
Marine, Planche XV.fig. Z i. le deflein d’u n eflûte '.
Nous donnons en France le nom <le flûte., ou dé
v ai fléau armé en flûte, à tous les bâtimens qu’on fait
fervir de magafin ou d’hôpital, à la fuite d’une armée
navale, ou qui font employés au tranfport des troupes,
quoiqu’ils foient bâtis à poupée quarrée, & qu-
ils ayent fervi autrefois comme vaiffeanx de guerre.
L a grandeur la plus ordinaire des flûtes eft d’environ;
130 pies de long de l’étraVe à l’étambord ;
vingt-fix piés & demi de large, & treize pies & demi
de creux environ. Quelquefois on prend pour
leur largeur la cinquième partie de leur longueur.
Les proportions des différentes pièces qui entrent
dans la conftruflion de ce bâtiment, varient fuivant
fa grandeur, ainfi que pour les vaiffeanx. (Z )
F l û t e , ( Tapijjier.) efp e c e de n a v e tte d o n t fie ferv
e n t les baffe-liffiers , & fu r laq u elle fo n t d év id ées
le s lain es o u a u tre s m atières q u ’ils em p lo y e n t à leu rs
ta p ifferies. L a flûte e ll u n b â to n fa it a u to u r , en fo rm
e d e p e tit c y lin d re , m ais d o n t, v e rs le m ilieu., le
d iam è tre eft m o in s g ran d q u ’a u x d eu x b o u ts. Il a o rd
in a irem e n t tro is o u q u a tre p o u ces d e lo n g , & q u a tre
o u c in q lig nes d’ép aiffeu r. Voyeç T a p i s s e r i e .
F LUTE , (gifler en') Jardinage , voyeç GREFFER.
FLUX ET REFLUX, f. m (Phyjîq. & Hydrogr.)
mouvement journalier, régulier, & périodique,.qu’ on
^obferve dans les eaux de la mer, & dont le détail
&C les caufes vont faire l’objet de cet article.
Pans les mers vaftes & profondes, on remarque
que l ’Océan monte & descend alternativement deux
fois par jour. Les eaux, pendant environ fix heures,
s’élèvent & s’étendent fur les rivages ; c’eft ce qu’on
appelle le flu x : elles relient un très-petit efpace de
tems, c’elt-à-dire quelques minutes, dans cet état
de repos ; après quoi elles redefcendent durant fix
autres heures, ce qui forme le reflux : au bout de
ces fix heures & d’un très-petit tems de repos, elles
remontent de nouveau ; & ainfi de fuite.
Pendant le f lu x , les eaux des fleuves s’enflent &
remontent près de leur embouchure ; ce qui vient
évidemment de ce qu’elles font refoulées par les
eaux de la mer. Voye^ E m b o u c h u r e 6* F l e u v e .
Pendant le reflux, les eaux de ces mêmes fleuves
recommencent à couler.
On a défigné le flu x & reflux par le feul mot de
marée , dont nous nous fervirons fouvent dans cèt
article. Voyeç M a r é e . Le moment où finit 1 e flitx ,
lorfque les eaux font ftationnaires, s’appelle la haute
mer ; la fin du reflux s’appelle la baffemer,.
Dans tous les endroits où le mouvement des eaux
n’eft pas retardé par des île s , des caps, des détroits,
ou par d’autres femblables obftacles , on obferve
trois périodes à la marée ; la période journalière, la
période menftruelle, la période annuelle.
La période journalière eft de 24 heures 40 minutes
, pendant lefquelles le flu x arrive deux fois , &
le reflux deux fois ; & cet efpace de 24 heures 40 minutes
, eft le tems que la lune met à faire fa révolution
journalière autour de la terre, ou , pour parler
plus exaftement, le tems qui s’écoule entre fon paf-
iage par le méridien, & l'on retour au même méridien.
