
gables relient les uns aux autres les cours d’eau naturels et portent au coeur de la Cité,
ainsi qu’au centre et à toutes les extrémités du Hondjo, la circulation commerciale, l’animation
populaire, lë mouvement et la vie de l’immense capitale.
Dans le nombre des canaux qui rayonnent des fossés du Castel à la mer, il faut mettre
au premier rang' celui du Nippon-bassi, et en seconde ligne le canal du Kio-bassi, l’un et
l’autre au sein de la Cité marchande.
C’est du point culminant du Nippon-bassi, qui est un pont fortement cintré, que Yédo
se présente sous l’aspect le plus pittoresque.
En marchant vers le Sud, on a devant les yeux, à l’horizon, la blanche pyramide du
Fousi-yama; sur la droite, la ville est dominée par les terrasses, les parcs et les tours
carrées de la résidence du Taïkoun. Dans cette même direction et jusqu’à sa jonction
avec les fossés du Castel, le canal du Nippon-bassi est bordé, sur ses deux rives, de
nombreux entrepôts de soie, de coton, de riz et de saki. A gauche, au delà du marché
au poisson, la vue se perd sur les rues et les canaux qui aboutissent à l’Ogawa. Des centaines
de longues barques, transportant du bois, du charbon, des cannes de bambou, des
nattes, udes paniers couverts, des caisses, des tonnelets, des poissons énormes, parcourent
en tous sens les voies de navigation, tandis que les rues semblent être exclusivement
abandonnées à la circulation du peuple. On distingue, il est vrai, de temps en temps,
parmi la foule des piétons, tantôt un convoi de chevaux ou de buffles noirs pesamment
chargés, ces derniers décorés autour des cuisses de deux guirlandes de grelots, et tantôt
des charrettes supportant quatre ou cinq étages de ballots artistement empilés. Ces véhicules
à deux roues sont traînés par des coulies. Aucun autre bruit de voiture ne se fait
entendre. Le retentissement des socques de bois sur les trottoirs et sur le pont sonore, les
grelots des bêtes de somme et les timbres des quêteurs, les cris cadencés des coulies et les
bruits confus qui montent du canal, forment ensemble une harmonie étrange, sans analogie
avec la voix d’aucune autre cité. Car toutes les grandes villes ont une plainte qui
leur est propre. A Londres, c’est le sourd grondement de la marée montante; à Yédo,
c’est le murmure de l’onde qui ruisselle et s’écoule. Comme la vague suit la vague, ainsi
se succèdent les générations. Celle que j ’ai sous les yeux semble passer et disparaître,
emportant avec elle ce que des ancêtres lui ont légué de plus précieux : objets du culte,
anciens costumes, vieilles armes; lois séculaires, tout cela ne sera plus qu’un souvenir
pour la nouvelle société japonaise qui maintenant se forme à l’école de l’Occident.
L’Ogawa est l’àrtère principale des voies de communication de Yédoi
Le port dés jonques, à l’embouchure du grand fleuve, occupe tout l’espace compris
entre la petite île d’Iskltwa et la grande île triangulaire qui fait partie de l’arrondissement
du Nippon-bassi. C’èst au-dessus du canal de ce nom que le pont de Yétaï s’étend de
la région Nord-Est du triangle à la rive occidentale de l’arrondissement de Foukagawa dans
le Hondjo.
Sur l’un et l’autre bord la population est essentiellement plébéienne. A l’exception de
quelques yaskis de deuxième et de troisième classe, qui dominent le cours du fleuve, on
ne rencontre dans ces quartiers que des habitations de pêcheurs, de mariniers, d’artisans
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