
vens 8c d'abbayes. Le prédéceffeur de Frédéric IL
ayant accordé à Tes fujets catholiques, non-feulement
le libre exercice de leur culte , mais encore
celui de leurs relations avec le faint fiège , & la
confirmation des eccléfiaftiques à Rome, il y envoya
un agent. Comme dans les lettres du pape
aux évêques de Breflau , il faHoit nommer quelquefois
le prince j le prudent Benoît X IV , -fans
lui accorder exprèffément le titre de r o i, le nomma
dans plufïeurs lettres écrites de 1748 à 1758,
Monarcha PruJfiA , ElcMor Brandeburgi Dans un
bref du 1 f avril 1758 au chapitre de Breflau , il fe
fervit de l’expreflion régi a majeflatis Bo'ujfiA. C lé ment
X IV . fut plus difficile. En 1772 il fe fervit
dans un bref du titre de fup'emus Boruflia Do
minator. Frédéric, IL qui fe mocquoit beaucoup
des formalités , rit de cette réferve , & n’infifta-
,pbint. Lorfque Pie VI. vint à Vienne, M. de
Hertzberg, d,e. fort propre mouvement, écrivir
au baron de Riedefel, miniftre de Prujfe auprès
de l’empereur, de repréfenter au pape , que la
tolérance fans bornes & les faveurs même inufi-
téés dans plufieurs États catholiques qu’accordoit
Fe roi à ceux de fes fujets de cette communion,
fembloit exiger de fa faint-eté plus de ménage-
mêns. Le pape en convint, & dans plufieurs
brefs fubféquens ,• notamment dans, celui de février
1784., adrefle au coadjuteur de Culm , il
3 nommé roi celui que la juftice & la nature
âvoient fait tel. Au re lie , Frédéric II. ne prit
aucune part à cette négociation , & témoigna
même la plus grande indifférence , lorfque M. de
Hertzbërg la lui communiqua. Jufqu’ici néanmoins
l’affaire n’a point été déférée au collège
des cardinaux , ni la dignité royale des fouve-
rains de la Prujfe reconnue folemnellement par le
laintTîège. Si l’on confulce le calendrier de la
cour de Rome de Î785 , { Notifie per L'anno 178y.)
on n’y trouvera ni royaume , ni duché dé Prujfe ,
ni électorat de Brandebourg. Le roi y eft nommé
marquis (marckefe ). La princefîe d’Orange , épou-
fe du ftathouder, y eft Amplement nommée Frédérique
Sophie de Brandebourg. Sous le titre
d’ Angleterre , on - lit . Charles Edouard , fils du
feu roi Jacques I I I On ne trouve dans cet almanach
pas plus d'éle&eur d’Hanovre que d’éle&eur
de Brandebourg , ckc. Mais qu’importe cette prétention
de la cour de Rome ?
- Le-roi Frédéric IL a porté le royaume de
Prujfe &T’ékélorât de Brandebourg a un tel degré
de puiffancë -3 qu’elle a fixé l ’attention de tonte
l ’Europe i en excitant l’admiration. Cette puiflan-
ce eft moins fondée fur l’étendue des États de
ce monarque , peu confidérable par elle-même,
comparée à celle de le plupart desautres royaumes
, que far les fages difpofîrions qui y font
é ta b lie s fu r la cohérence de toutes les'’parties,
qui conftituent cette puiffancë', & enfin fur la
perspicacité & les foins continuels de-Frédéric IL
8c la forme dtadminiftration qu’il a laiffé à fon
füceeffeur. • r
Le pays 8c les États en général de cette maifon
royale & éleélorale, fur le pied que les poffède
le roi aéFuel , en exécution du traité de paix
conclu à Drefde en 'VMj > & de celui conclu
à Habertzbôurg en i:,§j^|p|e contiennent tout a*
plus que trois m i l l e s g é o g r a p h i q u e s .
L ’éle&eur George (J*uttrànme n’eut fur pied en
1658 que huit mille nommes d’infanterie & deux
mille neuf cents de cavalerie , & à fa mort-cetts-
même infanterie fe trouva réduite à trois mille
fix cents hommes , & la cavalerie à deux mille
cinq cents.. L’éleéteur Frédéric Guillaume eue a
fon décès vingt un mille hommes d’infanterie &c
quatre mille cent de cavalerie , non compris les
garnirons qui fe montoient à'quatre mille fept
cents hommes. Le roi Frédéric I. entretint trente
' mille hommes , & le roi Frédéric Guillaume
tranfinit à Ton fils 8c fucceffeur une armée de
Soixante mille hommes très - bien difciplinée.’
