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On perce avec lin poinçon chaque feuille dans deux
de fes coins pour palTer les crochets qui doivent la
fufpendre.; & quand les feuilles font bien feches, on
les remet encore en prefle pour ôter la courbure
qu’elles ont pu prendre en féchant.
La colle pour le carton & pour le moulage fe fait
avec de la fleur de farine de froment : il faut la bien
détremper dans de l ’eau, & l’ayant mife fur le feu,
on la fait bouillir jufqu’à ce qu’elle ait perdu fon
odeur de farine ; on la pafle enfuite par un tamis
de crin , dans lequel on la manie pour divifer les
grumeaux & ôter tout ce qui pourxoit faire quelque
bofle au carton dans.le collage.
Le pere d’Incarville , ci-devant cité pour la maniéré
de faire des fleurs dans l’artifice , nous a aufli
appris que les Chinois , pour obvier aux accidens
du feu , mettent dans la colle des cartouches , de
l’argille & du fel commun , ce qui les empêche de
prendre feu : ce procédé dont on a fait l’eflai eft fort
to n ;.o n a feulement trouvé que l’alun convient
mieux que .le fel marin,.en ce qu’il n’attire pas l’humidité
comme fait ce f e l , & qu’il eft également in-
combuftible ; le carton doit être fait avec la même
colle. Sur une livre de farine , il faut mettre une
poignée d’alun en poudre : quand la colle eft faite,
on la retire du feu & on y mêle à-peu-près autant
d’argile détrempée qu’il y a de colle., & aufli claire.
A r t . VIII. De Vétoupille. On fe fert d'étoupille
pour amorcer les fufées & pour conduire le feu d’une
piece à une autre.
La matière de Yétoupille eft du coton filé ; on
lui donne la grofleur que l’on veut en le mettant en
plufieurs doubles. Il faut le faire tremper pendant
quelques heures dans du vinaigre, ou pour le mieux
dans de l’eau-de-vie ; après qu’il en eft fuffifamment
imbibé , on répand deflus du pouflier, & on manie
le coton dans le plat où il a trempé , pour qu’il fe
pénétré &c fe couvre de cette pâte de poudre ; lorf-
qu’il en eft fuffifamment couvert, on le retire du
p la t, en le paflant legerement dans les doigts pour
étendre la pâte , de maniéré qu’il en foit par-tout
également couvert, & on le met fécher à l’ombre
fur des cordes.
Quand Y étoupille eft feche, on la coupe par morceaux
de deux piés & demi de longueur , on en
forme des bottes ou paquets, & on les conferve dans
un endroit bien fec.
La grofleur commune de Yétoupille pour les communications
de feu & pour les fufées de moyenne
grofleur, eft d’une ligne & demie de diamètre ; pour
les ferpenteaux, d’une ligne, & pour les plus grofles
fufées, de deux lignes.
A r t . IX . De Vamorce. On prend de la poudre en
grain , que l’on humeéte d’un peu d’eau , & on la
broyé fur une table avec une molette de bois, jufqu’à
ce qu’elle foit réduite en pâte bien fine. On
s’en fert comme d’un m aftic, pour coller & retenir
l’étoupille dans la gorge des fufées.
A r t . X . Outils les plus néceffaires. Une table de
bois dur & une molette pour broyer les matières ;
au défaut de molette,on fe fert d’un maillet à charger
les fufées.
Quelques écremoires pour amafler & mélanger
les compofitions ; ce font des feuilles de laiton fort
mince, de quatre à cinq pouces de longueur fur environ
trois pouces de largeur.
Quelques pattes de lievre pour fervir avec l’écre-
moire à amafler les compofitions.
Une table pour faire le moulage.
Trois ou quatre broflçs de différentes grandeurs,
faites de poil de porc, pour coller à la colle de farine.
Quelques pinceaux de poil de porc pour coller à
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la colle forte & pour grailler l’artifice d’eau?
Une fcie à main pour rogner les gros cartouches.
Un grand couteau pour rogner les moyens cartouches
& pour couper le carton.
De grands & de petits cifeaux , pour rogner les
pots & les petits cartouches.
Un tambour de parfumeur garni de fix tamis , fa-
v o ir ,
Trois tamis de gaze de foie.
Le premier , d’un tifîii fort ferré pour pafler le
poujjier, & pour ôter la poufliere inutile du fable de
fer.L
e deuxieme un peu plus clair, pour pafler le fou-
fre , le falpetre , & le fable le plus fin ou du premier
ordre.
Le troifieme encore plus clair , pour pafler la fable
du deuxieme ordre.
Trois .tamis de crin.
Le premier d’un tiflu ferré,pour pafler du charbon
fin pour le petit artifice, & pour le fable du troifieme
ordre.
Le deuxieme moins ferré,pour pafler du gros charbon
pour les fufées volantes, & pour le fable du
quatrième ordre.
