
il faut confidérer quel étoit le' caraâere des prêtres
égyptiens. Elien rapporte que dans les premiers tems
ils étoient juges 6c magiftrats. Confidérés fous ce
point de vû e, le bien public devoit être le principal
objet de leurs foins dans ce qu’ils enfeignoient,
comme dans ce qu’ils cachoient ; en conféquence ils
ont été les premiers qui jont prétendu avoir communication
avec les dieux, qui ont enfeigné le dogme
des peines 6c des récompenfes d’une autre v ie , &
q ui, pour foûtenir cette opinion, ont établi les myf-
teres dont le fecret étoit l’unité de Dieu.
Une preuve évidente que le but des inftru&ions
fecretes étoit le bien public, c’eft le foin que l’on
prenoit de les communiquer principalement aux rois
6c auxmagiftrats. «Les Egyptiens, ditClément d’Ale-
» xandrie, ne révèlent point leurs myfteres indiftinc-
» tement à toutes fortes de perfonnes ; ils n’expofent
vt point aux prophanes leurs vérités facrées ; ils ne
» les confient qu’à ceux qui doivent fuccéder à l’àd-
»> miniftration de l’état, 6c à quelques-uns de leurs
» prêtres les plus recommandables par leur éduca-
» tion, leiir lavoir 6c leurs qualités ».
L ’autorité de Plutarque confirme la même chofe.
* Les rois, d it- il, étoient choifis parmi les prêtres
.» ou parmi les. hommes de guerre. Çes deux états
-»> étoient honorés & refpeâes, l’un à caufe de fa fa-
•» geffe, 6c l’autre à caufe de fa bravoure ; mais lorf-
» qu’on choififfoit un homme de guerre , on l’en-
» voyoit d’abord au collège des prêtres , où il étoit
» inlbuit de leur philofophie fecrete, 6c où on lui
» dévoiloit la vérité cachée fous le voile des fables
*> & des allégories ».
Les mages.de Perfe, les druides des Gaules & les
brachmanes des Indes, tous femblables aux prêtres
égyptiens, & qui comme eux participoient à l’adnVi-
niftration publique, avoient de la même manière &
dans la même vue leur do&rine publique 6c leur doctrine
fecrete.
. Ce qui a fait prendre le change aux anciens 6c aux
modernes liir le but de là double.doârine, 6c leur a
fait imaginer qu’elle n’.étoit qu’un artifice pour con-
Lerver la gloire des fciences & de ceux qui en fai-
foient profeffion, a été l’opinion générale que les
fables des dieux 6c des héros avoient été inventées
par les fages de la première antiquité, pour déguiler
■ 6c cacher des vérités naturelles 6c morales, dont ils
•vouloient avoir le plaifir de fe réferver l’explication.
Les philofophes grecs des derniers tems font les auteurs
de cette faulfehypothèfe, car il eft évident que
l ’ancienne Mythôlogie duPaganifme naquit de la corruption
de l’ancienne tradition hiftorique ; corruption
qui naquit elle-même des préjugés 6c des folies
du peuple, premier auteur des fables 6c des allégories
: ce qui dans la fuite donna lieu d’inventer l’u-
iage de la double doôrine, non pour le fimple plaifir
d’expliquer les prétendues vérités cachées fous l’enveloppe
de ces fables, mais pour tourner au bien
du peuple les fruits mêmes de fa folie 6c de fes pré-
jugés.
Les légiflateurs grecs furent les premiers de leur
nation qui voyagèrent en Egypte. Comme les Egyptiens
étoient alors le peuple le plus fameux dans l’art
du gouvernement, les premiers Grecs qui projetter
e z de réduire en fociété civile les différentes hordes
ou tribus errantes de la Grece , allèrent s’inftruire
chez cette nation favante, des principes qui fervent
de fondement à la fcience des légiflateurs, 6c ce fut
le feul objet auquel ils s’appliquèrent : tels frirent
Orphée,Rhadamante, M inos,Lycaon, Triptoleme,
&c. C ’eft-là qu’ils apprirent l’ufage de la double doctrine,
dont l’inftitution des myfteres, une des par*
ties des plus effentielles de leurs établiffemens politiques,
eftun monument remarquable. Voyellesdif-
fenations fur Vunion de La Religion , de la Morale &
de la Politique, tirées de Varburton par M. de Sit-
hoiiete, tom. II. diffère, yiij. Art. de M. Formey. ...
