amour on dit proprement pitié. Pituts ejl amorconfur- dain ne peut avoir en foy Canticordum, mais Difcor.
gens exgênere& ajfinitate. dum. N e judices quemeumque.
M. c’eft vérité 6c qui n’aimeroit cculxdefonligna- S. Entens làinement, ô cuer mondain: je ne vueil
ge qui /nos, 6tc. Que veulxtu par ces chofes conclure?
Loqnere ut vide am t e , ait Socrates.
S. Je te vueil donner à entendre la nature 6c la condition
de no lire Canticordum , mais que tu vueilles
convenir avec moy en aucuns poins bien ràifonnables,
6c legiers à confentir, O port et convenire in quid nomi-
nis & inprincipiis nous.
M. A cecy foire ne tendra ja, declaire quels font ces
poins, Clarifie a te ipfum & me.
S. Plufieursfont, mais je les rameneray à trois, comme
trois fuppoficions. L e premier e f t , quejaffoit
ce que on puiflè bien chanter de la voix corporelle,
fons quelconque art, ou artifice des notes, que nous
appelions V t .R e . M i .F a. Sol. L a . qui font la game
vocale -, neantmoins cell art eft très profitable, pour
mieulx fçavoir 6c plus feurement chanter. L ’autre
point eft , que nous povons raifonnablement impofer
les cinq lettres vocales A , E , I , O , U. aux cinq
affeélions que nous fentons fouvent dedans nous, fons
lesmonftrer, quia......... placitum fi povons entendre
par A. doleur. Par E. efpoir. Par I. pitié. Par O. paour.
Par U. joye. Vray eft que je laiflè icy dire la convenance
de ces cinq vocales aux cinq notes qui le forment
chafcune par l’une de ces lettres, comme j’ay
dit V t . par U. Re. par E. M i . par I . Fa. 6c L a . par A.
Sol. par O. Je ne diray point auftî, comment l’ordre
de ces cinq vocales convient très raifonnablement à
l’ordre de ces cinq affeélions deflüselcriptes, doleur,
elpoir, pitié,paour, joye: en (urplus je me tairay de
prelènt, donner la nature 6c declaration de fes affections
, qui le nomment par les Philofophes pallions,
des quelles plufieurs en ont efeript maints Livres. Je
viens doneques au tiers point, pour convenir avec toy,
ô cuer mondain, c’eft que fes affeélions ont quant aux
caulès, comme ont toutes aultres choies, fors Dieu.
On nomme ces quatre caulès efficient, matriel, formel
6 c final , N ih il ejl ortum cujus caufa légitima non
procédât. Que dis tu, confens tu à ces trois poins, ou vérités?
M. Coifoien que je ne congnoifièpoint encorsbien
ou tu veulx venir, non pour quant ces trois poins me
femblent raifonnables, 6c oélroyables 3 dy plus à plain
que tu entens par ces trois poins conclure : Sophifia
ejl celare quod’ intendit 3 fapientis aperire.
S. Je te vueil monftrcr trois conclufions. L a pre-
'miere que chafèun cuer, lôitlèulet, ou mondain ,puet
avoir dedens foy ung Canticordum par la maniéré qui
eft deferipte : car Canticordum vault autant que chant
de cuer. L ’autre conclufion eft, que c’eft moult profil
table 6c convenable choie, enlèignier 6c fçavoir fart
6c la nature de ce Canticordum. Car l’efprit humain
ne fe peult mieulx congnoiftre que par bien noter, 6c
par mefure chanter, 6c defehanter, felon ce Canticordum
3 comme plus à plain fera cy après dit, le tu
me veulx cfeouter. Et tu fees que n’elt rien tant ne-
edfoire à creature raifonnable, comme eft. ceft oracle
Divin : Congnois t o y . .............................Grace &
Latine. Cognofce te ipfum. Aultremcnt l’omme n’eft que
une belle. Si ignoras t e , 0 pulcherrima mulierum, egre-
d e r e& a b i pofl capras autvejligia gregum.Gzxit. 1.7. La
tierce conclufion eft, que le chant du cuer mondain ne le
doit mye proprement nommer Canticordum : mais Difi
cor dum, quant le cuer eft indevot, fel 6c crueulx : car
il n’a point d’accort en foy , mais defocort en maintes
guiles. O r eft ainly que Canticordum, lèlon Ion
propre mot, lignifie chant concor, quaji concordum.
Or eft quant le cuer en fes affeélions eft piteux, dévot
6c religieux Pax hominibus bona voluntatis, Luc.li.
