
eft de nuit extrêmement vigilant,’ qui pofe des
gardes extraordinaires & fait battre "avec foin les.
chemins, n’a pas - quelquefois la même: àttentipn1
de jour ; en .ce cas:, dit-il, il eftpeui-être plus fa- ;
cile de le furprendre de-jour1, comme je l’ai -vu!
expérimenté très fouvenr.
J’ai dit.précédemment qu’on doit faire l’attaque
par le côté où les gardes font moins fortes & d’où!
les cafernes font plus éloignées-; ce qui arrive ordinairement
dans les endrbits que le gouverneur!
ou le commandant croit les plus-fûrs par la bonté;
& la hauteur-des murailles ; mais il n’eft point de
montagne qu’on, né grimpe Jhnl de muraille qu’o a 1
ne monte, lorsqu’elles font mal garnies ; & , comme
dit Strada , « fouvent on emporte avec plus de facilité
ce que par fa firuation forte l’on croit ne devoir
jamais être attaqué ».
Afpar, général de l’empereur Théodofe I I , fur- ,
prit Ravennes du côté de certains marais par où
Ton croyoir 'Ventreprife impoffible , & que par
cëtte ràifôn letÿran dé l’empèréur Jean, maître
dé cette place , rfàifoit très niai garder.
En 1582, M. de Tiante , gouverneur de Ninove
pour les éta%!généraux de Hollande , furprit, fur
lés Ëfpagnoîs p à v ille d’Âlofte par l’endroit le plus
fort ; préfqiië toute la^garnifon ’étoit accourue ail
plus fôiblei v èrs'leqüerM;'de Tiante avoit fait
donner une fauffe alarme. hN
Le çonful Romain'QuintiliS-Fàbjùs Maximus ,
prévoyant que lëS mitrailles d’Arpi feroient moins
gardées dans l’endroit où elles étoient les plus
fortes", furpritcette jilàce par'la porte même qui
étoit le plus de défenfe.'
Les Gaulois s’étant foulevés contre Cæfar., lui
fermèrent avec de gros corps de troupes touts le^
paflages pour l’Auvergne , laiffant -feulement dégarni
celui des montagnes du Gévaudan , parcè
qu’ils fe fioient fur fix pieds de neige qu’il y avoir,
8c fur ce que ces montagnes étoient fi impratiqua- j
blés , que perfonne ne les partoit jamais dans
cette faifon ; mais Cæfar profitant d’une confiance
fi mal fondée, fit travèrfer , avec beaucoup de
fatigue à la vérité , ces montagnes à fon armée, &
furprit celle des ennemis, qui, ayant fortifié toutes
les autres avenues , fe croyoit en fureté.
Quand le porte qui n’eft pas-gardé eft fi fort
qu’on ne fauroit, en beaucoup de temps, faire
entrer par-là affez de monde pour pouvoir fe
rendre maître de la place, tâchez d’introduire par
cet endroit cinquante ou cent foldats d’élite , qui
iront d’abord attaquer par dedans la garde d’une
porte défignée pour faire entrer un détachement
q u i, à cette fin , fera venu fe mettre en embufçade
auprès, & qui fera prêt .à courir auffitôt qu’il entendra
les premiers coups ou Te bruit de l ’alarme.
• Ce fut de cette manière qu’Antiochus , roi de
Syrie, furprit Sardis par le confeil & le fecours de
Lagoras, deThéodote & de Denis, fes capitaines,
4 fil n’y eut feulement que quarante-cinq hommes
qui attaquèrent la, porte par dedans j quelques a#
-. rrgs,rapporfent qu’ils ,«’étoient. pas plus de quinze.
Si la garde delà porte, eft couverte d’une palif.
fade par le côté qui regarde l ’intérieur de la placé
' il eft néceffaire que quelques-uns des cinquante ou
cent hommes qui doivent s’introduire fecrètement
dans la place,, portent les outils néceffaires pour
mettre en pièce les barrières; ce qui peut fervir
encore pour lever touts les ©bftacles que votre
détachement poùrroit rencontrer en fon partage.
Pour connoître à quel endroit, èn cas d’alarme,
plus de troupes des, ennemis fe feront préfentées,
;1 faut, quelques jours avant la furprife , faire donnera
la place une fauffe alarme par différents côtés,
afin de favoir enfuite par vos efpions l’endroit où
chaque bataillon s’eft porté , fi auparavant ils n’ont
pu décopvrir quel porte eft deftiné à chaque
troupe.