La période menftruelle confifte en ce que les marées
font plus grandes dans les nouvelles & pleines
lunes, que quand’la lune eft en quartier; où , pour
parler plus exactement, les marées font les plus grandes
dans chaque lunaifon, quand la lune eft environ à
18 degrés au-delà des pleines & nouvelles lunes, &
les plus petites , quand elle eft environ à 18 degrés
au-delà du premier & du dernier quartier. Les nouvelles
ou pleines lunes s’appellent fyzygies, les
quartiers , quadratures : ces expreffions nous feront
quelquefois commodes , & nous en uferons. Voye£
S y z y g i e s , Q u a d r a t u r e s , &c. '
La période annuelle confifte en ce qu’aux équïno*
xes les marées font les plus- grandes vers les nouvelles
& pleines lunes, & celles des quartiers fpnt
plus grandes qu’aux autres lunaifonS ; au contraire
dans lès folftices, les marées des nouvelles & pleines
lunes ne font pas fi grandes qu’aux autres Iunai*
fons ; au lieu que les marées des quartiers font plus
grandes qu’aux autres lunaiforis.
On voit déjà par ce premier détail, que ïeflux &
reflux a une connexion marquée & principale aved
les mouvemens de la lune , & qu’il en a même , jufi
qu’à un certain point, avec le mouvement du foleil;
ou plutôt avec celui de la terre autour du foleil;
Voye{ C o p e r n i c . D ’où l’on peut déjà conclure
en général, que la lune & le foleil, & fur-tôut lè
premier de ces deux aftres, font la caufe du flu x &
reflux, quoiqu’on ne fâche pas encore comment cet*
te caufe opéré. Il ne reliera plus fur cela rien à de-
firer, quand nous entrerons dans le détail de’ la maniéré
dont ces deux aftres agiffent furies eaux: mais
luivons les phénomènes du flu x & du reflux.
Dans la période journalière on obferve encore t
i° . que la haute mer arrive aux rades orientales plutôt
qu’aux rades occidentales i i ° . qu’entre les deux
tropiques la mer paroît aller de l’eft à l’oiieft : 30*,
qûê'dans la zone torride, à moins de quelque obfta-
cle particulier, la haute mer arrive en même terni
aux endroits qui font fous le même méridien ; au lieik
que.dans les zones tempérées, elle arrive plûtÔt à
une. moindre latitude qu’à une plus grande ; & au-
delà du foixante-cinquième degré de latitude, lé
flu x n’eft pas fenfible.
Dans la période menftruelle on obferve i° . que
les marées vont en croiffant des quadratures aux fyi*
izygiës, & en décroiffant, des fyzygies aux quadrai-
tures : z°. quand la lune eft aux fyzygiesôu aux quadratures,
la haute mer arrive trois heures après le
paffage de la lune au méridien : fi la lune va des fyzygies
aux quadratures, le tems de la haute mer arrive
plûtôt que ces trois heures : c’eft le contraire fi
la luné va des quadratures!aux fyzygies : 30. foit que
la lune fe trouve dans l’hémilphere auftral ou dans
le boréal, le tems de la haute mer n’arrive pas plus
tard aux plages feptentrionales.
Enfin dans la période annuelle on obferve i° . que
les marées du folftice d’hyver font plus grandes que
celles du folftice d’été : z°. les marées lont d’autant
plus*grandes que la lune eft plus près de la terre ; &
elles font les plus grandes, toutes chofes d’ailleurs
égales, quand la lune eft périgéé , c’eft-à-dire à fa
plus petite diftance de la terre : elles font auffi d’autant
plusgrandes, que la lune eft plus près de l’équateur
; & en général les plus grandes de toutes les marées
arrivent quand la lune eft à la fois dans l’équateur,
périgée , & dans les fyzygies : 30. enfin dans
les contrées feptentrionales, les marées des nouvelles
& pleines lunes font en été plus grandes le foir
que le matin, & en hy ver plus grandes le matin que
le, foir,
Tels font les phénomènes principaux ; entrons à-
préfent dans leur explication.
Les anciens avoient déjà conclu des phénomènes
du flu x & reflux, que le loleil & la lune en étoient
la caufe : caufa, dit Pline, in foie lunâque, liv. I I . c.
