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tête du travail, bien avertis de ce qu’elles auront à
faire , & le turplus de la garde pofié de manière
qu’elle puiffe border les places d’armes 8c touts les
logements à feu qui feront en état.
Cela bien difpofé , 8c toutes les gardes faifant
front à la place, il y aura encore plufieurs inftruc-
tions à donner aux troupes de la tranchée. La première
, de bien avertir touts les poftes de ce qu'ils
auront à faire pour ne pas fe laiffer furprendre.
La fécondé , de ne point tenir ferme dans les
parties imparfaites du travail, mais céder , & faire
retirer les travailleurs & gens armés de la tête
dans les revers marqués des places d’armes prochaines
, & laifler agir le feu de la tranchée.
La troifième , de ne fe pas preffer d’aller aux
ennemis , mais d’attendre qu’ils foient à quinze pas
de la tranchée , avant que de faire fortir les grenadiers
8c gens commandés pour aller fur eux.
La quatrième, de faire tout le feu poffible des
logements 8c places d’armes pendant tout le temps
que les ennemis feront en marche pour venir à
vous ; cela bien obfervé, donnera un grand avantage
à l’afliégeant.
Pendant que ceci fe paffera , la garde de la cavalerie,
qui doit être avertie en montant la tranchée
de ce qu’elle aura à faire en cas de fortie, aura
vraifemblablement difpofé devant elle deux ou
trois petites troupes de 30 ou 40 maîtres, chacune
commandées par de bons lieutenants , qui,obfer-
vant la marche des ennemis , attendront qu’i ls .
foient bien engagés , 8c le (ignal qui leur fera fait
de la tranchée avant que de partir; & quand ils fe
verront à quelques 30 ou 40 pas :près , pour lors
ces petites troupes doivent partir, & prendreauffi-
tôt le galop, pour aller ou charger par les flancs ,
ou les couper tout-à fait, pendant que les grenadiers
, fortant des places d’artqes , les attaqueront
par la tête. Le gros de la ga/de çle la cavalerie, di-
vifé en plufieurs efcadrons, doit fuivre au trot ,
pour foutenir ces détachements , & faire fon poffible
pour couper la forrie. Si elle efl foutenue par
la cavalerie de la place, comme il n’en faut pas
douter, il ne faudra pas manquer de la faire charger
par quelques-uns de vos efcadrons, pendant que
d’autres foutiendront les petites troupes , & fe
joindront avec elles pour achever de rompre le
gros de la fortie , qu’il faudra pourfuivre tant que
l ’on pourra, fe mêler avec e lle, 8c s’en épauler
contre le feu de la place ; mais fitôt que les ennemis
feront recognés dans leur chemin couvert, il :
faut que toute l’infanterie qui aura chargé, fe rejette
dans la tranchée , &que la cavalerie s’éloigne
promprèment, car le feu de la place , qui {ans
doute fera bien préparé , deviendra alors fort dangereux.
Voilà de quelle manière on peut repouflèr les j
grandes forties, fans grande perte, les quatre ou
cinq premiers jours de l’ouverture de la tranchée.
Quand les premières & fécondés places d’armes
feront achevées, & garnies de troupes qui leur
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conviennent, les ennemis n’en entreprendront plus
de femblables.
M ais comme là troifième place d’armes fe fait
pour l’ordinaire fort près de la place, & qu’elle efl:
aflez éloignée de la fécondé , il pourroit bien arriver
que l’ennemi entreprendroit encore deflus
avant qu’elle fût achevée ; cependant les premières
8c fécondés places d’armes étant pour lors
bien garnies , l’ennemi fera moins en état de xéuf-
fir que ci-devant, car il fera beaucoup refièrré ;
cependant jufqu’à ce que la fécondé ligne foit en
état de recevoir du monde , il pourra bien être
| tenté d’entreprendre ; c’eft pourquoi quand la
tranchée fera pouffée jufquà l’endroit de fa firua-
tion, il faudra la diligenter avec application , la
garnir 8c border de troupes à mefure que quelque
parti s’avancera» avant que de pouffer la tranchée
plus avant, & enfin la mettre en état de recevoir
quelques bataillons.
