887 Av.is pour là Conduite Chreftienne. 888
feules perfennes Chreftiennes , qui en l’amour de J.
C. doivent eftre cor unum & anima un a. Lunion actuelle
de l’ame devote à Dieu , conbicn que elle fe face
de fe feule grâce , quant il veu lt, St comment il
veult, neantmoins une chafeune perfonne fe doit efforcer
félon Ion eftat St Vocation -, de participer par
feinCtement vivre en ce mélodieux chant de unifon,felon
la parole de Vnapretiofia margarita. M a tth .xu i.4 6 - E t
quia Maria optimam partem elegit. Luc. x. 42.. E.t sac
quiert mieulx par bonne vie, que par Clergie, combien
que fobre Clergie ou Théologie y vaille moult, tant a
l’obtenir, comme à l’enfeignier, tant que enfeignier fe
peut 3 car nul, fors Dieu, ne peut donner l’experience en
la quelle feule eft parfaite fcience en toutes chofes. Sy
prenons ung exemple entre les aultres de la voix St
parole de J. C. comme elle fut de grant vertus, par
toute l’hiftoire de l’Evangille , mais en efpecial aux
deux bons pèlerins alans -en Emaux le jour de la Re-
furreCtion , & y prenons aucunes confideracions,
pour y faire fin. La voix St la parole de J. C . avoit
en -foy vigueur, lueur , St ardeur -, car elle faifoit
ces deux pèlerins avoir en leur cuer ces trois conditions
, comme il appert, quant de l’abondance du
cuer, ils dirent depuis que J. C.fe party deux, Non-
ne cor nofirum ardens erat in nobis dum loqueretur in via
& aperiret ficripturas? Luc. xxiv. Xi. Icy avoit unité
de cuer : car ils dirent,’ cor nofirum , non , noflra:
cy eftoit une v(#x perçant, dum loqueretur in via; ÔC
lettre patent, & aperiret ficripturas : St cuer ardent,
Nonne cor nojirum ardens erat ? L a voix St la parole
de J. C . eftoit quant à la Divinité la parole de Dieu le
Pere, Quia verbum Patris quod ex ore altijfimt proce-
dit ex habundancia cordis fu i , id ejl ex fècunda memo-
ria efentU fim. Hincefl illud : EruBavitcor meum verbum
bonum. P fai. xliv. I • L a voix St la parole de
J. C. félon la divinité, produit avecqucs le Pere la fla-
me amoureufe du St. Efperit , qui conjoint le Pere
au Fils, St le Fils au Pere 3 Quia nexus eji Patris &
FilU. Sy n’eft pas de merveilles fe la parole dejhefu
Crift étoit enflamant les cuers comme il fut de mon-
ftré, tantycy, comme jour dePenthecoufte, vifible-
ment St invifiblement, St chafcun jour es cuers dévots.
La voix St la parole du Fils avec le Pere St le St.
Efprit, comme par une bouche parlant, toute chofe
créé , c’eft à dire tout le monde par dehors qui eft
comme une chançon tresmelodieufe, en laquelle font
tant de cordes fonans , tant de tuyaux ou fiftules raifon-
nans, tant de doulces voix chantans, comme il y a de
créatures 3 St de ce vient que tout riens créé magnifie,
honnoure, loue St glorifie le fouverain Dieu , comme
fon chant, fe voix St armonie •, mais en -efpecial
la créature raifonnable St intelleétuele, quant elle eft
bien pacifiée,purifiée, enluminée, parfaite St vivifiée.
Si avons parlé du chant qui appartient a créature
raifonnable, pour ce mortel pèlerinage, en tant que
fon chant approuche plus à cely de paradis , en par-
durable éternité, le quel chant du cuer nous difons
Canticordum de la haulte game qui appartient au cuer,
depuis qu’il a efté fenfuel, puis efpirituel St devenu
celeftial, c’eft aflavoir à devocion , à fpeculacion,
puis a contemplacion. Dieu chant nouvel te chante-
ray 3 de tout mon cuer te louvéray. Ame».
Cernite miferi quanta pro vobis fubivi.
Jn cruce morte me a dampnatur mors aliéna y ]
E t f ie emendo quod j 4dam perdiait edendo ,
Cerne quts es y quid eris, mor en s , duc duc cor m altay
Fae opus injunSlum, deinde vacato tibi,
Concine ficut o/or, tua dum mors imminet y 0 mors
Mortua morte Jefiu fis michi porta poli ! > <
Tempus adefi y b anima y quofiponfia cubile beatum
Sponfi confie endos, federe perpetuo.