Lorfque les ennemis font d’eux-mêrpes donner
la fauffe alarme , leur unique fin eft quelquefois
4’éprouver la vigilance de leur garnifon ,..il fe
peut auffi que ce foit pour tromper vos efpions fur
le porte où chaque troupe doit accourir ; ainfi l’épreuve
que vous en ferez par la fauffe alarme que
vous donnerez aux ennemis , fera bien plus fure
que s’ils la faifoient donner eux-mêmes.
t De la difpQjztion pour une furprife.
Il fera plus aifé de réuflir dans une furprife, fi
l’on peut raffemblër fecrètement des troupes qui
fe .trouvent féparées en différents portes, parce
que les ennemis auront moins de défiance lorf*
qu’ils verront que vous n’avez pas un corps de
troupes fuffifant pour former quelque entreprife
contre leurs places ou leurs quartiers.
Guftave Vafa , roi de Suède, avant de fe mettre
en marche pour aller furprendre le château où le
gouverneur Dalécarlie , fon ennemi, s’étoit retiré
, difperfa fes troupçs en différents endroits ,
afin qiie ce gouverneur ne feupçonnât rien & fût
moins vigilant ; mais Guftave ayant marqué à
chaque troupe l’heure & le lieu où elles dévoient
toutes fe joindre 9 furprit dans ce château fon ennemi
, qui fe tint moins fur fes gardes , dès qu’il
apprit que toutes les troupes du roi de Suède s’e-
toienc féparées.
Il faut, pour une furprife , faire des préparatifs
différents, félon les divers obftacles qu’il faut
vaincre. Deville met au nombre des empêchements
ordinaires le forte, la muraille, une barricade
, les barrières & les portes. J’ai déjà parle
des autres obftacles plus confidérables contre ces
empêchements ordinaires & qui ne font pas infur-
montables. Deville propofe les préparatifs fui-
vants ;
Des pétards avec leurs madriers , des clous pour
les fufpendre , & des marteaux pour enfoncer les
clous ; les pétards fervent.à ruiner & à rompre les
fimples murailles, les pprtes, les barrières , les
s u R
l grilles de fer & les barricades. Je parlerai plus au I long dans la fuite de l’ufage des pétards.
Des poutres de quinze pieds de long & de huit
I ou dix pouces de diamètre , traverfées par quatre
1 ou cinq bâtons en croix, afin que huit ou dix fol- I dats, moitié de chaque côté , puiffent s'en fervir
I comme un efpèce de bélier -des anciens, pour
I battre les murailles'de terre ou les fimplës! mu-
I railles de pierre , ainfi que je lé -dis plus ample*'-
B nient en traitant' dës-fiègës.1
z Desfapes & des hoyaux pour âpplanir l’entrée
I de ces murailles’à votre cavalerie , oü pour ôter
I quelque autre petit embarras du terrein.
Des maillets & des coins de fer pour faire fauter
I les ferrures, les verroux ou les pentures des portes
| & des barrières. .
• De grandes tenailles pour achever d’arracher les
I doux.
Des haches & des feies emmanchées en forme
■ de longs couteaux pour coüper ou feier les palif-
I fades 3c les barrières , 8c mettre lés' portes en
■ pièces.
1 Des mantelets de deux fortes , dont on parlera
I dans la fuite. •
Si, dans le lieu ou dans le quartier que vous
I ajlez furprend.re , il n’y a point d’artillerie à br;a-
■ quer contre les ennemis qui fe défendent dans
■ quelque édifice fort, faites porter fur des mulets
I ou fur des charrettes deux ou trois de ces canons
■ courts & chambrés de la nouvelle invention , de la
■ poudre & des boulets propres pour, ces fortesrde
■ pièces.' S’il y q de l’artillerie dans la place enriNe-
I raie, portez des clpux d’acier & des marteaux pour
I enclcmer les canons.
line feroit peut-être pas inutile pour la furprife
I d’un camp d’avoir des pierres à fufil, de la mèche
■ & des allumettes.
Je parlerai dans la fuite d’une autre forte de pré-
I paratif pour furprendre une place par des troupes
B iravefties.
