
que les cultivateurs achètent et plantent aux quatre coins de leurs champs, dans la persuasion
q u e 'c e s rustiques amulettes sont indispensables pour donner au sol toute sa
fécondité.
Celle saison de l’année est pour les bourgeois de Yédo l’époque des réjouissances
publiques qui ont pour théâtre les fraîches rétraites des rives’''du Surriida-gawa, ou les
jardins d’Odji aux berceaux de verdure humectés, de l’écume des cascades, ou des eaux
mêmes du grand fleuve, sur lesquelles la population citadine célèbre ’ses nuits véni-'
tiennes, jusqu’à ce que le dernier jour du mois la convoque à une solennité d’expiation et
de purification, géhéralès.
Le dieu de l’eaù, ancienne divinité du culte Kami, est fêté d’un bout à l’autre de
l’empire pendant tout le septième mois, ce qui représente à peu près la durée de la
saison pluvieuse. On plante de hautes tiges de bambou ornées de leurs branches supérieures,
de clochettes de verre et de bandes de papier bénites, à proximité des sources,
des puits, des canaux d’irrigation; et chaque matin et chaque soir, au bruit des gongs
des bonzeries, on hisse çà et là des bannières portant pour inscription : Respect et
hommage au dieu de ïea u \ Dans les demeures des campagnards, la famille expose sur
l’autel domestique dressé en l’honneur du Kami des offrandes de riz, de poisson et de
petite monnaie.
Le huitième mois s’ouvre par un fastidieux échange de civilités entre les clients et
leurs patrons, les employés et leurs chefs, les subalternes et leurs supérieurs.
Le quinzième jour est dédié au dieu de la lune. On prétend que c’est le moment de
l’année où l’astre de la nuit jette le plus vif éclat. Les fleuves et les canaux sont sillonnés
de gondoles où les citadins se livrent en famille à la contemplation de la pleine lune. Le
calme de l’air et la douceur de la température pendant les soirées des mois de septembre
et d’octobre favorisent les rendez-vous bourgeois et les nocturnes parties de plaisir dans
les jardins publics de la ville et d e là banlieue.
Le dixième mois est placé sous l’invocation de Yébis, qui est à la fois le dieu de la
pêche et l’un des patrons favoris des marchands. Ceux-ci, en braves et loyaux collègues^
font assaut de politesses et de présents, parmi lesquels figurent nécessairement des
gâteaux de millet, ainsi qu’un gros poisson rouge, nommé Taï, fort estimé dans les festins
japonais pour la délicatesse de sa chair et sa belle apparence. C’est en son honneur que
souvent on confectionne, sous la forme de poissons rouges, les grandes boîtes en laque
dans lesquelles on enferme et dépose, sur la natte des repas, les diverses pièces de dessert
qui. accompagnent le service du saki.
Les dames de la Cité ne sont pas moins diligentes à s’acquitter des devoirs que leur
position sociale leur impose. Elles se font des visites de bon voisinage, et ne négligent pas
non plus de brûler quelque cierge devant l’image de Yébis, pour la prospérité des entreprises
commerciales de leurs maris.-
De grand matin on les voit sè rendre par troupes à telle ou telle bonzerie qui a su
réserver dans son sanctuaire un autel, tant modeste, soit-il, au dieu qui, plus que tout
autre, a le privilège de recevoir les hommages des bourgeoises.