14. led Non ejlpaximpiis dicit Domihus. Ifoi. XLVIII. 22.
M. ... cuer lèulet touches fort mon honneur, en
celle darricnnc conclufion, ou tu dis que cuer monpas
dire que tu ne puilîes avoir le Canticordum dedans
to y , car je fçay bien que tu peulx devenir piteux
lèulet, dévot 6c religieux 3 mais tant que tu foyestou-
dis mondain, fons eftre dévot à Dieu , tu ne peux
^ eftre paifible, ne chanter d’accord par toy , ou avec
aultre, Conveniet nulli , qui fecum dejfidet ipfe. Cuer
qui demeure mondain a la voix aucunes fois calfe ou
enrouée, par parellè, ou luxure,’ l’a trop rude ou
furieulè, 6c afpre par avarice, 6c ire, l’a trophaulte
jufques à rompre le gorgeron par orgueil, 6cdefdaing3
l’a toute* perdue 6c eilranglée par yvrefiè 6c glouton-
nie. Sepulcrüm patens ejl guttur eorum. Ffal. v. n .
Pareillement des aultres vices qui empefehent doulce-
ment chanter 6c plaifanment dedens le cuer. In hym-
ni s & cant ids fupernaturalibus , & pfallere aquo animo
fientMujtca in Indu, importuna narratio.Eccli.x xn .6 .
M. legierement tu me cuides conclurre que je de-
viengne comme tu es lèulet, 6c Religieux, 6c que je
laiflè le monde qui fe maintient par conpaignie , Cre-
feite & multiplicamini. G en. 1. 22. & ait F lato.
S. Maintes maniérés font de folitude ou de Religion:
l’une maniéré eft quant au lieu ou habitacion par deh
o r s , ou demutaciond’abitcorporel, SicutinMona-
jleriis. L ’autre folitude eft par dedens, hors de cuers 6c
folitudes mondaines, tant foit la perfonne entre les
gens, Sicut dicit in Lege unusquijque fecum habitet. Et
iterum. Convertimini ad cor & . . . .• tecum habita : 6c pareillement
eft de religion que nous difons dévotion,con-
tenplacion. Vray eft que folitude du lieu fait ôc vault
fouvent à folitude du cuer, par dedens, 6c de fo pays
6c de fo devocion. E t lè tu veulx, nous confiderons plus
à plain encores celle profitable matière : mais je voy
bien que tu n’y pourroyes à prelènt entendre , pour
tes aultres occupations, qui te appellent 6c contraignent.
Se tu veulx retourner ung aultre jour, tu me
trouveras preft à chafcune heure.
M. Soit ainlÿ, car j ’ay de prelènt foifon à befon-
gnier, je revendray une aultre fois, 6c prie tandis pour
moy, Multùm valet deprecatiojujli ajfidua. Jacob, v. 16.
Cy jinie lapremiere callacion de la doUrine du chant
du cuer, qui fe dit Canticordum aupelerin. 3 Cy commence la féconde collacion au dyalogue , ouper-
fonnage de la doÜrine du chans du cuer , ■ qui f e dit
Canticordum au pelerin en la quyelle parle premièrement
cuer mondain.
Temps eft que je vifitecuer lèulet: 6cle voy qu’il
eft en fo folitude 6c meditacion, s’y me approcheray
6c le folueray , pour entretenir le parler de l’autre jour.
Dies diei eruSlat ver bum. Pfal. X V I I I . 3 .
S. A bien fois retourné, cuer mondain 3 mais ta
demeure aeftée longue, 6c ton retour, Longé dpec-
catoribus falus in regione dijfimilitudinis. ■
M. Ce n’eft pas de merveille3car maintes occupacions
me font forvenues,6c maintes cures 6c foucis, en tant que
j’ay fouvent foufpiré 6c déliré 6c loué ta folitude,s’ainfy
eft povoit foire Vexâtio dat intelleElum. Ifoiæ. xxviii. ip.
S. C’eft bon commencement quant tu viens à congnoiftre
la milère du monde , 6c le bien de folitude,
conbien que trop plusporras tout congnoiftre, quant
tu feauras les caulès. Scire, ejl rem per caufam cogno-
^fier e.
M. A celle fin luis je revenu 3 car tu me dis l’autre
jour que ton Canticordum avoit quatre caulès, lèlon
lelquelles on povoit congnoiftre là diverfité de Ion
chant au mien, le quel tu nommoies Difcor dum 6c le
tien, Concordum, 6c monftroyes comment ou chant
mondain tout eft confus. Confufa funt hic omnia : fp‘ s->
me tus, moeror, gaudium.