Le troifieme plus clair, pour mélanger les matières
dont on fait les compofitions -, & pour le fable
du fixieme ordre. Le fable du cinquième ordre fe fait
en mettant à part ce qui pafle le dernier du quatrième
ordre qui eft le plus gros , avec ce qui pafle le
premier du fixieme ordre qui eft le plus fin.
Des balances aflez grandes pour tenir deux livres
de compofition.
Un poids de marc depuis le demi gros jufqu’à deux
livres.
Quelques boîtes fermantes à coulifle , comme
cellès des épiciers, pour ferrer les matières tamifées
& les compofitions.
Deux cuillères de bois ou de fer-blanc pour
prendre les matières dans les boîtes.
Trois petits tonnelets pour mettre féparément le
falpetre, le foufre & le charbon non broyés.
Un barril pour la poudre, de la contenance de
dix à douze livres.
Des moules de fufées volantes de differentes grof-
feurs garnis de leur culot, portant fa broche & des
pièces ci-après.
La baguette à rouler.
Les trois baguettes creufes.
La baguette à charger le maflif.
La baguette à rendoubler le carton.
Le maillet. „,
La cornée ou cuillère à charger, qui eft la mefure
dç chaque charge de compofition.
Et le moule à former le pot.
Quelques culots à pointe , pour charger des ferpenteaux
& je ts , garnis de leurs baguettes à rouler
& à charger.
Quelques culots fans pointe pour charger les fufées
de table & autres , qui doivent prendre feu par
des trous que l’on perce fur la circonférence de leur
cylindre.
Un outillage pour les lances à feu, qui coniifte en
une baguette à rouler, quatre baguettes à charger,
& une palette pour frapper.
Un boifleau pour charger les petits ferpenteaux
qu’on nomme vetille.
Deux moules de differentes grofleurs pour former
des étoiles.,
Trois poinçons à arrêt ,de differentes grofleurs,
pour percer la communication du maflif à la chafle
des fufées volantes.
Un long poinçon fans arrêt pour piquer les chaffes
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fes des pots à feu , & un autre plus petit .pour percer
les marons & fauciflbns.
Des vrilles de differentes grofleurs pour percer les
fufées de table & autres.
Un compas & un pié de roi pour mefurer le diamètre
& la longueur des fufées.
Un gros piton à vis que l’on place dans un poteau
de bois pour étrangler les cartouches.
Un rabot pour diminuer la grofleur des baguettes
des fufées volantes lorfqu’elles font trop pefantes.
Du fil de fer & des pinces plates, pour attacher
les baguett-es aux fufées de table.
Une petite marmite de fer blanc pour faire chauffer
la colle-forte au bain-marie.
Une enclume de fonte , & deux gros marteaux
de la même nature, pour.faire le fable de fer.
Un aflortiment de cordes &c ficelles de différentes
grofleurs , pour étrangler & lier les fufées.
Un aflortiment de carton & de papier de différentes
qualités.
Une planchette pour tracer les cartouches cubiques
desmarons..
Un chevalet pour tenir les fufées volantes.
Un étau de ferrurier, un marteau, une rape-à-bois,
& quelques limes.
Ces outils^ n’ont point d’üfage particulier dans
l’artifice ; mais ils fervent dans beaucoup d’occa-
fions , &,il feroit difficile de s’en pafler.
Les différentes efpeces de feu d'artifice peuvent fe
diftribuer, . • -
i Q. En feux qui s’élèvent ou qui font portés dans
l’air ; tels que les fufées de plufieurs fortes , les ferpenteaux
, les pluies de fe u , les marons , les faucif-
fon s, les étoiles, &c. Voye£ ces articles.
i ° . En feux qui brûlent fur terre, tels que les lances
à feu , les jets de fe u , les foleils, les girandoles,
&c. Voye{ ces articles
3°. En feux préparés pour l’ea u , tels que les ge-
nouillers, les trompes , les jattes, &c.’V. ces articles.
Les effets de ces derniers articles qui brûlent fur
l’eau & dans l’eau , paroiflent fi contraires à la nature
du feu y qu’il n’eft pas étonnant que des charlatans,
pour rendre la çhofe plus merveilleufe & en tirer
plus de lucre, ayent fait croire qu’il y entroit des
drogues fort cheres, comme le vif-argent, l’ambre
jaune, le camphre, les huiles de foufre, de falpetre,
le petrole , l’huile de térébenthine, l’antimoine, la
fciûre d’ivoire & de bois , & d’autres ingrédiens ,
qui produifent pour la plûpart un mauvais effet, qui
eft de donner beaucoup de fumée.
Toutes les fufées d’air & de terre brûlent dans
l’eau , il ne s’agit que de les mettre en état de fur-
■ nager.
