
Il eft abfolument néceffaire dans les états confédérés
» i ° que l’on marque certains tems 8c certains
lieux pour s’affembler ordinairement ; a° que l’on
nomme quelque membre qui ait pouvoir de convoquer
l’affemblée pour les affaires extraordinaires, 8c
qui ne peuvent fouffrir de retardement : ou bien 1 on
peu t, en prenant un autre parti, établir une affem-
blée qui foit toujours fur p ie , compofee des députés
de chaque état, 8c qui expédient les affaires communes
, fuivant les ordres de leurs fupérieurs. Telle eft
l ’affemblée des Etats -généraux à la H a y e, 8c peut-
être n’en pourroit-on pas citer d autre exemple.
On demande fi la décifion des affaires communes
doit dépendre du confentement unanime de tout le
corps des confédérés , ou feulement du plus grand
nombre. Il me femble en general que la liberté d un
état étant le pouvoir de décider en dernier reffort
des affaires qui concernent fa propre conservation,
on ne fauroit concevoir qu’un état foit libre par le
traité de confédération, lorfqti’on peut le contraindre
avec autorité à faire certaines choies. Si pourtant
dans les affemblées des états confédérés^ il s en
trouvoit quelqu’un qui refufat, par une obftination
ïnfenfée, de le rendre à la délibération des autres
dans des affaires très - importantes, je crois qu’on*
pourroit ou rompre la confédération avec cet état
qui trahit la caul'e commune, ou même ufer à fon
égard de tous les moyens permis dans l’état de liberté
naturelle, contre les infratteurs des alliances.
Les états compojes font diffous, i ° . lorfque quelques
uns des confédérés fe féparent pour gouverner
leurs affaires à part, ce qui arrive ordinairement
parce qu’ils croyent que cette union leur eft plus à
charge qu’avantageulè. 2°. Les guerres inteftines entre
les confédérés , rompent aulîi leur union, à
moins qu’avec la paix on ne renouvelle en même
tems la confédération. 3 ° .D u moment que quelqu’un
des états confédérés eft fubjugué par une puifl'ance
étrangère, ou devient dépendant d’un autre état, la
confédération ne fubfifte plus pour lu i, à moins qu’a-
près avoir été contraint à fe rendre au vainqueur
par la force des armes , il ne vienne cnf«te à être
délivré de cette fujétion. 40. Enfin un état compofé
devient un état (impie, fi tous les peuples confédérés
.fe foûmettent à l’autorité fouverame d une feule per-
fonne ; ou fi l’un de ces états, par la fuperiorite que
lui donnent fes forces, réduit les autres en forme de
province. Voye^ fur cette matière la differtation latine
de Puffendorf, de fyfiematibus civitatum, m-40.
Life? aulîi 1’hißoire des Provinces-unies 8c celle des
Cantons fuïffes ; vous y trouverez des chofes cu-
rieufes fur leur union 8c leur confédération differentes.
Article de M. le Chevalier D E J A U CO U R T . Etats confédérés, voyei Etats com-
P°Etats de l’Empire, (Hiß. & Droit publ.) On
appelle ainfi en Allemagne les citoyens ou membres
de l’Empire qui ont le droit de fuffrage 8c de féance
à la diete. Voye.1 Diete. Pour jouir de cette prérogative
il faut polféder des fiefs immédiats, c eft-à-
dire dont on reçoive l’inveftiture de l’empereur lui-
même , 8c non d’aucun autre prince ou état de C Empire.
Il faut outre cela que le nom de celui qui eft
état, foit inferit fur la matricule de l’Empire, pour
contribuer fa quote-part des collettes 8c autres im-
pofitions qu’on leve dans les befoins de ,1 Empire ;
cependant cette derniere regle foudre des exceptions
, parce qu’il y a des états de l'Empire qui font
exempts de ces fortes de contributions.
