe & au gouvernement de la nation,
Nous prévenons le lecteur , que ce morceau
fft tiré en entier des Recherches fur la nature
C L E mm de la richejfe des Nations , par M.
Smith, )
Le te ms des violentes querelles de religion a
ete en général celui des violentes faCtions politi-
qués. Chaque parti fentoit ou imaginoit de fon
intérêt de fe liguer avec quelqu’une des feCte.s
belhgerantes } car il y a toujours eu de ces feCtes
dans 1 églife , & pour cela, il falloir qu’ il en adoptât
ou du moins qu’il en favorisât les dogmes.
La feCte qui avoit le bonheur d’être liée avec
le parti conquérant, partageait néceffairemenc
la vidoire de fon allié: la faveur & la protec-
-tion de cet allié la mettoit en état de faire taiie
& de foumettre jufqu'à un certain point fes
adverfaires. Ceux-ci fe trouvoient communément
réunis aux ennemis du parti vainqueur, & étoienj
par conféquent fes ennemis. Le clergé de la feCte
triomphante étant relié maître du champ de ba_
taille , 8c voyant fon influence 8c fon aucorfc^
fut le grand corps du peuple dans route leur
vigueur, le croyoït allez fort pour en impofer aux
chers & aux conducteurs du paiti qu’il ‘ avoir
foutenu , & pour les obliger à réfpedter feS opinions
& fes inclinations. La première chofe qu'il
leur demandoit, étoit d'impofer le lïlence & Je
joug à tous les adverfaires, & la fécondé
de lui affigner un revenu fixe & indépendant.
Comme il n avoit pas peu contribué à la vie,
toire, il paroiffoitallez raifonnablé qu'il eût quel-
que part aux- dépouilles. D'ailleurs il étoit las
davoir de la complaifance pour-le peuplé : &
de dépendre de fon caprice pour Ta fublillancé
Il ne confultoit donc en cela que ftln bien-être
& fes .‘plaifirs, fans s'embarralfér de l'effet que
•cette conceffion pourroit avoir dans la fuite ,fur
le crédit & l'autorité du corps eceléfiaftique
Le magurrat c iv il, qui -ne pouvoir accorder qu-
ceA qu '1 suroît été bien-aife de garder pour lui-
meme , ne fe preiïbit guère de fttisfaire le hier-
gc; cependant la néceflité le fbrçoit toujours à
en venir la, quoiqu'il nelefitfouventquaprèsbien
des delais 8c de mauvaifes excu fes.
Mais fi la politique n'avoit jamais appelle la
religion à- fon fecours 5 fi Je parti conquérant
n avoit jamais adopté les dogmes d'une feéte
p utot que ceux d'une autre, ii auroit proba-
blement traite avec toutes également & impartialement,
après avoir gagné le deffus, & ila u -
roit lame à chacun la liberté de choifir fes prêtres
& fa^ religion comme il le jugeroit à propos.
Il y auroit eu fans doute en ce cas une grande
multitude de feétes religieufes j prefque toutes
les congrégations auroiçnc fait vraifemblablement
autant de petites feétes qui fe feroient diftinguées
par quelques dogmes particuliers. Chaque prêtre
ou mmiftre auroit fenti la néceffité de faire les
derniers efforts & d'employer toutes fes relfources
pour conferver & augmenter le nombre de fes
difciples. Mais comme tous l'auroieuc également
fentie, le fuccès d'un doéteur ou d’une feéte
n'auroit pu être fort grand. Le zèle aétif & in-
térelfé des miniftres de la religion ne peut êt-re
dangereux où incommode que dans les fociétés
où l'on ne tolère qu'une feéte , ou bien quand
une grande fociété eft divifée en deux ou trois
grandes feétes, parce que les docteurs de chacune
agiffent de concert, avec l'harmonie qu’éta-
bliffent la difeipline régulière & la fubordination.
Mais ce zèle ne pourroit faire le moindre mal,
fi la fociété fe trouvoit partagée en deux ou trois
cents , ou , fi vous voulez, en deux ou trois
cents mille feétes , dont aucune ne feroit affez
confidérable pour troubler la tranquillité publique.
Les docteurs de chacune , ayant autour d'eux
bien plus d'ennemis que d'amis, apprendroient
"a fe conduire avec cette honnêteté 8c cette modération
qu'on ne trouve guères parmi ceux des
grandes feétes qui voyent leurs dogmes appuyés
du magiftrat c iv il, en vénération chez prefque
tous les habitans d'un grand royaume ou. d'un
empire étendu , 8c qui font environnés de par-
tifans , de difciples & d'humbles administrateurs.
