
6c tumultueux, occafionné dans un liquide par l’union
de deux fubftances mifcibles , opérée dans le
foin de ce liquide. Les chimiftes exafts ont diftingué
ce phénomène fous le nom ^effervefcence. V ËF-
FERVESCENCE.
Ils ont confacf é le mot de fermentation, pour exprimer
l’aftion réciproque de divers principes pré-
exiftans enfemble dans un feul 6c même corps naturel
fenfiblement homogène, y étant d’abord cachés,
oififs, inerts, 6c enfuite développés, reveillés, mis
en jeu.
Le mouvement qu’une pareille réaftion occafion-
ne eft infenfible, comme celui qui conftitue la liquidité.
Il ne faut pas le confondre avec le bouillonnement
fenfible, qui accompagne quelquefois lçs fermentations;
ce dernier n’eft qu’accidentel, il ne contribue
vraiffemblablement en rien à l’ouvrage de la
fermentation.
Les fujets fermentables font des corps de l’ordre
des compofés, ou des furcompofés (voyez M ix t io n )
dont le tiflu eft lâche, taxa compatis, & à la compo-
lition defquels concourt le principe aqueux.
La fin ou l’effet principal 6c effentiel de la fermentation
, c’eft la décompofition du corps fermentant,
la féparation & l’atténiiation de fes principes. Becher
6c Stahl ont penfé que les principaux produits des
fermentations le mieux connues, étoient dûs à une ré-
compofition. Nous expoferons ailleurs les raifons de
doute que nous avons contre cette opinion. Voyez
F e r m e n t a t io n v in e u s e au mot V in .
Il paroît clair à-préfent que l’effervefcence, qu’il
eût été toûjours utile de diftinguer de la fermentation,
ne fût-ce que pour la précifion de l’idiome chimique,
en eft réellement diftinfte par le fond même des cho-
fes ; car l’effence, le caraftere diftinftif de l’effervefcence
, confifte précifément dans le bouillonnement
d’une liqueur, occafionné par une éruption rapide
de bulles d’air : ce phénomène extérieur eft au contraire
accidentel à la fermentation, enforte qu’on s’ex-
primeroit d’une façon affez exafte, en difant que certaines
fermentations, celle des fucs doux par exemple
, fe font avec effervefcence, & que quelques autres
, telles que la plûpart des putréfaftions, fe font
fans effervefcence.
La fermentation du chimifte qui confidere les objets
qui lui font propres, intus & in cute , eft donc ab-
folument 6c efîentiellement diftinfte de l’effervefcence
; on ne peut les confondre, les identifier, que lorf-
qu’on ne les confidere que comme mouvement intef-
tm fenfible. Sous cet afpeft, le phénomène eft en effet
le même; c’eft proprement une effervefcence dans
les deux cas.
Cette difcufiîon nous a paru néceffaire pour fixer
la véritable valeur du motfermentation, employé dans
un grand nombre d’ouvrages modernes où il eft pris
indifféremment, foit dans le fens ordinaire que nous
donnons à celui d’effervefcence (V . Ef f e r v e s c e n c
e ) , foit dans celui que nous attachons nous-mêmes
au mot fermentation, l'oit enfin pour exprimer le phé-
riomene accidentel à notre fermentation, que nous
venons de regarder comme une véritable effervefcence.
Il eft évident d’après les mêmes notions, qu’il ne
faut pas comprendre dans l’ordre des fermentations.
fébullition ou le mouvement inteftin fenfible, qu’éprouve
un liquide par la plus grande intenfité de chaleur
dont il foit fufceptible, comme plufieurs auteurs
l’ont fait, & comme on feroit en droit de le faire d’après
la définition de Willis ; car l’ébullition différé fi,
effentiellement des autres efpeces de mouvement inteftin,
qu’elle n’eft pas même un phénomène chimi- 3ue: en effet l’ébullition n’eft que le degré extrême
e la liquidité ; or la liquidité n’eft pas une propriété
chimique. Voyez l 'article C h im i e ,,page. 4 1 z . col.premierc,
pag. 414. col. fécondé, 6c page 415 . col. prem.