$ j . Galilée jugea de plus, que le flu x & reflux étoit
une preuve du double mouvement de la terre par rapport
au foleil : mais la maniéré dont ce grand homme
fut traité par l’odieux tribunal de l’inqtufition, à l’oc-
cafion de fon opinion fur le mouvement de la terre,
Voyei C o p e r n i c , ne l’encouragea pas à approfondir,
d’après ce principe, les eau les du flu x & reflux :
ainfi on peut dire que jufqu’à Defcartes, perlbnne
n’a voit entrepris de donner une explication détaillée ,
de ce phénomène. Ce grand homme étoit parti pour
cela de fon ingénieufe théorie des tourbillons. Voyt\
C arté sian isme & T ourbillo n: Selon Defcartes
, lorfque la lune pafle au méridien , le fluide qui
eft entre la terre & la lune, ou plûtôt entre la terre
& le tourbillon particulier de la lune, fluide qui fie
meut auffi en tourbillon autour de la terre, fe trouve
dans un efpace plus refferré : il doit donc y couler
plus vite ; il doit de plus y caufer une preffion fur les
eaux de la mer ; & de-là vient le flu x & le reflux.
Cette explication, dont nous fupprimons le détail
& les conféquenees, a deux grands défauts; le premier,
d’être appuyé fur l’hypothèfe des tourbillons,
aujourd’hui reconnue infoûtenable , voye{ T our-
billons ; le fécond eft d’être directement contraire
aux phénomènes : car , félon Defcartes , le fluide
qui pafle entre la terre & la lune, doit exercer une
preffion fur les eaux de la mer; cette preffion doit
donc refouler les eaux de la mer fous la lune : ainfi
ces eaux devroient s’abaiffer fous la lune, lorfqu’elle
pafle au méridien : or il arrive précifément le contraire.
On peut voir dans les-ouvrages de plufieurs
phyficiens modernes, d’autres difficultés contre cette
explication : celles que nous venons de propofer
font les plus frappantes , & nous paroiffent fuffire.
Quelques cartéfiens mitigés attachés aux tourbillons
, fans l’être aux conféquenees que Defcartes en
a tirées, ont cherché à raccommoder de leur mieux
ce qu’ils trouvoient de défe&ueux dans l’explication
que leur maître avoit donnée du flux & du reflux :
mais indépendamment des objections particulières
qu’on pourrôit faire contre chacune de ces explications
, elles ont toutes un défaut général, c’èftde
fuppofer l’exiftence chimérique des tourbillons:
ainfi nous ne nous y arrêterons pas davantage. Les
principes que nous efpérons donner aux mots Hy d
ro d yn am iq ue , Hyd r o s t a t iq u e , 6* Résist
a n c e , fur la preffion des fluides en mouvement,
ferviront à apprécier avec exactitude toutes les explications
qu’on donne omqu’on prétend donner du
flu x & refluxj par les lois du mouvément dès fluides
& de leur preffion. Paflons donc à une maniéré plus
fatisfaifante de rendre raifon de ce phénomène:
La meilleure méthode de philofopher en Phyfique,
c’ eft d’expliquer les faits1 lès uns par les autres, &
de réduire les obfervations & les expériences à certains
phénomènes généraux dont elles foient la côn-
féquence. Il ne nous eft guere permis d’aller plus
loin, les caufes des premiers faits nous étant inconnues
: or c’eft Le cas où nous noiis trouvons par rapport
au flux & reflux .de La mer. IL eft certain par toutes
les obfervations aftronomiques, voye^ L o i de
K epler , qu’il y a une tendance mutuelle'des corps
céleftes les uns vers les autres : cette force dont la
caufe eft. inconnue, a été nommée par M. Newton ,
gravitation univerfelle , ou attraction , voye^ces deux
mots i voye{ auffiNewtonianisme : il eft certain de
plus, par les obfervations, que les planètes, fe meuvent
ou dans le vuide,ou au-moinS dans un milieu qui
ne leur réfifte pas. V. Planète, T o u rbillo n,R és
is t a n c e , &c. Il eft donc, d’un phyfieien fage de
faire abftra&ion de tout-fluide dans l’explication du
flu x & reflux de la mer, & de chercher uniquement
à expliquer ce phénomène parole principe de la gravitation
univerfelle , que perfonne ne peut refufer
d’admettre, quelque explication bonne ou mauvaile
qu’i l entreprenne d’ailleurs d’en donner.
Mettant donc à part, toute hypothèfe, nous pofe-
rons pour principe , que comme la lune pefe vers
la terre , voye[ L une , de même auffi la terre & toutes
fes parties pefent vers lù lune, ou , ce qui revient
au même, en font attirées ; que de même la terre &
toutes fies parties pefent ou font attirées vers le foleil
, ne donnant point ici d’autre fens au mot attraction,
que celui d’une tendance des parties de la terre
Tome VI.
vers la lune 6c vers le foleil, quelle qu*eri foit la eau*
fe : c’eft de ce principe que ndus allons déduire les
phénomènes des marées»
Kepler avoit conje&uré il y a long-teftis, qiie la
gravitation des parties de la terre vers la lune &£
vers le foleil, étôit la caiife du flux & reflux.
