
cette politique, afin que le foin des affaires perfon-,
nelles.?ne fît pas négliger celui des affaires d’Etat-
Gn; a enfin 'fend que la pauvreté des nobles eft
liiV-aiitte abus î & au mois d’oélobre 1784 on
publia l a proclamation fui vante- Le leéteur obfer*
vera qu’à Venife\e refpeét de la magiftrature imprime
à fes defirs même le caractère- d’une loi:
rinvitation- que l’on va lire-ne reliera sûrement
pas fans effeft
De par le pfîric,e'feréniffime,r & l’illultriffime &
excéLIiCptiffime Jnquifiteur des arts.
L’Une des bafes de la puiffance. & de la félicité
d’un Etat, eft le commerce : bien réglé, protégé,
fou te nu par l ’îndiiftrie, par,le génie & par l’activité
cïe la natio'n , il conduit à perfeétionner l’agriculture,
les arts 8c la navigation.
fe C e principe , qui fut autrefois la première maxime
& Je fondement de la grandeur de la .république
, eft aujourd’hui adopté par toutes les nations
éclairées. Cependant nous voyons parmi
nous languir cet efprit d’aélivité ; nous , voyons
au contraire s’accréditer un préjugé prefque général,
qui nous perfuade que le commerce ternit
la nobleffe 8c la fplerideur des famillès 5 de ces
mêmes familles, qui jadis f e ’réputoient plus il-
luftres .en proportion des capitaux qu’elles' employaient
dans‘ .le négoce, 8c qui ont acquis,
peut-être uniquement par cette voie , & les ri-
chefles dont elles jôuiffent à préfent , 8c cette
nobleffe même dont elles font fi jaloufes. Ce-prc-
jugé eft au point , que ft quelque patricien ou
-Inoble de- l’Etat prend intérêt .pour fon avantage
dans les arts , dans les manufactures ou dans le
commerce, il le fait par, des. voies fecrettes , &
fous un prête-nom , pour ne point s’attirer le
blâine injufte de ceux qui regardent le commerce
somme une occupation vile & peu décente.
Pour diffuader la nation de ce préjugé fî pernicieux
à l’Etat , & pour réveiller dans le coeur,
de nos citoyens ces maximes & cet efprit d’in-
duftrie , qui jadis animoient tous les fujets de la1
république, de quelque rang & de quelque condition
qu’ils fuffent,Ie fénat encourage & invite,
par cette proclamation , tous les patriciens , les
nobles de l’Etat & tous fes fujets quelconques,
.à prendre part & intérêt, en leur nom :& avéc ;
leurs capitaux, félon leur goût & leurs facultés ,
foit dans les arts, les fabriques, les bâtiffes., l’é-
tabliflement de maifons de commefce., ou telles
autres fpéculations de commerce, ou à encourager
les découvertes, la culture des productions
de l’Etat ; bu toute autre efpèce d’induftrie. Ils
doivent être perfuadés que , de même que de,
telles occupations n’ont jamais taché ni injurié le
-caraCfcère de la nobleffe , de même iis ne perdront
jamais rien dans l’efprit du- prince , ni de la nation
de l’eftime & de l’honneur qui Jeur font
dûs5 mais qu’ils feront au contraire agréables aux
yeux du gouvernement, & qu’ ils feront regardés
coït)me des citoyens affectionnés à la patrie, qui
défirent de fe diftinguer par leur zèle pour le fer-
v îce jk l ’avantage de la nation. Le fénat s’engage
à encourager par des diftinétions, autant que le
permettront les circonftances , ceux qui s’étudier
rotitrà .protéger & à perfectionner les découvertes’,
&c.
C e n’ eft que par les magiftratures que les nobles
peuvent arriver à une grande çonfidération ; mais
avant de parvenir aiix premières dignités , il faut
avoir pafte par une multitude de charges moins
importantes ; de forcé qùé les. grandes affaires në
font jamais entre-, les mains de la’ jeunefle. Cette
marche lente, qui.captivé l ’ambition', a fait dire
de V°.nï£e ce qu’on difoit de Sparte j. ce n‘ejf
que dans cette ville qwil efi agréable de. vieillir.
