
très cathérétiques, feront mis en ufage eu égard à
des ulcérés qui tiendront du caraôere des ulcérés
chancreux ; on pourra même employer le cautere
aûuel, mais avec prudence : & quant à l’écoulement
par les nafeaux, de quelque caufe qu’il provienne,on
pouffera plufieurs fois par jour dans les cavités na-
fales une injeftion faite avec de l’eau commune, dans
laquelle on aura fait bouillir légèrement de l’orge en
grain & diffoudre du miel. ' ,
Il eft encore très-utile de garantir les jambes ele-
phantiafées des impreflions de l’air ; & l’on doit d autant
moins s’en difpenfer, qu’il n’eft pas difficile d af-
fajettir fur cette partie un linge groffier propre à la
couvrir.
J’ai obfervé très-fouvent au moment de la difpa-
rition de tous les fymptomes du farcin, une fuppu-
ration dans l’un des pies de l’animal, & quelquefois
dans les quatre piés enfemble. On doit alors faire
ouverture à l’endroit d’où elle femble partir, y jet-
ter, lorfque le mal eff découvert, de la teinture de
myrrhe & d’aloès, & placer des plumaceaux mouillés
& baignés de cette même teinture. J’ai remarqué
encore plufieurs fois dans l’intérieur de l’ongle, entre
la foie & les parties qu’elles nous dérobent, un
vuide confidérable annoncé par le fon que rend le
fabot lorfqu’on le heurte ; j’ai rempli cette cavité,
de l’exiftence de laquelle je me fuis affûré, lorfqu’elle
n’a pas été une fuite de la fuppurafion, par le moyen
du boutoir, avec des bourdonnets chargés d’un di-
geftif dans lequel j’ai fait entrer l’huile d’hypericum,
la terebenthine en réfine, les jaunes d’oeufs, & une
fuffifante quantité d’eau-de-vie.
Perfonne n’ignore au-furplus l’utilité de la poudre
de vipere, par laquelle on doit terminer la cure de
la maladie qui fait l’objet de cet article ; & comme
on ne doute point aufli des falufaires effets d’un exercice
modéré , il eft impoffible qu’on ne fe rende pas
à la néceffité d’y folliciter régulièrement l’animal
pendant le traitement, & lorfque le virus montrera
moins d’aâivité.
Il faut de plus ne remettre le cheval guéri du farcin
à fa nourriture & à fon régime ordinaire, que
peu-à-peu , & que dans la circonftance d’un reta-
bliffement entier & parfait.
Du refte c’en eft affez, ce me femble, de ces faits
de pratique conftatés dans une forte d’hôpital de chevaux
que je dirige depuis fept ou huit années, & dans
lequel j’en ai guéri plus de quatre-vingt du mal dont
il s’ag it, pour donner au moins fur les fecours qu’il
exige, des notions infiniment plus certaines que les
çonnoiffances que l’on imagine puifer, à cet égard,
dans la plûpart de nos auteurs, connoiffances qui ne
nous préfentent rien de plus avantageux, que tous
ces fecrets merveilleux débités myftérieufement &
à un très-haut prix par un peuple de charlatans aufli
nombreux que celui qui de nos jours infeûe la Médecine
des hommes. («)
FARCINEUX, adj. (Maréchall.) adje&if mis en
ufage pour qualifier un cheval attaqué du farcin,
comme nous employons ceux de morveux & de pouf
f i f , pour défigner l’animal atteint de la morve & de
la pouffe. Ce)
FARD , 1. m. (Art cofmétique,) fucus, pigmentum ;
fe dit de toute compofition foit de blanc, foit de
rouge, dont les femmes, & quelques hommes mêmes
, fe fervent pour embellir leur teint, imiter les
couleurs de la jeuneffe, ou les réparer par artifice.
Le nom de fard, fucus, étoit encore plus étendu
autrefois qu’il ne l’eft aujourd’hui, & faifoit un art
particulier qu’on appella Commotique, xw/^uo-m^c’eft-
à-dire Yart de farder, qui comprenoit non-feulement
toutes les efpeces à&fard, mais encore tous les mé-
dicamens qui fer voient à ôter, à cacher, à rectifier
les difformités corporelles ; & c’eft cette derniere
partie de f ancienne Commotique que nous nommons
Orthopédie. Voye{ ORTHOPÉDIE.