EXOTIQUE, (Jardin.) fe dit d’une plante étrangère
, d’un fruit. Cette plante efl exotique.
EXPANSIBILITÉ, f. f. ,(Phyfique.) propriété de
certains fluides, par laquelle ils tendent fans ceffe
à occuper un efpace plus grand. L’air & toutes les
fubftances qui ont acquis le degré de .chaleur nécefi-
faire pour leur- vaporifation, comme l’eau au-deffuS
du terme de l’eau bouillante , font expanïibles. Il
fuit de notre définition, que ces fluides ne font retenus
dans de certaines bornes que par la force comprimante
d’un obftacle étranger , 6c que l’équilibre
de cette force avec la force expanfive, détermine
l’efpace aftuel qu’ils occupent. Tout corps expanfi-
ble eft donc aufli compreffible; 6c ces deux fermes
oppofés n’expriment que deux effets néceffaires d’urne
propriété unique dont nous.allons parler. Nous
traiterons dans cet article,
Premièrement , de l’expanfibilité confidërée en
elle-même 8c comme une propriété mathématique
de certains corps, de fes lois, & d e fës effets. :
Secondement, de l’expanfibilité confidéréè phy-
fiquement, des fubftances auxquelles elle appartient
, 6c des caufes qui la produifent.
Troifiemement, de Vexpanfibïlité comparée dans
les différentes fubftances auxquelles elle appartient-.
Quatrièmement, nous indiquerons en peu de mots
les ufages-de V expanfibilité, 6c la part qu’elle-a dans
la production des principaux phénomènes de la nature.
De 1'expanfibilité en elle-même , de fes lois , & de fes
effets. Un corps expanfible laiffé à lui-même, ne peut
s’étendre dans un plus grand efpace 6c l’occuper .uniformément
tout entier, fans que toutes fes parties
s’éloignent également les unes des autres : le princif
pe unique de f expanfibilité eft donc une force quelconque
, par laquelle les parties du fluide expanfible
tendent continuellement à s’écarter les unes des ait1*
trè s, & lutent en tout fens contre les forces corn-
preflives qui lés rapprochent. C’eft ce qu’exprime
le terme de répulfion, dont Newton s’eft quelquefois
fervi pour la défigner.
Cette force repulfive des particules peut fuivre
différentes lois, c’eft-à-dire qu’elle peut croître 6c
décroître en raifon de telle ou telle fonâion des difi*
tances des particules. La condenfation ou la réduction
à un moindre efpace, peut fuivre aufli dans tel
ou tel rapport, l’augmentation de la force comprimante
; 6c l’on voit au premier coup-d’oeil que la loi
qui exprime le rapport des condensations ou des ef-
paces à la force comprimante, 6c celle qui exprime
le rapport de la force répulfive à la diftance des particules
, font relatives l’une à l’autre, puifque l’efpa-
ce occupé, comme nous l’avons déjà dit, n’eft déterminé
que par l’équilibre de la force comprimante
avec la force répulfive. L’une de ces deux lois étant
donnée, il eft aifé de trouver l’autre. Newton a le
premier fait cette recherche (/iv. II. des principes ,
prop. 23.) ; 6c c’eft d’après lui que nous allons donner
le rapport de ces deux lois, ou la loi générale de
Vexpanfibilité.
La même quantité de fluide étant fuppofée, & la
condenfation inégale, le nombre des particules fera
le même dans des efpaces inégaux ; 6c leur diftance
mefurée d’un centre à l’autre, fera toujours en raifon
des racines cubiques des efpaces ; o u , ce qui eft la
même chofe, en raifon inverfe des racines cubiques
des condenfations : car la condenfation fuit la raifon
inverfe des efpaces, fi la quantité du fluide eft la même
; & la raifon direfre des quantités du fluide, fi
les efpaces font égaux.