Les états de l'Empire fe divifent en laïcs 8c en ec-
cléfiaftiques, en Catholiques & en Proteftans : ces
derniers font ou de la confeffion d’Augsbourg, ou de
la religion réformée, attendu que ces deux religions
font admifes dans l’Allemagne. On trouvera à Yarttcle
Diete de l’Empire , les noms de ceux qui ont
droit de fuffrage 8c de féance à l’affemblée générale’
des états de l'Empire. Les états laïcs acquièrent leur
droit par fucceffion, les eccléfiaftiques l’acquierent
par l’élettion capitulaire ; les életteurs eccléfiaftiques
, les archevêques, prélats, abbés, abbeffes, &c.
deviennent états de l'Empire de cette maniéré : enfin
les villes impériales libres doivent aulîi être regardées
comme des états de l'Empire.
L’empereur ne peut dépouiller aucun des états de
fes prérogatives , il faut pour cela le confentement
de tout l’Empire. Voye[ Diete & Empire. Cependant
un état perd fes droits par ce qu’on appelle l’e-
xemption. Voyez cet article.
Il ne faut point confondre les états de l'Empire ,
dont nous venons de parler, avec les «Va« provinciaux
, ou des cercles : ces derniers ne joiiiffent pas
des mêmes prérogatives que les premiers ; cependant
il y a des états qui ont en même tems féance à la
diete générale de l’Empire, 8c aux dietes particulières
ou affemblées des cercles. (—) Etats, ( Hijlanc. & mod. & Jurifpr.') font l’a ffemblée
des députés des différens ordres de citoyens
qui compofent une nation, une province, ou une
ville. On appelle états généraux, l’affemblée des députés
des différens ordres de toute une nation. Les
états particuliers font l’affemblée des députés des différens
ordres d’une p rovince, ou d’une ville feulement.
Ces affemblées font nommées états, parce qu’elles
repréfentent les différens états ou ordres de la nation
, province ou ville dont les députés font affem-
blés. .
Il n’y a guere de nations policées chez lefquelles
il n’y ait eu des affemblées, foit de tout le peuple ou
des principaux de la nation ; mais ces affemblees ont
reçû divers noms, félon les tems 8c les pays , 8c
leur forme n’a pas été réglée par-tout de la même
maniéré.
Il y avoit chez les Romains trois ordres ; favoir
les fénateurs , les chevaliers, & le bas peuple,’ ap-
pellé plebs. Les prêtres formoient bien entr’eux différens
colUges , mais ils ne compofoient point un
ordre à part : on les tiroit des trois autres ordres indifféremment.
Le peuple avoit droit de fuffrage, de
même que les deux autres ordres. Lqrique l’onaffem-
bloit les comices oii l’on êlifoit les nouveaux ma-
giftrats, on y propofoit aulîi les nouvelles lo is , 8c
l’on y délibéroit de toutes les affaires publiques. Le
peuple étoit divifé en trente curies ; & comme il
eût été trop long de prendre toutes les v oix en détail
8c l’une après l’autre, on prenoit feulement la
vo ix de chaque curie. Les fuffrages fe donnoient
d’abord verbalement; mais vers l’an 614 de Rome
il fut réglé qu’on les donneroit par écrit. Servius
Tullius ayant partagé le peuple en fix claffes qu’il
fubdivifa en 193 centuries , on prenoit la voix de
chaque centurie. Il en fut de même lorfque le peuple
eut été divifé par tribus ; chaque tribu opinoit, 8c
l’on décidoit à la pluralité. Dans la fuite les empereurs
s’étant attribué feuls le pouvoir de faire des
lo is , de créer des magiftrats, 8c de, faire la paix 8c
la guerre, les comices cefferent d’avoir lieu ; le peuple
perdit p ar-là fon droit de fuffrage, le fénat fut
le feul ordre qui conferva une grande autorité.
L’ufage d’affembler les états ou différens ordres,
a néanmoins fubfifté dans plufieurs pa ys, & ces afi
femblées y reçoivent différens noms. En Pologne on
les appelle dietes; en Angleterre, parlemens ; 8c en
d’autres pa ys, états.
Dans quelques pays il n’y a que deux ordres ou
états, du moins qui foient admis aux affemblées générales
, comme en Pologne, où la nobleffe 8c le
clergé forment feuls les états qu’on appelle dietes, les
payfans y étant tous efclaves. Des nobles font exclus
de ces affemblées.
