
S E C T I O N IV. « Vous y rencontrez au reftedës gens de toutes
les nations & de tous les coftumes ; fur-tout force
levantins , turcs , arabes, arméniens, grecs, africains
, & C . s> -
« On n’eft pas tellement animé réciproquement
entre ces côtes 8c celles de là barbarie, qu’il n’y
ait des maifons de commerce 5 8c au moyen d’ une
patente de convention du prince fous la domination
duquel eft le bâtiment, 8c d’un pavillon
tiers , il en va & vient ici deux ou trois de Tunis,
d’Alger & d’ailleurs 5 ce qui n’empêche pas qu’en
toute autre circonftance on ne guerroie à bon ef-
jcient. *>
*> La quantité de marchandifes angloifes qui
abordent à Nice pour le Piémont, à Gênes pour
la Lombardie , & à Livourne pour Ja Tofcane ,
la Sicile, laCalabre 8c la Pouille, eft prodigieufe 5
& j’ ai auffi remarqué , en parcourant les magafins
& caufant avec les commerçansï que les anglois
jconfomment beaucoup de draps en levant par
jcette voie. »
*>On parle beaucoup d’un nouveau port à Nice,
-plus grand , plus fûr , & auquel on donneroit une
franchise abfolue. C e feroit un coup funefte pour
c e lui-c i, mieux- fi* ué cependant, mais trop inquiété
par la maltôte & fes impatientantes formalités
, qui font perdre beaucoup de tems , & qui
finalement font couteufes. Voilà comme , en ne
calculant qu’avec les financiers , on ruine juf-
qu’aux fources de la finance. II n’y a pas à Livourne
comme à Gênes de dépôts publics pour
les marchandifes d’entrepôt, toujours fous la main-
'd e l ’adminiflration ; chaque négociant a fès magasins
chez foi. Or telles efpèces de foieries, de
draperies, & c . font prohibées 5 tels articles de
confommation payent de très-gros droits 5 fans
compter les objets de gabelles , dont le prince fe
réferve la vente , comme le fel , le tabac, l’eau-
de-vie y le papier y &c.
» Il faut donc que tout foit vu , fouillé, examiné
; par-tout les maltôtrers , bien 1k duement
autorifés , prennent leur tems 8c non celui des
autres. *>'
*> On juge ici de la contrebande comme Dracon
jugeoit des crimes j c’ eft la même punition pour
tous. On ne fait point mourir les fcélérats quelqu’a-
troces que foient leurs forfaits 3 on les envoie aux
galères : les contrebandiers n’ont pas d’autre punition.
Mais comme la peine n’eft pas proportionnée
au délit, foit que l’avidité qui l’a fait porter eut
trop à rougir de fa cruauté , foit qu'elle faififfe
volontiers une compenfation qui l’aflouyi/fe , on
élude la queftion, en mettant de, l’argent à la
place de la procédure. »
Remarques fur l'état de /<2 Tofcane, fur fort adtninijlration
, fur les réformes quafait le grand-duc ,
fiir le code & les tribunaux de ce pays.
Le grand-duc eft un fouverain à-peu-près ab-
folu , 8c nous ne connoiffons pas de barrières qui
arrêtent fon autorité. Il n’y a point de puiffance
intermédiaire qui puifîe le contenir , 8c les
moyens de réfiftance font très-foibles en Tofcane.
Les collèges chargés de l’adminiftration fe trouvent
à Florence , & font i ° . Le confeil d’é ta t,
divifé en quatre départemens, favoir celui des affaires
intérieures , celui des affaires étrangères, celui
des finances & celui du militaire. Chacun
d’eux a fon dire&eur. Le grand-duc a fixé certains
jours , auxquels il donne .audience à fes fujets 3
8c chaque directeur de département fuit fon exemple.