L’amoiy de la beauté a fait imaginer de tems immémorial
tous les moyens qu’on a cru propres à en
augmenter l’éclat, à en perpétuer la durée, ou à en
rétablir les breches ; & les femmes, chez qui le goût
de plaire eft très-étendu, ont cru trouver ces moyens
dans les fardemens, fi je puis me fervir de ce vieux
terme co lle â if, plus énergique que celui de fard.
L’auteur du livre d’Enoc affûre qu’avant le déluge
, l’ange Azaliel apprit aux filles l’art de fe farder,
d’où l’on peut du moins inférer l’antiquité de cette
pratique.
L’antimoine eft le plus ancien fard dont il foit fait
mention dans l’hiftoire, & en même tems celui qui
a eu le plus de faveur. Job, chap. xl. v. 14, marque
affez le cas qu’on en faifoit, lorfqu’il donne à une
de fes filles le nom de vafe d'antimoine , ou de boîte
à mettre du fard, cornu jlibii.
Comme dans l’Orient les yeux noirs, grands 8C
fendus paffoient, ainfi qu’en France aujourd’hui,
pour les plus beaux, les femmes qui avoient envié
de plaire, fe frotoient le tour de l’oeil avec une aiguille
trempée dans du fard d’antimoine pour étendre
la paupière, ou plutôt pour la replier, afin que
l’oeil en parût plus grand. Auffi Ifaïe , ch. iij. v. 22.'
dans le dénombrement qu’il fait des parures des fille*
de Sion, n’oublie pas les aiguilles dont elles fe fer-
voient pour peindre leurs yeux & leurs paupières^
La mode en etoit fi reçue, que nous lifons dans un
des livres des rois, liv. IV. ch.jx. v.30. que Jéfabel
ayant appris l’arrivée de Jehu à Samarie, fe mit les
yeux dans l’antimoine, ou les plongea dans le fard,
comme s’exprime l’Ecriture, pour parler à cet ufur-
pateur, & pour fe montrer à lui. Jéremie, chap. jv^
v. So. lie ceffoit de crier aux filles de Judée : En vain
vous vous revêtirez de pourpre & vous mettre£ vos colliers
d'or $ en vain vous vouspeindre^ les yeux avec /’antimoine
, vos amans vous mépriferont. Les filles de Judée ne
crurent point le prophète, elles penferent toujours,
qu’il fe trompoit dans fes oracles ; en un m ot, rien
ne fut capable de les dégoûter de leur fard : c’eft
pour cela qu’Ezéchiel, chap. xxiij. v. 40. dévoilant
les déréglemens de la nation juive, fous l’idée d’une
femme débauchée, dit, qu'elle s'ejl baignée , qu’elle
s'efi parfumée , qu'elle a peint fes yeux d’antimoine,
qu'elle s'efi affife fur un très-beau lit & devant une table
bien couverte , &c.
Cet ufage du fard tiré de l’antimoine ne finit pas
dans les filles de Sion ; il fe gliffa, s’étendit, fe perpétua
par-tout. Nous trouvons que Tertullien &
S. Cyprien déclamèrent à leur tour très-vivement
contre cette coûtume ufitée de leur tems en Afrique
, de fe peindre les yeux & les fourcils avec du
fard d’antimoine : inunge oculos tuos, non ftibio dia-
boli ,fed collyrio Chrifii , s’écrioit S. Cyprien.
Ce qu’il y a de fingulier, c’eft qu’aujourd’hui les
femmes Syriennes , Babyloniennes, & Arabes, fe
noirciffent du même fard le tour de l’oe il, & que les
hommes en font autant dans les deferts de l’Arabie,
pour fe conferver les yeux contre l’ardeur du foleil.1
Voyeç Tavernier, voyage de Perfe, liv. I I. ch. vif. 8c
Gabriel Sionita, de moribus orient, cap. x j. M. d’Ar-
vieu x, dans fes voyages imprimés à Paris en iy iy , livre
X I I . pag. xy , remarque, en parlant des femmes
Arabes, qu’elles bordent leurs yeux d’une couleur
noire compofée avec de la tuthié, & qu’elles tirent
une ligne de ce noir en-dehors du coin de l’oe il, pour;
le faire paroître plus fendu.