En Suede au contraire on diftingue quatre états
ou ordres différens de citoyens ; favoir la nobleffe,
le clergé, les bourgeois, &: les payfans.
Dans la plûj>art des autres pays on diftingue trois
états; le cierge, la nobleffe, 8c le tiers-état ou. troi-
fieme ordre, compofé des magiftrats municipaux,
des notables bourgeois , & du peuple. Telle eft la
divifion qui fubfifte préfentement en France ; mais
les chofes n’ont pas été toûjours réglées de même a
cet égard.
Avant la conquête des Gaules par Jules Céfar, il
n’y avoit que deux ordres ; celui des druides, 8c celui
des chevaliers : le peuple étoit dans une efpece
d’efclavage, 8c n’étoit admis à aucune délibération.
Lorfque les Francs jetterent les fondemens de la monarchie
françoife, ils ne reconnoiffoient qu’un feul
ordre dans Y état, qui étoit celui des nobles ou libres ;
en quoi ils conferverent quelque tems les moeurs des
Germains dont ils tiroient leur origine. Dans la fuite
le clergé forma un ordre à part, 8c obtint même le
premier rang dans les affemblées de la nation. Le
tiers-état ne fe forma que long-tems après fous la troi-
lieme race.
Quelques hiftoriens modernes ont qualifié très-
improprement YYétats, les affemblées de la nation
q u i, (ous la première race, fe tenoient au mois de
Mars; 8c fous la fécondé, au mois de Mai : d’oii elles
furent appellées champ de Mars 8c champ de Mai. On
leur donnoit encore divers autres noms, tels que
ceux de colloquium , concilium , judicium Francorum ,
placitum Mallum; 8c fous le régné de Pépin elles
commencèrent à prendre le nom de parlemens. Ces
anciens parlemens, dont celui de Paris 8c tous les
autres tirent fuccefîivement leur origine , n’étoient
pas une (impie affemblée d’états, dans le fens que ce
terme fe prend aujourd’hui ; c’étoit le confeil du roi
8c le premier tribunal de la nation, où fe traitoient
toutes les grandes affaires. L e roi préfidoit à cette affemblée
, ou quelqu’autre perfonne par lui commife
à cet effet. On y délibéroit de la paix 8c de la guerre,
de la police publique 8c adminiftration du royau«*«»
on y faifoit les lois ; on y jugeoit les crimes publics,
& tout ce qui touchoit la dignité 8c la furete du ro i,
8c la liberté des peuples.
Ces parlemens n’étoient d’abord compofés que
des nobles, 8c ils dirent enfuite réduits aux feuls
grands du royaume, 8c aux magiftrats qui leur furent
affociés. Le clergé ne formoit point encore un
ordre à p art, deforte que les prélats ne furent admis
à ces parlemens qu’en qualité de grands vaffaux de
la couronne. On ne connoiffoit point encore de tiers-
état; ainfi ces anciens parlemens ne peuvent être
confédérés comme une affemblée des trois états. Il
s’en faut d’ailleurs beaucoup que les affemblées d’é-
tats ayent jamais eu le même objet ni la même autorité
, ainfi qu’on le reconnoîtra fans peine en considérant
la maniéré dont les états ont été convoqués,
&dont les affaires y ont été traitées.
On ne connut pendant long-tems dans le royaume
que deux ordres, la nobleffe 8c le clergé.
Le tiers-état, compofé du peuple, étoit alors pref-
que tout ferf ; il ne commença à fe former que fous
Louis-le-Gros, par l’affranchiffement des ferfs, lef-
quels par ce moyen devinrent bourgeois du ro i, ou
des feigneurs qui les avoient affranchis.
Le peuple ainfi devenu libre', 8c admis à pofféder
propriétairement fes biens, chercha les moyens de
s’élever, 8c eut bientôt l’ambition d’avoir quelque
part au gouvernement de Y état. Nos rois l’élevèrent
par degrés en l’admettant aux charges, 8c en communiquant
la nobleffe à plufieurs roturiers ; ce qu’ils
firent fans doute pour balancer le crédit des deux
autres ordres, qui étoient devenus trop puiffans.
v II n’y eut cependant, jufqu’au tems de Philippe-
le-Bel, point d’autre affembfée repréfentative ae la
nation, que le parlement, lequel étoit alors compofé
feulement des grands vaffaux de la couronne,
8c des magiftrats, que l’on choififfoit ordinairement
entre les nobles,
Philippe-le-Bel fut le premier qui convoqua une
affemblée des trois états ou ordres du royaume, en
la forme qui a été ufitée depuis.
