qui.ont pris ce mot cognoiftrc , pour charnelc con-
jonélion , 6ç par ainfi ont d it , que Jofeph apres la
Nativité de Jhefos , congnu Noftre Dame , 6c en ot
des en fans, les quels font nommés en l’Euangile les
freres 6c les fours de Jhefos, car auffiJhefiis ne foroit
o H H Saint Ôc
oacre Mariage ; car virginité elt coufine aux Angels
6c car par ce Mariage leur nombre en foroit réparé *
6c les faints Pcres qui eftoient ou limbe , comme on
peut eftimer, orent cognoiflànce , de grâce efpeciale-
de celle folennité, fi en furerit csjoys, car leur redemmie
dit premier i g , dient eulx, s’aucuns n’elloient A ption approchoit. Mais auffi veons fe c’eft point à
apres,
Confiderons icy comment les hérités ont pris occa-
fion de errer , en ce qui les devoit édifier : car demandons
, pourquoy Sainét Jofeph ne cognut point
Noftre Dame, avant lâ Nativité de Jhefus, ceft certain
que ce fu pour la reverence du làinét Millere ;
6c pour la dignité de Noftre Dame., qui eftoit Temple
de Dieu Sacré ! Or ell tout cler que celle caufe
fu apres la dite Nativité 6c plus cogncue que par avant,
tant pour le telmoignage des Angels, 6c des Pallours,
6c des trois Rois., comme par les dis de St.Symeon
6c de fainéle Anne , 6c autres. En furplus nous a-
vons tant ou commun langaige, comme en la fainéle
Efcripture, que fo on dit tel n’a point fait telc cho-
fe avant tel temps, ou jufques à tel temps, il face la
diète chofe: comme on diroit que Judas ne fo repenti
pas avant qu’il full mort, il ne s'enfuit point que
apres la mort il fe repenti, je laiffie les autres exem-
:roire, que plufours des prifonniers de Purgatoire e.,
fulfont délivrés 6c ellargis , en l’omjeur 6c faveur de
ce joyeux , faint 6c glorieux Mariage : oy voir, nous
en furplus povons religieufement penfer que toutes 6c
quantes fois nous pécheurs faifons mémoire honorable
de ce Mariage, nous en importons les biens 6c les
aumofnes de grace 6c de pardon d’efpirituele joye,6c
de devocion y car pour nous pécheurs, 6c pour noftre
falvacion principalment, fu célébré ce Mariage:
fi y devons avoir fingulierc fiancé, amour, honneur
6c reverence, de quelque eflat, de quelque aage, 6c
de quelconque fexe ou condicion nous foions, 6c
quelconque grace nous vueillons empetrer, ou me-
fehief efohiver, 6c en elpecial, pour demander paix
6c union : car icy eft lignifiée l’union de fainte Eglife
à Jhefus fon efpous, 6c de l’amc à Dieu. Si doivent
auffi nouveaux mariages prendre exemple 6c devocion
à cell ic y , comme nous l'avons touchié ces chofese
pies. Il fouffifoit à St. Mathieu declairier que .Jofeph ß une briefve epiflre, qui s’adrefiè à fàint Eglife. Di
n p rnonnr nnraufis rhflrnplrmrnr Noftre Dame, oar IX t-ie A » 1 „ ____. . . . _____ ne cognut oneques charnelcmcnt par r_i________ t? j . - n t
ce qu’il excepta le temps ou quel il l’euft pluftoft co-
gneue au commencement des noces , car il n’en fit
riens pour la caufe defliis diète , il donne à entendre
auffi ne fit il en apres par trop plus forte raifon.
Confiderons quant à ce que yceulx hérités allèguent,
que Jhefus ot frères 6c fours, ceft erreur vient
par l’ignorance de l’ufage de la fainte Efcripture, qui
appelle fours 6c freres ceulx qui font d’un meifmes lignage
, comme coufins 6c confines, laifîons les e-
xemples: 6c quant à ce quejhefuseftditpremierncz,
c’eft à. entendre que devant lui ne fu autre , 6c non
mie que apres en euft aucun, félon l’ulàgede TEfcri-
pture 6c du commun parler.
