
qui furchargent la rna'ffe, Te dépofent fur les parties
les moins difpofées à rélifter à leur abord; & le s portions
glanduleufes de la gorge , naturellement affez
lâches, & abreuvées d’une grande quantité d’humeur
mitqueufe-, font le plus fréquemment le lieu oh
elles fe fixent. z°. Dès que nous abreuvons un cheval
aufli-tôt après un exercice violent, & que nous
lui préfentons une eau vive & trop froide, ces mêmes
parties en fouffrant immédiatement l’impreffion,
la boiflon occafionne d’une part le refferrement fou-
dain de toutes les fibres de leurs vaiflèaux, & par
une fuite immanquable, celui des pores exhalans, &
des orifices de leurs tuyaux excrétoires. D ’un autre
c ô té , elle ne peut que procurer l’épaifliffement de
toutes les humeurs contenues dans ces canaux, dont
les parois font d’ailleurs affez fines & affez déliées
pour que les corpufcules frigorifiques agiffent &
s’exercent fur les liqueurs qui y circulent. Ces premiers
effets, qui produifent dans l’homme une extinction
de voix ou un enrouement, fe déclarent dans
le cheval par une toux fourde, à laquelle fouvent
tous les accidens ne fe bornent pas. Les liqueurs
étant retenues & arrêtées dans les vaiffeaux, celles
qui y affluent font effort contre leurs parois, tandis
qu’ils n’agiffent eux-mêmes que fur le liquide qui les
contraint : celui-ci preflé par leur réaCtion , gêné
par les humeurs en ftafe qui s’oppolent à fon paflage,
&C pouffé fans celle par le fluide qu’il précédé, fe fait
bientôt jour dans les vaiflèaux voilins. Tel qui ne
reçoit, pour ainfi dire, que les globules féreufes ,
étant forcé, admet les globules rouges ; & c’eft ainfi
qu’accroît l’engorgement, qui peut encore être fuivi
d’une grande inflammation, vûla diftenfion extraordinaire
des folides , leur irritation , & la perte de
leur foupleffe enfuite de la rigidité qu’ils ont acquife.
Ces progrès ne furprennent point, lorfqu’on réfléchit
qu’il s’agit ici des parties garnies & parfemées
de nombre de vaiffeaux prépofes à la féparation des
humeurs, dont l’excrétion empêchée &C fufpendue,
doit donner lieu à de plus énormes ravages. En effet,
l’irritation des folides ne peut que s’étendre & fe
communiquer des nerfs de la partie à tout le genre
nerveux : il y a donc dès-lors une augmentation de
mouvement dans tout le fyftème des fibres & des
vaiffeaux. D e plus, les liqueurs arrêtées tout-à-coup
par. le refferrement des pores & des tuyaux excrétoires,
refluent en partie dans la maffe, à laquelle
elles font étrangères ; elles l’alterent. inconteftable-
ment, elles détruifent l’équilibre qui doit y regner.
En faut-il davantage pour rendre la circulation irrégulière
, vague & précipitée dans toute fon étendue ;
pour produire enfin la fievre, & en conféquence la
dépravation de la plupart des fondions, dont l’excrétion
parfaite dépend toûjours de la régularité du
mouvement circulaire ?
Un funefte enchaînement de maux dépendant les
uns des autres, & ne reconnoiffant qu’une feule &
même caufe, quoique legere, entraîne donc fouvent
la deftru&ion & l’anéantiffement total de la machine
, lorfqu’on ne fe précautionne pas contre les premiers
accidens, ou lorfqu’on a la témérité d’entre^
prendre d’y remédier fans connoître les lois de l’économie'animale
, & fans égard aux principes d’une
faine Thérapeutique.
- Toutes les indications curatives fé réduifent d’abord
ici à favorifer la réfolution. Pour cet effet on
vùidera les vaiffeaux par d’amples faignées à la jugulaire
, que l’on ne craindra pas de multiplier dans
les efquinancies graves. On prefcrira un régime délayant
, rafraîchiffant : l’animal fera tenu au fon &
à l’eau blanche ; on lui donnera des lavemens émoi-
liens régulièrement deux ou trois fois par jour ; ÔC
la même décoâion préparée pour ces lavemens,
mêlée avec fon eau blanche , fera une boiffon des
plüsfalutaires. Si la fievre n’eft pas confidérable, on
pourra lui adminiftrer quelques légers diaphoniques
, àl’effet de rétablir la tranfpiration, & de pouffer
en - dehors, par cette voie , l’humeur furabon-
dante.
