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Coins qu’on fe puiffe donner pour cela, parce que
d'ordinaire on entreprend beaucoup.
On ne doit pas cependant congédier les travailleurs
de jour, qu’ils n’ayent à peu-prés achevé
l ’ouvrage de la largeur 6c profondeur qu’on le
veut mettre , ce qui eft bien difficile à obtenir des
ouvriers , qui ont toujours grande envie de s’en
retourner, 6c très peu d'achever.
C ’eft pourquoi il eft à propos de faire parcourir
le travail de la première nuit par un détachement
de ioo ou 200 hommes à chaque attaque, qui ne
feront autre chofe que d’achever 6c barrer ce qui
a été commencé la première nuit.
La fécondé garde, le mafque (tint le v é , on
monte la tranchée tambour battant , & on pofe
encore à découvert ; mais il s’en faut bien qu’on
entreprenne autant de travail que la première nuit.
Celle-ci doit s’employer par préférence à la continuation
de la première place d’armes, & à qui il
faut donner toute l'étendue néceffaire , & cependant
pouffer ce qu’on pourra en avant, en croifant
toujours les capitales , dont il faut avoir foin de
marquer les prolongements à mefure qu’on s’avancera
vers la ville , & les piqués à chaque fois qu’on
les croife , afin de les rendre toujours plus remarquables.
La place d’armes entreprife fur toute fa longueur
doit être achevée dans toute la perfection qu’on
pourra lui donner à la fin de là troilième garde,
parce qu’elle doit être la demeure fixe des bataillons
, jufqu’à ce que la fécondé foit faite.
Outre la première place d'armes, que je confidère
comme l'ouvrage de la fécondé & troifième nuit,
quoique commencé dès la première , je fuppofe
que les deux tranchées auront marché en avant
confidérab!eurent , mais non jufqu’à la féconde parallèle
ou place d’armes, il ne feroit pas prudent
de fe tant avancer.
Les travailleurs de jour de cette garde doivent
être fournis en nombre égal à ceux de la nuit, &
le travailleur de jour commencé par la tête, comme
celui de la nuit par la queue.
Tout le monde doit contribuer à preffer & perfectionner
le travail de jour tant que l’on peut ;
après quoi 6c quand il eft en état, il faut faire avancer
les premiers bataillons dans la.place d’armes , &
ne mettre que des détachements dans les ouvrages
de la tête, avec ordre de ne point tenir ferme, fi
l’ennemi vient à eux.
Le troifième jou r, il faudra encore faire monter
force travailleurs , afin d?en pouvoir employer
y ou 400 à perfectionner ce qui manquera des jours
précédents, & arriver à la fécondé ligne parallèle
ou place d’armes, à laquelle il faut travailler aufii
avec la même vivacité.
Comme le feu doit commencera devenirdange-
reux * il faudra employer les fapes , non qu'il faille
renoncer tout à-fait à pofer encore à découvert
quelque partie de la troifième nuit ; mais il faut le
diferèrement », 6c pour cela trouver quelque
terrein favorable qui fourniffe un demi couvert ;
ou prendre le temps que le feu de la place eft. fort
rallenti, comme il arrive fouvent après les deux ou
trois premières heures que les gens font las de tirer
; pour lors on peut dérober un temps pour pofer
100 ou 120 travailleurs & plus, fi le feu continue
à diminuer ; mais c’eft de quoi il ne faut pas
abufer, parce qu’il faut tenir pour maxime, de ne
jamais expofer foii monde mal à-propos 8c fans
grande raifon , ce qui fe fait bien moins fouvent
qu i! ne feroit à défirer parmi nous , fans que cela
nous avance beaucoup ; au contraire , rien n’ell
plus capable de retarder le travail ; c ’eft pourquoi »
après la fécondé nuit, il ne faut plus pofer à découvert
fans grande circonfpeâien.
De la fape.
La fape faifant une partie confidérable de la
tranchée , je crois qu’il eft à propos d’expliquer la
manière de la conduire , avant que de paffer outre.