Ergo carnet hymen mens y os, cor y Ungua v Igor que,
P lande y fit le , totam tejubilus rapiat :
Te tamen & tua fie y tua f it fipes unie a Chrifiiy
Pafifio f it meritum gracia fiolatuum.
_ _ _ _ _ tua fbnitu varia tuba duplex.
Terreat ire tonansy blanda venite lenet
Turturis hac fadens , junges fufipiria fiuavi
Quod vel alauda canif, vel philomena mélos y
Cor tremet obtraüus .varies, dum letitU vis
Cor vehit in latum, mox premit anxietds \
Carmin a noBe Deus tibi dat, dum te peregre fers,
Fac refonet fiua lex jugiter ore tuo.
A. V I S
DE JEAN GERSON
Docteur c? Chancelier de l ’Mglife de Paris.
Pour la
CONDUI T E
C H R E S T I E N N E .
Tiré du Manufcrit de St. Viétor
B Cotté 1 3 8 .
Cy s'enfiuyent neuf Confideraciohs.
A imer Dieu fus toutes chofes, felônd que Dieu
l’a commandé, eft avoir bonne voulente St ferme
affeétion d’acconplir fes. Commandemcns,
St mettre arriéré toute chofe, nez fe propre voulen-
té St fon propre corps , qui feroit au contraire de la
voulenté de Dieu : St par ainfy homme ou femme
n’aime point Dieu fus toutes chofes qui peche moi-
tcllement, car il aime mieulx foire fe propre voulenté
que celle de Dieu, St la met devant la foye.
En toutes chofes que nous faifons de bien, foit
meogier, foit labourer, foit dormir, foit dire oroi-
fons, foit prendre esbatement, . . . . . St fobre nous
devons avoir une panfée a Dieu, pour ordonner tout
à fon fervice, St lors toutes nos operacions feront méritoires
St feintes, St vaudront prières, par ainfy nous
acomplirons ce que dit l’Apoftre Qu e tous dis fault
q prier Dieu fans faillir. i T h e f f . V . 1 7 . |
Chafcun jour la perfonne fe doit ramener à foymaif-
mes par ung peu de temps, St penfer ce quelle a hit
la journée, St demander mercy à Dieu du mal, &le
regracier humblement du bien , en depriant que de
mieulx en mieulx elle puiffe perfeverer , puis de fon
Confiteor St autre oroifon fclond fe devocion, par ainfy
la perfonne dormira feurement entre les bras de fon bon
amy Dieu, St fon Angel qui nous garde: St qui ne
le foit, il eft en périls bien fouvent de dampnacion,
par mort fubite ou autre cas , qui peuent avenir et
s’elle eft en pechié, fans avoir tele repentence, comme
dit eft, elle gift entre les bras de fon ennemy mortel
le dyable.
Contre la tcmptacion de la char ny av fi bon reniera
de, après la grâce Dieu, que fouyr tantoft la temp
tacion St fe convertir à oroifon , par efpecial a on
cfpous. J .C . St la glprieufe Vierge , St a fon p r o p r e
Angel. Et fe par ainfy ne fe part la temptacion 3 c
bonne chofe de faire le figne de la Croix, et de
par grant courage St indignacion, fy de td le o rd u ,
que je face tele vilenie à mon efpous St amy
je foie foulliée St ordoyée en tele vile & abohomi '
ble ordure, comme garfe feuffe, ordc St de oy
veant non mie ung homme feulement, mais J*
889 Confederations fur le péché de Blafpheme. 89o
monte. Car fe on les puniflbit incontinent, on les gar-
deroit bien.
L e pechié de blafpheme rechiet fur tous cculx St
celles qui l’oyent volentiers, on qui s’en jouent, ou
qui ny mettent empefehement, chacune perfonne félon
fon povoir, St fçavoir, St fon office. Ci foient
notées les aultres v 1. Confideracions.
L ’eft expédient pour efehever l’ire St la punicion
de Dieu prefente St avenir, que les Prélats de France
St gens d’Eglife, chafcun en fon endroit, fensattendre
l’vn l’autre , mettent provifion contre les dits vilains
blafphemes, felon leurs povoirs autant ou plus que
fe on leur vouloit tollir on ufurper leurs temporelles
poflèffions.
L ’eft expédient, que les Seigneurs St Capitaines
de gens d’armes St Officiers temporels labourent diligemment,
à ceque dit eft, chafcun felon fon endroit,
par oeuvre fon villain plaifir , fe rte foit par aventure ^
pour la pour d’omme, St plus quant par foy ou autrement
pour cxequuter les peines dcsja inftituées , ou pour
en inftituer de nouvelles, St défait les cxequuter fens
g efpargnier aucuns. Car autrement ce n’eft que une
moquerie faire les Loix qui ne les tient.
