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TAKANAWA ET ATAKOSTA. 335
sur tout l’espace qui s’étend de la rade au pied de notre colline, la vue ne sait où s’arrêter
: on dirait un océan de longues rues, de murailles blanches, de toitures grises.
Itien n’interrompt la monotonie de ce tableau, si ce n ’est, çà et là, quelques beaux
groupes d’arbres au noir feuillage, ou quelque temple dont le pignon surgit comme une
vague au-dessus des lignes onduleuses des habitations. Dans un quartier de notre voisinage,
une large trouée faite à travers les rues, comme si Une trombe y -avait passé,
signale la trace d’un récent incendie, et, plus loin, le sombre massif des f:ol!inés consacrées
à la sépulture des Taïkouns offre l’image d’une île solitaire dominant une mer
houléuse.
Le panorama du pavillon du Nord est encore plus uniforme,,' si c’est possible. Il
embrasse les quartiers spécialement habités par la noblesse, et il a pour limite à l’horizon
les remparts et les parcs touffus du Castel.
Les daïmiô-yaskis ou résidences seigneuriales auxquelles nous donnons improprement
le nom de palais, ne diffèrent entre elles que par leurs dimensions en étendue.
Les plus opulentes et les plus modestes présentent le même type d’architecture, le même
caractère de simplicité. Elles se composent d’une première enceinte continue de bâtiments1
réservés à une partie des serviteurs et des hommes dermes du prince. Ces bâliments
n’ont qu’un étage au-dessus du rez-de-chaussée, et forment un carré long, qui est toujours
entouré d’un fossé. Une seule toiture les recouvre, sans autre solution que le fronton
d’un portail pratiqué généralement au centre de chacun des côtés du parallélogramme.
Une seule muraille les protège, et le plus souvent elle n'offre d’autre issue sur la voie
publique que ce même portail. Quant aux fenêtres, elles sont en grand nombre, basses
et larges, régulièrement espacées sur deux lignes parallèles, et ordinairement fermées
par un grillage en bois.
A l’intérieur, un nombre plus ou moins considérable de maisons basses, divisées en
compartiments' réguliers, comme les casernes des yakouninea de Benten, sont échelonnées
en diagonale tout autour, ou du moins sur les deux côtés allongés des bâtiments
de ceinture. C’est là le campement des troupes seigneuriales.
Un ekpace libre le sépare d’une seconde enceinte grillée, qui contient la résidence
proprement dite.
Les dépendances du palais font face au quartier militaire. Les principales pièces
d habitation et la véranda donnent sur une cour intérieure et sur le jardin, qui est orné
d un étang entouré de frais ombrages. Tel est l’asile silencieux, inviolable, où le fier
daïmio se renferme, au sein de sa famille, pendant les six mois de l’année que les lois
de l’empire l’obligent de passer à la capitale.
Nous ne pouvons guère apprécier les conditions de résidence de la noblesse japonaise
que d après ce que nous en découvrons dans ce quartier vu à vol d’oiseau. Aucun Européen
•n a franchi le seuil d’un vaski japonais. Les ministres du Taïkoun, à l’exemple des seigneurs,
n’ont jamais admis dans leurs propres demeures la visite des ambassadeurs étrangers.
Les rapports personnels, d’ailleurs extrêmement restreints, s’entretiennent sous la
lorme cerémonielle d’audiences, qui ont lieu dans certains bâtiments de l’administration