
passer entre deux'images de granit représentant la malicieuse divinité accroupie, la queue
retroussée, le museau en l’air, mais de son oeil oblique poursuivant quiconque s’approche
du sanctuaire.
Les fidèles s’inclinent respectueusement, font leurs ablutions, jettent leur pièce de
monnaie dans le tronc et s’agenouillent, pour prier, sur les marches de la chapelle.
Parmi les nombreux édifices disséminés dans l’enceinte d’Asaksa-téra, une pagode à
cinq étages symbolise la suprématie du bouddhisme sur lès autres religions.
Quant au bâtiment central, c’est un énorme édifice quadrangulaire, dont la charpente
peinte en rouge est surmontée d’une toiture colossale recouverte de tuiles grises. Les soubassements
seuls sont en pierre. Ils supportent une galerie spacieuse, exhaussée de quelques
mètres au-dessus du sol. Dans l’intérieur du temple, le plafond repose sur des colonnades
de piliers rouges, taillés à angles vifs ; les parois de la nef sont ornées de peintures se
détachant sur un fond d’or. Des images encadrées, des statuettes, des ex-voto, des planches
en laque noir rehaussé d’inscriptions en lettres d’or, se montrent de tous cotés, sur les
panneaux, sur les colonnes, dans des chapelles latérales. L’une de ces dernières renferme
la galerie de portraits des plus célèbres courtisanes de Yédo, ainsi que d’autres
tableaux assortis à ce sujet.
Ce n’est pas assez que les bonzes de Miôdjin et les prêtres de Sannoô invitent des
courtisanes à se produire dans des processions religieuses périodiques: il y a chaque
année dans l’enceinte de Sin-Yosiwara une foire accompagnée d’une parade, d’une exhibition
générale des cinq mille privilégiées qui habitent ce quartier; et les bonzes d’Asaksa
téra se font délivrer régulièrement les portraits des reines de la fête pour les suspendre,
comme dans un panthéon, aux parois de leur sanctuaire.
Le choeur du temple, sombre et enfumé par la vapeur de l’encens, ne présente, à ce
qu’il m’a paru, aucune particularité remarquable, si ce n ’est le maître-autel, dont l’idole,
Quannon symbolisant la mère du Bouddha, apparaît accroupie sur le lotus, et ornée de
l’auréole, derrière un grand treillis de fil de fer. L’effet mystérieux de cette combinaison
touche médiocrement l’assistance. Des flots de peuple entrent, sortent, s’agitent tumultueusement
dans la nef ; céllè-ci n ’ëst pàs trës-spâciëusë, et une haute barrière en bois
sculpté, semblable à un jubé gothique, la sépare du choeur, où les bonzes, chargés de
lourds vêtements sacerdotaux, officient avec accompagnement de gongs et de tambourins.
Quelques fidèles jettent à leurs pieds, par-dessus la barrière, de la monnaie de fer enve-,
loppée de papillotes blanches ; d’autres achètent des cierges qui leur sont offerts par le
sacristain. En dehors des heures du culte, une grande caisse scellée en deçà de la grille
et communiquant avec les souterrains du temple reçoit les dons des visiteurs.
L’entrée solennelle du grand prêtre dans le choeur fait un instant diversion à la monotonie
du service. Ce majestueux personnage pose sur sa robe blanche un manteau rouge
à capuchon pointu et une sorte d’étole en soie verte à carreaux. Il est suivi d’un jeune
novice qui remplit auprès de lui les fonctions de frère servant, et que l’on prendrait, au
premier abord, pour une jeune fille, tant son visage, son teint et sa toilette trahissent
des moeurs efféminées. A l’élégant édifice de sa coiffure en cheveux il ajoute l’apparat
d’un costume étrange : pantalon blanc bouffant, ceinture d’étoffe blanche à larges noeuds,
petite veste de soie verte à longues manchespendantés.doublées;de satin blanc; c’est
ainsi que, pas à pas, il accompagne son maître pour lui offrir, au premier signe, une
tasse de thé contenue dans un réchaud portatif dont il tient le manche de ses deux
mains.
En présence des ministres actuels de la religion du Bouddha, l’on ne peut s’empêcher
de faire un retour mélancolique sur le pieux réformateur, dont ils osent se dire les disciples.
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Le pentalogue bouddhiste est conçu en ces termes :
I o Tu ne tueras point;