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les entreprifes des confulfl» & du fénat; ce qui leur
donnoit de grands privilèges & une confédération
encore plus grande.
Quoique leur pouvoir confiftât plutôt à empêcher
qu'à agir, ce pouvoir devint peu-à peu fî
excefïîf, que , dans la fuite y les empereurs maintinrent
leur ufurpation fous ce titre, qu'ils trouvèrent
à propos dLwp\>t\\zi*tribunitia pote fias, puif-
fance uib uni tienne ; ils le regardoient comme le plus
grand pouvoir connu dans un état libre ; il étoit
Familier & même agréable au peuple : ce fut un
des artifices d’Augufie, que tous fes fucceffeurs,
jufqu’ à Conftantin / mirent en ufage. Le titre de
roi & celui de dictateur étanç devenus odieux ,
celui de tribun, qui donnoit la même autorité,
fut jugé plus sûr j d’ailleurs il étoit facré & inviolable
, & il avoit été déclaré tel dès le commencement.
Les tribuns commencèrent de bonne heure à
faire voir le grand fervice qu’ils vôuloie-nt tirer de
leur commiflîon.Tls affembloient le peuple, le ha-
ranguoient, le gouvernoient & l’animoient. Ils
ordonnoient au fénat de s’afTembler ; ils cenfu-
roient le corps, î’interrompoient & l’ infultoient.
Ils appelloient en juftice les patriciens du plus
haut rang, & faifoient mettre en prifon les confuls,
mâgiftrats fuprêmes ded’ état. Ils pouffèrent leurs
prétentions fi lo in, que cet office, créé uniquement
pour prévenir l’oppreffion, parut oppreffeur.
Ils vouloient réformer le gouvernement, protéger
les plébéiens par I abaiffement de la nobleffe. Leur
grand crédit étoit fondé fur la méfintelligence
continuelle qu’ils avoient foin de maintenir entre
le peuple & le fénat, & le peuple ne voulant recevoir
des inftruûions que de fes tribuns, ceux-ci
leur en donnoient rarement de véritables , & fe
rendoient chers au peuple en le trompant.
Les tribuns agilfoient comme s’ils avoient été
créés pour perfécuter & écrafer les patriciens, au
lieu qu’ils dévoient feulement les contenir & tenir
la balance égale. Ils jettoient dans le trouble &
dans l’erreur les plébéiens, dont le grand intérêt
ctoitd’être tranquilles & libres. Le fénat, qui étoit
le grand confeil, & un des corps de l’état, devoit,
félon les plébéiens, être émondé ou écarté, ou
jefidu totalement inutile. L’état lui-même étoit
réduit à l’ inaétion , & privé d’un des corps qui le j
compofoient j ainfi on changeoit la conftîtution ~ :
pour faciliter l’établiffement d’un gouvernement J
plus populaire. Voye\ l ’article Rome.
TR IBU T S . Voyei l’article Impôt. -
TR IN IT É , Ifle de la Trinité, l’une des Antilles.
L ’ifle que les efpagnols trouvent d’abord en !
arrivant en Amérique, fe nomme la Trinité. Co- |
lomb y aborda , lorfqu’en 1498 il reconnut l ’O-
rénoque : mais d’autres intérêts firent perdre de
vue & l’ifle & les bords d» continent voilïn.
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1 C e ne fut qu'en que la cour de Madrid
fit occuper la Trinité , placée vis-à-vis de i'em.
bouchiire de l'Orénoque , comme pour rallentir
la rapidité du fleuve. On lui donne trois cens
dix - huit lieuès-quarrées ; elle n'a /armais effuyé
d ouragan , & fon climat ell fain. Les pluies y
font abondantes depuis le -milieu de mai jufqu’a
la fin d oétobre, & la féchereffe du relie de l'année
eft fans inconvénient, parce que ie pays, quoique
privé de rivières navigables, eft très-bien arrofé.
Les tremblemens de terre font plus fréquens que
dangereux. Dans l'intérieur de J’ifle font quatre
grouppes de montagnes qui, avec quelques autres
formées par la nature fur les rives de l'Océan ,
occupent le, tiers du fol; le relie eft prefque gé-,
neralement Afceptible des' plus riches cultures.
