
corporelles, ou la mort. Le bannissement peut atteindre les grands de l’empire et les
bonzes. Us sont relégués, selon leur rang, sur l’une ou l’autre des îles de déportation.
On dit qu’ils peuvent s’occuper dans leur exil à tisser des étoffes de soie.
Quant à l’emprisonnement, il n’est jamais dé longue durée, sauf pendant la
prévention. Le jugement peut bien y ajouter quelques semaines ou quelques mois, comme
j ’en ai vu un exemple à Yokohama, où le coskei d’un résident européen fut condamné
pour vol à une réclusion de trois mois au Tobé, résidence des gouverneurs de Kanagawa.
Il y était enfermé avec d’autres malfaiteurs dans une haute cellule se composant de quatre
murs blanchis à la chaux, surmontés d’un grillage en épais madriers; et il recevait journellement
pour son alimentation une boule de riz et un tempo, pièce de monnaie de quinze
L’ÉXÉCDTION PAR LE GLAIVE : DEUX SACS CONTIENNENT DÉJÀ LE CORPS D'AUTRES VICTIMES.
centimes, en échange de laquelle le geôlier lui fournissait du fruit ou quelque légume.
Mais généralement l’emprisonnement n’est que l’accessoire de la peine proprement dite,
qui consiste toujours en un châtiment corporel, tel que la marque et la fustigation.
Tout vol qualifié, d’une valeur inférieure à quarante itzibous, ou cent francs, comporte
la peine de la marque. Au lieu de l’empreinte au fer chaüd, on fait usage d’une sorte
de lancette pour pratiquer sur le bras gauche une incision de forme convenue, dont
on rend la cicatrice indélébile au moyen de la poudré à tatouer. L’opération se fait à la
fois dans deux pièces contiguës du bâtiment des prisons. Le condamné se tient agenouillé
dans la première, à côté d’une paroi à travers laquelle il passe, par un étroit guichet, le
bras gauche dans la seconde pièce, où un chirurgien exécute, avec tous les soins qu’exige
ce travail, la marque qui lui est indiquée par les termes de la sentence. De récidive en
récidive, un filou de profession, qui a la prudence de se borner aux vols de moins de cent
francs, peut arriver au chiffre de vingt-quatre marques, avec cette seule aggravation,
que les dernières sont appliquées sur le front, et que, à partir de la troisième, toutes les
autres sont accompagnées de la fustigation, La peine de la fustigation elle-même est
graduée jusqu’à l’éxtrême limite des forces du patient. Le médecin de la prison assiste le
misérable, lui tâte le pouls, et .donne au bourreau le signal de la clôture du supplice.
Tout malfaiteur qui retombe entre les mains de la justice après avoir été marqué
vingt-quatre fois, ou qui commet un vol dont la valeur dépasse quarante itzibous, est
condamné à la peine capitale. Le plus souvent on attend qu’il y ait trois ou quatre
exécutions à faire, et l’on y procède dans une cour de la prison, sans autres témoins que
les gouverneurs de la haute justice et leurs officiers. Chaque condamné est amené à son
tour en leur présence, les yeux bandés et le kirimon rejeté en arrière sur les épaulés.
On fait mettre le malheureux à genoux; quatre valets de bourreau, accroupis à ses côtés,
lui tiennent les pieds et les bras, et sa tête tombe sous le glaive éprouvé du maître des
hautes oeuvres. On la jette dans un baquet pour la laver et l’exposer ensuite avec les
autres, pendant vingt-quatre heures, sur l’une des places de marché de la Cité. Le corps,
immédiatement dépouillé et lavé, est enfermé dans un sac de paille ; et quand le premier
sic est attaché, Ion amène le second condamné, et les mêmes opérations se répètent,
jusqu’à ce que la tâche du bourreau soit achevée. Il ne reste plus alors qu’à livrer les
cadavres aux gentilshommes qui se sont fait inscrire pour en obtenir, à la première
occasion, dans le noble but de s’exercer au maniement du sabre..
On ne conduit généralement à l’une ou à l’autre des places publiques d’exécution
que les grands criminels, tels que les incendiaires et les assassins. Les premiers sont
livrés aux flammes. Quand on les attache au fatal pilier, l’on a soin de recouvrir leurs
liens d’une couche de terre glaise : les Japonais ne connaissent pas encore l’usage des
chaînes, et leurs cordes en paille, quelque bien tressées qu’elles soient, ne résisteraient
pas longtemps à l’action du feu. D’anciens résidents de Yokohama m’ont décrit, pour y
avoir assisté, le supplice d’un incendiaire qui avait juré de brûler le quartier franc, et qui
fut pris sur le fait à sa seconde ou troisième tentative. Peut-être aurais-je pu, à Yéjdo
même, voir mettre en croix deux parricides, car je reçus un matin de Tô la complainte
illustrée relative à leur crime et à leur prochaine exécution ; il l’avait achetée d’un colporteur
qui la chantait dans les carrefours de la Cité, comme on sait que cela se pratique
encore en pleine civilisation chrétienne.
L assassinat, sans circonstance aggravante, est puni de la décollation. Comme autrefois
en Europe, 1 appareil des exécutions publiques affiche la prétention de produire une