Deville, en officier bien expérimenté , dit, avec
■ beaucoup de raifon, que dans les furprifes les bons
■ préparatifs fervent extrêmement à réuflir 8c à di-
I minuer la perte ; ainfi il faut , en défaut d’autre
■ Voiture, démontërquelques foldats pour fe fervir
B de leurs chevaux à tranfporter les préparatifs dont
■ on vient de parler.
Il faut auffi des bêtes de fomme pour retirer les
■ bleffés, pour porter quelques munitions, de ré-
■ ferve qui fervent dans la retraite , & les médica-
■ ’Hients pour le premier appareil ; fuppofez que
■ vous ne preniez pas le porte que vous allez fur-
■ prendre, foit que vous vous retiriez de celui-là
I dans un autre où ces forces de chofes ne fe trou-
I vent pas.
Je fuppofe que toutes les troupes portent du
I pa n & de l’avoine pour l’allée <k le retour, 8c fl
I la marche eft de plus d’un jour 8c par un pays qui
I ne foit pas peuplé y il faut faire donner aux troupes
-de la viande cuite■ ou du fromage; à l’égard de
T’eau., j’en parlerai en traitant des embufeades.
Si les préparatifs dont vous avez befoin pour la
furprife que vous méditez, font féparés dans différents
portes j »vous pouvez , fous quelque prétexte,
les en faire fortir, afin qu’ils vous joignent
dur votre marche ; ce-qui fe doit faire d’une ma-
inière cachée, de peur que les habitants qui. ver-
jroiêtit- ce convoi, ne fpupçonnent quelque chofe
|de votre defleini- • • ■ , m
Quand même vousiauriez dans les places voisines
les préparatifs néceffaires pour la furprife que
vous projefrez , il faudroit les faire conftruire dans
‘différents lieux, ou ( ce qui vaut encore mieux ) ,
dans les maifons de campagne de certaines personnes
qui vous font affidées , & qui ne permettront
pas aux-ouvriers de parler avec quelque
autre que ce foit. On peut prendre la même pré-,
caution à l’égard des ouvriers, en les faifant tra-:
vailler dans les arfenaux du prince , dont l’entrée
en tout temps devroit être défendue à touts ceux
qui ne font pas deftinés aux ouvrages qui s’y font ;
alors on ne- trouveroit .rien de particulier dans
votre myftère, quiautrement , peut exciter la
curiofité des efpions> 8c donner lieu à découvrir les
fecrets. •: : q . .j;~
En 1579 , le colonel Balfour, Ecoffois , vouloit
furprendre dans Méénen les Wallons , qui te-
noient le parti Efpagnol mais craignant qu’on ne
pénétrât fon defl’ein , s’il faifoit faire à Bruges , où
il fe trouvoit ; les échelles dont il avoit befoin , il
donna fès ordres pour les faire conftruire fecrète-
ment dans la maifon de campagne d’un de fes
amis , & furprit les Wallons , qui ignoroient que
Balfour eût tout cet attirail.
On fuppofe que les échelles doivent être affez ,
hautes afin de pouvoir, fans obftacle, monter fur .
le parapet. On éprouve pourtant , pour l ’ordi- .
naire, qu’elles fe trouvent trop courtes , ce qui
provient de ce qu’en donnant la mefure de la
hauteur des murailles , on oublie d’ajouter ce qne
l’éloignement de l’échelle du pied de la muraille-
emporte de plus , ou de ce que celui qui en a me-, ,
furé la hauteur s’eft mal acquitté de cet emploi 5
cela vient auffi quelquefois de ce que l’endroit de
la muraille qu’on a mefuré eft different en hau- ,
teur de cet autre endroit où l’on monte par les
échelles ; Car il arrive,fouvent que les murs des
courtines, des fia lies & des faces des battions font
plus hauts les uns que les autres , parce que l'iné—.
galité du terrein le demande ainfi ou que l’ingé-.
nieur qui a fait conftruire chaque ouvrage l’a ainfi
voulu.
Les Vénitiens en 1516, ne réuflirent pas dans !
la furprife de Brefcia , parce que les échelles fe
trouvèrent trop courtes.
C ’eft par cette même rai fou que les Turcs per-,
dirent tant de monde dan si le premier affaur qu’ils
donnè.ent au château de Saint Te line de Malthe ;
car ils ne s’apperçurent que les échelles n’ctôient