C e nombre a augmenté considérablement. fous
le règne de fon fils , ainfi qu’on l’a vu tout-
à-l’hëure. La ' difciplirïe, la ‘ célérité Ta pré-
cifion que" cette" arfnéè obfetve' fous les armes ,
font incorrîpafables j elle eft toujours completté ,
8c prêté. à‘ entre'r en campagne; C e qui facilite
particulièrement la levées- des recrues , eft que
tous les pays qui compofent, tant le royaume de
Prujfe ^ que l’éleélorat de Brandebourg , font di-
vifés en cantons ou en petits cercles, dans lef-
quels les régi mens, & les compagnies défîgnés-
font obligés de fe recruter , fans qu’ils . priment
empiéter les uns fur les autres > auffi Ies.régimens
font-ils toujours en' garnifon ou en quartier, foit
dans 1er cantons qui leur font afljgnés , foit dans
les environs. La'majeure partie' cependant des
recrues qui fe font en tems de paix , fe tire de
l’étranger à prix d’argent j 8c celles qui fe font
dans les cantons défîgnés-, reçoivent des congés
de neuf à dix mois , pour pouvoir travailler de-
leurs métiers dans le lieu de-leur demeure.
La monarchie Pruffîenne n’a redouté aucune'
puiflance fous Frédéric II : ce prince, après avoir
donné en perfonne douze batailles, .après avoir
réfifté à fix puiffances, 8c confervé dans la guerre
de fept ans;, par.des.prodiges d’aétivité, de fa»
geffe, d’efprit 8c de valeur, la Siléfie & toutes
les • pofleffions, a fait de fi grandes chofes 5 il a
laiffé, fes,finances en fi bon.ordre., il a donné à
fes États une telle copfiftan.ee 8c une telle force „
que l’hiftoire ne préfente rien de pareil dans aucun
pays , 8c il fera .peut-être utile d’entrer dans
quelques détails fur l’heureufe adminiftration qui a
eu de pareils fucçès. Quoique Frédéric II. foit demeuré.
en.arrière des lumières de fon fiècle, fur l’économie
politique,-on yerra ftu ipoins qu’il a mis en
pratique les grands principes de l’adminiftration.
Les détails quenoüs àllo'ns ’donner font tirés
d$9
des differtations de M. le comte de Hértxbert ,
l’un des miniftres de Frédéric I I 5 & le le&eur
peur compter fur leur exactitude.
Frédéric a répandu depuis la paix de Hubers-
bourg , conclue en 176$ , chaque année , juf-
qu’en 1785 , à-peu-près deux millions d’écus en
gratifications 8c bienfaits extraordinaires dans fes
Etats , de forte que la fomrne totale monte depuis
cette époque à plus de quarante millions
d’écus. Une puiffancë , q u i, après avoir fbutenu
quatre guerres fanglantes & ' deftruétives , dont
«elle de fept ans fut plus meurtrière que les guerres
puniques , peut continuer à entretenir Tins
fubfîde étranger, 8c uniquement de fes propres
fo rce s , une armée de deux cents mille com-
bartans , & quinze grandes fortereffes 5 q u i, fans
avoir aucune dette , poffède un tréfor confidérable
, qui paye exactement fa cour 8c fes officiers
militaires & civils ; qui fans fouler fes fujets , &
en fe contentant des anciennes taxes & contributions
, peut leur faire tous les ans un don de
deux millions d’écus , tirés du furplus des revenus
de l’État , ne doit être ni éphémère , ni dans
une fituation précaire , mais elle doit plutôt'avoir
une bafe folide & une confiftance durable.
On aura de la peine à lui fuppofer cette force ,
fi on ne la confidère que de loin , 8c fi on la juge
d’après les cartes de fa médiocre étendue, ou
d’après le fol fablônneux des environs de la capitale,
& d’après d’anciens préjugés d’un nouvel
État faÇIice; Mais un État 8c fa,puiffancë font
durables, quand il y a une population nom-
Breufe , proportionnée au: territoire , une bonne
agriculture, une grande induftrie nationale & une.
balance de commerce favorable & aifurée.
