
CH A PITR E XXX
L A C L A S S E D E S M É D E C I N S
Vers le milieu du jour, pendant la saison chaude, les rues de Yédo deviennent désertes;
les rives des canaux sont jonchées d’embarcations vides, amarrées sur les grèves
que le reflux laisse à découvert. Aucune clameur, aucun bruit ne s’élève du sein de la
grande cité. Si l’on distingue encore, çà et là, tantôt un voyageur, tantôt une couple de
pèlerins, hâtant le pas pour arriver à leur étape de midi, on les voit cheminer en silence,
la tête baissée et lès yeux fatigués de l’éclat de la route. Cependant les rayons du soleil
tracent de grandes zones lumineuses et y dessinent les contours des ombres épaisses qui
tombent des larges toitures sur les dalles des trottoirs, ou des arbres centenaires sur le
gazon des promenades et des bosquets sacrés.
Le peuple des rues et des canaux s’est retiré à l’abri des hôtelleries ou du toit domestique,
dans le profond réduit des pièces du rez-de-chaussée, pour y consommer le
principal repas de la journée* et pour s’abandonner ensuite, pendant quelques heures,
au sommeil.