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ter l Elle a fait naître, elle a formé des hommes
capables de fi grandes entreprifes , 8c de
jetter les fondemens d’un fi grand empire ; 8c
c’eft la feule partie du monde qui ait pu en former,
ou qui en ait jamais formé.de ce genre.
Les colonies font redevables à la' politique de
l ’Europe, de l'éducation 8c des grandes vues
de leurs aéfcifs & entreprenans fondatéurs -, 8c c’eft
à-peu près-là toute l’obligation que lui ont quelques
unes des plus importantes 8c des plus con-
fidérables d’entr’elles.
C O U R - P L EN IE R E . Mot ufité dans l’hiftoire
de la monarchie françoife, mais dont il feroit
difficile de donner une définition exaâe. On con-
noît d’une manière trop imparfaite la compofî-
tion, les fonctions 8c l’autorité de la cour-plé-
nière 3 durant la première 8c la fécondé raec , pour
que nous nous permettions de dire ici ce que
nous en penfons.
Le roi l’ayant rétablie dans le lit de juftice
tenu à Verfaillesle 8 mai 1788, nous nous bornerons
à inférer ici l’édit de rétabliffement , 8c le
difcours de M . le garde - des fceaux qui a précédé
les édits.
Difcours de M. le garde-desfceaux 3 pour annoncer
l'édit du roi 3 portant rétabliffement de
la cour-plénière.
Meffieurs 3
Avant même que cette cour fût compofée d’un
fi grand nombre de magiftrats , François I , Henri
I I , Henri I V , 3c Louis X I I I , avoient fenti le
danger d’admettre la jeune magiftrature aux délibérations
de leurs parlemens fur les affaires publiques.
Us avoient confidéré, qu?étant exclue du jugement
des caufes importantes, elle devoit bien
moins encore participer à la difcuffion de celles qui
mtéreffoientl’Etat, où elle auroit dominé par le
nombre.
Frappé des mêmes inconvéniens, le roi exécute
aujourd’hui le projet que fes prédéceffeurs
avoient conçu.
Sa majefté n’admet de fon parlement de Paris,
que la feule grand’chambre à la cour qu’elle rétablit
, pour procéder à la vérification 8c publia
cation de fes loix générales.
Mais, jaloux de rendre cette cour auffi digne !
qu’il eft poffible de fa confiance 8c de celle de j
la nation, le roi réunit cette portion éminente
de la magiftrature aux princes de fon fang, aux
pairs de fon royaume , aux grands-officiers de
fa couronne, à des prélats , des maréchaux de
France, 8c autres perfonnages qualifiés, des gouverneurs
de province* des chevaliers de fes ordres.
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un magiftrat de chacun de fes, parlemens , des
membres choifis dans fon confeil, deux magiftrats
de la chambre des comptes 8c deux de la
cour des aidesvde Paris.
C ’eft dans cette forme que le roi rétablit aujourd'hui
ce tribunal fuprême qui exiftoit autrefois
, 8c qui, félon les expreffions mémorables
de Philippe de Valois 8c de Charles-le- fage,
étoit le conftftoire des féaux & des barons , la cour
du baronnage & des 'pairs , le parlement univerfel3
la jufiice capitale de la France , la feule image
de la majefté fouveraine, la fource unique de toute
la juftice du royaume 3 & le principal ' confeil des
rois.
Cette réfolution , meffieurs, n’eft pas nouvelle
dans les confeiis de fa majefté, vous n’avez
pas oublié qu’elle vous fut annoncée dans la première
de fes loix , au moment où vous fûtes
rendus à vos fondions.
Mais il falloit que l’exécution d’un fi grand
changement-fût follicitée par les circonftances.
Les circonftances l’exigent en effet.
Ce n’eft pas, meffieurs, que jufqu’à la convocation
des états-généraux , promife par le roi,
fa majefté fe propofe de rien ajouter aux impôts
qui ont déjà reçu leur fandion légale.
3 E t fi par malheur une guerre imprévue ou
d’autres néceffités urgentes de l’Etat, rendoient
indifpenfables de nouvelles perceptions , ce ne
feroit que provifoir.ement 8c jufquà l’Affemblée
de la nation, que le roi dcmanderoit à la cour-
plénière d’en vérifier les édits.
Mais il y a d’autres loix que des loix burfa-
les , des loix d’une importance reconnue , dont
le réfiftance des parlemens a diverfement contrarié
l’exécution , 8c qui exigent qu’une feule
8c même fandionles mette en activité dans tout
la. royaume.
De l’unité de ce confeil fuprême doivent né-
ceffairementréfulter, meffieurs, des avantages inef-.
timables pour une grande monarchie.
Déjà les diverfes ' coutumes qui régiflent les
différentes provinces, 8c même fouvent les différentes
villes de chaque province , ont fait un
chaos de la légiflation françoife.
I I entre dans les vues législatives de fa majefté ;
de Amplifier ces coutumes diverfes, & d’en réduire
lp nombre avec tous les ménagemens que
méritent d’anciennes loix, lorfqu’elles font liées
apx moeurs locales.
Mais f i , à cette diverfîté de loix particulières,
il falloit ajouter encore, dans l’exécution
des loix générales, de nouvelles différences cau-
fées dans chaque reffort, tantôt par le refus,
tantôt
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tintât par les claufes de l’enregiftrement, il n’y
auroit plus ni unité dans la légiflation, ni en-
fenible dans la monarchie.
