
conduites naturelles dont l’excellence ne le cède à aucun produit de l’industrie moderne.
On l’emploie, au lieu du fil de fer, dans l’établissement de ponts suspendus. 11 y a
dans les montagnes de Kiojisiou un pont jeté d’une roche à l’autre, par-dessus un
profond abîme, au moyen d’un escalier suspendu, composé de gros tronçons de bambou,
alignés et superposés par couches dans le sens longitudinal. Les Japonais connaissent
les ponts de bottes de jonc recouvertes de planches pour traverser les lieux marécageux.
Ils passent de larges rivières sur des ponts de tonneaux entrecoupés de fascines et
assujettis par des tresses de paille. Ils franchissent les ravins escarpés sur des ponts
de corde, et même au moyen d’un seul câble le long duquel glisse une sorte de bac
aérien.
Dans un pays tel que le leur, où le Gouvernement n’entretient qu’une voie publique,
la grande route militaire du Tokaïdo, les habitants des campagnes, réduits à leurs propres
forces, rivalisent d’industrie pour établir, aux moindres frais possible, les relations vicinales
qui leur sont nécessaires. De là l’infinie variété des procédés qu’ils mettent en
oeuvre pour se créer des voies de communication et des moyens de transport par terre
ou par eau. L’un des plus curieux, au nombre de ces derniers, c’est l’appareil dont
se servent les femmes employées à la culture du riz, pour traverser des plaines
inondées. Quatre cuviers, attachés entre les branches de deux poutres mises en croix,
reçoivent autant de personnes et de provisions que cette singulière embarcation peut
en supporter, et deux des passagers la font cheminer à la pique.
Ce même génie de mise en oeuvre, qui sait tirer parti des moyens d’action les plus
simples, des instruments les plus primitifs, des procédés les plus élémentaires, se révèle
également dans les arts et dans les métiers des Japonais. Mais c’est là tout un coté
très-important, de leur vie sociale, qui nous échappe ou dont l’étude nous est rendue
fort difficile. Nous ne pouvons voir librement le peuple à l’oeuvre que dans les travaux
des champs et dans quelques échoppes de village. Ses chantiers dans les places maritimes,
ses ateliers et ses fabriques dans les villes industrielles, les conceptions artistiques
et les productions les plus originales de sa civilisation autonome, tout cela nous est
soigneusement caché par les mesures policières d’un gouvernement ombrageux, ht
cependant peu à peu la lumière se fait, et bientôt le jour viendra où, à cet égard aussi,
le Japon tinira par s’ouvrir aux investigations de la science.