
En résumé, le respect des morts oïi le culte des tombeaux, qui est, en apparence, l’un
des traits estimables de la religion bouddhiste, n’existe, à proprement parler, que pour les
classes privilégiées, et dans la proportion des avantages que les bonzes en retirent. Le
mode dfinhumation, la forme des cercueils, et surtout la pratique de l’incinération, introduite,
en l’an 700, par le prêtre Toséo, ont permis aux bonzeries de détailler à l’infini
les lots de terrain dont elles disposent. Un modeste enclos suffit à toute une famille
pour un grand nombre de générations. La table commémorative, dressée sur le lieu où
l’on a enfoui l’urne cinéraire, n’occupe avec ses accessoires guère plus dé placé que
l’urne elle-même. L’entretien défectueux des sépultures du commun peuple contraste vivement,
avec le bel ordre dés terrasses et des grands monuments funéraires qui s’élèvent
daiis.leur voisinage. Les uns et les autres sont cependant confiés aux soins de la même
bonzerie; mais il en, est des tombeaux comme des indulgences : les bonzes en ont fait
une question dé tarif.
C H A P IT R E XL
S É J O U R E N R A D E
Une ingénieuse machination des gouverneurs des affaires étrangères du Taïkoun
faillit brusquer d’une façon peu courtoise la fin de notre premier séjour à Yédo.
Cet épisode de ma mission me paraît de nature à être mentionné, à titre d’aventure
caractéristique, particulièrement propre à donner une idée de la politique d’expédients
qui a signalé le règne éphémère du dernier Taïkoun de la dynastie des princes de Ksiou,
le malheureux Minamoto Iyémotsi, auquel à succédé le Stolsbashi, fils du prince de Mito.
Le gouvernement taïkounal s’était engagé, par écrit, sur une démarche officieuse de
M. Lindau, à conclure un traité avec la Suisse. Lorsque je me présentai pour recueillir
l’effet de cette promesse, les ministres japonais objectèrent que des circonstances impérieuses
en exigeaient l’ajournement. 11 est vrai qu’à cette époque les1 conséquences
politiques et économiques de l’établissement des Européens au Japon indisposaient de plus
en plus les grands dynastes féodaux. Le Mikado, sous la pression des mécontents, se refusait
à sanctionner les conventions internationales auxquelles le Taïkoun avait souscrit.