Art. X I . De la maniéré de communiquer le feu d'un
artifice mobile à un artifice fixe. L e fecret de cette communication
de feu a. été apporté de Bologne en
France, en 1743 , par les fleurs Ruggiêri, actuellement
artificiers du Roi & de la ville. On admira
dans les fpeCtales pyriques qu’ils donnèrent, fur le
théâtre de la comédie italienne, l’art avec lequel ils
faifoient communiquer le feu fuccefîivement &• à
temSj d’un foleil tournant à un foleil fixe,,& de fuite
à plufieurs autres pièces mobiles & fixes., placées
fur un même axe dé fer. l: : •
L’auteur de ce mémoire ayant trouvé ce fecret1,
il s’éft fait unplaifir de le rendre public dans fon traité
d’artifice,imprimé à Berne en 17 50.Il confifte dans
une chofe fort fimple, c’eft d’approcher deux étoupilles
l’une de l’autre, aflez près, fans cependant
qu’elles fe touchent, pour que l’une ne puifle brûler
fans donner feu à l’autre : voici la maniéré dont
il faut opérer.
On fuppofe un foleil fixe, placé entre deux foleils
tournans fur un axe de fer ; le premier eft fixé defliis
Tome VI.
pat une cheville qui traverfe fon môÿeü & l’axe ;
les deux autres font retenus par des écrous vifles fur
l’axe, au moyen defquels on leur donne pour tourner
autant & fi peu de jeu que l’on veut.
- L’efpace entre le premier foleil tournant & le foleil
fixe, eft de fix pouces quatre lignes. On le rem-1
plitpar deux cylindres de chacun trois pouces de Ion*
gueur & de deux pouces de diamètre, aufli enfilés
lur l’axe ; ils font collés de colle forte , l’un fur le
moyeu du foleil fixe, & l’autre fur le moyeu du foleil
tournant.
Entre ces deux cylindres, doit être enfilé fur l’axe
un bouton de quatre lignes d’épaifleur, fur un pouce
de diamètre : il fert à les tenir dans un éeartemenfi
de quatre lignes l’un de l’autre ; & pour ne pas multiplier
les pièces, on prend ordinairement ce bouton
fur l’un des cylindres dont il fait partie, ou bien on
l’y ajoûte en le collant deflus.
Sur la fur-face plane de chaque cylindre un peu au-*
deflus du bouton, doit être creufée une rainure circulaire
de deux lignes & demie de largeur,& d’aütant
de profondeur, dans lefquelles on colle une étoùpil-
le avec de l’amorce ; c’eft par ces étoupilles que fe
doit faire la communication du feu, celle d’un cylindre
ne pouvant brûler qu’elle ne donne feu à celle
de l’autre vis-à-vis, n’y ayant que quatre lignes de
diftance entr’elles. Le feu eft apporté à l’une par une
étoupille, qui partant de l’extrémité du dernier des
jets du foleil tournant, vient rendre à l’étoupille de
ladite rainure circulaire, y étant conduite dans une
rainure creufée fur le rayon qui porte le jet d’où elle
part, fur le moyeu & fur le cylindre, d’oii s’étant
communiqué par fon extenfion à l’étoupille de la rainure
circulaire oppofée, il eft conduit de - là à la
gorge de l’un des jets du foleil fixe, par une étoupille
couchée dans une rainure faite fur fon cylindre & fur
1 fon m oyeu, julqu’aapié du jet d’où elle va fe rendre
à fa gorge. Ces étoupilles'doivent être bien couvertes
avec du papier collé deflus, excepté celles'qui
font;placées dans les rainures circulaires ; on les ga-
: rantit des étincelles de feu avec un tuyau de carton
ou de laiton bien mince, dans lequel on place les
deux cylindres : ce tuyau doit les couvrir prefqu’en
entier; & pour qu’il ne gêne pas leur mouvement,
on lui donne de diamètre deux lignes de plus qu’aux
1 cylindres.
- La longueur que l’on donne aux cylindres, a deux
objets : le premier eft d’éloigner les étoupilles circulaires
des bords du tuyau qui les couvre, par où les
étincelles pourraient s’introduire : le fécond eft de
tenir les.foleils fixes & tournans dans un écartement
aflez grand pour que le feu ne puifle fe communiquer
de l’un à l’autre ; ce qui arriverait s’ils étoient plus
proches , quoique les communications foient bien
couvertes.
L’efpace entre le foleil fixe & le fécond foleil
tournant; étant garni d’une pareille communication
entre deux cylindres, le feu fe portera à ce fécond foleil
par une etoupille qui tirera fon feu du pié de l’un
des jets:du foleil fixe ; on y percera un trou pour y
faire communiquer l’étoupille, & à laquelle il donnera
feu en finiflant.
De c e ‘fécond foleil tournant, le feu peut de même
être conduit à un fécond fixe, & ainfi fuccéflive-
mént à. plufieurs pièces.
Cette piece d’artifice qu’on nomme machine.pyrU
que, Te termine ordinairement par une étoile ; elle
eft: formée par fix barres de trois à quatre piés de
longueur, on les viflefur un moyeu pareil à celui
d’un foleil fixe, il y a deux jets attachés au bout de
chacune fur une traverfe qui croife la barre, leurs
, gorges fe croifent, & l’ouverture de l’anglé qu’on
leur donne eft mefurée pour former urte étoile ; une
étoupille couchée dans une rainure fur chacune des
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