
la navigation indigène, elle se borne encore au cabotage et perd à peine de vue les rustiques
fanaux des côtes : les lois de l’empire, qui règlent jusqu’au mode de construction des jonques,
ne leur permettent.pas détenir la haute mer.
Le commerce de cabotage, dont le port de lliogo est le centre, se trouve presque tout
entier entre les mains des armateurs d’ôsaka.
Cette grande et antique cité n’est qu’à huit heures de marche de lliogo. Sa situation sur
le delta du fleuve Yodo-gawa, qui se divise en cinq ou six bras vers son embouchure, a
facilité, dans la ville même, l’établissement d’un réseau de canaux navigables, sur lesquels
sont jetés une multitude de ponts cintrés. Aussi Osaka est-elle surnommée la Venise du
Japon. Les palais de la noblesse occupent les quais qui longent le bras principal du fleuve.
Tout le reste de la ville se compose de maisons et de magasins appartenant à la classe marchande.
A peine y rencontre-t-on çà et là quelques vieux temples plus ou moins délabrés.
L’un d’eux, à l’extrémité du faubourg de l’Est, a été mis par le gouvernement du Taïkouri
a la disposition des ambassades étrangères. Une citadelle d’un mille de circuit domine la
partie Nord-Ouest de la cité, et commande la route impériale qui se dirige sur Iiioto.
La ville d’Osaka ne compte pas moins de sept cent mille habitants. Longtemps elle a
servi de résidence aux Mikados (de l’an 744 à l’an 118b de notre ère). Ils eussent dû,
semble-t-il, se trouver à l’aise au sein de cette population énergique, entreprenante, laborieuse,
à laquelle 1 empire devait principalement le développement de son commerce et de
sa prospérité. Mais ce n ’était plus l’époque héroïque où le Mikado, comme le doge de la république
vénitienne, montait sur sa jonque de guerre et remplissait en personne les fonctions
d amiral. On ne le voyait plus inspecter ses troupes du haut d’un brancard reposant sur les
épaules de quatre vaillants hérauts d’armes, ou ordonner des manoeuvres, du sommet d’une
colline, assis sur un pliant, et agitant de la main droite un éventail de fer. A Osakâ, le
Mikado, parvenu au faîte de la richesse, de la puissance et de la sécurité, se construit un
palais au contre d un parc spacieux, qui l’isole des bruits de la ville. Ses courtisans lui persuadent
qu il est de la dignité du petit-fils du Soleil de se rendre invisible à la tourbe de ses
sujets et d abandonner aux princes et aux favoris qui l’entourent les soucis du gouvernement,
le pénible commandement de la flotte et de l’armée. La vie du daïri est assujettie
aux lois d un cérémonial qui en règle les moindres détails, les plus petits mouvements, et
qui trace autour du souverain comme un cercle infranchissable pour toute autre personne
que les gens de la cour. Le pouvoir impérial ne jette plus que de rares lueurs sur la nation.
La bourgeoisie, déçue dans ses espér&ces, lassée du régime arbitraire des favoris, ose
enfin élever la voix, et ses murmures pénètrent jusqu’aux oreilles du souverain. Celui-ci
ne convoqua pas d’assemblée de notables, mais il institua des bureaux où l’on devait recueillir
dans des cahiers les plaintes du peuple. Les courtisans, convaincus que la dynastie
des petits-fils du Soleil courait à sa perte, prirent le parti de se transporter avec leur empereur
à Kioto,, petite ville de l’intérieur, à cinquante kilomètres au nord d’Osaka. Us réussirent
à en faire la résidence permanente des Mikados et la capitale définitive, la miako de
l’empire.
En abandonnant la populeuse cité bourgeoise, ce grand centre de commerce, d’industrie
d’activité intellectuelle, indépendante du daïri, ils obtenaient le double avantage de
couper au souverain toute communication avec le peuple et de mouler, pour ainsi dire. la
nouvelle capitale selon leurs goûts et au gré, de leurs passions^
Kioto est située dans une plaine fertile, ' ouverte au Midi et bornée au Nord-Est par
une chaîne de collines verdoyantes, derrière lesquelles s!étend un grand lac, que l’on appelle
indifféremment lac d’Oïtz ou d’Oumi, du nom des deux principales villes de ses rives.
Il passe pour offrir quelques-uns des plu*s beaux points de vue du Japon. Les eaux d une
douzaine de rivières découlant des montagnes dont il est entouré, l’alimentent sans cesse
et donnent naissance à l’Yodo-gawa, qui baigne la partie méridionale de Kioto, et, après
un cours de vingt-cinq lieues de développement, se jette dans la mer intérieure, au-des-
sous d’Osaka.
LE LAC D’OÏTZ, PRÈS DE KIOTO.
Deux affluents de l’Yodo-gawa prennent leur source au Nord de la çapilale et en longent
les murailles, l’un à l’Orient, l’autre à l’Occident. Ainsi Kioto est complètement
entourée d’un réseau d’eaux courantes, qui se prêtent aux travaux d’irrigation des rizières
aussi bien qu’à l’établissement de canaux dans les rues de la ville ou d’étangs dans les
parcs impériaux.
On cultive dans ses environs le riz, le sarrasin, le froment, l’arbuste à thé, le mûrier, le
cotonnier et une immense variété d’arbres fruitiers et de plantes légumineuses. Des bosquets
de bambous, de lauriers, de châtaigniers, de pins et de cyprès, couronnent les collines.
Les sources jaillissantes y abondent. Des milliers d oiseaux, le faucon, le faisan, la huppe,
les oies, les canards, les échassiers de toute espèce, animent les campagnes. La contrée de
Kioto est réputée dans tout le Japon pour la douceur de son climat. C’est aussi l’une des
parties de l’empire qui sont les moins exposées aux ouragans et aux tremblements de terre.