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formîté qui doit régner fur toutes les troupes d’une
même puiffance. Pourquoi le hauffe-col des régiments
étrangers eft-il plus grand que celui des régiments
nationaux ? L’uniformité eft encore bief-
fée & fans aucun avantage.
Pendant la dernière guerre de Corfe , des chefs
de corps obligèrent les officiers de leurs régiments
à cacher leurs haujfecols , parce que les habitants
du pays , tireurs très adroits, vifoienttoujours aux
hommes qu’ils voyoient décorés de cet ornement.
Cette anecdote vraie nous prouve que l'habillement
de l’officier doit différer le moins qu’il eft pofïibîe
de celui du foldat, & que nos haujfe-cols ne doivent
point, par leur éclat, devenir au point de nuire.
Cette même anecdote nous a engagés à examiner
fi le hauffe-col nous eft véritablement nêceffaire.
Pourquoi , lorfqu’on fupprima l’armure , or- \
donna-tôn aux officiers de conferver le haùffe-col ?
Ce fut parce que touts les combattants étant vêtus
chacun à fa guife ; il falloit bien laiffer à l’officier
quelque marque très vifible qui le diftinguât du
foldat. Pourquoi, quand on inventa les uniformes ,
conferva-t-on le haujfe-col ? Ce fut encore par la
même raifon ; mais depuis l’invention des épaulettes
, le haujje-col nous eft devenu inutile , & c’eft
uniquement par habitude que nous le portons ;
pourquoi donc ne les réformerions-nous pas ? Si
nous perfiftons à vouloir conferver le hauffe-col,
tâchons au moins d’en tirer quelque utilité.
Pendant tout le temps où les officiers d’infanterie
commandèrent par rang, d’ancienneté de régiment,
il étoit aifé de fçavoir à qui appartenoic le commandement
, un coup-d’oeil jetté fur l ’uniforme fuffi-
foit ; mais à la première guerre cela ne fera plus
auffi facile ; il faudra obliger chaque capitaine à
porter fes commiffions & les lettres de lieutenant,
& c ., ou bien l’on verra naître fouvenr des
difcuffions peu aifées à terminer. Q u o i, dira-t-on ,
chacun ne fait-il pas l’époque à laquelle il a été
fait capitaine , lieutenant, fous-lieutenant ? On l’a
fçu mais on a pu l’avoir oublié. Je n’ai prefque
jamais affifté à un confeil de guerre , que je n’aie ;
vu des officiers balbutier, d’une manière très incertaine
, la date de leur commiffion ; & d’ailleurs un
homme dévoré d’ambition ou qui préfumera de fes
connoiffances , ne pourra-t-il point anti dater fes
fervices de quelques jours ou de quelques mois ?
L ’ambition & l’amour-propre font trop fouvent
des faux bien plus grands. On remédieroit à tours
ces inconvénients , en ordonnant que chaque officier
fera graver fur fon- haujfe-col l’époque à'laquelle
il aura obtenu les differents grades par lesquels
il aura paffé. P , porte drapeau ; S L , fous-
lieutenant ; L S , te lieutenanf en fécond ; L P , le
lieutenant en premier; Q , quartier maître ; C S ,
Capitaine en fécond ; C , capitaine en premier ; M ,
major ; L C , lieutenant colonel ; M S , meftre-der
camp en fécond ; M C , mettre-de-camp commandant.
Le milléfime & le quantième du mois le-
roient gravés vis-à-vis ces lettres capitales.
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Dans la cavalerie on pourroit graver les marnes
lettres fur la lame ou fur la garde de l’épée ; il en
fèroit de même dans l’infanterie , fi l’on réformoit
les haujfe-cols.
Un des écrivains du bureau de chaque état-major
auroit bientôt appris l’art de graver les lettres & les
chiffres néceffaires à l’opération facile que nous
venons de propofer ( C. )
HAUTE-PAYE, raye plus forte que la paye ordinaire.
On donne auffi ce nom à ceux qui reçoivent
la haute-pave.
HAUTEUR. Nombre des foldats quicompofent
une file.