. Confiderons quant aux noces de St.Jofcph 6c N oftre
Dame, qu'eles eftoient moult honorables, car
eulx deux eftoient de la lignie Royal de David , 6c de
la Sacerdotale de Aaron : jafoit ce ne fullènt moult
fons à la parfin, que en la très folennele Eglifc de Noftre
Dame de Paris, ha une caufe efpeciale de faire la
célébrité de la Dcfponlàcion Noftre Dame, car illec
font deux anneauls d’or, lefquels on tient avoir efté à
la Vierge pu celle, écefteonfequemment bien à tenir
religieufement que faint Jofeph les y donna en fa Dè-
lponlàcion 6c Mariage , illec eft avec cel la ceinture
Noftre Dame, à la quele touchier prennent les femmes
enceintes leur devocion, illec eft de fon précieux
la it , du quel fut nourri le Roy des Roys qui tout
gouverne.
O R A C I O.
o R vueillés Vierge pucelleSainéle 6c Sacrée, vu-
eilliés empetrer grace envers voftre chier, Ôc
habondans es richeffos mondaines , mais eulx en avo- q doulx enfant Jhefus , que on puiffo en voftre diète
ient à foufiifànce 6c à honneur, 6c pour fouftenir con- Eglifo, 6c toutes autres par Crcftienté, célébrer Higne-
venablement leur eftat 6c menage : l’efpoufe eftoit ja ment fans fol ulàge, le virginal Mariage du fàint, 6c ju-
Mere de Dieu , laquelle eftoit moult belle 6c benig- fte, 6c vierge Jofeph avec vous , à l’onneur d’icelui
ne, 6c plaifant à regarder, fans quelconque vilain défit
ou mouvement à mal : l’efpous eftoit St. Jofeph,
qui ja eftoit inftruit du fàint miftere de l'Incarnacion,
6c qui fe reputoit moult honoré de ceque l’Angel lui
avoit commandé de par Dieu , qu’il cfpoufàft folen-
nclement une tele Vierge pucelle, lui qui eftoit auffi
vierge. Si fàifoient eulx deux bonne 6c lye chiere .
. . . . . honefte fans diflolucion à leurs parens
6c voifins 6ç amis qui eftoient venus à la fefte des
noces, lefquels conjoiflbient les uns à la Vierge pucelle
, d’avoir un tel bon 6c noble efpous , les autres
à St. Iofeph, d’avoir une tele belle1, faige, 6c noble
pucelle à efpoufc : 6c s’aucuns font icy curicufos que-
ftions, comme de l’abit 6c de l’ordonnance de la Vier- D
g e , s’clle eftoit veftue richement, s’clle eftoit en cheveux,
telle defeouverte , s’elle avoit fermante d’o r,
eu chnpiaux eh couronne d’or , fo là furent aucunes
danfes, ou chanfons, oumeneftres jouansd’iftrumens;
refpondons à toutes teles demandes, que eulx deux
6c leurs amis prefens firent fclond la couftumc du
temps de lors-, voir en toute honefteté 6c chafteté,
6cen fobreleeffo, fans difiblucion, full en dis, full en
chanfons, fuft en maintien, fuft en boire ou en men-
gier j mais tout ainfi <*e appartenoit à tele fainéle
convencion.
voftre efpous, lequel comme ama tant purement, vous
garda 6c le benoit enfant Jhefos, tant loyaument vous
gouverna, tant foigrieufement vous acompaigna, tant
continuemcnt, chaftement 6c fainèlement vous honora,
6cvous lui tant benignement 6c humblement, 6c
maintenant eft avec vous glorieufcment, affin que moyennant
fes mérités 6c interceffions 6c les . . . .
lebening 6c glorieux Jhefus qui voteftre nez 6c nourri
en ce Mariage fàcré, nous face eftre participant des noces
celeftiales, 6c pcrdurable gloire, il qui eft efpous
de toute TEglifê triumphant, 6c Dieu benoit fans fin.
Amen.
A U L T R E S
CONSIDERACIONS.
COnfiderons, mon ame, d’or en avant aucunes
dcschofes que fàint Jofeph 6c la Vierge pucelle
firent depuis la folennite de leurs ngpes, fclond
le texte de l’Evangile, avec eftimacion religieufc : mettons
tout de premier devant les yeulx de noftre confide-
racion, comment les parens & les amis, qui furent es
noces,
g <5 y Confiderations fu r fa in t Jofeph. 8 66
noces fcpartürent, en donnant aucuns gracieux dons
plus que riches 6c. précieux , 6c en prenant aimable
coneie. Lors eulx deux fe retraitent en oroifon, à l’ex-
cmpie du jone Thobie ôc de Sarré : illec curent
comme c’eft bien àfavoir, folitaire 6c familière collo-
queion, fois la merveilleufc providence ÔC difpoficion
divine, 6c fosles grâces que Dieu leur avoit fait. Or
defirs, en plus que deux petits enfàns fcurôc frere, ou
que le Pereôcla Mere envers leurs enfans : or eft grâce
plus puiflànt que nature.