« ï° .-L ’agriculture ëtant le moyen le plus ftlr
d’augmenter la population , Frédéric n’à ceffé ,
pendant le cours de fon règne , de faire rebâtir les
villages & les métairies qui avoient difparu, & d’en
conftruire dé nouveaux 3 fur-tout le long des ri-:
vières. La plupart de ses - rivières ayant débordé
dans les anciens feras, & inondé beaucoup de
térrein fertile, il les a fait refferrer par des digues
, & a retiré par ce moyen-un nombre im-
nienfe d’arpens de terre cultivable 8c d’excellens
pâturages , & les a donnés gratuitement à des
coloiijs, la plupart - étrangers ; fl a fait bâtir lès
maifonS'^.'fournir le bétail , 8c tout ce dont ils
avoient befofn pouf ieur^étàbli-ffement, & il leur a
accorde de longues franchifês d’impôt & d’enrôlement.
Les travaux exécutés le lo’ng des rivières
de ta Netze 8c de la Warthe , depuis Driefen
jufqu a C lift ri n , ont produit cent vingt mille
journaux , 8c 1 etabiiffement de trois mille familles
: il a fait de fembtables travaux le long
de -l’Oder , de Cuflrin jufqu’ à Gderbefg j lè long
de la HaVbl & de l’Elbe , autour du grand tac de
Madué ën Poméranie & dans les marais de Fienet
(Econ. polie. 6* diplomatique. Tçm. IV . 3
au pays de Magdebourg, 8c aux environs de
Poftdam , & enfin dans un grand nombre d’endroits
de toutes les provinces. Il s'occupoit à ta
mort à faire deffécher & défricher les marais dû
Dromling, terrein inaceeflible dans ta Vieille-
Marche î auffi on comptoit de rendre à l’agriculture
jufqu'à cent vingt mille journaux ou ar-
pens de terre cultivable S: de pâturages. Il a fait
bâtir : »
Villages ou hameaux , & familles qu'on y a établi.
« Dans 1a Marche éle&orale dé
Brandebourg . . . . . . 217 - 10,740-
Dans 1a Nouvelle-Marche. . . 152 - 3 , 043
Dans la Poméranie . . . . . 100 - y , 312
Dans les pays de Magdebourg 8c
:de Halberftadt. . . . . . 20 - 2 ,8oy
Dans lés provinces de Cîèves ,
Meurs , Marck , Gueldres ,
Minden , Ravensbefg , Teck-
lembourg , Lingen 8c Ooft-
Frife . ' . *. • . . . . . - 4 , 940
Dans la Prufie occidentale . . . yo - 1 , 119
Dans le duché de Siléfie . . . ------ 14 , oyo
539' m M m
Ou pour donner un réfumé il a fait bâtir environ
fix cents -villages & hameaux , & il a établi
environ quarante-trois mille familles, fur de nouveaux
fonds de. terre j en comptant cinq perfon-
ne^ par chaque fam ille o n aura'une augmentation
.de'deux cents quinze mille perfonnes. Les deux
tiers de ces colons étoient des étrangers.
2°. Frédéric a avance à un grand nombre de
gentils hommes 8c de poffelfeurs de terres dans
les Marches, en Poméranie & en Siléfie plufieurs
: millions, pour les mettre en état de défricher 8c
(d’améliorer leurs terres, 8c d’y établir des colons.
Il leur a donné ces femmes, en préfent, ou à un &
deux pour cent.d’intérêt, dont le produit eft def-
tiné à des penfîons de maîtres d’école & de veuves
ou filles de pauvres officiers.
3p. Il a donné en ferme héréditaire à toutes
fortes de cultivateurs plus de trois cents métairies
ou pofleffions de-fes propres domaines, en
les réparant :de fes grands bailliages. C ’eft en certains
pays un des moyens les plus convenables &
les plus prompts pour augmenter ta population,
parce que plus les pofleffions font petites partagées,
pjus elles nourrilfent d’hommes j & il
faut oublier ici les principes généraux de quelques
écrivains. Comme le fouverain de ta Prujfe
poffède en domaine & en propriété prefqu’un tiers
des biens-fonds de tous fes Etats , & qu’il en tire
les revenus par ta fermé d’un -grand nombre de
villages , qu’on nomme bailliage , ( Aemter) il
pourroit confîdérablement augmenter ta population
de fes États & le nombre de fes fujets , en
diftribuant tous fes domaines en petites fermes