
fanté en fervant l’état, n’a-t il pas plus de droits
fur ces hofpices, que des hommes qui ont palïé
leur vie dans l’oifiveté 8c la débauche , & qui ne
doivent qu’à leurs vices les maux vi&imes ? dont ils font les
12°. Après que YinfpeElcur a terminé ces. différents
examens , il s’occupe de l'école d'infimElion. Il
voit li l’on fuit la progreffion & les principes établis
par l’ordonnance : en fuivant la loi vous ne pouvez
jamais mal faite ; voila quel doit êire fa maxime
confiante & univerfèlle; la plus petite innovation
dans la pofition du corps , dans le port de l’arme ,
dans les mouvements, les temps & les commandements,
doit être réformée, & même punie. Puif
qu il ne lui eff pas permis, à lui inJpeEleur, à lui
chef fuprême, de déroger aux loix, à plus forte
rai (on cela doit-il être défendu aux chefs fubor-
donnés ; 8tquel défôrdre ne s’enfui vroit-il pas , fi
chacun s’arrogeait le droit facré de faire des loix ?
Çar cefl donner une loi nouvelle, que de faire
lféugbeirr. à l’ancienne le changement même le plus
I$°- Après l’inftruâion particulière des recrues ,
Y infpeEleur s’occupe d é L'inJlruElion p a r tic u liè r e d es
com p a gn ie s ; il fait d’abord fur chaque compagnie
les mêmes obfervations qu’il a faites fur l’école
d inftruélion. Si aucun officier ne s’eft permis d’interprêter
la loi, l’uniformité la plus exaéle règne
non-feulement dans la même compagnie , mais
dans toutes les compagnies d’un régiment & dans,
tours les régiments d’une armée. Ceft donc à cette
©beiffance paffive, à la loi que YinfpeEleur doit s’attacher
avec une attention fcrupuleufe. Plus il .en
fera l’efclave, plus il méritera d eftime , & plus fes
devoirs lui deviendront faciles. xQuelque s in fp e c -
leurs exigent . je crois avec raifon, que chaque fol-
dat fâche l’époque de fon engagement; l'état de fa
maffe, celui de fon compte particulier ; le numéro
de fon arme, l’époque de fon habillement, fon
rang» tant dans le contrôle d’ancienneré que dans
celui qui eft fait par rang de taille; qu’il puifferéciter
les confignes générales & particulières; qu’il
ait appris à monter & à démonter fes armes , & la
théorie de fes devoirs dans routes les circonftances.
En paffanr leur revue, ces infpeEleurs font donc , à
différents foldats de chaque compagnie , quelques' queftions relatives à ces différents objets , 8c ils réprimandent
ou louent le capitaine, les officiers &
fleosld bata sr-éopfofincdie.rs, d'après la manière dont chaque
140. Affuré que les foldats font auffi inftruits
qu’ils doivent 1 être, Y infpeEleur cherche à connoître
le degré d\'infîruélion que les bas-officiers ont atteint. Son examen porte ici fur la théorie & la pratique.
Le bas-officier doit favoir non - feulement commander
& exécuter , mais encore rendre compte
de ce qu’il exécute 8c de ce qu’il commande : Y infpeEleur
v oit donc fi les bas officiers connoiffent l’ordonnance
des places 8c celle des manoeuvres; fi la
mémoire ne fait pas les frais de leur inftruâion. Il
loue celui qui répond avec intelligence ; blâme ;
menace ou punit celui qui ne rend pas un compte
clair 6c exaél de ce qu’il doit favoir ; car il eft per-
fuadé que 1 homme qui balbutie eft peu inftruir. R
ne doit pas croire à la timidité ; elle naît prefque
toujours de l’ignorancé. Quant au maniement des
armes, il n’a pas befoin de s’en occuper longtemps;
1 adreffe du foldat lui répond de celle des bas-officiers.
*5°* L'inflruElion des officiers. Voici le grand &
véritable objet, & néanmoins c’eft un des plus négligés.