Lorfque cette place d’armes fera une fois remplie
des troupes qui lui conviennent, il n’y aura
plus d’autres forties à craindre que celles qui fe
font à la dérobée, qui fout toujours petites, 8c ne
s’entreprennent guères que de nuit. Suppofez cependant
que l’ennemi en entreprît quelqu'une de
confidérable avant qu’elle fût achevée, il ne faudra
, pour les repouffer, que tenir la conduite ci-
devant propofée pour les quatre ou cinq premières
gardes.
Toutes les forties à faire entre la troifième place
d’armes & le chemin couvert, ne fe font que pour
tâcher de furprendre quelque bout de lapes imparfaits
, renverfer le travail, y mettre le feu, 6c
obliger les pofies avancés de la tranchée à fe découvrir.
Ces forties fe font ordinairement par 10, 20 ,
30 ou 40 hommes , appuyés de beaucoup de feu
préparés contre ceux de la tranchée , ce qui ne
fauroir manquer d’être fort fanglant, vu la proximité
du chemin couvert, c’efl pourquoi il ne, faut
pas s’y expofer; mais il faut bien apprêter le feu
de la troifième place d’armes 8c le laiffer agir ;
après quoi, quand il fera temps d’y faire marcher
quelques compagnies de grenadiers, fe fervir des
couverts de la tranchée tant qu’on pourra , 8c fur-
tout ne fe point preffer d’aller au-devant de ces
forties, mais céder, & leur donner lieu de s’engager
pour les attirer fous votre,-feu ; enfuite de
quoi, quand ils feront bien en défordre , lés faire
pouffer par les grenadiers , fans pourfuivre trop
loin ; mais fe contenter de les recogner chez eux ,
& puis fe retirer dans vos couverts.
Comme ces forties ne peuvent avoir pour objet
que de furprendre quelques têtes de tranchées
imparfaites, ou d’obliger votre monde à s ’expoier
au feu apprêté pour cela, il faut , pour ne s’y
point commettre , donner ordre aux fapeurs 8c à
ceux qui les joindront, de fe retirer promptement
fur les revers de la place d armes fitôt qu’on verra
paraître les premières têtes de la fortie, laiffer
p t à
mieW e teffips le feu de la g p g P fWSWg
fur eux quand on les verra affez engagés , fans fe
foire une affaire de les voir renverfer une douzaine
ou deux de gabions, & y mettre le feu , pourvu
ou'on le leur faite bien acheter ; une heur* de réparation
bien employée fera qu il n y paraîtra plus.
Ceci eft une répétition de ce qui a été déjà dit ,
je l'avoue, mais l’importance de la choie mérite
bien qu'on la répète plufieurs fois, plutôt que de
cnanquer à la bien éclaircir.
Des forties intérieures.
Si après être logé fur le parapet du chemin couvert
, l’ennemi s’avifoit d’y revenir avant que le
logement fût bien établi, il ne faut point s opt-
îtlâtr” à le foutenir, mais il fan. faire retirer les
travailleurs & gens arme_s a l abri des
& leur biffer jetter leur feu , qui fo réduira peut
être à faire jouer quelques fougaffes. Pendant ce
temps-là il faut faire fervir les ricochets j g remonter
for les cavaliers pour leur foire faire feu , il
eft fur qu’ils nefortiront pas de leur chemin couvert
pour défaire ce logement. C eft pourquoi ils
n’y feront pas grand mal. Il faut donc leur ai er
quelque temps jetier leur première fougue , Sc
après quoi les mêmes gens qui y étoient a la garde
du logement ayant repris haleine, ou d autres
gens trais , bien munis de grenades & de ce qu il
leur fera befoin , reviendront fur la fortie, & ache-
veront de lui faire quitter le logemeru quil faudra
réparer & mettre en état de pouvoir fe foutenir
lui même le plutôt qu’il fera poffible- -
Si après qu’on aura pris les traverfes les plus
prochaines , l’ennemi fait mine d y revenir, vrai-
femblablement il ne le fera que pour avoir le temps
de faire jouer quelques fougaffes , 8c attirer ce
qu’il pourra d’affiégeants deffous ; c eft pourquoi
fans avoir d’empreflement de s’y mettre, il faudra
d’abord céder , & quelques moments ;apres les
faire brufquement attaquer par une compagnie e
grenadiers , qui les pouffent &- délogent de la , en
même-temps il faudra en faire entrer trois ou
quatre dans le chemin couvert, pour chercher le
trou de la mine , en tirer la fauciffe, la rompre ou
l ’enterrer, fi on ne peut l’arracher.