Le même noble ne peus. exercer deux charges
à la fois-; loi fage ,* qui devroit être établie dans
tous les .états.
Un noble qui refufe la charge à laquelle il 3
été élu , paye une amende de deux mille ducats,
& eft exclu du grand-confeil pour deux ans.
Le doge & les procurateurs de St.-Marc , ont
feuls le droit d’être félicités fur leur élection.
C ’eft ainfî qu’on écarte autant qu’on peut >
loin des nobles , l’appât de la flatterie.
Un' magiftrat ne peut fe démettre avant que
fo.n fucceffeur foit nommé : il ne peut s’abfenter
du lieu marqué pour fa refidence fans la perrnif-
'fioii de la feigneurie. S’il eft malade, on lui fubf-
titue un autre officier 5 ainfî le fervice public
n’eft jamais interrompu.
Les nobles qui entrent dans l’ordre de Malthe ,
renoncent, dès cet inftant, à. tout efpoir de pof-
féder des charges ; parce qu’ils deviennent fujets*
d’ uh prînee étranger.
Il eft défendu aux nobles de recevoir des pré“
fens ou des penfions des princes étrangers, 8c
d’acheter des terres dans leurs états. Le bannif-
fement, la dégradation de n o b le f f e la confif-
cation des biens, font les peines portées contre les
infraéteurs de cette loi vraiment républicaine.
Il eft encore défendu, aux nobles d’acquérir
des fréfs & des biens - fonds en terre fermê-
On a craint que la dépendance féodale n’altérât
l’égalité qui doit régner entre eux , & que tous
les biens paffant dans les mains de nouveaux nobles,
qyi font plus riches , il ne reftât aux nobles
anciens que le mépris qui fuit l’indigence»
Un noble vénitien ne peut fe marier avec une
étrangère /,, ni do'nner fa fille à un gentilhomme
fujet d’ fin autre prince. La néceifité de conferver
dans/|s feii> de, la patrie , 8c de cacher’ aux étrangers:;
fes fecrets d e , l’Etat , celle de prévenir les
dangers de l’ impunité, & d’un afyle afluré.pour
les coupables loin des -lieux où ils font nés,
ont été les motifs de cette loi. Mais en mêmé-
tems qu’elle défend'les alliances avec les étrangers
, elle permet même à la plus haute nobleffe
d’ époufer des citadines ; fage règlement,
qui fortifie le parti de la nobleffe contre le peuple
, 8c q u i , en careffant l’orgueil des riches
citadins , les engage à fournir aux dépenfes de
leurs gendres dans les ambaffades 8c dans- tous
les emplois qui exigent de la repréfentation. Le
corps des citadins comprend les fecrétaires de la
république, les avocats, les notaires , les médecins
, les, marchands dé foie & de drap, & les
verriers de Murano.
Toutes les loix vénitiennes tendent à maintenir
entre les nobles la paix 8c l’égalité ;' ainfî elles
ne réconnoiflent point le droit d’ aîneffe , préférence'
injufte , que la nature défavoue , quoique,
les patriarches en aient donné l’exemple.
Pendant la guerre perfonne. n’eft,exempt d’impôts;
Lès nobles vénitiens n’ en'ttent que dans la marine,
Scjamiis dans le fervice,‘de terre. On donne
toujours àu général; ou prince etranger, deux
coiffêillers- ou plutôt deux èfpiôns , fans lefquels.
il .ne peut commander ni être obéi. Enfin^ ofi
le rèdouté prefque autant que'les ennemis memé.
Le •fyltême du fénat eft' dè^divifer les tfoepeS
auxiliaires , de refondre perpétuellement, les ré-
gimens les uns dans les autres , de. forcer leurs
commandanS“. par toutes fortes d humiliations a
.demander promptement leur retraite , politique
S .qui nuit au fuccès de la guerre , mais qu’on regarde
les nobles & le duc lui-'même lés paient;
comme le peuple.