Plufieurs écrivains recommandables par leurs-
talents, ont confacré leurs veilles à des commentaires
fur Part de la guerre ; ils ont pris la peine
d’en expliquer & d’en étendre les differentes pratiques;
leurs travaux ont répandu fur cet art urï
jour affez éclatant pour que les jeunes militaires
puiffent l’apprendre fans avoir befoin de fecours
étrangers ; nous devons tenir compte à ces écrivains
laborieux des foins qu’ils fe font donnés ;
mais ne feroit-t il pas temps qu’un homme inftruit
vînt à fon tour refferrer ce que fes prédéceffeurs
ont étendu? Ne devrions-nous pas avoir nn cours
complet de fcierice militaire à Fufage de ceux qui
; la poffèdem déjà ? un ouvrage qu’ori put lire dans
un très petit nombre d’heures ? un court abrégé
qui retraçât néanmoins tout ce qu’il importe aux
militaires de fçavoir ?
Les maximes de guerre du comte de Keveuhuller
feroient, je crois, le meilleur modèle qu’on pût
fuivre pour compofer cet ouvrage. Si cet officier
général nous avoit laiffe un traité plus complet &
; plus détaille, nt^is n’aurions à cet égard aucun
voeu à former.
Nous allons donner, relativement aux hauteurs ,
un foible efîai du travail qu’on dèvroir faire fur
touts les mots qui compofent notre vocabulaire militaire.
Que l’on marche, que Pon campé , ou que Fon
combatte, on doit garder les hauteurs que l’on a en
avant de fo i , fur fes derrières & fur fes- flancs.
Toutes les fois que l’ennemi s’eft emparé d’une
hauteur qui commande les flancs , le front ou les
derrières delapofition q*ie l’on veut occuper, du
champ où l’on veut combattre , du chemin que
l’on veut tenir , il faut commencer par l’en chafîêr.
Quelqu’impraticable que vous paroiffe une hauteur
, vous ne devez point négliger de la garder ;
avec de la volonté & du temps , l’ennemi pourront
vaincre les obffacles que la nature lui auroit pré-
fentés, gagner le fommet de la hauteur, & même
y conduire du canon.
Quand vous conduirez vos troupes à l’attaque
d’ une hauteur, vous marcherez au petit pas ; en les
menant trop vite, vous les effoùfleriez.
Quand Vous faurez que l’ennemi a raffemblé fur
iine hauteur dont vous voudrez le chaffer, de gros
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quartiers de roc, des charriots, & c ., vous préviendrez
vos troupes de s’ouvrir toutes les fois qu’elles
verront defeendre quelques-uns de ces objets. , ^
Si vous ne pouvez parvenir à chaffer de vive
force l’ennemi de la hauteur qu'il occupe , em-~
ployez quelque ftratagême pour la lui faire abandonner.
Si les ftratagêmes & la force font inutiles , cherchez
un autre paffage , une autre pofition , ou un
autre champ de bataille.
Si vous avez le choix de plufieurs hauteurs pour
conttruire un pofte, vous occuperez celle qui fera
de l’accès le plus difficile , & qui dominera les
autres. Vous examinerez auffi fi la rampe en eft
configurée de manière à ce que le feu qui partira
de la cime de la hauteur s’approche beaucoup de
fon pied.
Vous raffemblerez fur la hauteur que vous occuperez
de gros quartiers de roc , des troncs d’arbre
oc des charriots ; vous ferez rouler ces objets fur
l’ennemi qui viendra vous affaillir.
Quand l’ennemi vient pour vous chaffer d’une
hauteur, laiftez-lë monter fans faire feu jufqu’à la
demi-portée de moufquet ; faites'Hlors une dé-,
charge bien ajuftée, & fondez auffitôt fur votre
adverfaire avec impétuofité & à l’arme blanche.
L’avantage que donne la defcénte rend le choc
plus violent & le fuccèsplus certain.
Quand vous ne voudrez pas combattre , ou au
moins livrer une affaire générale , vous occuperez
les hauteurs. ( C ).
HEAUME. Cafque de nos anciens chevaliers.
Il étoit quelquefois d’un ornement nommé cimier,
qui repréfentoit des cornes , des aîles , une couronne
, &c. Voye^ Armes.