,A ces confédérations .qui feules auroient rendu
indifpenfabls le rétabliffement de la pour - plénière 3
fè joignent encore, meffieurs, des motifs d’un
grand poids.
Le roi , fans doute, çft loin de fuppofer
que fes parlemens puiffent jamais oublier tout
ce qu’ils doivent d’obéiffance 8c de fidélité à
l ’autorité fouveraine.
Mais enfin , meffieurs , fous l’empire des loix,
toutes les claffes de citoyens doivent fe recon-
noître jufticiables d?ùn tribunal ; & les parlemens
n’aûroient eu jufqu’à préfent d’autre juge que le
roi feul , dans; le cas mémo de forfaiture.
Ce n’eft qu’à la cour-pléniére que fa majefté
peut confier cette fortdion rigoureufe, dont l’exer
cice doit éviter à fa bonté l’ufage perfonnel de
fon autorité , contre les magiftrats qu'elle s’éft
vue plufieurs fois dans la néceffité d’employer.
Pour rétablir cette cour, le roi n’a eu befoin
d’aucune innovation; il lui a fuffi de remonter
au delà de l'éredion de fes parlemens.
C ’eft dans les monümens de notre hiftoirê que
fa majefté a trouvé le modèle de cette grande
Inftitution.
En effet, avant la création des cours dans les
provinces, dont la première époque eft du quatorzième
fiècle, il n’exiftoit encore que le parlement
de Paris , qui enregiftroit les loix pour
tout le royaume.
Ce premier parlement formoit alors la cour-
pléniere dans les occafions importantes ; 8c cette
tour-pléniére étoit compofée comme le roi la
compofe aujourd’hui.
. Quant aux parlemens de province , dont la
création fucceflive eft poftérieure à cette ancienne
forme d’adminiftration, ils doivent être d'autant
moins étonné de perdre le droit d’enregiftrement,
que nos rois leur ont interdit la connoiffance de
plufieurs efpèces de caufes attribuées fans réclamation
au feul parlement de Paris.
Cependant, meffieurs, pour ne point fe priver
des connoiffancès locales qui peuvent avertir fa
bonté ou éclairer fa juiiice , le roi admet à fa
cour-pléniere un magiftrat de chacun de fes parlemens
• •
Ainfî , quand les provinces de leurs refforts
auront des intérêts particuliers à y difeuter, elles
y trouveront toujours un fidèle interprète de leurs
réclamations 8c de Jeurs droits.
Pou r vous, meffieurs , vous ferez tous appelles j
( S con. polit. 6? diplomatique. Tome I F .
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fucceffivement, par ordre d'ancienneté, à cette
cour augufte.
Vous ne fubirez, pour devenir membre de la
cour -plénière, que les mêmes délais auxquels
vous êtes fournis pour Héger à la grand’chambre.
Rendus à vos fondions naturelles, vous jouirez
déformais paifiblement de la confidération que
méritent vos fervices.
Vous verrez l ’Etat profpérer. fous une adroi-
niftration économique , tranquille , 8c modérée;
vous bénirez le roi qui fe montrera entière-
rement occupé à réparer, de concert avec la na>
tion, les maux pafles , 8c à préparer les biens
à venir ; qui , loin d’avoir voulu concentrer fon
autorité dans un feul corps , pour la rendre arbitraire
, ne demandera jamais , foit à la nation,
foit à ce tribunal-, patriotique , qu’un zèle fin-
cère , des confeiis éclairés, le refped de la juftice,
l'amour des peuples, un courageux dévouement
au bien public , 8c. qui enfin eft atiffi
décidé à n’abufer jamais de fa puiffance, qu’à la
maintenir 8c à la faire refpeder.
Edit du roi, portant étdbiijfement de la
cour-plénière.
Lou is , 8ce. Par notre nouvelle ordonnance
fur i'adminiftration de Ja, juftice , nous avons
changé la compofition & augmenté les pouvoirs
de nos tribunaux du fécond ordre ; mais après
avoir ainjî établi dans tontes les provinces , des
juges qui puiffent terminer définitive mène le plus
grand nombre des procès fur les lieux , ou près
des lieux qui les voient naître , la légiflation
générale demande encore que nous faffions con-
noître nos intentions fur le dépôt univerfel de
nos loix 8c fur leur enregiftrement.
Les loix qui intéreffent uniquement un reffort
ou Une partie de notre royaume , doivent incon-
teftablement être' publiées Sc vérifiées dans les
cours fupérieures qui font chargées d’y rendre
la juftice à nos peuples; mais fi les loix qui
doivent être communes à toutes nos provinces
côntinuoient d’être adrefféès à chacun de nos parlemens
, nous ne faurionS nous promettre, dans
leur enregiftrement, la promptitude & l’uniformité
qu’exige leur exécution.
Cet inconvénient devient de jour en jour plus
fenfible depuis une année. Notre édit concernant
les affemblées provinciales , defirées par les notables
, éprouve encore , dans quelques-uns de
nos parlemens, une réfiftance que l’u'tiîké de ces
aflemblées & le voeu de la nation ne permet-
toient pas de préfumer.
Plufieurs de nos provinces font également privées
des avantagés qui doivent réfulter pour elles ,
F f f f f . ;