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ne foient arrivés, 8c qu’ ils ne leur ayent enfeignè
le travail.
De l'ouverture de la tranchée» ( Fig. 326).
Quand tout eft bien difpofé , que touts les
payfans font établis, les lignes avancées aux deux
tiers ou trois quarts de leur façon, qu’il y a de
bons amas de fafcines à la tête des camps, que l’artillerie
eft en état de pouvoir mettre du canon en
batterie dans trois ou quatre jours , la place étant
bien reconnue, & ne paroiftant rien au dehors qui
puiffe vous traverfer, 8c les attaques enfin réfo-
lues , on prend jour pour l’ouverture de la tranchée,
on choifit en même temps les lieux les plus
propres à faire cette ouverture, où l’on met des
marques. On reconnoît les alignements prolongés
ainfi qu’ils font marqués A D , B D , C E , des capitales
des pièces qu’on doit attaquer, le long def-
quelles on fedoit conduire, & qu’il faut marquer
par des piquets , auxquels on attache des bouchons
de paille marqués F , le prolongement des
capitales le connoît & fe dirige en alignant la
pointe des pièces qu’on doit attaquer, par celles
du chemin couvert qui les enveloppent, ce qui
donne deux pointes. Le troifième , marqué par un
piquet en alignement des deux premières en lieu
fur, où vous puiffiez approcher commodément. Le
quatrième fe prend en alignement des trois premières
, après quoi on n’a qu’à continuer fur ces
deux derniers pour fuiVre le prolongement à me-
fure qu’on s’approche, en plantant autant de piquets
qu’on a befoin.
Moyens de mefurer la dijlance de T ouverture de la
tranchée au chemin couvert.
On ne fauroit trop prendre de connoiflance fur
tout ce qui regarde les places qu’on veut attaquer ;
celle de favoir leur éloignement jufqu’à l’ouverture
de la tranchée, n’eft pas la moins néceffaire,
puifqu’elle peut donner moyen aux affiégeants de
lavoir à point nommé l ’éloignement où l’on fe
trouve journellement des dehors les plus avancés
pendant le cours des attaques , ce qui donnera
moyen en même temps de bien placer les places
d’armes, & fervira pour diriger le chemin des
tranchées, parce que l’on fait toujours où l’on e fl,
& combien il en refte à faire pour arriver aux ouvrages
de la place.
Suppofez donc le lieu bien pris dans le prolongement
de lVne des capitales marquée pour l’ouverture
de la tranchée.Si l ’on veut favoir précifé-
ment la diftance qu’il y a de l’angle le plus avancé
du chemin couvert, il n’y a qu’à fe fervir des opérations
de la trigonométrie pour la trouver avec
précifion ; mais comme on n’a pas toujours des
tables de finus 8c de logarithmes dans la poche,
voici un moyen fimple qui n’eft pas moins géométrique
que les autres*
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Soit donc la capitale prolongée A B (fig. 327 ) ,
l’angle du chemin couvert A eft le lieu où l’on
Veut couvrir la tranchée B ; après avoir pris gatde
à le mettre en lieu où l’on puiffe avoir l’efpace né-
cefTaire à l’opération , il n’y a qu’à former l’angle
droit B , & tirer la ligne B C , avec des piquets de
60,80 ou 100 toifes , plus ou moins , vous couperez
cettè ligne en trois ou quatre parties égales.
Cela fait fur fon extrémité G , formez un autre
angle droit B C D , & tirez la^ ligne G D indéter-
minément ; alignez l’un des piquets de la traver-
fale B G , comme E avec l’angle du chemin couvert
A ; vous aurez deux points qui ferviront à
faire trouver dans leur alignement le point F , fur
la ligne C D ; mefurez enfuite C F avec une toife
pour connoître fa largeur , enfuite fi C E eft le
tiers de B E , prenez trois fois la longueur C F ,
vous aurez la diftance A B connue en toifes ; car
les deux triangles A B E , E C F , étant femblables,
le côté A B eft au côté C F , comme P E eft à
E C ; mais B E eft triple de G E , donc A B fera
triple de C F , & par conféquent pour avoir I A B ,
il faut prendre trois fois la longueur de C F . Il
faudra en faire autant aux autres attaques, pour
être fur de toutes vos diftances.