S. C ’eft vérité, tu n’as pas perdu ta mémoire, s y
ay bonne confiance que tu profiteras encores pins.
Nemo repente fit fummus. Entens donques que le chant
873 du cuer nell pas du tout lèmblable au chant de la
bouche : non pourquant la conenoiflànce du chant vocal
vault moult à congnoiftre la maniéré du chant cordial,
qui fe foit par dedens , 6c ne peut eftre ouy des
oreilles corporelles. Nemo novit qua funt fpiritus, nifi
fpiritus qui in ipfo ejl. 1 Cor. 11.11. Et tout de premier,
comme le chant vocal doit avoir certaines mefures,
attrenpance 6c armonie, lèlon la lettre que on veult
mettre avec les nottes ou les voix : pareillement fouit
foire ou chant cordial. Si fâches que celle mefure 6c
Mais c’eft plus fort 6c plus laborieux enfoyr 6c acquérir
pure affeétion, que clere cognicion 3 6c toutes-
fois que vault cler entendement, fe la voulenté demeure
mauvaife : c’eft icy l’entendement dyabolique,
qui interpretatur feiens. L ’ennemy fcet maintes choies,
6c a bien cler engin mais ne met riens à fon profit
pour fes affeélions, le$ quelles il tourne toutes à mal
vouloir 6c foire . . . . . non bonne. En oultre tu
peut promptement apprendre, pourquoy tu n’as point
paifible 6c forain chant: car paix n’eft chantée par les
armonie ce tient en ce que les cinq voix du cuer, * Angels , fors que aux hommes de bonne voulenté.
Ipq n n tile s nous difo ns einn nrinrinales affpAinnc rtln-si* dm les quelles difons les cinq principales affeélions, • *__» ... l__/.______
doleur, paour, pitié, elpoir 6c joye, douvent tenir le
moyen par mefiirc vertueufc : c’eft que doleur ne foit
mye plus grande, ne plus petite que elle ne doit, félon
la lettre, c’eft à dire, lèlon la matière de laquelle
on fe veult 6c doit on doloir. Pareillement des quatre
aultres : car nul trop n’eft bon Ne quidnimium. Je
congnois bien que ainfy nous le trouvons, fe nous y
prenons garde 3 maislamaiftrilè eft de trouver ce moy
Gloria in exceljis Deo de in terra pax hominibus bona
voluntatis. Luc. 1 1 . 1 4 .
M. Pourquoy dondfùes m’as tu mis en nombre bonne
voulenté, en figurant ton chant, puis que elle eft
foule caufe de paix 6c de concorde, & e x confequenti,
caufa ejl omnis armonia.
S. Certes je n’ay pas oublié bonne voulenté, quant
j ay mis en colloque pitié ou milieu, 6c comme ou
centre du Canticordum , en remanbrance de J.C. qui
en en toutes f e s affeélions, car il n’y a que unevoye eft noftre paix 6cfterement de pitié. Magnumpietatis
pour aler droit le moyen: mais infinis font des voy es facramentum 1. Tim. m. 16. 6c figuré par J. qui eft
pour fourvoyer, Cum in uno offendit faElus ejl omnium la plus petite lettre, comme ce nom Jefosfe commen-
reus. Jacob .ii.io. / ce par J. 6c lignifie leplus petit par humilité qui oneques
S. C ’eft vérité , 6c pour ce eft donnée la doélrine full le plus fimple, quafi avis ,IfdU .w w . 7.6c haultenfo
morale par les Philofophes: fy ne convient mye que divinité:6cfelon celle voix petite, humble, 6c moyque
nous difons icy François, ouromant ou maternel.
Mais je vendray promptement au point de noftre in-
quifitition, 6c diray, que comme les notes, ou les voix
de la game vocale font trouvées par grant art, àmon-
ftrer comment la bouche doit former fon chant, 6c
gieux 6c benirfg à fon prouchain. Et je te diray dont
vient cecy. Tu dois fçavoir que l’affcétion de pitié,
ou pitié, fo fonde for prochain reéle de lignage, ou
de parenté, comme j ’ay dit oir , eft ainly que nous
fommes tous par creacion fils de Dieu, 6c le devons
defchant: pareillement eft trouvé ung art, pour mon- eftre par gracieufo adopcion , Déd it eis potejlaftrer
comment le cuer doit former 6c ordonner fon
chant, felon les lettres vocales, en concorde 6c plai-
fant armonie, felon la lettre de fon chant.
