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de commander 1 aile droite lorsqu'il étoit à l’armée.
Dans le temps des flragètes, cette circonftance devint
rare ; te polémarque ne fut plus qu’un magiftrar
charge de rendre la juftice entre le citoyen & l’étranger.
( Herodot. L V,c . 66. V I » p. 370 ).
La difficulté de trouver touts les ans dix-géné^
raux capables de commander les armées, & la multiplication
du nombre des généraux qui dévoient
en être la fuite, doivent faire penfer au premier
coup-d’oeil que cette inftimtion étoit très vicieufe
& on pourrait la cenfurer comme le fit Philippe de
Macédoine. « J’envie, difoit-il, le bonheur des
Athéniens, ils ne font point embarraffés pour créer
touts les ans dix généraux, 8c parmi touts mes fu-
jets je n’ai encore trouvé que le feul Parmeficon ».
Mais il faut obferver que ces dix firagètes n’étoient
pas touts employés au commandement des armées.
Ils formoient un confeil général d’adminiftration
militaire ; or un homme médiocre à la tête d’une
armée pouvoit être un fageadminiftrateur. ( Ulpian.
in Demoflh. eontra Nid. )
Quoique l’on procédât touts les ans à une élection
nouvelle, on ne choififlbii pas toujours dix
nouveaux flragètes ; les fuffrages fe réunifloient
fouvent fur ceux qui s’étoient diflingués dans cet
emploi, comme le prouvent les exemples de Thé-
miftocle , d Ariflide , de Limon , deNicias, & fur-
tout celui de Phocion, qui fut élu quarante-cinq
fois fans avoir jamais follicité cette faveur.
La république n’employant pour chaque expédition
qu’une partie de fes forces, il étoit nécef-
Jaire qu il reftat dans Athènes quelques flragètes
pour régler les affaires de la guerre , entretenir une
correfpondance avec les chefs de l'armée, leur envoyer
des fecours, 6c faire face à l’ennemi qui
pouvoit fe préfenter.
Ce grand nombre de généraux donnoit au peuple
la facilité de choifir ceux qui avoient le plus de
talent ; ou fi aucun ne réunilîoit toutes les qualités
néceffaires à un général en chef , de fuppléer à
celles qui lui manquoient, en lui affociant des collègues
qui les pofledaffent. Il pouvoit corriger le
courage trop ardent de l’un par la froide circonf-
peclion de l’autre ; alors ils leur donnoient pour
les concilier un troifième collègue d’un caraftère
doux 8c liant. Il étoit difficile 6c rare que le peuple
fe trompât fur le choix des hommes les plus dignes
de commander ; chaque tribu étoit trop peu nom-
breufe, 6c avoittrop d’intérêt à connoîtrela capacité
de touts fes membres , pour que les talents
puffenr y être ignorés ou méconnus. Les candidats
étoient jugés par des hommes qui ne les avoient
jamais perdus de vue depuis l’enfance, qui avoient
furveilîé leur conduite dans les gymnafes , dans
les camps , dans le commerce de la v ie ; 6c fi le
ftragète élu ne répond oit pas à l ’efpérance de fa
tribu, cet inconvénient ne-durait que jufqu’à l ’é-
îeétion fuivante.
Ce grand nombre d’éleclions e ir b e n o it l’émulation
dans touts les citoyens. Il n’y en avoit aucun
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né avec des talents q u i, en s’attachant à la pro-
feflion militaire , n’eût l’efpérance de réunir les
fuffrages en fa faveur , & d’empêcher que le falut
de la république ne dépendît de deux ou trois
têtes , dont la mon aurait laiffé l’état fans reffource,
ou qui auraient pu abuferfoit du beforn que l’on
aurait eu d’eu x , foit de la faveur du peuple. Ce
dernier inconvénient paroifloit fi grand , que dès
qu’il s’élevoit un citoyen dont les talents effaçoient
ceux de touts les autres , 8c attirait les regards du
peuple dans les occafions importantes , la république
feprivoit pour un temps de leurs fervices i
on l’exiloit pour dix ans , mais fans lui infliger aucune
flétriffure, 8c uniquement pour qu’à fon retour
il trouvât les emplois remplis par des collègues
qui divifaffent la faveur du peuple.
