
D’autres servantes, d’une condition plus infime encore, les petites esclaves de revendeuses
ri de cabaretières de bas étage, rôdent, deuxà deux, dans l’ombre de fetides ruelles.
Mais ou se trouve le dernier degré de la misère abjecte? Faut-d en voir le type dans
la pauvre fille qui, pour le compte de sa logeuse, erre seule aux abords des ponts, toute
grelottante et à peine-décemment couverte de son unique vêtement de mince cotonnade?
ou doit-on le chercher dans le fond des abîmes de Sin-Yosiwara? C’est ce que la
police de Yédo pourrait dire avec une hideuse précision; car elle prélève son infâme
tribut et fait régner le code de l ’e s c l a v a g e féminin non-seulement sur la partie de la ville
qui ne connaît pas d’autres lois, mais dans toutes les hôtelleries et chez toutes les
logeuses dont l'établissement privilégié tolère la concurrence.
Or, puisqu’il n ’est permis à aucune des misérables de la rue de se passer ni *9e
s’affranchir d’un pareil patronage, il n’y en a pas une non plus qui échappe à la surveillance
de l’autorité. Le rôle de cette dernière ne va pas au delà d’une action purement
policière et fiscale. Elle ne fait rien dans l’intérêt de la santé publique. Les tentatives des
Européens dans les ports qui leur sont ouverts, ont échoué contre des répugnances
insurmontables d e là part des indigènes. D’année en année le mal s’étend dans toutes
les couches de la société et revêt de plus en plus les caractères d’un fléau national, d’une
immense calamité publique.
MAISON DE THÉ POUR LES CENS PAISIBLES.
CHAPITRE XLIX
A S A K S A T É R A
Plus de cent bonzeries, se composant chacune d’un nombre plus ou moins considérable
de bâtiments, tels que monastères, temples, pagodes, chapelles, maisons de thé et
boutiques, forment la base méridionale du quartier d’Asaksa-lmatô.
La plus grande et la plus illustre est celle de Quannon, divinité bouddhiste à laquelle on
attribue je ne sais-quel magique pouvoir d’intercession entre la terre et le ciel. La célébrité
de cette bonzerie éclipse si complètement tous les autres lieux sacrés du voisinage, que,
dans le langage du peuple, le mot d’Àsaksa-téra ne désigne jamais d’autre temple que celui
de Quannon dans le quartier d’Asaksa.
A l’extrémité septentrionale d’une place où il y a un marché permanent d’arbustes et
de fleurs, s’élève un lourd portail, orné de lanternes colossales. Deux des gardiens du cieL
géants de bois peints au vermillon, apostés à droite et à gauche de l’entrée principale,
défendent le passage et prélèvent sur chaque pèlerin le tribut traditionnel d’une paire d’énormes
sandales de paille. C’est sous leurs yeux que se fait pour le bas peuple, à la veille