
rizières, de toutes les terres arables que les habitations n’ont pas encore envahies,^
Celles-ci se composent d’une multitude de chétives demeures habitées par des
pêcheurs, des cultivateurs, de petits artisans, des marchands en détail, des officiers du
dernier rang et dès restaurateurs de bas étage.
Quelques résidences seigneuriales rompent l’uniformité des constructions en bois
par les lignes monotones de leurs longues murailles blanchies au lait de chaux.
Les bonzeries et les*temples sont clair-semés partout ailleurs que dans les deux
quartiers de la baie. A lui seul Takanawa en possède près de trente. Mais la dévotion doit
s’ètre retirée vers le Nord de la ville ; car c’est parmi ces temples que le gouvernement a
pu choisir sans inconvénient les bâtiments nécessaires à la réception des ambassades et
à l’installation des légations étrangères.
Les ambassades que le Taïkoun a reçues,- depuis 1858, se sont généralement présentées
par la voie de mer devant sa capitale.
On se figure sans doute, en Europe, que leur apparition à bord de grands bâtiments
de guerre et leur débarquement au bruit des salves de l’artillerie n’auront pas manqué
d’offrir aux Japonais un spectacle des plus imposants. En réalité, je crois que si elles se
sont proposé de donner à leur entrée à Yédo un caractère de solennité, elles ont dû marcher
de déception en déception.
Le voyage d’abord, la traversée de Yokohama à Yédo, est propre à dérouter toutes
les idées que l’on peut se faire des approches d’un port de mer qui compte près de deux
millions d’habitants. La distance que l’on franchit jusqu’au mouillage de la capitale est de
15 milles-hautiques environ. 11 semble que Ton devrait, sans interruption, croiser ou'
dépasser une multitude de jonques allant et venant sur cette unique route maritime de
l’immense cité. Il n’en est rien : à la sortie de la rade de Kanagawa, la mer est presque
déserte; et au delà des plages sablonneuses de Kawasaki, ce n’est que le nombre croissant
des barques de pêcheurs qui annonce la proximité de Yédo.
Au Japon, en effet, il y a absence complète de commerce par ef(u sur les côtes du
Grand Océan ; dans le golfe de Yédo cependant, quelques jonques fontje cabotage, mais
elles ne dépassent guère la limite de la première ligne de douanes : elles s’arrêtent à
■Uraga, d’où leur cargaison s’expédie à la capitale sur les flancs des,chevaux de somme.
Le Tokaïdo et d’autres chaussées de moindre importance sont donc lès'vraies artères de
l’alimentation de Yédo, et il y règne une animation d’autant plus grande que la voie de
la mer est plus délaissée.
Ce n’est pas tout : non-seulement nos bâtiments de guerre font la traversée de Yédo
sans attirer l’attention d’autres spectateurs que les pauvres pêcheurs de la baie, mais ils
sont contraints,, en raison du peu de profondeur de la rade, de jeter l’ancre à deux ou
trois milles au Midi delà capitale, tout à fait hors de portée de la vue des-citadins. On comprend
que l’effet des saluts de mer, à une pareille distance, ne doit pas être très-majestueux.
Quant aux balteries indigènes, dont les abords de Yédo sont hérissés, aucune
d’elles ne répond aux salves étrangères.
Six forts, défiguré polygone, construits sur pilotis en Jravers de la baie, à quelques