
«se charge de lui faire les honneurs du jardin -et des salles de récréation. Chacun des
divertissements que l’on y trouve est tarifé ici, c’est un concert vocal et instrumental ;
là, une danse de caractère, l’un et l’autre exécutés par des femmes, artistes de profession,
résidant à Yédo et n ’ayant rien de commun avec les habitantes de Sin-Yosiwara. Leurs
productions, même à notre point de .vue, ne seraient nullement indignes de la meilleure
compagnie, si l’on retranchait: du programme des danseuses une pièce seulement, ou
plutôt un jeu national, qui n’est, au sentiment des Japonais, qu’une innocente facétie.
11 s’agit simplement-:d’un. défi chorégraphique, où. chaque, faux pas entraîne, comme
châtiment, la perte d’une pièce de toilette,'en sorte que, au pis aller, l’on risque-d’aboutir
au costume des bains publics, qui est celui de tout le monde au moins une fois dans la
journée: .
Le Cankiro possède une salle de banquets, dont la> décoration est fort originale. Elle
se compose d'une tapisserie de jolies esquisses, de genre ou de paysage, les unes à
l’encre de Chine,, les autres coloriées, et toutes également peintes sur des morceaux de
papierr-cadon: taillés d’après le patron des diverses sortes d’éventails en usage dans
l’extrême Orient..
Un autre genre de peintures orne le fond de la galerie. Ce sont des.vues de Yédo et
des environs, assez grossières, mais ne manquant pas d’effet ; elles paraissent exécutées
en épaisses couchés de couleurs simples et rappellent exactement les productions de.ces
peintres populaires de,Naples, qui passent leur vie à fabriquer pour les touristes des
éruptions du Vésuve. Enfin, la.vraie merveille du Gankiro, c’est- son théâtre d’enfants.
On n’y voit; pas d’autres acteurs que.les jeunes ûlles de sept à treize ans dont l’éducation
est confiée aux eourtisanes.émérites de Sin-Yosiwara. Celles-ci leur enseignent la lecture,
f écriture, le calcul, le chant, la musique, la danse, la mimique et la déclamation. Les
opérettes,: les. petites féeries, les ballets costumés . qu’on- le u r. fait- exécuter,., sont, des
pièces, pleines de!grâce.et de gentillesse. Il est douteux qu’au point; de vue du'mérite
littéraire elles soient de beaucoup supérieures, aux vaudevilles, ; aux comédies e t aux
proverbes dramatiques que l’on donne en Europe dans les internats de jeunes personnes ;
mais il parait,' en tout cas, avéré que le petit théâtre des Japonaises se distingue avantageusement
du nôtre, à la fois par une verve plus franche et par un plus grand respect
des oonvenaneés, ou, mieux encore, parce qu’il se renferme tout naïvement et-sans y.
mettre d’intention dans leicharmant domaine de la.poésie enfantine.-
C’est, à'.mon :avis, quelque chose, de navrant que le spectacle des-soins : éducatifs
dont ôn entoure' lés jeunes filles ; du Gankiro;. Je n’ai jamais pu admirer avec une vraie
satisfaction les prodiges de l’arboriculture japonaise, c’est-à-dire ces arbres nains et
hâtifs qu’elle parvient à couvrir de fleurs doubles et qui ne donnent aucun fruit. Mais
qu’estnce què^la violation des« lois, de ,1a nature, dans le domaine du règne végétal, en
comparaison de la profanation de la-nature humaine ? El paree: que, dans tous les pays
du monde, ce dernier, crime sè; commet impunément à l’égard- du sexe faible,'là-avec
plus où, moins de; brutalité, ici avec, plus ou moins:.d’hypocrisie, : sera-ce une raison
pour ne pas protester : contre dès institutions que la morale universelle réprouve ?