
aux mouches, aux larves, aux insectes, et prélevant sa récompense sur les grains échappés
des sacs de céréales que l’on embarque dans le voisinage.
Il y a sous notre toit toute une colonie de pigeons, venus l’on ne sait d’où, et vivant
dans la plus complète indépendance. Les corbeaux me semblent être d’une espèce particulière
à la Chine et au Japon; ils sont de médiocre grosseur, et leur croassement
diffère un peu de celui auquel nous sommes habitués en Europe ; on pourrait le décomposer
en deux syllabes distinctes : Kd-wd, Kd-wd, prononcées d’un ton guttural. Les
corneilles ont un cri plaintif qui ressemble à la voix humaine. Le sifflement des aigles
et des éperviers est du plus bel effet quand il s’allie au bruit des vagues et aux sons de
harpe éolienne que les brises de la mer emportent en agitant les hautes branches des
cèdresv .
Tous ces hôtes ailés de Benten sont très-familiers. Les éperviers perchent sur la
vergue du mât de pavillon ou sur notre toit, qui leur fournit probablement quelque
cachette pour leurs provisions de poisson mariné: Les. pigeons et les corbeaux, quand ils
sont dans los allées du jardin en même temps que je m’y promène, ne prennent point
leur vol, mais .se .tirent seulement de côté pour me laisser passer.-$£
Quant aux oiseaux que nous ne voyons qu’à distance, ce sont d’abord des troupes
innombrables de mouettes et de goélands, volant autour des navires en rade, ou achevant
de dépouiller les nattes d’emballage que l’on a jetées à la mer après avoir chargé les provisions.
de bouche des équipages ; plus loin encore, dans les anses paisibles du bras de mer
qui nous sépare du village de Kanagawa, en face de mes fenêtres, ce sont des bandes de
canards et d’oies sauvages, qui trouvent leur pâture parmi les roseaux: au coucher du
soleil, elles vont chercher leur gîte sur les lointains canaux des rizières, où elles se rendent
en décrivant dans les airs des figureè géométriques. La troupe fatiguée poursuit silencieusement
sa route ; seulement, par intervalles, il s’échappe de son sein deux ou trois cris
prolongés, semblables au commandement d’un chef ralliant des soldats attardés.
Parmi les oiseaux solitaires, il n’en est pas de plus pittoresque que le héron guettanl
patiemment sa proie, l’oeil fixé sur l’onde limpide, le corps en équilibre sur une seule de
ses jambes, tandis que l’autre est repliée sous son aile. 'L’éclatante blancheur de son
plumage se détache sur un fond de roseaux et de hautes feuilles de nénufar. Quelquefois
on le rencontre sous un dais de branches de pins ou de saules pleureurs ; toujours il
semble avoir l’instinct des harmonies naturelles qui conviennent à sa mélancolique
existence.
L’impression que produit la grue est très-saisissante. Lorsque ce bel oiseau apparaît