Depuis les voyages de M. d’A rvieux, le favant
M. Shaw rapporte dans ceux qu’il a faits en Barbarie,
à l’occafion des femmes de ces contrées, qu’elles
croiroient qu’il manqueroit quelque choie d’effentiel
à leur parure, fi elles n’ayoient pas teint le poil de
leurs paujpiéres & leurs yeux de ce qu’on nommé
al-co-hol, qui eft la poudre de mine de plomb. Cette
opération fe fait en trempant dans cette poudre un
petit poinçon de bois de la groffeur d’une plume, &
en le paffant enfuite entre les paupières : elles fe persuadent
que la couleur fombre, que l’on parvient de
cette façon à donner aux yeux , eft un grand agrément
au vifage de toutesffortes de perfonnes.
Entr’autres colifichets des femmes d’Egypte, ajoû-
te le voyageur anglois, j’ai vû tuer des catacombes
de Sakara, un bout de rofeau ordinaire renfermant
un poinçon de la même efpece de ceux des Barbaref-
ques, & une once de la même poudre dont on fe fert
encore a&uellement ( 1740) dans ce pays-là, pour le
même ufage.
Les femmes greques & romaines empruntèrent
des Afiatiques, la coûtume de fe peindre lés yeux
avec de l’antimoine ; mais pour étendre encore plus
loin l’empire de la beauté, & réparer les couleurs
flétries, elles imaginèrent deux nouveaux fards inconnus
auparavant dans le monde, & qui ont paffé
jufqu’à nous : je veux dire le blanc & le rouge. Delà
vient que les Poètes feignirent que la blancheur
d’Europe ne lui venoit que parce qu’une des filles
de Junon avoit dérobé le petit pot de fard blanc de
cette déeffe, & en avoit fait préfent à la fille d’A-
genor. Quand les richeffes affluèrent dans Rome, elles
y portèrent un luxe affreux ; la galanterie introduisit
les recherches les plus rafinées dans ce genre >
& la corruption générale y mit le fceau.
Ce que Juvénal nous dit des bapfes d’Athènes,
de ces prêtres efféminés qu’il admet aux myfteres
de la toilette, fe doit entendre des dames romaines
, fur l’exemple defquelles, ceux dont le poète
Veut parler, mettoient du blanc & du rouge, at-
tachoient leurs longs cheveux d’un cordon d’o r , &
fe noirciffoient le fourcil, en le tournant en demi-
rond avec une aiguille de tête.
Ille fupercilium madidâ fuligine factum ,
Obliqua producit acu , pingitque trementes ,
Attollens oculos. Juvén. Sat. 2.
Nos dames, dit Pline le naturalifte, fe fardent par
air jufqu’aux yeux, tanta efidecoris affectatio , ut tin-
gantur oculi quoque ,• mais ce n’étoit - là qu’un leger
crayon de leur molleffe.
Elles paffoient de leurs lits dans des baii\s magnifiques
, & là elfes fe fervoient de pierres - ponces
pour fe polir & s’adoucir la peau, & elles avoient
vingt fortes d’efclaves en titre pour cet ufage. A
cette propreté, luxurieufe , fuccéda Pondion & les
parfums d’Aflyrie : enfin le vifage ne reçut pas moins
<le façons 8c a’ornemens que le refte du corps.
Nous avons dans Ovide des recettes détaillées de
fards, qu’il confeilloit de fon tems aux dames romaines
; je dis aux dames romaines, car le fard du blanc
&.du rouge étoit refervé aux femmes de qualité fous
le régné d’Augufte ; les courtifanes & les affranchies
n’ofoient point encore en mettre.Prenez donc de l’orge,
leur difoit-il,qu’envoyent ici les laboureurs de Libye
; ôtez-en la paille & la robe ; prenez une pareille
quantité d’ers ou d’orobe, détrempés l’un & l’autre
dans des oeufs, avec proportion ; faites fécher &
broyer le tout ; jettez-y de la poudre de corne de
cerf; ajoûtez-y quelques oignons de narciffe ; pilez le
tout dans le mortier ; vous y admettrez enfin la gomme
8c la farine de froment de Tofcane; que le tout
foit lié par une quantité de miel convenable : celle
qui fe lervira de ce fard, a joû te -il, aura le teint
plus net que la glace de fon miroir.
Qucecumque afficiet tali mtdicamine vultum ,
Fulgebit fpeculo loevior ipfa fuo.