Confiderons lexemple de D av id, auquel fcrvoit
Abifâc, pucelle très belle, 6c tresdefirable, 6c cou-
choit avec lui en fon l i t , 6c l’efehaufoit ; non pour
quant David ne lacongnut oneques charnclement, ne
pleuft à Dieu, mon ame, que tu cogneuffos bien les * s’anflamma de fon amour en mal. Nous lifons de Sar-
hauls, les dignes, ôc les fecres mifteres, des quels ce- ré , vierge 6c pucelle, fille àR agu e l, qui appelloit
’ , r ‘ ' ° ^ '' ^ Dieu en tefmoing Tob. viii. p. en difànt, . tu fc«
Sire, que je ne defiray oneques homme, &
fie Vierge 6c St. Jofeph parloient 6c fe delièloient fo-
brement ôc chaftement, en enflamant touteieur pen-
fée, 6c les levant en la dileccion de Dieu, 6c en l’enfantant
efpirituelment par nouvelles cognoiffances de
fo vérité) ôc en lieu de lignie corporele eftoit bon fruit
de vertus, 6c lignie efpirituele en plaifance trop plus
deliétable, que ne peut eftre délit charnel : illec n’avoit
quelconque mouvement ou pointure de charnel defir,
6c dedens tout eftoit purté, tout eftoit chafteté, tout
eftoit efpirituauté, ce que penfoient, parloient, fàifoient.
Gonfiderûns, que la virginale familiarité 6c conver-
focion de Marie plus efmouvoit St. Jofcph à toute chafteté
de corps 6c de penfée, que ne fàifoit fon abfence,
comme le rcgart 6c l’approximacion du fàvinier , fe-
lond lesPhilofophes,efimiet à chafteté, 6c refroide la
fievre de charnel defir. Certes voirement efh charnel
fuis gardée .
de tout male concupifcence : non pour quant avoit elle
efpoufé fept maris , lefquels avoient efté occis pour
leur male concüpifcenCe, par l’ennemi qui fonommoit
Hafmodeus. Nous avons d’un Philofophe . .
au quel fe venta 6c gaiga une foie femme, la plus belle
qui lors fuft, qu’elle le trairoit à fon amour, vint cou-
chier avec lui, mais pour néant fu cq, car oneques ne
le pot efmouvoir à fon defir, Ôc quant les jouvenciaulx
qui avoient gaigié à elle, femoquoient d’elle, ôrefpon-
di-elle, j’ay fait gaigure d’un homme, non mie d’une
ftatue ou d’une pierre.
Confiderons cncores comment, fclond le dit Saint
Auguftin, quant on a goufté l’efprit, c’eft à dire chofe
efpirituele , toute char, c’eft à dire charnel defir
n’a point de faveur : ainfi l’avoit il efprouvé, fclond <
defir ou concupifcence comme une fievre, qui nous g qui eftdit paravant > ainfi l’espreuvent les cuers dévots,
trt 6c enflamme, fe larofée de la grace Divine ne l’e-
ftaint ou refroide : mais quant grace defeent, la four-
naife embrafée de charnele concupifcence en noftre
char corrompue fe fait comme un ventderofée, ventant
fcriement ôctelement, que noftre efprit avec fos
trois vertus ne fo bruflenten riens par mauvais contentement
, à l’exemple des trois compaignons Daniel,
les quelsNabugodonofor fit getter en la fornaife aidant.
