
papier mâché, qui jouissent de la plus grande faveur dans les ménages japonais. Elles
n ’ont que la lète et le buste, l’un e t‘l’autre enveloppés d’un manteau écarlate, et l’on dit
que, sous cette forme, elles doivent perpétuer de génération en génération la mémoire
d’un grand prêtre du Bouddha qui s’était totalement usé les jambes dans la pratique de ses
dévotions. Ces poupées sont inversables, ou plutôt reprennent toujours leur équilibre,
comme nos diablotins de sureau. 11 y en a de toutes dimensions. Les escamoteurs s’en
servent en guise de muscades dans leurs tours de gibecière.
Plus loin deux ouvriers, armés chacun d’un petit marteau et d’un poinçon, s’occupent
à ciseler des pipes en métal, et un troisième à en tarauder les tuyaux de bois, au moyen
d’une simple planche percée de six trous d’inégale grandeur, sertis en spirale de fer.
Là un fabricant d’arcs en expose un instant les bois à la flamme d’un feu de copeaux,
pour leur donner le pli nécessaire; tandis que son camarade arrange avec un peu de colle
et de ficelle les houppes de soie,'de crin ou de papier, que l’on arbore au sommet de longues
piques pour signaler de loin le rang ou la nature des fonctions d’un chef civil ou militaire.
L’atelier voisin est celui d’un vieux bonhomme q u i, sans autre instrument qu’une pince,
ajuste aux lanternes de papier leur monture de cerceaux et de crochets en fil de fer.
A l’entrée d’une ruelle latérale,“ une demi-douzaine d’ouvriers font des socques et des
sandales en bois. Ici le travail est divisé; chaciin a sa spécialité. Celui-ci, armé d’une
scie à main, coupe les bûches en tronçons égaux, que le second refend en forme dè semelles
et de planchettes transversales ; le troisième rabote et arrondit les socques massifs,,
et les simples sandales; le quatrième y pratique les trous par où l’on fait passer les
cordons de paille. La vrille dont il se sert, descend et monte à volonté, sous l’impulsion
qu’il lui imprime des deux mains au moyen d’une baguette horizontale, aux extrémités de
laquelle sont attachées deux courroies qui s’enroulent et se déroulent tour à tour sur l’axe
de ce singulier instrument. Enfin les autres ouvriers sont employés à vernir les chaussures
de luxe ou à préparer par dizaines de paires les paquets qui doivent être transportés dans
les magasins de détail.
Cependant il me restait à voir la plus originale des boutiques du quartier, celle d’un
horloger fabricant de cadrans solaires et d’horloges rivales des « coucous » de la forêt
Noire, avec cette différencè, qu’elles sont établies sur le système des heures mobiles, qui
croissent et décroissent selon la marche des saisons.
L’artiste, accroupi devant une petite enclume fichée en terre, fait toutes les parties du
mécanisme de son chronomètre, à l’exception du timbre qui sonne les heures. Ses outils,
répandus autour de lui sur les nattes qui recouvrent le sol, se composent d’un marteau, de
deux ou trois limes, d’une couple de pinces et de quelques forets.
Quant aux cadrans solaires, qui sont des instruments portatifs, de la forme et de la
taille d’un gros marron, il n’en soigne que l’installation intérieure; la boîte se fabrique
chez les ouvriers‘‘en cuivre. On l’ouvre comme une noix dont' les deux coquilles seraient
unies par une charnière. Au centre de l’une des demi-sphères est fixé un petit gnomon,
dont l’ombre atteint la surface plane de la périphérie, et celle-ci est divisée en douze parties
égales, selon le système japonais des douze heures uniformes numériques, qui en valent
chacune deux des nôtres. L’autre moitié de la petite boîte contient dans une cavité cylindrique
une aiguille aimantée, oscillant librement dans le plan horizontal. Âu-dessous de
l’aiguille se trouvent quatre caractères distants les uns des autres de quatre-vingt-dix de-,
grés, et désignant les quatre points cardinaux. La surface plane circulaire de cette demi-
sphère est divisée également en douze parties correspondant à celles du côté opposé et
marquées des mêmes nombres, mais dans l’ordre inverse. Pour faire usage du cadran
solaire, il suffit de l’orienter par le moyen de l’aiguille aimantée, et alors la direction de
l’ombre du petit style permet d’estimer l’heure, plus ou moins approximativement.