Cela pofé : foient deux cubes égaux, mais remplis
d’un fluide inégalement condenfé ; la preffion
qu’exerce le fluide fur chacune des faces des deux
cubes, & qui fait équilibre avec l ’afrion de la force
comprimante fur ces mêmes faces, eft égale au nombre
des particules qui agiffent immédiatement fur ces
faces, multiplié par la force de chaque particule. Or
chaque particule preffe la furface contiguë avec la
même force avec laquelle elle fuit la particule voifi-
ne: car ici Newton fuppofe que chaque particule
agit feulement fur lâ particule la plus prochaine ; il
a foin, à la vérité, d’obferver en même tems que
cette fuppofition ne pourroit avoir lieu, fi l’on re-
gardoit la force répulfive comme une loi mathématique
dont l’aftion s’étendît à toutes les diftances,
comme celle de la pefanteur, fans être, arrêtée par
les corps intermédiaires* Car dans cette hypothèfe
il faüdroit avoir égard à la force répulfive des particules
les plus éloignées, 6c la force comprimante de-
vroit être plus confidérable pour produire une égale
condenfation ; la force avec laquelle chaque particule
preffe la furface du cube, eft donc la force même
déterminée par la loi de répulfion, 6c par la diftance
des particules entr’elles ; c’eft donc cette force qu’il
faut multiplier par le nombre des particules, pour
avoir la preffion totale fur la furface, ou la force
comprimante. Or ce nombre à condenfation égale
feroit comme les furfaces ; à furfaces égales, il eft
comme les quarrés des racines cubiques du nombre
des particules, ou de la quantité du fluide contenu
dans chaque cube, c’eft-à-dire comme les quarrés des
racines cubiques des condenfations ; o u , ce qui eft la
même chofe, en raifon inverfe du quarré des diftances
des particules, puifque les diftances des particules
font toujours en raifon inverfe des racines cubiques
des condenfations. Donc la preffion du fluide
fur chaque face des deux cubes, ou la force comprimante
, eft toujours le produit du quarré des racines
cubiques des condenfations, ou du quarré inverfe
de la diftance des particules, par la fonôion quelconque
de la diftance, à laquelle la répulfion eft proportionnelle.
D on c, fi la répulfion fuit la raifon inverfe de la
diftance des particules, la preffion fuivra la raifon
inverfe des cubes de ces diftances, o u , ce qui eft la
même chofe, la raifon direfre des condenfations. Si !
la répulfion fuit la raifon inverfe des quarrés des diftances
, la force comprimante fuivra la raifon inverfe
des quatrièmes puiffances de ces diftances, ou
la raifon direfre des quatrièmes puiffances des racines
cubiques des condenfations ; 6c ainfi dans toute
hypothèfe , en ajoûtant toûjours à l’expofant quelconque
n de la diftance, qui exprime la loi de répulfion,
l’expofant du quarré ou le nombre 2.
Et réciproquement pour connoître la loi de la répulfion
, il faut toujours divifer la force comprimante
par le quarré des racines cubiques des condenfations
; o u , ce qui effila même chofe, fouftraire toûjours
2 de l’expofant qui exprime le rapport de la
force comprimante à la racine cubique des condenfations
: car on aura par-là le rapport de la répulfion
avec les racines cubiques des condenfations, 6c l’on
fait que la diftance des centres des particules fuit la
raifon inverfe de ces racines cubiques.
D ’après cette réglé, il fera toûjours aifé de connoître
la loi de la répulfion entre les particules d’un
fluide, lorfque l’expérience aura déterminé le rapport
de la condenfation à la force comprimante :
ainfi les particules de l’air, dont on fait que la condenfation
eft proportionnelle au poids qui le comprime
( voye^ A ir ) , fe fuient avec une force qui fuit
la raifon inverfe de leurs diftances.