HERSE. Barrière compofée de fortes pièces de
bois pointues par en bas, & quelquefois garnies
de pointes de fer. On la fufpend au-deffus du paffage
d’une porte de ville de guerre , en l’attachant
avec une corde à un moulinet. On lâche la corde
quand on veut abattre la herfe ; alors elle defeend
par une coulifle pratiquée dans l’épaiffeur de la
voûte, & forme une barrière ou efpèce de fécondé
porte après la première. En cas de furprife, on
coupe là corde pour plus de célérité , & la herfe
tombe. Elle fertà arrêter l’ennemi qui auroit rompu
la première porte. On a fubftitué les orgues à la
herfe, parce qu’il n’eft pas difficile d’arrêter celle-
ci en enfonçant quelques clous dans les couliffes ,
ou mettant dèflbus des chevalets.
On nomme herfe farrafjie ou cataraâle & orgues ,
celte qui eft faite de pièces de bois verticales fans
traverfe.
La herfe ordinaire fert quelquefois au défaut de
chevaux de frife pour défendre une brèche ou un
paffage ; on l’y place les pointes en liant.
Ce que nous allons ajouter fur la manière de
tirer parti des objèts que la campagne offre, eft
deftiné à montrer aux officiers particuliers, qu’entre
lfis mgins du génie militaire, animé par l’amour de
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la gloire , tout devient utile & fe convertit en
armes offenfives ou défenfives. Parmi les differents
objets qu’on trouve dans les champs , il n'en eft *
en effet , aucuns dont un officier intelligent ne
puiffe tirer un parti avantageux.
11 peut fe renfermer dans une enceinte formée
avec des charriots qu'il a raftemblés , & tenir dans
ce parc comme dans un véritable fort. Voye£
Convoi.
Il peut empêcher l’ennemi d’arriver jufqu’à lui
en embarraffant un défilé ou un chemin avec des
charriots qu’il a chargés de pierre ou de terre, &
dont il a enlevé une roue. Voyeç Défilés.
11 peut, lorfqu’il eft placé fur une hauteur, faire
rouler, fur l’ennemi qui cherche-à le joindre , des
charriots entiers, 'ou feulement leurs roues , ou
bien encore quelques-uns de ces rouleaux qu’on
promène fur les bleds dans quelques provinces de
France.
Il peut offrir à la cavalerie ennemie un obftacle
prefque infurmontable, en s’enfermant dans une
double enceinte de charrues liées enfemble ; la
fécondé enceinte doit être placée à dix ou douze
pieds de la première.
Les clayes qui forment les parcs dans lefquels
on renferme les bêtes à laine, peuvent fervir à
retenir les terres des parapets qu’un officier veut
élever , ou devenir un abri contre les attaques des
huffards & des troupes légères.
Les herfes fur-tout , peuvent lui fervir également
contre la cavalerie & l’infanterie ;on enterre
les herfes de deux ou trois pouces ; on les fixe
contre terre avec des branches d’arbre ou des piquets
auxquels on a laiffe un crochet; on tourne
les pointes des herfes vers l’ennemi , & on en recouvre
les montants avec nn peu de terre ; ces
herfes peuvent être utiles & quand on eft renfermé
dans un ouvrage , & quand on occupe une pofition
découverte. Petits moyens , dira-t-on peut-être ;
j’en conviens, ces moyens font petits, mais ils
peuvent produire de grands effets, & ils annoncent
au moins qu’on n’a rien négligé pour remplir dans
fon entier l’ordre qu’on a reçu. ( C. )
HERSILLON. Planche longue de dix à douze
pieds , garnie de pointe de fer ou de clous. On en
place plufieurs l’un près de l’autre fur une brèche
ou dans tout autre paffage que Fon veut défendre.
HISTOIRE MILITAIRE. Avant de mettre fous
les yeux des militaires les avantages que la leéhire
des hiftoriens anciens & modernes peut leur procurer,
avant de prouver qu’il nous manque une
hiftoire qui mérite véritablement le furnom de
militaire, avant d’efquiffer le plan d’un ouvrage
hiftorique propre aux gens de guerre, & d’indiquer
la manière de tirer parti des hiftoriens que
nous poffédons , nous croyons devtfir jetter un
coup d’oeil fur les caufes qui ont rendu lents &
tardifs les progrès que Fart militaire a faits parmi
nous. Cet apperçu nous offrira peut-être quelques
idées dont l’exécution pourroit aider l’art delà