
PR EM IÈ R E S LEÇONS DE COMMERCE,
leur poids équivalent de monnaie japonaise de même nature, les négociants étrangers
échangeaient à la douane japonaise 100 dollars contre 311 itzibous formant exactement
le poids des 100 piastres. Or, Æomme un dollar mexicain est égal en poids à 3 itzibous,
chacun de 1,600 tempos, on recevait 4,800 tempos pour un dollar ; et comme 6,000 a
6,800 tempos font un kobang, on achetait un kobang pour environ 1 dollar 1/4, tandis
qu’il avait une valeur conventionnelle de 10 florins de Hollande ou de 3 dollars 3/4. On
arrivait donc à mettre en circulation au Japon le dollar de 5 fr. 30, valeur intrinsèque,
au cours.de 1S fr. 75 ‘.
Dans les transactions sur marchandises, le vendeur étranger obtenait de l’acheteur
japonais que celui-ci le payât en kobangs. Le kobang, estimé valoir environ 4 dollars,
était donné en payement au cours de 3 itzibous par dollar, c’est-à-dire de 12 itzibous,
estimation du poids, tandis que lé cours conventionnel du kobang était : 1 kobang égale
1 1 itzibous. Ainsi l’or, sur le marché japonais, valait quatre fois seulement son poids
d’argentf au lieu de quinze ou même de quinze fois et demie, comme partout ailleurs.
L’agiotage entre les deux marchés de la Chine et du Japon rapportant en fin de compte
un bénéfice de 60 à 90 pour 100, le moindre aventurier, n’eût-il que 10 dollars en poche,
pouvait s’établir à Yokohama et solder sa première journée par un gain de 30 dollars,
sans avoir fait autre chose que d’échanger son argent contre de l’or et cet or contré de
l’argent ; et de même, le dernier des brocanteurs pouvait, au besoin, se défaire de ses
marchandises à 50 pour 100 au-dessous du prix de facture, en réalisant néanmoins un
fort joli bénéfice.
/»/Les commerçants de Shanghaï encombrèrent le marché de Yokohama de piastres et
dé' marchandises simultanément. En un seul jour, trois navires américains venant de
/Shanghaï déchargèrent à la douane japonaise 1,200,000 dollars, plus de 7 millions de
vfrancs. Quant aux colis de toute nature qui arrivaient successivement de cette même
place, c’était le stock invendable du marché chinois, les marchandises que la guerre
empêchait d’écouler en Chine et que l’on jetait sur les quais de Yokohama pour s’en
débarrasser à vil prix, jusqu’à concurrence de la compensation que devaient offrir les
retours en kobangs. Il est à peine nécessaire d’ajouter qu’au bout de trois ou quatre mois
d’un semblable trafic toute notion de commerce normal et loyal s’éteignit sur le marché
japonais. Le prix de tous les articles de manufactures y avait baissé de 60 pour 100. La
passion de l’agiotage, la soif du gain, l’ivresse du jeu tournaient les têtes et régnaient
dans la colonie avec une fureur qui n’a été surpassée que par la fièvre de l’or dans
les placers de la Californie.
Conçoit-on l’impression que dut produire sur le-gouvernement et sur le peuple japonais
un pareil début de ces relations commerciahisrdpnt les ambassades de l’Occident
avaient fait le sujet de tant de brillantes promesseset de solennelles protestations ! Cependant,
sans affaiblir ni méconnaître le moins du monde ce qu’il y a de peu flatteur pour le
„commercé occidental dans le tableau que je viens ,de retracer, je ne puis m’empêcher de
1 G. Brennwald, Rapport général sur la partie commerciale de la mission suisse au Japon. Berne, 1865.
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