
pas d’accord sur.le nom qu’il faut leur donner; il n’est pas rare au Japon que telle île
ou telle localité ^oit désignée tantôt par son nom propre, tantôt par un surnom, une
épithète distinctive. La difficulté de s’entendre avec les interprètes et les pilotes indigènes
augmente encore les erreurs. Quant aux interprètes, leur prononciation, ainsi
que leur orthographe, varie considéràblement selon qu’ils ont appfis l’anglais ou le
hollandais £ et quant aux pilotes, chacun d’eux parle le dialecte de sa province. Les uns
et les autres, très-exacts dans l’accomplissement de leurs devoirs, sont également ingénieux
à éluder les services qui n’auraient pour effet que de fournir un aliment à l’esprit
d'investigation des Occidentaux. Enfin les traités eux-rnèmes entourent d’obstacles presque
insurmontables l’étude nautique ou topographique des divers archipels de l’empiré. Nulle
partf en dehors des ports ouverts aux nations contractantes, il n’est permis aux navigateurs
étrangers ni de descendre à terre et d’y faire des installations pour lever des plans,
ni de procéder à des sondages en vue des côtes, sauf lorsqu’il y a nécessité. Plus d’une
fois, des embarcations qui tentèrent de contrevenir à cette dernière défense, ont essuyé le
feu des canons japonais. Toutes les passes de quelque importance sont^ protégées par des
forts ou par des batteries couvertes. Aucun port n’est accessible aux étrangers, si ce n’est à
titre de refuge, dags le cas de réparations urgentes ou d’autres « besoins» des navires ; et
l’équipage, à moins d’autorisation spéciale, doit constamment rester à*'bord'.
I Nous sortîmes de notre refuge de Taské, le 21 dé grand matin, non sans de longues
et prudentes manoeuvres, que les insulaires, montés sur des barques, suivaient de loin avec
une vive curiosité.
Sur toute la ligne que nous parcourûmes dans cette journée, l’on remarqué un grand
mouvement local de bateaux de pêche et de jonques de commerce^-Nous avons à notre
droite, sur la terre de Kiousiou, les belles et riêhes provinces des seigneurs de Fizen et de
Tsikouzen. Ce dernier réside à Foukouokà, sa capitale, ville maritime peu connue, mais
qui n’a pas moins de 100,000 habitants.. Outre le cabotage des ports japonais, elle cultive
des relations commerciales avec la grande île de Tsousima, au nord-ouest de Kiousiou,
et avec la Corée. Parfois aussi des jonques ^coréennes ou chinoises êe montrent dans
les eaux de Nagasaki de Tsikouzen, ou de la mer intérieure. La nature êt la valeur
de leurs cargaisons sont assujetties ¿¡à de sévères règlements de douane et de police,
émanant des autorités japonaises. Telle est néanmoins l’importance des transactions
nationales ou internationales de ces parages ignorés du reste du monde, que l’amiral Hope,
ayant relevé le nombre de jonques qu’il a rencontrées dans sa traversée de la mer intérieure,;
est arrivé au chiffre de 1,500.
Les bateaux de pêche sont innombrables. On les découvre tantôt amarrés prèé des
îles, tantôt cinglant en pleine mer à l’aide d’une grande voile taillée en carré long.
Enfin l’un des traits les plus caractéristiques des tableaux que présentent lès archipels
japonais, c’esi la quantité prodigieuse d’oiseaux qui les animent de leurs cris ef de
leurs évolutions. Ici, des aiglés ou des éperviers planent au-dèSsus des brisants; là,
des grües détalent pesamment d’un bouquet de cèdres-; plus loin, des cormorans et
dés hérons pèchent parmi les roseaux et da*ns les anses paisibles où refluent íes ondes dés
^courants ; partout les oies, el les canards sauvages flottent sur les vagues ou traversent
les airs par troupes disciplinées, tandis que lès mouettes et les hirondelles dé mer tourbillonnent
par essaims autour des promontoires et des écueils.
Les Japonais en général respectent des oiseaux sauvages* Ils ne consomment que
la volaille de basse-cour. La race gàlline, qûi sè rencontre sous "toutes les latitudes,
erôfepté sous la zone glaciale, est très-vigoureuse au Japon, où elle présente d’intéressantes
variétés.maintenant acclimatées et bien connues en Europe, Il paraît même qu’il s’est fait
de vieille date, dans les deux pays, des échanges ejt des croisements d’espèces. L’on
demandait à des ambassadeurs japonais s’ils reconnaissaient, pour en avoir vu dans
leur patrie, une sorte de poules qu’on leur montrait dans un jardin d’acclimatation
« Certainement, répondirent-ils*, c’est l’espèce que nous nommons les poulet de
Hollande. »
Les insulaires de la mer intérieure échangent volontiers, une poule contre une bouteille
vide. J ’ai remarqué maintes fois sur les marchés du Japon que les bouteilles
d’Europe sont l’un des articles les plus recherchés du peuple, et cela se conçoit dans
un pays où il n’existé pas de verreries. Une circonstance qui tend à y renchérir cet