Prefque toujours les infpeEleurs fe bornent à
favoir fi les officie rs ont un bon ton de commandement,
8c s’ilsfavent faire exécuter les manoeuvres
de détail. Q u’il y a loin de ce qui eft , à ce qui devrait
être. Un officier particulier devroit pouvoir
rendre compte à Ion infpeEleur de touts les
objets relatifs à l’adminiftration intérieure de la
compagnie à laquelle il eft attaché, 8c plus particulièrement
encore de la divifion qu’il a fous fes:
ordres immédiats. Il devroit pouvoir lui dire : lors
de la dernière revue , ma divifion étoit compofée
de N homm. s ; depuis cette époque j’en ai perdu
N par mort;N par défertion ; N par congé d’ancienneté
; N par congé de grâce ; N par la réforme
; N qui ont paffé dans d’autres compagnies ;
j ai reçu N recrues , j’ai donc N hommes ; N ont
été habillés en 178 ; N en 178 ; N en 178 ; mes
armes font du modèle de N ; N font bonnes ; N
font médiocres ; N font mauvaifes. Il devroit
rendre le même compte du grand & petit équipement
de fa divifion ; faire voir qu’il connoît la
ficuation particulière de chaque foldat, 8c en un
mot, tout ce que le foldat lui-même ne doit point
ignorer. Les officiers devroient encore connoître
le prix du pain , de la viande , des légumes; la
quantité de chacune de ces denrées que chaque
ordinaire confume par jour, 8c celle qu’iljseut con-
fumer; pouvoir parler avec connoiffance de l'inf-
truéfion , des qualités particulières & des moeurs de
chaque bas-officier ; du caraélëre & des moeurs de
chaque foldat. V infpeEleur pourroit exiger auffi que
les officiers fçuffent rendre compte de toutes les
ordonnances relatives au fervice de campagne &
des places, &c. Quant aux autres connoiffances
que nous avons détaillés dans l ’article Capitaine ,
combien ne feroit-il pas à délirer que les infpeEleurs
euffent ordre de s’affurer fi les officiers les pof-
fèdent !
Quant aux chefs des corps, les infpeEleurs jugent
aifément de leurs connoiffances , de leurs talents
& de leurs qualités, par la manière dont le corps
qu’ils commandent eft difeipliné , inftruit, &c.
L'infpeEleur ne doit jamais oublier qu’il eft refpon-
fable de touts les abus d’autorité qui fe commettent
dans fon infpeéfion , & que c’eft à lui-à donner à la
difeipliné cetre fermeté heureufe qui eft également
éloignée de la foibleffe & de la dureté. J’ai ouï
dire qu’un ancien infpeEleur employoit le moyen
fuivant pour apprécier les meflres-de-camp de. foa
infpeElïon. Il exîgeoit qu’ils fiffent eux mêmes , peu
de jours avant fon arrivée , la revue de leur régi
ment, & qu’ils rempliffent des états conformes à
ceux qu'il devoit lui-même envoyer au miniftre.
Quand les colonels, réduits par l’amour propre ,
avoient donné des louanges à ce qui n’en méritoit
point, ou n’avoient point blâmé ce qui étoit repré-
henfible , il leur faifoit fenrir la fauffeté de leur jugement
, & leur indiquoit la route qu’ils devoierit
fuivre pour le re&iner. Il prétendoit, en agiffant
ainfï, l'or mer de bons colonels , & même de bons
infpe leurs , 8c l’on ne peut .s’empêcher de convenir
que fa méthode étoit bonne.
160. Après que VinfpeEleur a vil les compagnies
en détail , il fait prendre les armes à tout le régiment
pour juger de l’inftrnéfion générale relativement
aux manoeuvres. Ici il doit montrer une févé-
r rire extrême ; elle feule peut arrêter les innovations,
toujours dangereufes , quand la loi ne les
preferit point. Si chaque régiment ne fe conforme
pas exaâement à l’ordonnance, l’armée, lorfqu’elle
eft raffemblée, ne formera pas un feul corps, ou
au moins les mouvements des differents membres
n’étant pas uniformes, égaux, fimultanés , ne pro-
duifent que peu de bons effets. Je reviens trop
fouverit, peut-être , fur cette même idée, mais
c’eft parce que chacun s’écarte de ce véritable
point de ralliement, que je crois ne pouvoir faire
trop d’efforts pour y ramener les efprits. Après que
le régiment a coulé à fonds toutes les manoeuvres
preferites par l’ordonnance , quelques infpeEleurs
font fortir du rang trois capitaines pris au hafard :
ils confient à l’un d’eux le commandement du régiment
, 8c aux deux autres celui des bataillons, &
par cet effai ils jugent de l’inftru&ion générale des
capitaine«.
170. L’infpeEleur porte enfuite des-yeux attentifs
fur Yhabillem. tit. Il voit s’il eft parfaitement conforme
au modèle envoyé par la cour ; fi les différentes
parties font bien exécutées & bien entretenues.
Voye^ Habillement.