Les topiques dont nous uferons, feront, dans le
cas d’une grande inflammation , des cataplafmes de
plantes émollientes ; & dans celui oh elle ne feroit
que foible & legere, & oh nous appercevrions plutôt
un Ample engorgement d’humeurs vifqueufes ,
des cataplafmes réfolutifs. Lors même que le mal ré-
fidera dans l’intérieur, on ne ceffera pas les applications
extérieures; elles agiront moins efficacement,
mais elles ne feront pas inutiles, puifque les vaiffeaux
de toutes ces parties communiquent entr’eux ,
& répondent les uns aux autres.
Si la fquinancie ayant été négligée dès les com-
mencemens, l’humeur forme extérieurement un dépôt
qui ne puiffe fe terminer que par la fuppuration,
on mettra en ufage les cataplafmes maturatifs ; on
examinera attentivement la tumeur, & on l’ouvrira
avec le fer aufli-tôt que l’on y appercevra de la fluctuation.
Il n’èft pas poflible de foulager ainfi l’animal
dans la circonflance oh le dépôt efi interne ; tous les
chemins pour y arriver, & pour reconnoître préci-
fément le lieu que nous devrions percer, nous font
interdits : mais les cataplafmes anodyns fixés extérieurement
, diminueront la tenfion & la douleur.
Nous hâterons la fuppuration , en injeâant des liqueurs
propres à cet effet dans les nafeaux de l’animal
, & qui tiendront lieu des gargarifmes que l’on
preferit à l’homme ; comme lorfqu’il s’agira de ré-
ioudre , nous injecterons des liqueurs réfolutives.
Enfin la fuppuration étant faite & le dépôt abcédé »
ce que nous reconnoîtrons à la diminution de la fievre
, à l’excrétion des matières mêmes, qui flueront
en plus ou moins grande quantité de la bouche du
cheval ; à une plus grande liberté de fe mouvoir, &c.
nous lui mettrons plufieurs fois par jour des billots
enveloppés d’un linge roulé en plufieurs doubles ,
que nous aurons trempés dans du miel rofat.
Toute inflammation peut fe terminer par-là e»
gangrené, & i’efquinancie n’en eft pas exempte. On
conçoit qu’alors le mal a été porté à fon plus haut
degré. Tous les accidens font beaucoup plus v io-
lens. La fievre, l’excrétion des matières vifqueufes,
qui précédé la féchereffe de la langue & l’aridité de
toute la bouche ; l’inflammation & la rougeur des
y e u x , qui femblent fortir de leur orbite ; l’état inquiet
de l’animal, l’impoflibilité dans laquelle il eft
d’avaler, fon oppreflion, tout annonce une difpofi-
tion prochaine à la mortification. Quand elle eft formée
, la plûpart de ces fymptomes redoutables s’é-
vanoiiiffent, le battement de flanc eft appaifé , la
douleur de la gorge eft calmée , la rougeur de l’oeil -
diffipée, l’animal, en un mot, plus tranquille ; mais
on ne doit pas s’y tromper, l’abattement occafionne
plutôt ce calme & cette tranquillité fauffe & apparente
, que la diminution du mal. Si l’on confidere
exaôement le cheval dans cet état,' on verra que fes.
yeux font ternes & larmoyans., que le battement de
les arteres eft obfcur ; & que du-fbnd du fiége de la
maladie s’échappent & fe détachent des efpeces de
filandres blanchâtres , qui ne font autre chofe que
des portions de la membrane interne du larynx &
du pharynx, qui s’exfolie : car la gangrené des parties-
internes, principalement de celles quifontmembra-
neufes, eft fouvent blanche.
Ici le danger eft extrême. On procédera à la cure
: par des remedes modérément chauds , comme par
des cordiaux tempérés : on injéCtera par les nafeaux.