Il y a pourtant une reftriftion néceffaire à mettre
à cette loi : c’eft qu’elle ne peut avoir lieu que dans
*ne certaine latitude moyenne entre l’extrême com-
preffion & l’extrême expanfion. L’extrême compref-
Tome VIt
fion a pour bornes le contaft, où toute proportion
ceffe, quoiqu’il y ait encore quelque diftance entre
les centres des particules. L’expanfion,à la vérité,
n’a point de bornes mathématiques ; mais fi elle effi
1 effet d une caufe méchanique interpofée entre les
particules du fluide , 6c dont l’effort tend à les écarter
, on ne peut guere fuppofer que cette caufe agiffe
à toutes les diftances ; & la plus grande diftance à laquelle
elle agira,fera la borne phyfique de Ÿexpanfibi-
Lite. Voilà donc deux points où la loi de la répulfion,
ne s’obferve plus du tout : l’un à une diftance très-
courte du centre des particules, 6c l’autre à une diftance
très-éloignée ; & il n’y a pas d’apparence que
cette loi n’éprouve aucune irrégularité aux approches
de l’un ou de l’autre de ces deux termes.
Quant à ce qui concerne le terme de la compreffion j
fi I’attrafrion de cohéfion a lieu dans les petites diftances,
comme les phénomènes donnent tout lieu,
de le croire (voye^ Tuyaux capillaires, Réfraction
de la Lumière, Cohésion, Induration,
Glace, Crystallisation des Sels,
Rapports chimiques , &c. ) ; il eft évident au
premier çoup-d’oeil que la loi de la répulfion doit
commencer à être troublée, dès que les particules en
s’approchant atteignent les limites.de leur attraélion
mutuelle, qui agiffant dans un fens contraire à la répulfion,
en diminue d’abord l’effet 6c le détruit bientôt
entièrement , même avant le contafr; parce que
croiffant dans une proportion plus grande que l’in-
verfe du quarré des diftances, tandis que la répulfion
n’augmente qu’en raifon inverfe des diftances
fimples, elle doit bientôt furpaffer beaucoup celle-ci.
De plus,,fi, comme nous l’avons fuppofé, la répulfion
eft produite par une caufe méchanique, interpofée,
entre les particules, & qui faffe également effort
fur les deux particules voifines pour les écarter, cet
effort ne peut avoir d’autre point d’appui que la fur-
face des particules ; les rayons, fuivant lefquels fon
aftivité s’étendra, n’auront donc point un centre unique
, mais ils partiront de tous les points de cette fur-
face j & les décroiffemens de cette aéhvi té ne feront
relatifs aux centres mêmes des particules, que lorfque
les diftances feront affez grandes pour que leur
rapport, avec les dimenfions des particules, foit devenu
inaffignable ; 6c lorfqu’on pourra fans erreur
fenfible, regarder la particule toute entière comme
un point. Or , dans la démonftration de la loi de
Vexpanfibilité,-nous n’avons jamais confidéré que les
diftances entre les centres des particules , puifque
nous ayons dit qu’elles fuivoient la raifon inverfe
des racines cubiques des condenfations. La loi de la
répulfion, 6c par conféquent le rapport des condenfations
avec les forces comprimantes, doit donc être
troublée encore par cette raifon, dans le cas où la
compreffion eft pouffée très - loin. Et je dirai en paf-
fant, que fi l’on peut porter la condenfation de l’air
jufqu’à ce degré, il n’eft peut-être pas impoffible de
former d’après cette idée des conje&ures raifonna-
bles fur la tenuité des parties de l’air, 6c fur les limites
de leur attraûion mutuelle.
Quant aux altérations que doit fubir la loi de la
répulfion aux approches du dernier terme de l’ex-
panfion, quelle que foit la caufe qui termine l’activité
des forces répulfives à un certain degré d’ex-
panfion, peut-on luppofer qu’une force dont l’activité
décroît fuivant une progreffion qui par fa nature
n’a point de dernier terme, celfe.cependant
tou t-à-cou p d’agir fans que cette progreffion ait
été altérée le moins du monde dans les diftances
les plus voifines de cette ceffation totale ?
6c puifque la Phyfique ne nous montre nulle part
de pareils fauts, ne leroit-il pas bien plus dans l’analogie
de penfer que ce dernier terme a été préparé
dès long-tems par une efpece de correftion à la loj
M m i j