i ç . La confulte, confeil légal du prince pour
les affaires de grâce 8c de juftice. 30. La direction
générale des bois, qui donne des permiffions poqr
la coupe des taillis, ou des bois de haute-futaie *
& qui veille au maintien des loix qu’on a publiées
pour la confervation des forêts. 40. Le fuprême
magiftrat, chargé des affaires de juftiee, compofé
de cinq fénateurs qu’on change tous les quatre,
mois , & dont l’un préfide 8c porte le titre dé
lieutenant du fouverain. Il connoît des caufes ci-
viles de toutes les perfonnes employées à la cour 3
nomme les curateurs des femmes, &c. $°. Le
confeil des deux cens , qui s’ affemble fix fois par
an, & qui eft compofé des chefs de famille des
citoyens de Florence. 6°. L’adminiftration générale
des revenus royaux. 70. Le confeil .des vivres ,
qu’on appelle Annona3 auquel par un éditdu grand-
duc en date du 29 octobre 1768 , ont été réunis
les deux offices d’abondance 8c de vivres avec
tous leurs droits d’infpe&ion fur les boulangers ,
les bouchers , les vendeurs d’huile, & c . ;89. La
chambre du grand-duc , à laquelle reifortiffens
toutes les caufes qui intéreflent les revenus du
prince, ou qui ont rapport à la chafîe, à la pêche ,
aux droits fur les contrats , aux douanes, à l’office
des farines , à celui de la pofte , à la monnoie »
aux entreprifes des loteries , au papier timbré a.
aux cartes à jouer, au fel ,.aux fermes , & c . Elle
eft compofée de fix auditeurs , d’ un grand-chancelier,
& d’un chancelier criminel. 90. La chambre
des communautés , fondations pieufes, grands
chemins & rivières. Son département étoit ci-devant
partagé entre deux chambres fupprrmées en
17693 l ’une fe nommait l’office des neuf, ou des
conservateurs de h jurifdi&io-n 8c du domaine de
Florence , & l ’autre l’office de capitani di parte*
1 ov. La chambre du commerce, des arts & des ma-
nufafèures, érigée en 1770.11 ° . Les confemtcarS
«es lo ix , magiftrature, qui donne le fyndicat aux
juges. i2 °. La chambre des décimes eccléfiaftiques,
qui a l’infpe&ion de la taxe, à laquelle font fournis
les biens du clergé, & qui eft chargée de
l ’entretien des universités de Pife 8c de Florence.
13°. Les décimes du grand-duc , confeil qui tient
un état de tous les fonds des particuliers, & gui
perçoit les impôts fuivant i’ancienne taxe. i4° .L e
dépôt roy al, qui reçoit-tous les revenus du fouverain
, & où s’expédient les permilfions de porter
des armes. iy°. La. députation royale , touchant
les couvents , qui dans les affaires relatives aux
couvens, exerce les droits du fouverain. 160. Le
~fifc , qui adminiftre les revenus du fife, & reçoit
les amendes pécuniaires. 170. L ’office des taxes
fur les contrats , où s’enregiftrent tous les aétes
de vente & d’acquintion , les contrats de rente ,
de d o t, &c. où fe payent les droits relatifs à ces
objets. 180. La jurifdiétion , tribunal oppofé à
celui de la jurifdiéiion eccléfiaftique 8c chargé
de toutes les affaires qui intéreuent les droits
royaux dans les matières eccléfiaftiques. C ’eft de
lui qu’émanent les coliations de tous les bénéfices
qui font du patronage royal ou public. Il a l’état
de tous les bénéfices du- grand-duché. Il expédie
1 exequatur des aétes qui viennent des pays étrangers,
afin de leur donner une fanélion qui permette
dé les préfenter aux tribunaux. C ’éftauffi
dans ce confeil qu’on donne Xexequatur des bulles
8c des brefs du pape. 190. L’office de la Magona,
qui a infpeélion fur la fabrique & la vente du fer.