L’ufage de cette connoiflance eft que toutes le s
fois qu’on veut favoir le chemin qui refie à faire,
il n’y a qu’à faire mefurer celui que l’on a fait, le
! refie fera ce qui refie à faire, ce qui fervira à remarquer
la diftance la plus propre à placer les
places d’armes, batteries , logement, &c. ; pendant
que tout cela fe difpofe, le général règle l’état
des gardes de l’infanterie & de cavalerie, fur
le pied d’avoir cinq ou fix jours de repos.
On règle en même temps la cavalerie qui dort
porter la fafcine, 8c les travailleurs de jour 8c de
nuit, qui doivent être en'fort grand nombre, les
premières & fécondés gardes, ce qui fe fait un
jour ou deux avant l’ouverture delà tranchée, à
la diligence du major général 8c du maréchal général
des logis delà cavalerie, qui ont foin d’avertir
les troupes, & de bien reconnoître la fitua-
tion des gardés.
Cès deux officiers doivent s’entendre avec l’e
directeur général de la tranchée, recevoir de lui
les demandes journalières qu’il efi obligé de leur
faire fur les befoins de la tranchée, & avoir foin
de les y faire fournir très exaétement.
Tout cela préparé , le direôeur règle fon détail
avec les ingénieurs ; il les inftruit du lieu par
où il veut ouvrir la tranchée , & il a foin de leur
faire prendre de la mèche , des piquets , des maillets
pour la tracer, ce que l’on fait porter en paquets
par des fbldars ; ce font ordinairement des
fapeurs, lefquels ont foin de tenir tout prêt.
Lorfque tout efi ainfi réglé, on pofe une .petite
garde près des lieux deftinés aux ouvertures, pour
empêcher qu’on y dérange rien, & qu’on ne les
fréquente pas trop ; car il eft beau de cacher fon
deffein autant qu’on peut.
Le jour de l'ouverture étant venu, les gardes s’af*
femblent fur les trois heures après midi, fe mettent
en bataille , après quoi on fait la priere, le général
les voit défiler fi bon lui femble ; les travailleurs
s’aflemblent auffi près delà , touts munis de
fafcines , de piquets, & chacun d’une pèle & une
pioche , & quand la nuit approche , 8c que le jour
commence à tomber , les gardes fe mettent en
marche, chaque foldat .portant une fafcine avec fés
armes, ce qui fe doit pratiquer à toutes les gardes ; à l’égard des outils , il fuffit d’en faire prendre aux
travailleurs , les -deux premières gardes, & de les
faire laiffer à la tranchée où on les retrouve.
La garde de la cavalerie va en même temps
prendre les poftes qui lui ont été marqués fur la
droite & la gauche des attaques , ou fur l’une des
deux, félon qu’il a été jugé convenable ; tout cela
fe fait le premier jour en filence, 8c fans tambour
ni trompette ; les grenadiers & autres détachements
marcheront à la tête de tout, fuivis des bataillons
de la tranchée , & ceux-ci des travail-
leûrs, lefquels font touts difpofés par divifion de
50 en 50 , chaque divifion commandée par un capitaine
, un lieutenant & deux fergents. On les
fait marcher par quatre ou fix de front jufques près
de l’ouverture de la tranchée, où, quand la tête eft
arrivée, le brigadier ingénieur du jour qui a fon
deffein réglé, va pofer les brigades en avant, par
©ù fe doit conduire la tranchée pendant que les ba- ;
taillons s’arrangent à droite & à gauche de l’ouver- j
ture de la première tranchée, derrière les couverts :
qui s’y trouvent, finon aux endroits qui auront
été marqués par leur major ,où ils déchargent leurs
fafcines ; enfuite de quoi ils fe repofent fur leurs !
armes en filence , toujours prêts à exécuter les i
ordres qui leur font donnés. Pendant cet arrangement.,
le brigadier de jour qui a pofé fes détachements,
donne le premier coup de cordeau, &
montre ce qu’il y a à faire au fous-brigadier, pour
continuer à tracer la tranchée ; il fait enfuite défiler
les travailleurs un à un-, portant la fafcine fous •
le bras droit, fi la place eft à droite , 8c fous le
gauche, quand on la laiffe à gauche, & commence
lui-même par pofer le premier des travailleurs , &
puis le fécond , troifième , quatrième , cinquième,
& c ., l’un après l’autre, leur commandant
i°. Le filence.