L ’iftoire eft commune, mais le miftere y eft
bel.C
onfiderons doneques , mbn ame , que celle pure
rofée eftoit fi habondant en Noftre Dame , que par
fon bening 6c divin regart, par fes làintes 6c chaltes
paroles, par fon honnefte 6c attrempé maintien^,
ventoit au. dehors celle fouefve 6c refrigerative rofee
de grace 6c de virginité : fi n’eftoit pas de merveille fo
Jofeph en fon efprit 6c es vertus de fon aîné, ne bruif-
foit point par l’ardetir de vil concupifcence) meismequi
à la fois font remplis de tels plaifirs divins 6c favou-
reux;, que tout délit charnel leur torne en habomina-
cion, quans eulx y penfent j à l’exemple de celui qui fe-
roit bien repus de très dçlicicufcs viandes, toutes viandes
grolîès lui torneroient à defplaifir, ôclesverroit ou
penferoit fans appétit, ou contre cuer. Pareillement,
un cuer bien en amour de Dieu, voit à la fois toute beauté
dehors, fans la defirer, mais la tourne à fon proffit,
6c, à plaifir efpirituel: combien que ce n’eft mie trop
feure chofe de foy trop y fier, ou longuement abandonner
j car on pourroit y eftre pris ou las, ou trcbuchier
en la témérité, ôc foie erreur desTurelupins, quivou-
loient converlèr nus6c nues, làns honte, à l’exemple
de Adam 6c Eve, ce difoient, mais eulx n’eftoient pas
en eftat tel de Innocence j mais en celui ou quel Adam
6c Eve eurent honte d’apparoir nus. i
Confiderons jouxte ces chofcs, que furent jadis aucuns
Philofophes, qui commandoient à aler nus comment
que icy eftoit ou milieu celui qui non mie fou- ^ me chiens 6c belles, à nommer toutes chofcs par leur
lement refcmbloit ou fils de Dieu, mais helas ce four
neau d’ardant concupifcence deftruit, art 6c occitles
gens deBabilon, c’eft à dire de confufionôc de con-
verlàcion feculiere, qui fervent à Nabugodenofor,
c’eft le prince d’enfer:, tels attifcnt le feu en la fornaife
de leurs corps en toute guifc , 6c en tout norriflè-
menffde fors vins, de viandes, de curieux 6c folsôc fichiez
regars, de vains 6c lubriques parlers, de difîo-
lues contenances, 6c foufflece feu Dameoyfeufe, par
les fouffles de toute maie occafion, en recevant 6c at-
traiant les vent de toutes viles penfées, 6c luxurieux
defirs, fi n’eft pas de merveille fo tels periflent.
Confiderons, mon ame, que n’eft pas de merveille
fe tels fils deBabilon, c’eft à diredeconfufion, ferfs
a Nabugodenofor, qui figure l’ennemie , ne croient
pas de legier ce que nous avons dit de la très chafte
converfacion 6c très familière de St. Jofeph, 6c de la
Vierge pucelle j car eulx en jugent fclond leurs meurs
propre nom, fans honte j du quel fol erreur fulecom-
pileurdu vicieux Romant de la Rofc : mais telsfàillcnt
contre toute honefteté , 6c contre l’enfeignement de
nature, fclond le dit de I ulle, combien que Tulle ne
feeuft pas fi bien la racine 6c la caufe de cefte befoigne.
Verité eft que nature humaine, fclon là premiere infti-
tution, en l'eftat d’innocence, n’avoit riens vergoi-
gneux, pour ce eftoient Adam 6c Eve au commencement
nus làns honte, mais depuis leur pechié concupifcence
honteufe, 6c rebelle contre raifon, s’embati en
leurs membres, 6cfe hontoyerent, 6cfo couvrirent de
feuilles. Et de la vient que regarder nuement 6c parler
ouvertement, en la matière du fait de generation, ef-
meut de plus en plus cefte vile 6c rebelle concupifcence,
6c attife fon feu, fclond ce que experience le monftre à
l’ueil 6c au cuer: mais ainfi n’eft mie des autres membres,
6c des paroles des autres pechiés, comme de larre-
cin, oudemurtre, ou de mençonge, fi les peut on
6c condicion corrompus, par la defordonnée fievre D bien nommer ouvertement, y penfer, làns tel péril.
de vile concupifcence. Nous veons que un fébricitant
defire tant à boire eaus , que bien lui femble que il
buveroit un feau de eaue ou deux , 6c s’il eftoit bien
fain, il n’en auroit cure. Nous lifons 6ç avons veu
de plufours, 6c encores en y a , qui tant pour leur
bonne complexiön corporele bien ordonné, comme
pour leur bonne occupacion , 6c principalment poulie
don de grâce, peuvent converlèr avec aultres per-
fonnes belles 6c plaifans, fans eulx brûler par vilains
Tomi I I I , Pars II,
Confiderons encores, que pour cefte corrompue
racine de vile concupifcence, avient que plufieurs dévots
6c chaftes font à la fois elmeus à temptacion orde,
6c vilaine, que nous nommons temptacion de blafphe-
me contre la purté de'Dieu, ou des Saints ÔC Saintes:
vient à la fois par la foggeftion de l’ennemi, par dehors;
mais ondoitmefprifer teles tcmptacions, Ôc les palier
làns en tenir compte, 6c làns penfer que ce foit pechié,
ou qu’il s’en faille confcflèr , puifquc tele temptacion
I i i de