Les doéteufs de chaque petite feéte fe trouvant
prefque feuls, feroient obligés de refpeéter ceux
de prefque toutes les autres leétes, & , en fe
rapprochant p'ar les conceffions qu'ils jugeroient
convenable de fe faire mutuellement, iis pour-
roient amener la doctrine de la plupart d'entr'eux
à la véritable religion, cette religion pure 8c rai-
fonnable , exempte de tout mélange d'abfurdicé ,
d'impofture & de fanatifme , après l'établiffement
de laquelle ont foupiré les fages des différens
fiècles, mais que les loix poiïtives n'ont peut-
être jamais établie 8c n'établiront peut-être jamais
dans aucun pays, parce que ces lo ix , en cè qui
concerne la religion, ont toujours été 8c feront
vraifemblablement toujours plus ou moins empreintes
de renthoufiafme 8c de la fuperftition.
populaires. C e plan de gouvernement eccléfiafti-
que, ou , pour mieux dire, qui excluLtout gouvernement
eacléfiaftique, étoit celui que là feéie
qu'on appelle des indépendàns, feéte d'extrava-
gans enthouuaftes s'il en fut jamais, propofoit
o’étab'lir en Angleterre vers la fin de la guerre
civile. S’il avoit eu lieu , quoique d'une origine
antiphilofophique, il auroit probablement introduit
i'efprit philofophique & la modération par
rapport à toute efpèce de principes religieux. U :
paroît qu'il a produit cet effet en Penfylvanie ,
où il eft établi, & où les loix ne favori fent pas
une feéte. plutôt qu'une autre , quoique celle des.
Quakers y fgit la plus nombreufe & que cet
efprit s'elt enfuite répandu dans toutes les républiques
d'Amérique*
Mais quand l’égalité du traitement ne feroit
pas naître cette heureufe difpôfition dans toutes,
ni même dans -la plus grande partie des feétes
d’un pays, fi elles étoient en affez grand nombre,
& fi chacune d'elles fe trouvoit ainfi trop
j foible pour inquiéter le public , non-feulement
il y auroit peu de chofe à craindre du zèle outré
de chacune pour les dogmes particuliers, mais
il en refulteroit plufieurs bons effets, & fi le gouvernement
étoit parfaitement décidé à les obliger
de fe lailfer mutuellement en repos , il y a grande
apparence que d’elles-mêmes elles fe fubdivifendent
bien vîte, au point de fe multiplier affei
pour qu'aucune d'elles fît peu de fenfation dans
l’Etat.
On peut remarquer dans toute fociété civi-
lifé e , dans toute fociété où la diftinétion des
rangs eft une fois bien établie , deux plans ou
fyltêmes de morale , qui ont toujours eu cours
dans Je même tems , & dont l'un peut être ap-
pellé ltriét ou auftère , & l'autre doux ou relâché.
Le premier eft généralement admiré & révéré
par le bas peuple. Ceux qu'on appelle honnêtes
gens eftiment communément davantage &
adoptent le fécond. La principale diftinétion entre
ces deux fyftêmes oppofés, femble avoir pour fondement
le degré de défapprobation ou de blâme
que nous devons donner aux vices de légéreté ,
aux vices qui naiffent d’une grande profpérité
ou d'un excès de gaieté 8r de bonne humeur.
Dans le fyftême doux ou relâché jJ on traite avec
beaucoup d'induigence, & on exeufe volontiers ,
ouJ'on pardonne même le luxe, l'enjouement
folâtre ou déréglé, l'amour du plaifir porté
a un certain degré d’intempérance, la violation
de la chafteté , au moins dans l’un des deux
fexes j & c . pourvu qu'ils ne foient pas accompagnés
d’une indécence groffière, & qu'ils ne
mènent pas a la faulfeté & à l’injuftice. Dans le
fyftême auftère , au contraire , on détefte ces
excès, & on 11e les regarde qu’avec horreur. Les
vices qui viennent de la légéreté font toujours
ruineux pour les gens du peuple', & fouvent il
ne faut qu'une feule femaine paffée dans l’infou-
çiançe & la diffipation, pour perdre à jamais un
pauvre artifan , 8c le déterminer à commettre
par défefpoir les crimes les plus énormes. C 'e ll
pourquoi les meilleurs 8c les plus' fages parmi
le peuple, abhorrent toujours cette forte d ’excès,
fachant par' expérience avec quelle rapidité les
fuites en deviennent fatales aux perfonnes de leur
condition. D'un autre côté , le défordre & les
extravagances de plufieurs années ne ruinent pas
toujours un homme au-deffus du peuple , 8c les
gens de cette claffe font affez portés à regarder
e pouvoir de fe livrer à certains excès comme
un avantage de leur fortune , & la liberté de le
-faire impunément & fans être expofés aux reproches
j comme un des privilèges attachés à leur
rang. En conféquence , ils ne blâment pas avec
révérité ces excès dans les gens de leur forte ,
ils ne les cenfurent que légèrement , ou même
ils ne les cenfurent point du tout.