La première affemblée 8!états généraux fut convoquée
par des lettres du 13 Mars 1301 , que l’on
comptoit à Rome 1302. Ces lettres ne fubfiftent plus,
mais on les connoît par la réponfe qu’y fit le clergé ;
elles furent adreffées aux barons, archevêques, evê-
ques & prélats ; auxéglifes cathédrales, univerfités,
chapitres 8c collèges, pour y faire trouver leurs députés
; 8c aux baillis royaux, pour faire élire par les
villes des fyndics ou procureurs.
Ce fut à la perfuafion d’Enguerrand de Marigny
fon miniftre, que Philippe-le-Bel affembla de cette
maniéré les trois états, pour parvenir plus facilement
à lever fur les peuples une impofit-ion pour foûtenir
la guerre de Flandres, qui continuoit toûjours', 8c
pour fournir aux autres dépenfes de Philippe-le-Bel,
qui étoient exceflives. Le roi cherchoit par-là à ap-
paifer le peuple 8c à gagner les efprits, fur-tout à
caufe de les démêlés avec Boniface VIII. qui çom-
mençoient à éclater.
Ces états tinrent plufieurs féances, depuis la mi-
Carême jufqu’au 10 Avril qu’ils s’affemblerent dans
leglife de N otre-Dame de Paris. Philippe-le-Bel y
a îifta en perfonne : Pierre Flotte fon chancelier y
expofa les deffeins que le roi avoit de réprimer plufieurs
abus, notamment les entreprifes de Boniface
VIII. fur le temporel du royaume. Il repréfenta aufîî
les dépenfes que le roi étoit obligé de faire pour la
guerre, 8c les fecours qu’il attendoit de fes fujets ;
que fi Y état populaire ne contribuoit pas en perfonne
au fervice militaire, il devoit fournir des fecours
à'ârgent. l-er»! demanda lui-même que chaque corps
formât fa réfolution , 8c la déclarât publiquement
par forme de confeil.
La nobleffe s’étant retirée pour délibérer, 8c ayant
enfuite repris fes places, afïïira le roi de la réfolution
où elle étoit de le fervir de fa perfonne 8c de
fes biens.
Les eccléfiaftiques demandèrent un délai pour délibérer
amplement, ce qui leur fut refufé. Cependant
fur les interrogations que le roi leur fit lui-même
, favoir de qui ils tenoient leurs biens temporels,
8c de ce qu’ils penfoient être obligés de faire en
conféquence, ils reconnurent qu’ils tenoient leurs
biens de lui 8c de fa couronne ; qu’ils dévoient défendre
fa perfonne, fes enfans & fes proches, 8c la
liberté du royaume ; qu’ils s’y étoient engagés par
leur ferment, en prenant poffeflion des grands nefs
dont la plûpart étoient revêtus ; & que les autres v
étoient obligés par fidélité. Ils demandèrent en meme
tems permi filon de fe rendre auprès du pape pour
un concile, ce qui leur fut encore refufé, vû que la
bulle d’indication annonçoit que c’étoit pour procéder
contre le roi.
Le tiers-état s’expliqua par une requête qu’il préfen-
ta à genoux, fuppliant le roi de conferver la franchife
du royaume. Quelques auteurs mal informés ont crtx
que c’étoit une diftinttion humiliante pour le tiers-
état, de préfenter ainfi fes cahiers à genoux ; mais
ils n’ont pas fait attention que c’étoit autrefois l’ufage
obfervé par les trois ordres du royaume : 8c en
effet ils préfenterent ainfi leurs cahiers en 1576. La
preuve de ce fait fe trouve fo l ig v°. 47 v°. 58 v°.
d'un recueil fommaire des proportions & conclurons