20 . Le monte commune , où fe payent tous les
quatre mois , en avril , en août & en décembre ,
les intérêts des capitaine placés dans les. luogki di
monte , ou monts-de-piété. 210. L’office des huit,
qui connoît de toutes les affaires criminelles de
l’état, excepté celles qui furviennent dans les territoires
de Sienne, de Piftoja 8c de Pontremoli,
Sc auquel font foumifes les perfonnes même de la
cour. On y reçoit auffi les plaintes pour des dettes
de peu d’importance. 22°. La pratique fecrette ,
qui connoît des démêlés de jurifdiélion qui s’ élèvent
entre les corps de magiftrats, & reçoit les
appels des vafîaux. Les territoires de Piftoja 8c de
Pontremoli , 8cc. en dépendent* 230. L ’ office
de proconful, auquel font fournis tous les juges,
notaires, avocats, do&eurs , &c. 240. Le magiftrat
des pupilles, chargé des caufes & des revenus
des veuves, des mineurs , 8c des orphelins, ;
8c qui a l’infpeétion fur la vente des biens des ;
mineurs. 250. Le magiftrat des révifions 8c du fyndicat
, qui furveille toutes les admîniftrations ,
les caiffes & les comptes. Son autorité eft quelquefois
augmentée ou diminuée, félon les cir-
conftances. 26®. L’office du fel. 27°. La rote , ou
Je confeil de juftice pour les caufes civiles , compofé
de fix auditeurs. 28°. Le cabinet dés bâti-
mens, jardins 8c fontaines du prince. 19e * Le
cabinet des farines & des réunions, où fe perçoivent
tous les droits fur la viande 9 fur les auberges
8c tous les revenus des communautés ,
qui ont été réunis à l’adminiftration générale.
3©0. Le cabinet de poffeffions , qui a l’infpe&ion
fur toutes les fermes & autres poffeffions du grand-
duc, 31°. La cour de monnoie, où l’on frappe
là monnoie qui n’a cours que lorfque la chambre
du grand - duc , fubftituée aux magiftrats autrefois
chargés de ce détail, a affifté à la légalifàtion &
à l’épreuve des différentes pièces. 3 2°. L’office des
traites , où l ’on garde les bourfes avec lefquelles
les citoyens vont au ferutin pour Féleétion des
magiftrats ; qui a infpeétion fur cette élection, &
auquel font fournis tous les membres de la juftice
.de Tofcane. 330. Le commiffariat de la gyerre,
qui veille à toutes les affaires économiques du militaire.
340. Le tribunal de l’inquifition, auquel
affiftent,, comme à Venife , quelques confeillers
laïcs, en vertu de l ’accord conclu avec le faint-
fiège en I 7 f 4 , & qui par-là a beaucoup perdu de
fa puifTance. 3J°. La nonciature, tribunal dans
lequel le nonce du pape fait juger par fon chan-
cel’.er les caufes qui lui font dévolues par appel.
Les couvens fur-tout y font* fubordonnés ; mais
un religieux accufé n’a rien à craindre tant que la
jurifdièïion royale n’a point acquiefcé à fa punitio
n . La même chofe a lieu dans la jurifd'iétion
des archevêques à l’égard du clergé régulier.
Les abus quis’étoient introduits dans la difeuf-
fion des caufes civiles , 8c la lenteur difpendieufe
avec laquelle elles étoient traitées, ont produit
en 1772 des réformes dans l’adminiflration de la
juftice à Florence.
Depuis 1750 il s’eïh fait auffi dans les affaires
eccléfiaftiques des réformes importantes. Oq a
défendu en particulier par la loi d’amortiffement,
de faire en faveur des mains-mortes des difpofi-
tions qui excèdent la valeur'de cent fequins 3
encore faut - il que cette fomme ne paffe pas le
vingtième du patrimoine du teftateur. On a réglé
en 1773 que les contrats d’aliénation , de cens
perpétuel , de permutation , &c. relatifs à quelques
fonds & paffés par les eccléfiaftiques ou les
fondations pieufes , foit entre eux , foit avec des?
laïcs, n’auroient de valeur qu’autant qu’ils fe-
roient approuvés par un décret du magiftrat fuprême
de. la ville de Florence ou par un refait
du fouverain.
Le nouveau code criminel que vient de publier
le grand-duc ( au mois de novembre 1786 ) a,obtenu
les éloges de l’Europe entière : ce code
n’eft à proprement parler qu’une feule loi divifée
en cent dix-neuf articles.
Les baies fondamentales de la nouvelle loi
font l’abolition de la peine de mort en général ,
pour tous les délits fans aucune exception 5 de la
mutilation des membres, de l ’ufage non moins
révoltant de la torture , & de la confifcation des
biens des coupables. On avoit multiplié à l’infini