Les follicitations, les yifites;.des cliens / défendues
fous des peines rigoureufes dans Les affaires,
civiles , font tolérées dans les affaires criminelles
; parce qu’on n’ aime point à multiplier
de révolte , enfin de lui faire prendre pour liberté
le pltis odieux libertinage.
Autant le .fénat eft (oigneux d’entretenir des
rivalités parmi le peuple J k parmi les' nobles de
terre ferme , autant ii eft jaloux de perpétuer la
concorde parmi les nobles vénitiens. 11 fut un
feins Ou lès gentils-donnes fe coëffôient les unes
à la guelphe , & les autres â la gibeline OH
appérçiit dans -:cette diverfite de parure un air
de faétion, & pour en prévenir les fuites , oa
introduifit les modes-françoifes a qui devinrent
générales.
le fpeétaçle des fupplices. ..
Toute fone de correfpondance avecle^ ambaffa-
deurs étrangers étoit autrefois défendue aux nobles,
fous peine de la vie ; on ne leur permettoit pas;
même de parler aux gens de la fuite de ces mi-
niftres : . cette loi étoit rigoureufe ,' mais les plus;
habiles d’entre les vénitiens la croyoient nécef-:
faire.
Gn' lès Toumet encorè à remettre au fénat les
préfens d’ufage qu’ils ont reçus des princes ;/auprès
defquels ils étoienc envoyés. Mais on les
leur rend., fi on eft fatisfait de leur conduite.
. Ils font refponfabfes des fautes de'leurs femmes
, lorfqu’ils les mènent avec eux.
Les enfans. du doge ne peuvent être ambaffV-
deurs du vivant de leur père, parce qu’on craint
qu’il nedes charge de quelques inftruétions par-
ticulièrés pour les intérêts de fa maifon. ,
La nobleffe ne ' peut être vendue qu’ à des catholiques,
on redoute la diverfité des religions ;
prefque tous les Etats où elle eft mixte offrent
des exemples déplorables, des trilles effets de çe
.mélange.
La politique du fénat eft peu délicate relativement
V’édncation militaire eft abhorrée’par le féhat;
qüi: 'crain't l’ambition des* grands capitaines , Sê.
qui d’ailleurs n’ayant plus envie de conquérir.,
mais; feulement de copferver lés, conquêtes,
trouve toujours des étrangers prêts à le fetvir,/
pour de l’argent, lorfqu’ il eft attaqué.
aux moeurs. Son fyltême, félon Amelôt
de la Houflaye , eft d’avilir le peuple pour le
rendre obéiflant, de lui permettre les plaifîrs les
plus, illicites, pour Je diftraire de tout projet
comme la sûrete de la ^république- Le
gouvernement craint tellement dinfpirerau peu*
olede goût des armes, qu’on dit que les vénitiens
ont abandonné St. Théodore , leur ancien
patron , pour St. M a r c , parce que le premier
avoit été foldat-
La milice dé mer éft feule protégée ' ^ ’lé fénat
, parce qu’ il fent qujelle lui eft ncceftaire ,
qu’il ne peut .rien lui fubftituer. Chaque vaif-
feau eft une école y <i>ù de , jeunes nobles apprennent
l’art-de la navigation f on oblige même les
marchands à entretenir les.’pius pauvres.
Si on juge le gouvernement de Venifc, d’après
(es véritables principes y on le trouvera; très-
défeétueux , ge M. de Montèfquieu a diravec
■ P » Dans les républiques d’hàlie , ou h
puiffance légiflative , la puiffance exératrice &
celle de juger, font .réun ie sla,lib e r té ,fe trouve
mo'ins que dans nos monarchies. Auffi le gouvernement
a - t - i l bèfoin pour fe maintenir, de
moyens.,auffi violsns.que le gouvernement des
turcs : téqioins; lés inquijîtéûrs d’ét.ât, & le
tronc où (out délateur .peut :à-fpiis lés momens
jetter avec un billet fön acculacion. »
» Voyez quelle peut être la,fituation d’un citoyen
daqs qes, rêpubliquès.-' Le hiême,corps de
magiftrature a , comme exécuteur des lo is , toute
........................G g g g i