Nous entendons par la fape , la tête d’une tra’n-
chée pouffée pied à pied, qui chemine jour 6c nuit
également, quoi qu’elle avance peu en apparence ;
elle fait beaucoup de chemin en effet, parce qu’elle
marche toujours ;, c’eft un métier qui demande une
efpèce d’apprentiffage , pour s’y rendre habile
auquel on eft bientôt fait, quand le courage & le
délir du gain font de la partie.
Voici comme elle fe conduit.
L’ouvrage étant tracé, 8c les fapeurs-inftruits du
chemin qu’ils doivent tenir, on commence par
faire garnir la tête de gabions , fafeines, facs à
terre, fourches de fer, crocs , maillets, mante-
lets , &c.
Cela fait, on perce la tranchée par une ouverture
que les fapeurs font dans l’épaiffeur de fon parapet
, à l'endroit qui leur eft montré, après quoi
le fapeur qui mène la tête, commence de faire-
place pour fon premier gabion, qu’il pofe fur fon-
plan , 6c l’arrange de la main, du croc & de la
fourche du mieux qu’il peut, pofant ledeffus def-
fous, afin que la pointe des piquets des gabions
débordant le fomnvet, puifle fervir à tenir les fascines
donc on le charge ; cela fait, il le remplit de
terre en la jettant de biais en avant, & fe tenant
un peu en arrière pour ne pas fis découvrir;, à mefure
qu’il remplit le premier gabion, il frappe de.-
temps en temps de fon maillet ou de fa pioche
contre * pour faire entaffer la terre.
Fig. 328. Plan d’une terede fape.
329. Sape vue par derrière.
5.30. Sape vue par devant.
331. Profil de l’excavation des quatre fapeurs.
332. Profil d’une fape achevée.
Le premier gabion rempli, il en pofe un fécond
furie même alignement, qu’il arrange & remplit
de même; après un troifième, un quatrième, fe
tenant toujours à couvert & derrière ceux qui font
remplis, ce qu'il continue toujours de la forte £
mais parce que les joints des gabion* font fort
dangereux avant que la fape foit achevée , il les
faudra fermer de deux ou trois facs a terre polês
bout fur bout fur chaque point , que le fécond fapeur
arrange , après que le troifième & quatrième
les lui ont fait paffer. o
Au vingtième ou trentième gabion pofe oc rempli
, on reprend les fapes de la queue pour les rapporter
en avant, afin de les épargner , ‘de forte
qu’une centaine de facs à terre bien ménagés ,
peuvent fuffire à conduire une fape depuis le commencement
du fiège jufqu’à la fin.
A l'égard de l’exécution de là fape, voici comme
elle fe doit conduire.
Le premier fapeur creufe un pied & demi de
large fur autant de profondeur , laiffant uneberme
de fix pouces au pied du gabion , & taluant un peu
du même côté.
Le fécond élargit de fix pouces & approfondit
d’autant, ce qui fait deux pieds de large 6c autant
de profondeur. «
Le troifième & le quatrième creufênt encore chacun
d’un demi pied , & élargiffent d autant, font
les taluts 6c réduifent les fapes à trois pieds de profondeur
& autant de largeur par le haut, revenant
à deux pieds & demi fur le fond , les taluts parés , 1
ce qui eft la mefure que nous demandons pour la
rendre parfaite. Il refte quatre hommes à employer
de la même efeouade , qui, fe tenant en repos derrière
les autres, font rouler les gabions 8c fafeines
aux quatre de la tête , afin que les premiers fapeurs
les trouvent fous la main ; ils leur font aufii glif-
fer des fafeines pour garnir le deffus des gabions
quand ils font pleins , favoir, deux fur les bords &
une dans le milieu , qu’on a foin de faire entrer
dans les piquets pointus des gabions , qui fur-
montent le fommet, afin de les tenir fermes, après
quoi on les charge de terre.
