
CH A PITR E VIII
LES ORIGINES DU P EU P L E JA PO N A I S
Plus d’une fois, en observant les moeurs des Japonais, je me suis demandé d’où peut
venir ce peuple si intéressant, si original, si différent de ses plus proches voisins, et,
comme tant d’autres voyageurs que le même problème n’a pas moins obsédés, j ’ai dù
conclure que la sciencè n ’est pas encore en état de le résoudre.
Il offre les complications les plus propres à piquer la curiosité. La première supposition
qui se présente à l’esprit, c’est que l’arcbipel du Japon doit avoir été peuplé par
une émigration tartare, et j ’admettrai pleinement, en effet, qu’il y ait eu des relations très-
anciennes entre la Corée, le nord du Japon, les Kouriles et même le Kamtschatka ; car
cette chaîne d’îles qui s’étendent du continent asiatique au continent américain dans les
régions septentrionales du Grand Océan, nous apparaît comme les arches démantelées
d’un pont gigantesque, et réveille naturellement l’idée d’un passage qui se serait établi
de l’une à l’autre au moyen de la navigation, même la plus primitive. Mais ce que nous
rencontrons en remontant aux origines du peuple japonais, ce n’est point la horde nomade
et conquérante, ce sont les paisibles tribus de pêcheurs et de chasseurs répandus, sous
le nom d’Aïnos, expression indigène qui signifie « les hommes », le long du littoral et
dans les îles de la partie septentrionale du Grand Océan. Or, les Aïnos n ’ont pas les yeux
obliques et peu fendus, ni les pommettes saillantes, ni la barbe clair-semée des Mongols
: c’est une race d’hommes trapus, à grosse tête ronde, et ils se distinguent tout