I du vin dans lequel on aura délayé de la thériaque,
ou quelques autres liqueurs fpiritueufes : on applique*-
ra extérieurement des cataplafmes faits avec des plantes
îcs réfolutives les plus fortes, & fur Iefqueïs ort aura
fait fondre de l’onguent ftyrax ; & l’on préviendra
i’anéantiffement dans lequel la difficulté d’avaler
précipiteroit inévitablement l’animal, par des lave-
■ mens nutritifs*
Quant à l’obftacle qui prive l’animal de la faculté
de refpirer, on ne peut frayer un paffage à l’air, auquel
la glotte n’en permet pliis, qu’en faifant une ouverture
à la trachee, c’eft à-dire en ayant recours à
la bronchotomie ; opération que j’ai pratiquée avec
fuccès, &c que j’entrepris avec d’autant plus de con-
fiance, qu’elle a été premièrement tentée fur les animaux
: car Avenfoër parmi les Arabes, ne la recom-
- manda fur l’homme qu’après l’expérience qu’il en fit
lui-même fur une chèvre.
Il s’agiffoit d’un cheval réduit dans un état à m’ô-
ter tout efpoir de le guérir, au moins par le fecours
des remedes. Il avoit un battement de flanc des
plus vifs : l’oeil appercevoit fenfiblement à l’infer-
tion de l’encolure dans le poitrail, une fréquence &
une intermittence marquée dans la pulfation des carotides.
Les arteres temporales, ou du larmier, me
firent fentir aufli ce que dans l’homme on appelle ««
■ pouls- caprifant. Les veines angulaires & jugulaires
étoient extrêmement gonflées ; le cheval étoit comme
hors d’haleine, & pouvoit à peine fe foûtenir ;
fes yeux étoient vifs , enflammés, & , pour ainfi
parler, hors des orbites ; fes nafeaux fort ouverts ;
fa langue brûlante & livide , fortoit de la bouche ;
une matière vifqueufe, gluante & verdâtre, en dé-
couloit : il n’avaloit aucune forte d’alimens ; les plus
.liquides, dont quelque tems auparavant une partie
paffoit dans le pharynx, tandis que celle qui ne pou-
.voit pas enfiler cette voie naturelle, revenoit & fe
xîégorgeoit par les nafeaux, n’outre-paffoient plus la
cloifon du palais : l’inflammation étoit telle enfin,
que celle de l’intérieur du larynx fermant l’ouverture
de la glotte, occafionnoit la difficulté de refpirer
, pendant que celle qui attaquoit les autres parties,
étoit la caufe unique de l’impoflibilité de la déglutition.
Dans des maladies aiguës & compliquées, il faut
parer d’abord aux accidens les plus preftans ; des circonstances
urgentes ne permettent pas le choix du
tems, & la néceflité feule détermine. L’animal étoit
prêt à fuffoquer, je ne penfai donc qu’à lui faciliter
la liberté de la refpiration. Je m’armai d’un biftouri,
d’un fcalpel, & je me munis d’une canule de plomb
que je fis fabriquer fur le champ ; j’en couvris l’entrée
avec une toile très-fine, & j’attachai aux an-
jieaux dont elle étoit garnie fur les côtés du pavillon
, un lien, dans le deffein de l’affujettir dans la
trachée.
Le cheval, pendant ces préparatifs, étoit tombé,
je fus contraint de l’opérer à terre; je le pouvois
d’autant plus aifémeiït, que fa tête n’y repofoit point,
& que cette opération eft plus facile dans l’animal
que dans l’homme, .en ce q ue, i ° l’étendue de fon
encolure préfente un plus grand efpace ; & parce
qu’en fécond lieu , non-feulement le diamètre du
canal que je voulois ouvrir eft plus confidérable,
mais il eft moins enfoncé & moins diftant de l’enveloppe
extérieure.
La partie moyenne de l’encolure fut le lieu qui me
parut le plus convenable pour mon opération, attendu
qu’en ne m’adreffant point à la portion fupérieu-
r e , je m’éloignois de l’inflammation, qui pouvoit
avoir gagné une partie de la trachée ; & que plus
près de la portion inférieure, je courois rifque d’où-
yrir des rameaux artériels & veineux provenant
des carotides & des jugulaires, & qui par des variations
fréquentes font fouvent en nombre infini dif-
perfées à l’extérieur de ce conduit.
