
de sujets coloriés, de découpures de feuilles d'or ou de bandes de papier argefité; on en
remarque aussi qui sont faites pour certaines spécialités, telles que le narné, petite pâtisserie
pour les enfants, et les fruits de mer, sucreries aussi charmantes de formes que de
couleurs, représentant une infinie variété de moules et de coquillages.
Cependant, pour rendre justice au discernement du bourgeois de Yédo, il .faut ajouter
que cè n’est point dans la fabrication des bonbonnières qu’il permet aux ébénistes de
déployer toutes les ressources de leur art. De plus nobles.sujets ^’offrent à leur émulation :
tantôt ce sont des boîtes pour l’encens destiné aux cérémonies publiques ;ou au culte
domestique ; tantôt des cassettes renfermant tout ce qu’il faut pour l’application des moxas
ou pour l’opération de l’acuponcture. Et encore réserve^t-on les plus admirables travaux
•des mosaïstes, c’est-à-dire les miniatures en laque et en paillettes de nacre , représentant
des oiseaux, des fleurs et des arbres en fleurs, pour les. boîtes à médicaments, sorte de
tabatières à quatre ou cinq compartiments superposés, que l’on soulève ou que l’on fermé
au moyen de^deux cordonnets de soie, et qui contiennent ordinairement des pilules opia-;
cées, de la thériaque, de la poudre d’huile de menthe et de la poudre de sucre blanc.
Le bourgeois porte sa boîte médicinale à la ceinture, avec sa pipe et sa blague à tabac ;
et quand il en est besoin, il la fait garnir, à son gré, sans ordonnance du médecin. 11
ne lui est pas permis cependant de pénétrer dans la phprmacie. Le patron travaille avec
ses aides sous les yeux du public, mais protégé par une grille en bois laqué, devant laquelle
les chalands attendent patiemment dans la rue qu’il lui plaise de les servir et de recevoir
leur argent à travers les barreaux de son sanctuaire.
MANCHE DE COCTEAU.
ENTRÉE DE JARDINS A MYASKI (YÉDO).
CHAPITRE XXXVIII
Les peuples de civilisation chinoise ne possèdent rien de semblable à la bienfaisante
institution sémitique d’un jour de repos, revenant régulièrement à la suite d’une certaine
série de journées de travail. Ils ont des fêtes mensuelles dont les classes ouvrières profitent
communément fort peu, et une semaine entière, la première de l’année, pendant
laquelle, tous les travaux étant suspendus, la population des villes et des campagnes se
livre aux divertissements qui sont à sa portée, chacun les choisissant selon sa position sociale
et les ressources dont il peut disposer.
Le bourgeois de Yédo et en général l’artisan, le fabricant, le marchand japonais, ont
vécu, jusqu’à l’arrivée des Européens, dans les conditions économiques les plus exceptionnelles
du monde. Ne travaillant que pour la consommation intérieure d’un pays très-
favorisé de la nature, assez grand et assez cultivé pour suffire à tous ses besoins, ils ont
goûté pendant des siècles les charmes d’une vie à la fois modeste et facile. Il n ’en est plus
ainsi. J ’ai assisté au& derniers jours de cet âge d’innocence, où, sauf quelques gros négo