Que fi pendant toute l’émeute q«e cette action
caufera , la fougaffe joue , il faudra fe loger dans
le trou qu’elle fera , & s’y couvrir auffitot, enfuite
on s’étendra , 8c l’on achèvera de s’y établir.
Quand on fe fera rendn maître des places d armes
, des angles rentrants, fi avant d avoir mis
les logements en état , l’ennemi s’avifoit d y revenir
par une fortie, il faudroit fe conduire comme
çi-devant, fans fe préfenter ni fe mettre en peine
de la foutenir de vive force, parce que le feu de
la place d’armes , celui des ricochets & des bombes ,
& l’effet des pierriers vous en feront raifon dans
peu.
Que fi toutes ces chofes ne peuvent l’obliger a
l ’abandonner, la moindre charge le déterminera
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| s'eft aller ; ce qui doit être fuivl d’une réparation
& d'un achèvement parfait, qui met l’afliegé hors
d’état de faire de pareilles entreprifes.
Si l’ennemi fait une fortie dans le foffé , ce ne
peut être que dans ceux qui feront fecs, pour tacher
d’en traverffer le paffage, y apporter du re-
tardemeut, & nuire à l’attachement du mineur.
Les précautions à prendre contre fes forties, qui
font ordinairement foibles , font de bien faire prolonger
les logements du chemin couvert dans le
foffé , le plus près qu’on pourra , & même les
batteries contre le9 flancs où il fera bon d avoir
quelques gargouffes chargées à balle de moufquets,
pour en cas de befoin en charger promptement
quelques pièces. ^ t
Outre ce que deflus, en débouchant dans Iè
foffé, il faudra débuter par rétablir des-logements
adoffés contre fon bord extérieur, qui flanqueront
le paffage des deux côtés. Ils doivent être affez
étendus pour y mettre à couvert 25 ou 30 grenadiers.!
-, I
Après cela on travaillera a 1 epaulement ; il
faut le charger de terre le plus qu’on pourra ,
afin qu’il foit moins facile à brifer , car1 fi les ennemis
l’attaquent, ce ne fera que dans cette vue. -
C ’eft pourquoi, fuppofé que l’eau fût près de la fu-
perficie du fond, il y faudroit foire des trous , &
fe pourvoir de coupes pour jetter de l’eau de temps
en temps for l’épaulement, & le mouiller. Il fera
bon auffi de percer dans le foffé par plufieurs, descentes
, & d’avoir dans le logement le plus prochain,
quelques compagnies de grenadiers pout
accourir au fecours de l’épaulement.
Quant au mineur, fi on fait1 brèche avec le canon
il ne fera pas queflion de fortir fur lui ; & fi
après il’éboulement du canon on juge qu’il foit
néceffaire d’en attacher un, l’épaulement qui fera
pour lors achevé, & le logement fait pour foutenir
l’un & l’autre, muni du monde néceffaire, feront
fuffifans pour le protéger fans fe mettre en peine
d’y faire autre chofe.
A l’égard du retour des ennemis fur des logements
en brèche, fur lefquels on ne feroit que
foiblement établi ; c’eft une chofe affez commune
aux gens qui veulent fe défendre quand on les
preffettop. ,,
Nous dirons de quelle manière on doit te procurer
cet établiffement, lorfque nous parlerons de
la prife de la demi lune, qui eft un moyen fûr de
prévenir les retours, & de faire du moins qu’ils
ne foient pas dangéreux ; & comme ce qui fe fait,
pour une demi-lune en cas pareil, fe peut faire
pour une contregarde , ouvrage à corne , baftion
& autres pièces revêtues', nous finirons ici le chapitre
des/orties , qui font mes peu fréquentes depuis
l’ufage des places d’armes , du moins les
grandes.
Des batteries de canon.
Si l’on s’en rapporte à l’opinion commune de
Y y i j