J’employai enflûte un aide, auquel j’ordonnai de
J'orne VU
pin cet conjointement avec moi, & du côté oppofé,
la peau, à laquelle je fis une incifion de deux tra-
vers de doigts de longueur. Je n’intéreffai que les té-
^gumens ; & les mufcles étant à découvert, je les
ieparai feulement pour voir la trachée-artere, à laquelle
je fis une ouverture dans l’intervalle de deux
a ^es an” eaux I avec un fcalpel tranchant des deux
cotes. L’air fortit aufli-tôt impétueufement par cette
nouvelle iffuë, & cet effort me prouve que la glotte
étoit prefqu’entierement fermée ; & que la petite
quantité de celui qui arrivoit dans les poumons par
l’infpiration, s’y raréfioit, & ne pouvoit plus s’en
échapper. Le foulagement que l’animal en reffentit,
fut marqué. Dès cette grande expiration, &c au
moyen des mouvemens alternatifs qui la fuivirent,
fut moins inquiet, moins embarraffé. Ces avantages
me flaterent, & j’apportai toutes les attentions
néceffaires pour affûrer le fuccès de mon opération.
La fixation de la canule étoit un point important ;
il falloit l’arrêter de maniéré qu’elle ne pût entrer ni
fortir toute entière dans la trachée ; accident qui au-
roit été de la derniere fatalité, foit par la difficulté de
l’en retirer, foit par les convulfions affreufes qu’elle
auroit infailliblement excitées par fon impreflîon fur
une membrane d’ailleurs fi fenfible , que la moindre
partie des alimens qui fe détourne des voies ordinaires
, & qui s’y infinue, fufeite une toux qui ne ceffe
qu’autant que par cette même toux l’animal parvient
à l’expulfer.
Mais les liens que j’avois déjà attachés aux anneaux
, me devenoient inutiles ; la forme & les mou-
vemens du cou du cheval, rendoient ma précaution
infuffifante. J’imaginai donc d’ôter les bandelettes ,
& je pratiquai deux points de future, un de chaque
cô té , qui prît dans ces mêmes anneaux, & dans les
lèvres de la plaie faite au cuir. La canule ainfi aflu-
r é e , je procédai au panfement, qui confifta Amplement
dans l’application d’un emplâtre fenétré fait
avec deJla poix, par conféquent très - agglutina-
t if , que je plaçai, comme un contentif & un aéfenfif
capable de garantir la plaie de l’accès de l’air extérieur
; & je n’eus garde de mettre en ufage la charpie
, dont quelques filamens auroient pu s’introduire
dans la trachée. Ce n’étoit point encore affez , les
points de futurp maintenant la canule de façon à s’op-
pofer à fon entrée totale dans le conduit, qu’elle te-
noit ouvert ; mais fa fituation pouvoit être changée
Çar les différentes attitudes de la tête de l’animal, qui
étant mue en-haut & en-avant, auroit pû la tirer
hors du canal : aufli prévins-je cet inconvénient, en
affujettiffant cette partie par une martingale attachée
d’un côté à un furfaixqui entouroit le corps duche-
vai , & de l’autre à la muferole du licou ; enforte
que je le contraignis à tenir fa tête dans une pofition
prefque perpendiculaire. Je lui fis enfuite une ample
îaignée à la jugulaire feulement, dans l’intention d’évacuer
; & le même foir j’en pratiquai une autre à la
faphene, c’eft-à-dire à la veine du plat de la cuiffe ,
dans la vûe de folliciter une révulfion.
La canule demeura cinq jours dans cet état. Les
principaux accidens difparurent infenfiblement ; &
je ne doute point que cet amandement, qui fut vifi-
ble deux heures même après que j ’eus opéré, ne foit
dû à la facilité que j’avois donnée au cheval d’infpi-
rer & d’expirer, quoiqu’artificiellement : l ’anxiété,'
l’agitation, & erifin l’anéantiffement dans lequel il
étoit, provenant fans doute en partie de la contrainte
& de la difficulté de la refpiration ; contrainte qui
caufoit une intermiflion de la circulation dans les
poumons ; & intermiflion qui ne pouvoit que retarder
& même empêcher la marche & la progreflion
du fluide dans toutle refte du corps, puifque toute ht
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