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Tibère ; je ne prétends pourtant pas prouver par-
là qu’on doive ôter au commandant en chef le
droit de propofer au prince ceux qui méritent
d’ètre avancés & d’être nommés aux emplois vacants
; je l’ai précédemment établi fur des raifons
qui m’ont paru folides.
Tite - Live remarque que plufieurs fénateurs
»voient fourenu le parti du roi Tarquin*le-Superbe,
charte de Rome , parce qu’ils avoient été fes créatures.
J’ai fait obferver , en traitant des qualités d’un
général, que M. de Langé , dans fa difcipline mU
litaire, veut qu’un général d’armée ait famille,
afin que craignant de la lairter dans l’opprobre &
la pauvreté, il n’ofe machiner contre le fouverain ;
j ’ai prouvé , par les exemples d’Alexandre-le-
Grand & de Cortez , que le prince d oit, fous
quelque prétexte, attirer à la cour & auprès de fa
perfonne , les fils ou les frères d’un commandant
fufpeéï, afin qu’ils fervent comme d’otages. On
çeut aufli donner un emploi dans les palais à la
femme de ce général.
Lorfqu’il arrive que le prince commence d’en-
tfer en foupçon fur la fidélité du commandant de
fon armée , il faut éloigner de ce commandant les
officiers qui ont une étroite liaifon avec lu i, &
qui pourroient le .fervir utilement de leur confeil
& de leur épée. On peut prendre pour prétexte
pour les écarter , de vouloir les avancer dans
quelque autre endroit. Je dis la même chofe des
régiments dont le général fe feroit plus particulièrement
attiré l’affeéfion , parce qu’ils fervent
depuis plus longtemps fous fes ordres, ou qu’ils
en ont reçu plus de bienfaits. Il eft aifé de tirer
ces régiments pour en former un détachement, &
les éloigner enfuite davantage, en les faifant peu
à peu remplacer par d’autres troupes. Pendant ces
entrefaites, non-feulement le prince doit cacher
fon foupçon, mais même donner à penfer qu’il ;
regarde comme un fervice ce qu’il n’envifage réel- '
lemént que comme une offenfe.
Agrippine appréhendant que Claude ne déclarât
pour fon fucceffeur à l’empire Britannicus , plutôt
que Néron , éloigna touts les tribuns & les centurions
qu’elle croyoit affeâionnés à Britannicus ,
fous prétexte de leur avancement, afin que fi Britannicus
vouloit afpirer à l’empire par la force , il
ne fe trouvât perfonne auprès de lui qui pût fou-
tenir fon parti.
Philippe, roi de Macédoine, ayant réfolu de
faire arrêter Léonce, commença par éloigner, fous
divers prétextes , les troupes en qui Léonce auroit
pu trouver un appui pour en venir à une révolte
déclarée.
Solis parlant de la fédition que Cammafin , roi
de Tezeuco, avoit excitée contre l’empereur Mon-
tezuma * fon oncle , dit que Montezuma fe comporta
avec beaucoup de réferve auprès de fes mi-
niftres , faifant femblant de méprifer le crime ,
pour ne pas donner de la défiance au coupable ,
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leur difant à cette fin que cette témérité de fou
neveu ne devoit être regardée que comme unear-
deur de jeuneffe, ou comme un premier mou-
vement d’un homme fans capacité ; mais en
même-temps il trama une confpiration contre
Cammafin » ayant gagné par des dons & des pro-
mefles fes propres domeftiques, qui, une'nuit
l ’attaquèrent dans fon palais, & l’ayant fait embarquer
dans un petit bateau qui étoit prêt, ils 1®
conduifirent prifonnier au Mexique.
REVUE. Examen d’une troupe. L’objet d’une
revue générale eft de voir fi une troupe eft corn-
plette, fi chaque foldat ou cavalier eft: en état de
fervir, bien habillé, bien équipé, bien armé & bien
exercé. Ce font les officiers généraux, les infpec*
teurs généraux, & les officiers fupérieurs qui font
les revues générales.
Les commiflaires font touts les mois une revue
particulière de touts les régiments qui font dans
leur département, pour conftater le nombre des
foldats ou cavaliers de chaque compagnie, & s’ils
ont les qualités néceftaires pour le fervice.
Les extraits de revue qu’ils envoyent au miniftre
de la guerre & aux intendants des provinces, contiennent
le nombre & la qualité des hommes , des
cheveaux & de l’habillement des troupes. Ces extraits
font fignés par les gouverneurs ou commandants
des places ou les régiments font en garnifon,
& s’il n’y a point dans le lieu de gouverneur ou
de commandant, ce font les maires, échevins ou
autres magiftràts qui appofent leur fignature.