M ais on inventa bien - tôt une recette plus fimple
que celle d’Ovidè, & qui eut la plus grande vogue :
c ’étoit un fard compofe de la terre de Chio, ou de
Samos, que l’on faifoit diffoudre dans du vinaigre,
Horace l’appelle humida creta. Pline nous apprend
que les dames s’en fervoient pour fe blanchir la peau,
de même que de la terre de Selinufe, qui eft, dit- il,
d un blanc de lait,& qui fe diffout promptement dans 1 eau. Fabula, félon Maniai, craignoit la pluie, à
caufe de la craie qui étoit fur fon vifage ; c’étoit
une des terres dont nous venons de parler. Et Pétrone
, en peignant un efféminé , s’|xprime ainfi : Per-
fiuebant per frontém fudantis acacia rivi , & inter ru-
gas malarum, tantum erat creta , utputares detraclum
parietem nimbo laborare: » Des ruiffeaux de gOmme
» couloient fur fon front avec la fueur, & la craie
» efoit fi epaiffe dans les rides de fés’ joues, qu’on
» auroit dit que c’étoit un mur que la pluie avoit dc-
■ » blanchi ».
Poppeé, cette célébré courtifane, douée de tous
les avantages de fon fexe, hors de la chafteté, ufoit
pour fon vifage d’une éfpece de fard onéhieux, qui
formoit une croûte durable > & qui ne tomboit qiFa-
près avoir été lavée avec une grande quantité de
lait, lequel en détachoit les parties', & découvroit
une extreme blancheur 1 Poppée, dis-je, mit ce nouveau
fard a la mode, lui donna fon nom, Poppaanà
pingicia, & s’en fervit dans fon exil même, où elle
fit mener avec elle un troupeau d’âneffes, & fe fe-
roit montrée avec ce cortège, dit Juvénal, jufqu’au
pôle hyperborée.
Cette pâte de l’invention de Poppée qui coüvroit
tout le v ifage, formoit un mafque, avec lequel les
femmes alloientdans l’intérieur de leur maifon : c’é-
toit-là, pour ainfi dire, le vifage domeftique, & lé
feul qui étoit connu du mari. Ses levres,fi nous écoutons
Juvénal, s’y prenoient à la glu :
Mine miferi vifeantur labra marin.
Ce teint tout neuf, cette fleur dè peau, h’étoit faite
que pour les amans ; & fur ce p ié -là , ajoûte l ’abbé
Nadal, la nature ne donnoit rien ni aux uns ni aux
autres.
Les dames romaines fe fervoient pour le rouge l
au rapport de Pline , d’une efpece àe fucus qui étoit
une racine de Syrie avec laquelle on teignoit les laines.
MaisThéophrafte eft ici plus exaû que le natu-
ralifte romain : les Grecs, félon lu i, appelaient
eus, tout Ce qui pouvoit peindre la chair ; tandis que
la fubftance particulière dont les femmes fe fervoient
pour peindre leurs joues de rouge, étoit diftinguéé
par le nom de rifwn, racine qu’on apportoit de Syrie
en Grece à Ce lùjet. Les Latins, à l’imitation du
terme grec , appelleront cette plante radicula ; 8c
Pline l’a confondue avec la racine dont on teignoit
les laines.
Il eft fi vrai que le mot fucus étoit un terme général
pour défigner le fard, que les Grecs & les Romains
avoient un fucus métallique qu’ils employoient
pour le blanc, & qui n’étoit autre chofe que la cé-*
rufe ou le blanc de plomb de nos revendeufes à la
toilette. Leur fucus rouge fe droit de la racine rizion,
& étoit uniquement deftiné pour rougir les joues :
ils fe fervirent aufli dans la iùite pour leur blanc,
d’un fucus compofé d’une efpece de craie argentine ;
& pour le rouge du purpuriffum, préparation qu’ils
faiioient de l’écume de la pourpre, lorfqu’elle étoit
encore toute chaude. Moye^ P o u r pr e , {Coquille).
C ’en eft affez fur les dames greques & romaines*
Pourfuivons à-préfent l’hiftoire du fard jufqu’à nos
jours, & prouvons que la plûpart des peuples de
l’Afie & de l’Afrique font encore dans l’ufage de fe
colorier diverfes parties du corps de noir, de blanc,
de rouge, de b leu, de jaune, de verd, en un mot de
toutes fortes de çouleurs, fuivant les idées qu’ils f®