Fox juavis , vos decora,
Quando cordi concanora,
Pur a vox ejl cordium.
M. Enfeignemoy, jetepry, avant que tu voilés
oultre, qui eft la lettre du chant cordial, felon les cinq
voix ou aflèélions. Parvus error in principi
tem filios D e i fie r i, & c . Joan. 1. 12. pour tant voult
Dieu, qu’en toutes nos peticions , nous l’appelions
noftre Pere des cieulx, cy eft noble lignage. . . .
Etenim genus fumus, ÂSlor. xvii. 28. Cy eft divine
fraternité entre les hommes , fratres enim fumus.
Doneques à celle voix moyenne d’amoureufe pitié, ou
pitié 3 fc doyvent accorder les autres quatre voix, afin
que le Canticordum foit vray Concordum, non Difcor-
maximus
* , dum: car puisque elles feront d’accord à celle unité,
ejl in fin e , & quod pnecipiti via rettum deferit ordinemn comme à une teneur, 6c à une fin, tout demeure en
_v_< , « . J ^ . . . 7 _ • .
Utos non habet exitus
S. Ta peticion eft raifonnable: car lân lavoir la lettre
, on ne pourrait bien ordonner fon chant. Caufa
formalis formatur in materia & in fine, Tu demandes
icy la caufe materiele 6c la finale de noftre chant 3 fi
dy que la matière, ou la lettre de noftre chant, eft
accord 6c en armonie, Que. dicitur quafi armonia, id ejl
ad unitatem concordia , & fit unifonttm five monocordum à
monos ,unum.
M. Par cequetumedeclaires la caufe de l’armonie
melodieulè de ton Canticordum , je congnois la caufe
de mon' defeort ou Dijcordum , car je n’ay point une
J.C. noftre Sauveur principalement, 6c toute la be- principale pitié à Dieu 3 Ançoys domine en moy cupi-
noite Trinité en unité 3 car toute aultre chofecreéne dité ou iniquité, pour dire vérité: fi n’eft pasmerveil-
0» rW «||~ 1 ^ - fo fe je ne puis ordonner mes affeélions, quant je n’ay
fe doit chanter, fenon à la louange de Dieu. 1 Cor. x.
3 1 . Omnia in gloriam D e i facite. Et par ainfi nous
avons la caufe finale de noftre chant : nous avons aufli
la principale caufe efficient 3 mais la caufe formale eft
la grace de Dieu, qui donne bon vouloir au cuer, 6c
le fait bel 6c plailànt à Dieu, 6c bien en amouré6c na-
point une certaine teneur. Cor impii quafi mare fervens
quod quiefeere non potejl, Ifai. L V I I . 2 0 . E t Non aliter
durarequeunt res, nifi caufa refluant qua dédit ejfe.
S. O fituvouloies uferdelamerveilleufe nuance qui
, fe puet faire, 6c fe fait ung chafeun jour de fàinte 6c
vre de fon amour, ou charité 3 Cant. iv.p. Fulnerajli fàulfe mufique, à la vraye 6c certaine 3 defàulfe joye à
cormeum, & vulnerata Charitate ego fium. Sy eft dit no- vraye 3 de faint efpoir à bonne elperance5 pareille-
tre chant nouvel, pour ce qu’il eft de chofes éternelles, ment de mauvaife paour 6c de doleur en bonnes 3 6c
flip toutes idez nouvelles en pardurablc etemitè, celle nuance ne fe puet faire fans la quinte note que
f l novum fub f ile . Eccle. 1.10. nous difons pitié. Pietas ad omnia valet. 1. Tim. rv. 8.
M. J e commence voir la difference de ton chant 6c M. Expofe moy la manière de telles nuances, quia
u mien, felon les quatre caufes: car la lettre 6c la fin mut aciones fecit periculofe.
c”ant n’eft pas Dieu principallement, mais leD S. Voulentiers, 6c pour exemple je te reciterayce
* > bien
rfen-
____________ x ------------------ pourquoy. Jintens £C oy quu tanoit iouvent pour
quafimortuus f it d corde. vaincre, ou oller, ou muer celle trifteflè. Il comv
ul * U mon.^res kicn que tu as cler engin, fe tu le mençoit tantoll penfer à là mort, 6c à la briefté de
0 oyes appliquer 6c donner à noftre canticordum. celle vie, puis à fes pcchiés, puis aux peinesd’enfèr,
I i i 3 puis