D’ailleurs l’ébullition comme telle ne produifant
pas néceffairement dans le corps bouillant une altération
intérieure ou chimique , puifqu’elle eft aufîi
bien propre aux corps fimples ou inaltérables qu’aux
corps compofés, il eft clair qu’elle n’a de commun
avec la fermentation qu’un phénomène extérieur
& purement accidentel.
Revenons à la fermentation proprement dite. Les
différentes altérations fpontanées dont nous avons
donné la lifte au commencement de cet article, en
font réellement des efpeces ; 6c tout ce que nous
avons dit jufqu’à préfent de la fermentation en général
, convient également à chacun de ces phénomènes
en particulier: mais il n’eft qu’un petit nombre
de fermentations qui ayent été loigneufement étudiées,
& qui foient fuffifamment connues ; favoir,
celles qui produifent le vin, le vinaigre, 6c l’alkali
volatil fermenté, qui portent les noms && fermentation
vineufe , de fermentation acéteufe , & de putréfaction
, & celle des farines pétries avec de l’eau, qui
n’eft qu’une branche ou variété de la première. Ce
font-là les fermentations par excellence, les feules
même qui ayent été examinées exprofejfo, les uniques
efpeces qui rempliffent toute l’extenfion qu’on
donne communément au phénomène général énoncé
fous le nom de fermentation. Les autres efpeces ne
s’y rapportent que par une analogie qui paroît à la
vérité bien naturelle, mais qui n’eft pas encore établie
démonftrativement. On a fur les premières efpeces
des connoiffances pofitives ; & fur les autres
feulement des vérités entrevues, des prétentions.
Nous croyons que c’eft en traitant des trois efpeces
de fermentations généralement reconnues par
les Chimiftes, que nous devons examiner toutes les
queftions particulières qui appartiennent à ce fujet,
6c dont l’éclairciflement eft néceffaire pour l’expo-
fer d’une maniéré fatisfaifante. En nous en tenant
à des confidérations générales, qui feules convien-
droient à cet article , nous relierions dans un vague
qui n’apprendroit rien ; car les généralités vagues
n’apprennent rien, non-feulement parce que les vérités
abftraites ne trouvent accès que dans peu de
têtes, même prifes dans l ’ordre de celles qui s’occupent
par état des faits particuliers dont ces vérités
font formées, mais encore parce que la précifion
qu’elles exigent, retranche & châtre beaucoup d’idées
qui porteroient le plus grand jour fur le fujet
traité, mais qui ne repréfentent pas des propriétés
exaftement communes à la totalité des objets, em-
braffés par une contemplation générale.
Nous nous propofons donc de répandre tout ce
qui nous relie à dire fur ie fujet très-curieux que nous
venons d’ébaucher, dans les articles particuliers V in ,
P a i n , V in a ig r e , P u t r é f a c t io n . Voyez ces articles.
(é)
Fe r m e n t a t io n , ÇEcon. anim.') la lignification
de ce mot a été rqftrainte fur la fin du fiecle dernier
feulement ; il n’eft employé aujourd’hui, parmi les
Chimiftes, les Phyficiens, 6c les Médecins inftruits,
que pour exprimer un mouvement inteftin, qui peut
être produit, fans aucune caufe externe fenfible ,
dans la plûpart des végétaux 6c dans les feuls corps
de ce genre, dont les parties intégrantes étoient auparavant
dans un état de repos ; mouvement par le
moyen duquel il s’opère un changement dans la fub-
ftance de ces corps, qui rend leur nature différente
de ce qu’elle étoit, enforte qu’il leur donne une propriété
qu’ils n’avoient pas auparavant, de fournir un
efprit ardent, ou un elprit acide : d’où s’enfuit la di-
ftinftion de la fermentation en vineufe & en acéteufe.