« Si la terre cefloit , dit - i l , d’attirer les eaüx Vèri
» elle-même, toutes celles de l’Océan s’éleverôient
» vers là lune ; car la fphere de l’attra&ion de la lu*
» ne s’étend vers notre terre, & en attire les eaux »*
C ’eft ainfi que penfoit ce grand aftronome, dans
fon introd. ad theor. mart. & ce foupçon, càr ce n’é-
toit alors rien dé plus, fe" trouve aujourd’hui vérifié
& démontré par la théorie fuivante, déduite des
principes de Newton.
: Théorie des marées.-> La fur face de la terré & de là
mer eft fphérique, ou -du moins étant à - peu - près
fphérique, peut être ici regardée comme telle. Cela
pofé', fi l’on imagine què la lune A ( Planche géo-
graphique, ftg. S.') efLaa-deflus de quelque partie de
la fùrface de la mer, comme Ë , il eft évident que
l’eau Z étant le plus près de la Lune, pefera vers
elle plus que ne fait auciinë autre partie de la terre
& de la mer, dans tout l’hémifphere F E H .
Par cônféquent l’éaù'.en E doit s’élever vers la
lun e, .& la mer doit s’enfler en E.
Par la même raifon ; I’eàù en G étant la plus éloignée
de la lune , doit pefer moins vers cette planète
que ne fait aucune autre partie de la terre OU
de la mer , dans l’hé mifphere F G H.
Par cônféquent l’eau de cèt endroit doit moins
s’approcher de là lune , que toute'autre partie du
globe terreftre ; c’eft-à-dire qu’ elle doit s’élever du
côté oppofé comme étant plus legeré, & par confisquent
elle. doit s’enfler en (F.
Par c,es mpyens, la furfùce de POcéan doit prendre
néceflairement une figure ovale , dont le plus
longidiametre eft E G , le plus coür.t F H ; de forte
que-la lune venant à, changer fa pçfition dans .fp.n
mouyémen t diurne autour de la. terre, .cette figure
ovale 4e l’eau doit changer avec elle : & c’eft- là
ce qui jpraduit ces deux flux de reflux que l’on ret
marque toutes les vingt-cinq heures,
Telle'eft d’abord en général, & pour ainfi-dire eu
gros, Pexplication du flu x & reflux. Mais pour faire
entendre fans figure , par le lèul ràifonnement, &
d’une maniéré encore plusprécife, la caufe de l’élévation
des eaux en G & en E , imaginons que la lune
foit en repos, & que-la terre foit un globe folide
en repos., couvert jufqu’à telle hauteur qu’on voudra
d’un fluide homogène ; xave & fans reffort, dont
la furface foit fphérique ; fuppofons -de plus que les
parties de ce fluide pefent (comme elles font en effet)
vers le centre du globe-, tandis qu’elles font attirées
par le foleil & par la lupe ;>il ieft certain que fi toutes
les partiés du fluide & du globe qu’il couvre, étoient
attirées avéc une force égale & fuivant des directions
parallèles, l’adion des deux' aftres n’auroit d’autre
effet, que de mouvoir ou de déplacer toute la maffe
du globe & du fluide, fans.caufer d’ailleurs aucun
dérangement dans la fituation refpeftive de leurs
parties. Mais fuivant les lôis de l’attraCtion, les parties
de l’hémifphere fupérieur,c’eft-à-dire de celui qui
effile plus près de l’aftre,. font attirées avec plus de
force que le centre du globe; & au contraire-les parties
de l’hémifphere inférieur font- attirées avec
moins de force :: d’où il s’enfuit que lè centre/lu globe
étant mû par l’aCtion diufoléil ou de là lune, le
fluide qui côlivrè l’hémifphere ' fupérieur, & qui eft
attiré plus fortement , doit tendre à fe mouvoir plus
vîte.que,le centre, & par cônféquent s’élever avec
une .force égale à l’excès de la force qui l’attire fur
celle qui attire le centre ; au contraire le fluide de
Y Y y y y ij