L ’eft expédient, que les bourgeois St autres qui
ont mefnage St famille, faffent diligence que leurs en-
fons St fervitcurs fe gardent de tels blafphemes , St
que à ce faire les Seigneurs de l’Eglife St temporels
les exhortent St baillent autorité , St ce vauldroit
tous Sains St Saintes , St mon Angel qui fi amia-
blement me garde : St ainfy de tels langages doit ufer
l’ame devote , contre les mauvais ennemis , qui par
mauvaife temptation nous veulent ofter noftre intégrité
St chafteté •’ car perfonne qui prent par deliberation
plaifir en delegations Stpanfeesluxurieufes, peche
mortelement, St plus quant elle vauroit aconplir
elle l’aconplit.
CONS IDER AT IONS
fiir le péché de
B L A S P H E M E .
D e novo édita d M S . Cod. ViB. 1 8 4 .
L ’honneur de Dieu St de fes glorieux Saints
St Saintes, St pour le felut tant efpirituel com-
-me temporel des Chreftiens, foient noftres
les confiderations deflbubs eferiptes,
L e pechié de blafpheme eft quand on mefdit de moult que on accouïtumaft les enfans St jeunes gens
Dieu contre fe vraye Religion Chreftienne, ou quand à non jurer Dieu ou fes Saints , par la doétrine St
on dit chofe au diffame de fon Saint Nom , comme bon exemple des grands. Car par bonne couftumc
en le maulgrcant ou defpitant,' ou deshonneftement feroit aufli legiere St creabk chofe non jurer , com-
St vilainement parlant St jurant de luy St de fes benoits me jurer: pourquoy on ccheveroit innumerables par-
Saints St Saintes. C juremens qui font pechiez mortels.
L e pechié de blafpheme eft de foy pire St plus horrible
, que n’eft embler l’autruy , ou que n’eft mangier
char le Vendredy ou le Carefme, St c’eft proprement
le pechié St le langage de l’ennemy d’enfer St
dés damnéz.
L e pechié de blafpheme eft plus à punir par jufti-
ce que ne feroient les pechiés devant nommes. Et à
ce eft la Sainte Eforiture St lesLoy s, St les Decrets St
les Conftitutions faites en France St ailleurs 3 les aucunes
fur peine de mort : pour ce que aucuns blafphemes
font plus griefs que les aultres, St fera bon de les
reveoir St monftrer.
L ’eft expedient, fe femble, veu que ce diabolique
pechie eft tant general St tant enraciné en plufieurs
lieux, que du commencement fuflent ordonnées aucunes
peines legieres, afin que on les peuft excquuter
fans efpargnier aucune perfonne, de quelconque condition
qu’elle fuft, grande ou petite, ancienne ou jeune,
riche ou pouvre , noble ou non noble, Eccle-
fiaftique ou feculicre.
L ’eft expedient, que fur les chofes deffiis diètes les
gens de la Juftice Ecclefiaftique aient leurs conlèils
St advis , St pareillement les gens de la Juftice fecu-
Jiere. Et puis, que par un commun accord on pro-
L e pechié de blafpheme eft grand caufe des peftil- ^ cedaft en la befoingne diligemment, St fens fointife,
lances, St des guerres, St des famines, St aultres tribulations
en Chreftienté, St par efpecial ou noble
Royaulme de France qui a le nom d’eftre très Chre-
ftien, St toutesfois, dont c’eft douleur, ce detefta-
ble pechié y eft acouftumé plùsque ailleurs , en fon
grand diffame Sc evident dommage St defolacion.
Le pechié de blafpheme n’eft point à exeufer par-
cequ’il eft tourné en mauvaife St très damnable St
perverfe couftume, tant en general, comme a i particulier,
ne pareeque les blafphemeurs dient qu’ils ne
s’en pourroient tenir , mefmement quand ire les furautant
ou plus que ce c’eftoit pour un grand prouffit
temporel acquérir, ou garder en la chofe publique ou
particulière.
L ’eft expédient, que foient faites exhortacionspubliques,
non pas feulemeut par prédications St de parole
3 mais par lettres St par ccdules és Dimanches St
Feftes, St es Procédions 3 pour mpnftrer St deelairer
tout ce qui femblera convenable à l’accompliflèment
de celle Sainte befoingne. Dieu doint qu’ainfi fe fef-
fc.
K k k 3 JOAN