Voyez FERMENTATION (CA/OT«).
fl n’eft plus queftion de fermentation dans la théo-
rie dé la Medecine, que relativement à l’idée qui
viant d’en être donnée, & à ce qui en fera dit à la
fin de cet article : on évite ainfi la confùlion, qui ne
pourroit manquer .de fuivre de l’abus de ce terme
dont on faifoit ufage indiftinûement (depuis Vanhel-
mont jufqu’à l’extinftion de la fefte des médecins ,
que l’on appelloit chimique) , pour exprimer toute
forte de mouvement inteftin, excité par un principe
quelconque , dans les parties intégrantes de deux
corps de nature hétérogène telle qu’elle foit, avec
tendance à la perfeftion des corps fermentans, ou à
leur transformation en des fubftances différentes de
ce qu’ils étoient; enforte que la raréfaftion, l’effer-
vefcençe, la putréfaftion , n’étoient aucunement
diftingués de la fermentation , 6c étoient prifes affez
indifféremment les unes pour les autres. C’eft ainfi
que Wiiiis repréfente la fermentation, dans la définition
que l’on en trouve dans le traité de cet auteur fur
ce fujet, de fermentât, cap. iij. définition aufli vague,
auffi peu appropriée, que le fyftème auquel elle fer-
voit de principe pour rendre raifon de tous les phénomènes
de l’économie animale.
Les différentes fermentations que l’on imaginoit
dans les différens fluides du corps humain ; les fer-
mens, c’eft-à-dire les fubftances auxquelles on attri-
buoit la propriété de produire des mouvemens intef-
tins, par leur mélange dans nos humeurs, étoient en
effet les grands agens auxquels on attribuoit toutes
les opérations du corps humain, tant dans l’état de
fanté que dans celui de maladie. V o y e z F e r m e n t .
Telle etoit la bafe de la théorie de Vanhelmont, de
Sylvius Deleboe, de Viridetus, 6c de toute la feéle
chimique, qui varioient dans les combinaifons des
fermens 6c de leur aftion : mais ils fe réuniffoient
tous en ce point principal, qui confiftoit à ne raifon-
ner en Medecine que d’après l’idée des mouvemens
inteftins dans les humeurs, à ne faire contribuer pour
ainfi dire en rien l’aftion des parties organiques dans
les diverfes fonftions du corps humain.
C’eft pourquoi ces médecins ont été mis au nombre
des humoriftes. Voyez Hu m o r is t e s . Et pour les
diftinguer parmi ceux-là qui font partagés en différentes
feftes , on a donné le nom de fermentateurs à
ceux dont il s’agit ici : c’eft au moins ainfi qu’ils ont
été défignés dans plufieurs ouvrages modernes, tels
que ceux de M. Senac, celui de M. Quefnay furies
nevres continues, &c.
L’hiftoire des erreurs n’eft peut-être pas moins
utile , 6c ne fournit pas moins d’inftruftion que celle
des vérités les plus reconnues ; ainfi il eft à-propos de
ne pas fe borner ici à donner une idée générale des
opinions des- fermentateurs qui ont joue un fi grand
rôle fur le théâtre de la Medecine moderne, il convient
encore d’y joindre une expofition particulière
de ce qui peut lervir à faire connoître l’effentiel de
leur doctrine , 6c de la maniéré dont elle a été réfutée
, pour ne rien laiffer à defirer fur ce fujet, dans
un ouvrage fait pour tranfmettre à la poftérité toutes
les productions de l’efprit humain çonnues de nos
jours, toutes les opinions, tous les fyftèmes feienti-
fiques qui font jugés dignes par eux-mêmes ou par la
réputation de leurs auteurs d’être relevés, 6c que
l’on peut regarder comme des vérités à cultiver, ou
comme des écueils à éviter : ainfi après avoir rap-
pelié combien on a abufé, par rapport à la fermentation
, & du terme & de la chofe, il fera à - propos
de terminer ce qu’il y a à dire fur ce fujet concernant
la phyfique du corps humain, en indiquant la
véritable 6c la feule acception fous laquelle on employé
6c on reftreint aujourd’hui le mot de fermentation
dans les ouvrages de Medecine.