L’excavation de ces trois pieds de profondeur
fournit les terres néceffaires à remplir les gabions,
& une maffe de parapet, formant un talut à terre
courante du côté de la place rempli de haut en
bas, qui ne peut être percé que par le canon.
Quand les quatre premiers fapeurs font las, &
qu’ils ont travaillé une heure ou deux avec force ,
ils appellent les quatre autres , lefquels prenant la
place des premiers , travailleront de même force ,
jufqu’à ce que la laflitude les oblige à rappeller
les autres, obfervant que celui qui a mené la tête
prend la queue des quatre à la première reprife du
travail, car chacun d’eux doit mener la tête à fou
tour, 6c pofer une pareille quantité de gabions ;
afin d’égaler le péril & le travail ; de cette façon ,
on fait une grande diligence quand la fape eft bien
fournie.
Au furplus, on fait marcher la fape non-feule*
ment en avant, mais aufii à côté, fur les prolongements
de la droite & de la gauche ; & pour l'ordinaire
on voit des 4 ,3 & 6 fapes dans une feule
tranchée, qui toutes cheminent à leur fin«-
Dans le même temps, celui qui dirige les la-
peurs doit avoir foin de faire fervir des gabions
& fafeines à la tête des fapes, ce qui fe fait par
l’intervention de celui qui commande la tranchée ,
qui lui fait fournir le monde dont il a befoin.
Le moyen d’être bien fervi, feroit de donner
6 deniers de chaque fafeine , portées de la queue
des tranchées à la tête des fapes , payés fur-le-
champ à la fin des voyages , ou d’une certaine
quantité ; chaque foldat en peut porter aifément
trois , 6c faire trois ou quatre voyages ; il faudroity
par la même raifon , donner 1 f. des gabions, en
obfervant cette-petitelibéralité, les fapes feroient
toujours bien 6c aifément fervies.
11 eft encore à remarquer que quand on a af*
faire à des ennemis un peu éveillés , ils cannonent
la tête des fapes avant que votre canon tire , de
manière que fouvent on eft obligé de les abandonner
; mais fi on y eft forcé de jour, on s’en dédommage
pendant la nuit.
A mefure que la fape avance, on fait garnir celle
qui eft faite par les travailleurs qui l’elargiffent,
jufqu’à ce qu’elle ait 10 ou i l pieds de large , fur
3 de profondeur, pour lors elle change de nom &
s’appelle tranchée, fi elle fert de chemin pour aller
à la place ; mais on la nomme placé à’armes fi elle
lui fait face qu’elle fort difpofée pour y placer
des troupes.
Ces fortes d’ouvrages , qui fuppofent de l’adreffe
& de l'intelligence , 8c qui fe font avec danger f
doivent être bien payés , fi l'on veut être bien;
fervi.
Le prix le plus raifonnable de la fape doit être
de 40 f. la toife courante au commencement, favo
ir , tout lè long du travers d elà fécondé place
• d’armes, 6c ce qui fe trouve entre elle 6c la troifième.
2 liv. 10 f. .pour la troifième place d’armes & le
travail jufqu’au pied du glacis.
3 liv. pour celle qui le fait fur le glacis.-
y liv. 10 f. pour celle qui fe fait fur le haut du
chemin couvert.
5 liv. pour celle qui entre dans ledit chemin couvert.
10 liv. pour celle qu’on fait au paffage des foffés
fecs.
20 liv./s’ils font pleins d’eau, & quand elle ferai
double , comme cela arrive quelquefois, il la faudra
payer au double , félon les endroits où on la
fera.
A Fégard de celle qui fe .fera dans les brèches-
des baftions 6c demi-lunes, elle n’a point de prix
réglé , parce qu’elle eft expofée à tout ce que la
. plate a de plus dangereux, c’eft pourquoi félon le
péril auquel ils feront expofés , ri faudra donner ce
; que l’on jugera à propos.
Le toifé fe doit faire par tin feu! ingénieur pfo-
pofé pour cela à chacune des attaques ; le même
fait le compte des brigades enipréfence des officiers
6c fer sent s , qui ont foin après de faire diftribue*