2°. De fe coucher fur leur fafcine.
30. De ne point travailler qu’on ne leur comr
mande.
Quand il en.a pofé quelque nombre , il cède la
place au premier ingénieur , qui continue à pofer
& faire pofer pendant que lui , brigadier , va
prendre garde aux traces ; tout cela fe continue de
la forte jufqu’à temps qu’on ait tout pofé, obfer-
.vant bien :
i° . Touts les replis & retours de la tranchée.
a0. De faire avancer les gens détachés , à rae-
fure qu’on avance le tracé.
3 . De couvrir toujours les brifures des retours
jjsàr tin prolongement de deux ou trois toifes en
arrière, pour couvrir les enfilades, ce qui fe fait
aux dépends de la ligne en retour, 8c ainfi de
toutes les autres.
40. De faire jetter la terre du côté de la place.
50. De prendre bien garde de ne pas enfiler, ni
auffi de fe trop écarter ; mais de rafer les parties
les plus avancées des dehors de la place, à quelque
dix ou vingt toifes de près, ce qui fe fait plutôt
par eftime qu’autrement, à moins qu’on ait commencé
à tracer avant que le jour foit toùt-à fait
tombé, ce qui eft toujours mieux , lorfqu’on le
; peut fans grand rifque.
j 6°. De ne pas s’éloigner des capitales prolongées
A D , B L ) , dont il faut renouveller les pi-<
quets F de temps en temps, & les coëffer d’un
bouchon de paille, afin de les reconnoître, même,
de quelques bouts de mèches allumées pendant la
nuit, parce qu’il fe faut faire une loi de ne s’en pas,
éloigner, & de les fréquemment croifer, & par
conféquent les reconnoître de temps en temps ,
pour pouvoir fe diriger félon elles, afin d’éviter-
les écarts & retours inutiles , parce que ce font les
vrais guides qui nous doivent mener à la place.
Pour mieux faire, il faut pofer les retours à fa fi*
cines comptées, afin d’en favoir toujours les me-
fures ;fi la fituation des ouvertures eft favorable ,
il ne fera pas impoffible qu’on puiffe parvenir jufqu’à
la première parallèle, ou place d’arme , dès la
première nuit ; mais fi on eft obligé d’ouvrir de
fort loin , cela fe rend moins aifé , 8c il faudra.em-
ployer beaucoup plus de travail.
Il eft à préfumer que le direéteur général aura,
fait fon projet fur le pied d’avancer jufques là ; à
quoi j’ajoute , fi oeia fe peut, delà commencer un
retour , ne fût-ce que par une cinquantaine de travailleurs.
Ce qui eft dit ici pour les attaques de la droite *
fedoit auffi entendre pour-celle de la gauche 9
chacune d’elle devant aller le même train , 8c toujours
marcher de concert; de forte que quand
Tune trouve quelques difficultés qui la retardeut
l’autre la doit attendre , pour éviter les inconvénients
auxquels font fujets ceux qpi, allant trop
vite, ne fe précautionnent pas affez.
Quand le travail eft difpofé, on fait haut les,
bras, &tout le monde travaille, averriffant toujours
les travailleurs de jetter la terre du côté de
la place', on fe diligente tant que l’on peut jufqu’au
grand jour , pour lors on fait mettre les détachements
à couvert fur le revers de ce qu’il y a de
fait de la place d’arme , 8c derrière les plus proches
replis de la tête des tranchées , où on les fait coucher
fur le ventre, car elles font encore bien foibles
au matin ; après cela on congédie les travailleurs,
de la nuit, & on les relève par un pareil nombre
de jour , commençant par la tête, au contraire de
ceux de la nuit qu’on a commencé par la queue.
Il eft rare que cette première journée puiffe bien
achever les ouvrages qu’on a commencé| quelques
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