180. \J armement occupe alors Y infpeEleur. Il examine
fi l’on a foin de le faire entretenir 8c réparer.
Il défend l’ufage de touts les moyens & de touts
les. ingrédients qui peuvent en rendre trop tôt le
renouvellement néceffaire.
19°* IYinfpeEleur fait fur le grand équipement les
mêmes obfervations que fur l’armement & fur l’ha-
billement; ( voyeç Equipement. ) Il veille auffi à
ce que le petit équipement ne foit pas trop multiplié.
2.00. UinfreEletir jere auffi un coup-d’èeil rapide
fur la tenue pour juger fi elle eft bonne , & fur tout
militaire. Celle q i eft trop recherchée eft auffi
condamnable que celle qui eft trop négligée. Voyez
T enue. y x
2i°. Pour s’affurer de la propreté 8c de la bonn^
tenue des quartier« , YinfpeEf-nr fe r nd dans
quelque- chambre , f, ns en avoir prévenu ’ s che s
du corps & fans fe laiffer conduire à celles qu’on
lui défigne. Il vifite le livre du prêt, les denrées
de l’ordinaire , la qualité des fournitures dont les
cafernes fbht remplies, &c.
22°* L'infpeEleur fait prêter aux recrues le ferment
militaire ; avant d’admettre les nouveaux foldats à
ce ferment, il leur demande s’ils n’ont aucune réclamation
à faire. Voyeç Serment.
2 30. L’infpeEleur àffemble le confeil d’adminiftra-
tion. 11 vifite le regiftre des délibérations de l’armée;
il cherche à deviner fi les confeils fe font
tenus aux jours indiqués ; fi on y a traité de tout ce
f qui devait y être agité ; en un mot fi les membres
fe font acquittés de touts leurs devoirs ; il lit le
journal des dépenfes , en compare les articles aux
pièces juftificatives ; s’arrête fur le prix des recrues,
pour juger s’il n’excède pas le taux fixé par la loi ;
fur les faux frais , pour n’allouer que ceux qui font
vraiment néeeffaires. Il fe fait repréfenter les fonds
de la caiffe ; il règle les remplacements à faire dans
l'habillement, l’armement & le grand équipement ;
il arrête le prix des façons , 8c enfin les autres dépenfes
à faire clans l’année fuivante ; rarement les
infpeEleurs trouvent du défordre dans ces différents
objets; mais en feroit-il toujours de même s’ils ar-
rivoient à l’improvifte , & s’ils affembloient le
confeil d’adminiftration auffitôt après leur arrivée ?
240. UinfpeHeur forme enfuite l'état des officiers
propofés pour les emplois fupérieurs. Dût-on reléguer
pendant quelque temps mon opinion parmi les
projets de l’abbé de Saint-Pierre , dût-on la placer
parmi ceux qu e- S pi famé donnoit dans le feizième
liècle , ou dans la claffe de -ces idées qu’on affeâe
dé renvoyer à la république de Platon pour les
couvrir d une teinte de ridicule, je ne la diffimulerai
point. Le vrai finit toujours par être reconnu ; mes
intentions font pures , & je crois qu'un écrivain qui
tait une vérité utile & point dangereufe , eft plus
condamnable que celui q u i, abufant du droit précieux
d’expofer fes penfées , cherche à détruire les
préjugés les plus néeeffaires , ou à allumer dans
l’ame de fes le&eurs le feu des pallions viles 8c fu-
neftes ; je dirai donc qu’il eft impoffible'à YinfpeEleur
même le plus exercé, à moins qu’jl n’ait reçu du
ciel le don précieux de lire dans le fonds des coeurs
8c de deviner les hommes ; qu’il lui eft impoffible,
non de faire un bon choix , le hafard peu le bien
fervir, mais de faire un choix motivé. Eft-ce en
voyant un officier exécurer quelques temps du maniement
des armes , en l’entendant faire quelques
commandements, rendre compte des légers changements
que fa compagnie a éprouvés , qu’on
peur juger s'il eft propre à commander un corps ,
8c s’il eft digne , par fes vertus 8c fes talents , d’être
l’organe de la loi 8c de la volonté du fouverain. Ce
qui eft impoffible à un infpeEleur, n’eft guères plus
facile à un meflre de-camp : celui-ci ne refte tout au
plus chaque année, que trois mois à fon corps;
pendant ce court efpace de temps , il ne vit (,oint
allez htjrrv ment avec fes officiers 6c il n. les fuit
poini ayec aflez de confiance pour les connoître à