,L a forme de l’iile eft qua'rrée. Au nord, eft une
cote de vingt-deux lieues , trop élevée & trop
hachée.pour pouvoir jamais être bien utile. Celte
d e j eft n a que dix-neuf lieues ; n-iais toutes telles
qu'on pourrait les defirer. La côte du fud offre
vingt-cinq lieues un peu exhaufîees, où le café &
le cacao devraient profpérer. La bande de i'ouell
eft féparée.du refte de la colonie, au fud par le
cariai du Soldat, au nord par la bouche du Dragon
, forme, au moyen d'un enfoncement,
une rade de vingt lieues de large , de trente de
profondeur. C ’ eft , dans toutes les faifons , un
abri sûr pour les navigateurs qui , durant une
grande^ partie de l’année , mouilleraient difficilement
ailleurs, excepté à la galiote.
Dans_ cette partie fon d e s établiflèmens efpagnols;
ils fe réduifent au port d'Efpagne, qui. a
foixante dix huit cabanes couvertes de chaume
& à Saint-Jofeph, placé trois lieues plus loin
dans les terres, où l’on compte quatre-vingt-huit
familles encore plus miférables.
Le cacao fut autrefois cultivé près des deux
bourgades ; fa perfeétion le faifoit préférer à celui
de Caraque même. Pour s'en aflurer, les négociant
le payoient d'avance. Les arbres qui leportoient
périrent tons en 17 17 , Sentent pas été renouvelles
depuis. Les moines attribuèrent ce défaltre au
refus que faifoient les colons de payer la dîme.
Ceux que la fuperftition ou l'intérêt n’aveugloient
p as , en accusèrent les vents du nord, qui trop
fouvent ont porté ailleurs le même genre de calamité.
Depuis, Ja Trinité ne fut guere plus fréquentée
que Cubagua. Voye{ les articles Espagne
& V enezuela.
T R IP O L Y , l ’un des Etats Barbarefques.
Dans le feptième fïècle , les Sarrafins, redoutables
pat leurs frift.-tutions St par leurs fuccès ,
armés du glaive St de l’alcoran, obligèrent les
Romains , affoiblis par leurs diviftons, à renalfer
les mers, & groffirent de l’Afrique feptenrrionale
la valle domination que Mahomet venoit d.a
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fonder avec tant de gloire. Les lieuten.ms du calife
arrachèrent1 dans la fuite ces riches dépouillés
à leur maître. Ils érigèrent en états -indépendans
les provinces commifes à leur vigilance.
Cette divifion dans les forces 8t. dans la puif-
fance , infpira aux turcs l'ambition de fe rendre
maîtres de ce valle territoire. Leurs Accès furent
peut-être plus rapides qu'ils ne l'avoient efpétés:
mais une nouvelle révolution réduifit bientôt a
tien ou à peu de chofe des conquêtes fi confidé-
rabl.es.
Les pachas ou vice-rois chargés de conduire les
pays afluiettis, y portèrent cet efprit de rayage
dont leur' nation a laiffé par-tout des traces ineffaçables.
C e n’étoient pas feulement lespeuples
qui étoient expofés à des rapines perpétuelles.;
l’opprelfion s'étendoit, fur les troupes, quoique
toutes Ottomanes. Ces foldats, plus difpofes a
faire des injuftices qu’ à les Apporter, reprefen-
terènt à la Porte que les Maures Sc les Arabes,
aigris par des aétes répétés de tyrannie, étoient à
la veille de fe révolter ; que l’Efpàgne, de fon cote,
fe difpofoit à une invafion prochaine ; & que fa r inée
, incomplette 8c mal payée, n’avoit ni le
pouvoir ni la volonté de prévenir ces évènemeas
fâcheux. O11 ne voyoit qu’un moyen efficace pour
fe garantir de tant de calamités ; c’éroit un gouvernement
particulier , qui, fous la proteélion du.
férail 8c en lui payant tribut, pourvoirait lui-
même à fa confervation & à fa défenfe. Le plan
propofé fut adopté , après quelques difficultés.'
