
LE NOUVEL ORDRE DE CHOSES AU JAPON. 405
Quant.àu commerce d’importation, il repose, ainsi que le commerce d’exportation,
sur deux seuls articles capitaux, savoir :
Les cotons filés, tissés et imprimés ;
Et certaines étoffes de laine ou de. laine et coton mélangés, dont la nomenclature
serait fastidieuse.
Les sommes que rapporte l’écoulement de ces produits de nos manufactures, sont
loin de compenser celles que nous payons pour nos achats de soies et de thés japonais.
Jusqu/à présent, toutefois, des circonstances exceptionnelles nous ont permis d’établir
la balance entre les exportations et les importations, et l’on peut espérer que longtemps
encore ce fructueux, imprévu ne nous fera pas défaut.
Après les opérations de change, nous avons eu les commandes de vaisseaux de guerre,
de bateaux à vapeur armés en coursé, de batteries de canons rayés, de fusils se chargeant
par la culasse et de munitions de tous genres dont les Japonais éprouvaient le besoin
pour se livrer convenablement à leur guerre civile. Nous leur avons même construit
un port militaire, avec chantiers et arsenal de marine, à Yokoska, au Sud de Yokohama.
Bientôt ils nous demanderont d’exploiter leurs mines, d’établir leur réseau télégraphique
et de leur construire des chemins de fer.
Ensuite, il viendra un temps où, dans leurs habitations, le verre à vitres remplacera
les châssis de papier transparent, où il faudra mettre des rideaux; aux fenêtres et des
glaces dans les salons; où l’on y allumera le gaz au lieu de la bougie fumeuse, et où
la confection parisienne enfin aura des succursales dans le grand Nippon, car déjà les
Japonais commencent à s’habiller à l’européenne, et se figure-t-on que la toilette des
dames ne se mette pas à l’unisson des modes de leurs cavaliers !
En attendant, les importations secondaires se réduisent aux articles ci-après, et en
quantités très-restreintes : plomb, étain, feuilles de zinc ou d’étain, fer, fil de fer et fer-
blanc, montres, articles de Paris, couvertures, cuir, peau, ivoire, cornes de rhinocéros,
et sucre.
Il y a, en outre, une importation presque exclusivement destinée à l’approvisionnement
et à la consommation des quartiers francs : verre à vitres, meubles, poterie, verrerie,
vêtements, vins, spiritueux et conserves alimentaires.
Loin d’avoir rien exagéré dans tout ce que j ’ai dit de l’importance commerciale du
Japon, je pourrais ajouter qu’à ce seul poinl de vue, le Japon, de longtemps encore, ne
donnera pas tout ce que l’on en peut attendre. Sa force de production serait décuplée et
centuplée, qu’elle n’aurait pas atteint ses dernières limites. Ce pays ne fait que de sortir
d’un état de choses où il n’avait pas d’autre consommateur que sa propre population. Le
nord de l’Archipel est généralement inculte, et jusque dans le sud de Nippon il y a des
milliers d’arpents en friche, couverts de forêts et de bruyères ou convertis en parcs et en
jardins improductifs, dans les propriétés de mainmorte des seigneurs féodaux et des confréries
monastiques.
Néanmoins, tout cela serait utilisé, planté de mûriers, de camphriers, de cotonniers
et d’arbustes à thé, que l’exiguïté de son territoire empêcherait toujours lé Japon de rivaliser