Sous les flragètes étoient dix taxiarques, dont
chacun commandoit l’infanterie de fa tribu. Outre
cette fonôion, ils étoient chargés de choifir l’àf-
fiette des camps, d’y faire, ainfi que fur les routes ,
préparer des marchés où les officiers 8c foldats
puffent acheter les denrées dont ils auraient be-
foin 3 6c d’y maintenir la police.
Compofition des troupes.
Sous les taxiarques étoient les officiers fupérieurs
ou chiliarques , c’eft-à dire, commandans de mille
hommes ; grade qui paraît répondre à celui de nos
colonels. Sous ceux-ci les officiers inférieurs oit
commandants de cent hommes & de cinquante
hommes au deffous, les commandants de dix &
de cinq hommes répondent à nos bas-officiers. .
La cavalerie avoit deux généraux nommés Ay-
parques- ; fous eux étoient dix phylarques, dont
chacun commandoit la cavalerie de fa tribu. On
peut préfamer que les officiers , de même que les
flragètes, n’alloient pas touts à l’armée , 6c qu’il
en reftoit dans l’Aftique pour commander les
troupes deflinées à la garde du pahfis , fur-tout
dans les premiers temps de la république , où la
cavalerie étoit à peine de trais cents hommes.
Lôrfque ce nombre fut augmenté, il eft vraifem-
bl^ble que celui des généraux employés le fut pareillement.
Le même ufage peut fe prèfumer encore
plus vraifemblablement pour les taxiarques y
dont le nombre égaloit celui des flragètes , 6c n’é-
toit pas néceflaire dans l’armée.
L ’hyparque ayant été nommé, facrifioit & prioit
les Dieux qu’ils lui accordaient de penfer , de
dire 8c de faire ce qui leur ferait le plus agréable,
6c en même temps le plus cher, le plus glorieux
6c le plus utile à lui, à les amis, & à la république.
Il devoit enfuite faire prendre les armes à la cavalerie
qui étoit fous fes ordres, afin d’en compter
le nombre preferit par la l o i & de le tenir tou-,
jours complet.
Il devoit avoir foin que les chevaux fuient nourris
de manière à être toujours en é.at de fervir, à
ce qu’ils fuffent propres à la guerre, dociles, point
récalcitrants, marchant d’un pas fur dans toutes
fortes de terreins.
Outre les phylarques deftinés à l’aider dans fes
fonSions, il avoit un confeil dans lequel étoient des
orateurs chargés de contenir les cavaliers dans le
devoir, par la terreur des châtiments, & de mitiger
dans le confeil de difcipline les jugements trop révères.
{Xenoph. ittt. p%. ).
Ce confeil pouvoit faire faire le temps du fervice
aux cavaliers qui négligeoient leurs chevaux, & réformer
les chevaux vicieux, récalcitrants ou incapables
de fuivre les autres. ( ibid. ).
Les -monuments anciens ne nous apprennent
point fi dans les élevions annuelles des généraux ,
on élifoit auffi les autres officiers, ou fï l’em atten-
doit pour ce choix que la guerre fût réfolue. On fera
tenté d’adopter le premier fentiment, fi on fait attention
que cette élection aurait retardé le départ
des troupes, & l’ouverture de la campagne , qui
pouvoit demander quelquefois de la célérité ; de
plus, qu’il y avoit touts les ans à Athènes une pompe
religieufe, à laquelle touts les citoyens affiftoient en
armes, & qui pouvoit être regardée dans 1 ordre
politique comme une revue générale des forces de
la nation. Cette cérémonie fuppofe néceffairement
des officiers de tout grade à la tête.des troupes.' Au-
roit-on employé da ns cette pompe fol e n n elle d’au très
chefs que ceux qui dévoient commander à la guerre,
8c dont les fervices avoient mérité cette diftinélion?
L’infanterie fut toujours regardée par les Grecs
comme la principale force des armées. Elle étoit.
compofée d'optiles, ou foldats pefamment armés ,
& de pflles , ou foldats armés à la légère. Ceux - ci
étoient compofés à-peu-près comme les optiles.
( Arïfiot. Rhetor. ).