C’eft principalement à l’égard de l’élaboration des
alimens dans les premières voies, 6c de leur conver-
fion en un fluide animal, que les partifans de la fermentation
mal-conçûè fe font d’abord exercés à lui
Tome VI.
attribuer toute l’efficacité imaginable ; c’eft confé-
quemment dans l’eftomac 6c dans les inteftins qu’ils
commencèrent à en établir les opérations : d’où ils
étendirent enfuite fon domaine dans les voies du
fang 6c dans celles de toutes les humeurs du corps
humain, par un enchaînement de conféquences qui
réfultoient de leurs principes, toûjours ajuftés à fe
prêter à tout ce que peut fuggérer l’imagination,
lorfqu’elle n’eft pas réglée par le frein de l’expérience.
C’eft une opinion fort ancienne, que l’acide fert
à la chylification. Galien fait mention d’un acide
pour Cet ufage, dans fon traité de ufu partium, lib.
IV . cap. viij. il çonjefture qu’il eft porté de la rate
dans l’eftomac une forte d’excrément mélancholique
ou d’humeur atrabilaire, qui par fa nature acide &
âpre, a la faculté d’exciter les contrariions de ce vif-
cere. Avicenne paroît avoir pofitivement adopté ce
fentiment : lib. I . can.feu. 1. doclr. 4. cap. j . C ’eft auffi
dans le même fens que l’on trouve que Riolan (a n -
tropogr. I. I I . c. x x . ) attribue à l’acide la chylification.
Caftellus, médecin de l’école de Mefline, alla
plus loin ; ne trouvant pas (félon ce qui eft rapporté
dans fa lettre à Severinus) que la coftion des alimens
puiffe s’opérer par le feul effet de la chaleur , puif-
qu’on ne peut pas faire du chyle, dans une marmite
fur le feu, parla le premier ae fermentation comme
d’un moyen propre à fuppléer à ce défaut. Il prétendit
que cette puiffance phyfique eft néceffaire, eft
employée par la nature pour ouvrir, dilater les pores
des alimens dans l’eftomac, pour les faire enfler
6c les rendre perméables comme une éponge, afin
que la chaleur puiffe enfuite les pénétrer d’une maniéré
plus efficace qu’elle ne feroit fans Cette préparation
, afin qu’elle en opéré mieux la diffolution &
les rende plus mifcibles entr’eux. Telle fut l’opinion
de celui que l’on pourroit regarder à jufte titre comme
le chef des fermentateurs f qui n’en eft certainement
pas le moins raifonnable), c’eft-à-dire de ceux
qui ont introduit la fermentation dans la phyfique du
corps humain.
Mais perfonne avant le fameux Vanhelmont ne
s’étoit avifé, pour expliquer.l’ceuvre de la digeftion,
de foûtenir l’exiftence d’une humeur acide en qualité
de ferment, qui foit produite 6c inhérente dans le
corps humain ; perfonne avant cet auteur n’avoit
enfeigné qu’un ferment peut diffoudre les alimens
de la même maniéré que le font les diffolutions chimiques
par l’effet d’un menftrue. Vanhelmont .conçut
cette idée avant qu’il pût avoir cormoiffance de la
découverte de la circulation du fang; & quoique
cette découverte ait été faite de fon tems, il s’étoit
trop acquis de réputation par fon fyftème, 6c il en
étoit trop prévenu, peut-être même trop perfuadé,
pour y renoncer.
Ainfi tant que la circulation n’étoit pas admife;
on étoit fort embarraffé de trouver une caufe à laquelle
on pût folidement attribuer la chaleur animale
: cependant on voyoit que les alimens les plus
froids de leur nature, 6c qui.n’ont aucun principe de
vie par eux-mêmes, contraâent dans le corps humain
la chaleur vitale, qu’ils femblent porter & renouveler
continuellement dans toutes fes parties;
chaleur abfolument femblable à celle qui les animoit
avant que ces alimens fuffent pris,.digérés, & mêlés
avec les différentes humeurs animales. On obfer-
voit par les expériences convenables, que les fubftances
acides employées pour la nourriture,.font
changées par l’effet de la digeftion 6c de la coftion
des humeurs, en un fluide d’une nature fi différente,
qu’on peut fans aucune altération en tirer un fel volatil
; changement dont il eft certainement bien difficile
de rendre raifon.
Helmout, qui étoit tellement paflionné pour la
V v v ij