Alger , Tunis, Tr ip o li, reçurent la meme legif-
lation. C ’eft une efpèce d’arillocratié. Le chef
qui fous le nom de dey , conduit la république,
eft choifi par la'milice, qui eft toujours turque,
8c qui compofe feule la nobleffe du pays. Il eu
rare que ces éleélions fe faffent fans effufion de
fang ; 8c on voir, fouvent uri homme élu dans
le carnage maffacré dans la fuite par des gens-
. inquiets , qui veulent s’emparer de fa place, ou
la vendre pour, s'avancer. L'empire de Maroc,
quoique héréditaire, eft fujet aux mêmes révolu-;
rions.
L ’ état de Tripoli, borné d’un côté pat l’Egypte.
8c de l'autre par Tunis, a deux jens trente lieues
de jcôtes. Quoiqu'elles ne foient pas extrêmement
fécondes, on y décuplerait aifément la population,
parce que l’abondance de poiffons pourront
fupplée-r à la médiocrité des récoltes, 8c les récoltes
elles-mêmes devenir meilleures par plus de
travail. L ’intérieur du pays n’ell qu’ un défert ; on
n’y voit que de loin en loin quelques familles
maures, quelques familles arabes, fixées dans le
peu d'endroits où elles ont trouvé affez de terre
pouren obtenir une modique fubfiftance. A-trente
journées de la capitale eft le miférable 8c- tributaire
royaume de Fez en , dont les habitans font-
noirs. Le peu de communication que les deux
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contrées ont entre elles ne peut s’entretenir qu a
travers des fables mouvans 8: arides, où Ion ne
trouve que très-rarement de l’ eau. La république
peut avoir un revenu de deux millions de livres,
fondé fut. les palmiers, fur les puits de la campagne,
fur les douanes 8c fur la monnoie.
Les caravanes de Gadême 8c de Tombut porraient
autrefois beaucoup d'or à Tripoli; depuis
quelque tems elles font moins riches 8c moins régulières.
Celle de Maroc continue à s y rendre en
allant à la Mecque, 8c en revenant.de ce lieu révéré
par les mufulmans : mais comme le nombre
.des pèlerins a fenfiblement diminue , ce partage
n'eft plus 11 utile* Par toutes ces raiforis, le commerce
qu'on faifoit par terre eft réduit a rien ou
à peu de chofe.
Celui de mer eft un peu plus confidérable, Les
navigateurs levantins vont prendre quelquefois
leur chargement dans quelques-unes des mauvaifes
rades répandues fur. cette côte immenfe : mais la
plupart font .leurs ventes & leurs achats dans le
port de cette capitale , beaucoup meilleur que
tous les autres, & où fe trouvent reunies les mar-
chandifes du pays 8c les marçharidifes étrangères.
Quoique ces opérations ne foient pas très - importantes
, les liaifons de cette république avec
l’europe font encore moindres..
Il n'y a que le s1 tofeans & les vénitiens qui
ayént des relations luivies’ avec Tripoli. Cependant
les marchandiles des uns ne font pas annuellement
vendues au-delà de cent quarante mille
(livres, & celles des autres n’arrivent pas à deux
cens mille livres. Les premiers font reIIé5 àffujèttîs.
à toutes les formalités des douanes; les féconds
s’en font affranchis en donnant tous les ans cinquante
cinq mille cinq cens livres au Elfe. C e marché
a été dédaigné par les françois , quoique leur
[maître n’ ait pas difeontinué d’ y entretenir un
(agent.
De tous les Etats Barbarefques , Tripoli fut
long-tems celui dont les bâtimens corfaires étoient
les plus nombreux & les mieux armés ; ils par-
; raient de la capitale, qui porte le même nom que
le! royaume.
Cette ville , que de magnifiques ruines & un
bel aqueduc très-bien confervé ont fait foupçoriner
être l’antique Orca, 8c qui doit être,au moins une
-colonie grecque ou romaine , eft .fituée fur le
bord de la mer, dans une plaine qui ne produit
que des dattes, & où1 l’on ne trouve ni fources ni
rivières. C e fut un des premiers polies qu’occupèrent
les arabes entrés par l’Egypte dans la
. Lybie. Les efpagnols le prirent en i .j 10 ; & dix-
1 huit ans après, Charles-Quint le donna aux chevaliers
de Malthe , qui ne le comervècent que
jufqu’en 1 1. Il a depuis été bombardé deux fois
par les françois, fans que ces châtimens ayent rièn