La conftitution primitive fubfifta jufqu’ajla guerre
contre les Perfes. Les .citoyens des trois premières
claffes furent feuls chargés de la défenfe de la république
, parce qu’ils étoient .les feuls que leurs
urofeflions miffent en état d’acheter des armes, des
vivres , & de payer une rançon lorfqu’üs étoient
faits prifonniers. Mais quand la formidable puiffance
des Perfes menaça la Grèce de la fervitude ' le danger
& les befoiris de l’état armèrent touts les citoyens
fans diftinâion de claffes. Lorfque la Grèce
fut délivrée , 8c que les Grecs de l’Afie mineure
ayant conçu l’efpérance de fecouer le joug des Perfes,
eurent obtenu l’alliance Scies fecours des Athéniens
, la quatrième .claffe des citoyens d’Athènes ,
c’eft-à-dire, la claffe pauvre 6c mercenaire, fe
voyant armée ,nombreufe , 8c devenue néceflaire ,
déclara qu’elle ne communiquerait point avec les
trois autres , fi on n’aboliffoit la loi qui Pexcluoit
des charges , & *fi on n’établiffoit qu’il n’y aurait
point d’autre diftin&ion entre les citoyens que celle
, du mérite perfonnel. Les trois autres claffes préférèrent
fagement cette innovation à une guerre in-
’Veftine, ( Av» J, £. 479 )•
Solde.
Mais des citoyens foldés, qui ne poffédoient que
ce qu’ils pouvoient gagner personnellement par
l ’exercice de leurs profeffions , n’auroient pu fournir
à leur entretien que par un brigandage deftruc*
tif de la difcipline.il fallut donc pourvoir à leur
fubfiftance, leur entretien 8c leur armement par
une folde, 8c l’état fe vit alors dans la néceffité,ou
de les faire fervir feuls, ce qui le.s auroit infailliblement
rendus maîtres de la république , ou d’étendre
cette inftitution à toutes les claffes. Ce dernier
parti fut pris , même pour la cavalerie. Le fan-
taffin oplite reçut deux oboles par jour ( 7 f. 4 d. ),
ou dix dragmes par mois ( io liv .) ; le cavalier fix
Oboles ( 1 livre ) , ou trente dragmes par mois »
( 30 liv. ).
Suivant la détermination de M. Dupuy ( Mm.'
de l’Acad., tom. X X V l t l, p, 691 , N. ) , le denier
romain eft à la dragrae attique comme, 3 j ■ à 3 k j -
Le denier romain = 75 grains d’argent, poids de
Paris. On a donc , le denier eft à la dragme : : 3 7 :
o li. ; 175 —= 84. Le grain d’argent en matière
pure , a cours actuellement en France à raifon d’en viron
2,862,187 deniers. Ainfi, la dragme attique
eft à-peu-près une livre de notre monnoie, 8c le
denier romain , 18 fous. Mais comme nous ignorons
quel étoit le rapport du prix des denrées à cette valeur
, nous ne pouvons pas juger de ce qu’elle étoit
pour le foldat.
Cette innovation, parut d’abord avantageufe
parce que la première folde fut prife fur les contributions
volontaires des Grecs de l’Afie mineure ,
pour la liberté defquels la guerre s’entreprenoif.
Elle foulageoit toutes les claffes de l’état, & donnoit
les moyens d’aguérir la dernière, qui n’avoit
point jufqu’alors rendu de fervices militaires ; mais
ces contributions dévoient ceffer, la république fe
trouver chargée d’une dépenfe permanente , qui ne
pouvoit que retomber fur les citoyens des premières
claffes. Ce moment fit naître la haine 8c la difeorde
entre les divers ordres de l’état ; le petit peuple 8c
les orateurs , qui captoient fa bienveillance , opi-
noient toujours pour la guerre , parce qu’elle lui
fourniffoit des moyens d’avancement 8c de fubfiftance
; les riches au contraire la redoutoient 8c s’y
oppofoient, parce qu’elle diminuoit leurs revenus
8c les forçoit de contracter des dettes. ( Piutarch. ,
Pericl. , Ulpian. , in Dernoflh. , de Syntax. , Demoflh,
Phylipp. I , Suid. , voce y-araytnç ).
Dans la fuite, la folde fut confidérablementaugmentée
: chacun des oplits qui, dans la guerre du
Péloponnèfe afliégeoient Polidée ( ayant J. C , c.
428) ,'recevoient deux dragmes par jour (2 liv. ) ,
l’une pour lu i, St l’autre pour un uperite ou valet.
Dans le traité entre les Athéniens oc les Argiens ,
il futftipulé que fi une ville qui aura reçu un fecours
de troupes, veut le retenir au-delà de trente
I jours , elle fera tenue de donner par jour à chaque
I optile, pfile 6c archer, trois oboles à’Ægine ( 18 f.