RIBAUDEQUER. Arc de quinze pieds de long,
ou de douze, au moins, arrêté fur un arbre large
d’un pied , où l'on creufoit un canal pour y placer
un javelot de cinq à fix pieds, ferre, empenné,
& fait quelquefois de corne. On le drefloit fur une
muraille. On le bandoit avec un tour ; la chafle.eti
étoit telle que le javelot pouvoit percer quatre
hommes de fuite. Cette machine étoit femblable
au fcorpion : on l’appelloit auffi arbalète de pajfe.
RIBAUDS. Corps de foldats qui fervoit dans
les armées de . Philippe - Augufte. Ces ribauds
étoient des gens déterminés, qui affrontoient hardiment
les plus grands- périls, quoiqu’ils ne fnflent
armés qu’à la légère. Ils avoient' beaucoup de rapport
à nos grenadiers d’aujourd’hui ; mais ils fe
décrièrent tellement par leurs débordements, que
pour fignifier un débauché- qui faifoit gloire de fes
débauches , on difoit que c’étoit un ribaud: c’étoit
une injure dès le temps de Saint - Louis. (Dan» Mil,
franc.
RONDACHE. Bouclier rond qu’on appelloit
rondelle. On s’en fervoit encore du temps de Henri
IV. (O. )
RONDE, terme militaire qui fignifie le tour ou
la marche que fait un officier, accompagné de foldats,
autour des remparts d’une ville de guerre
pendant la nuit, pourvoir fi chacun fait fon devoir
, fi les fentinelles font éveillées , & fi tout
eft en bon ordre. Dans les garnifons exaltes, U
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m É marche touts les quarts-d’heures. de forte
„„■ il y a toujours quelqu’un fur le rempart. L ejh-
riér qui fait fa ronde porte du feu, ou il en fait
p o r te r , pour examiner plus exaûement les difle-
rents poftes qu’il doit viliter. . .
Ronde - major eft celle que fait le major. Lorfque
la ronde-major arrive à un corps-de-garde, la
fentinelle qui eft devant les armes;, des qu elle
l’aaperçoit, lui demande qui va - là ? on répond
Mde-major. La fentinelle lui crie demeure-là ; ca-
voraïhors delà garde. L’officier qui commande la
garde fe préfente, accompagné de deux fufihers
qu’il place derière lui , l ’un à fa droite , 1 autre à
fa gauche, préfentant leurs armes. Il a auffi avec
lui le fergént portant la hallebarde , & le caporal
de configne qui porte le fallot. L officier demande
quivadà ? oh lui répond ron^e-major ; il dit avance
lui a ïordre. Le major avance ; & l’officier, après
avoir reconnu fi c’eft lui - même ou 1 aide - major
de la place , lui donne le mot à l’oreille. Le ma-
; jor peut compter les foldats de la garde, & vifiter
leurs armes-Cette ronde te fait pour vifiter l’état
des corps-de-garde & des fentinelles ; favoir fi
touts les officiers & foldats font à leurs poftes ,
& fi le mot eft bon par - tout. C ’eft pourquoi il
faut que le major vifite les armes & compte les
foldats, & que l’officier lui donne le mot lui-
même ; car autrement comment le major peut - il
| favoir fi l’officier a le mot , comme il a été donné
[ au cercle, fi l’officier ne le lui donneainfi ? Non-
feulement l’officier doit donner le mot au njajor,
| mais encore , dans la réglé , le, major ne doit le re-
I ccvoir que de lui. L’officier doit bien reconnaître ,
[ avant de donner le mot, fi c’eft le major ou 1 aide-
major de la place qui fait la rond:, & fi , fous ce
prétexte, quelqu’un ne vient pas furprendr'e l’ordre,
& favoir l'état de la garde & des fentinelles. C ’eft
[ pour cette raifon qu’il fait porter lé fallot, & les
fufiliers qu’il prend, font pour fa fureté & celle
de fon pofte; auftï n’e ft-ii obligé de donner
l’ordre au major qu’à la première r o n d e . fait,
& qu’on appelle ronde - major ; & s’il en vouloit
[ faire une fécondé , il faudroit qu*il donnât lui-
même l’ordre au caporal, qui viendroit le recevoir
comme une fimple ronde. Lorfque le major a fait
fa ronde, il va chez le gouverneur lui fendre
compte de l’état où il a trouvé les poftes. Il doit
enfuite aller porter l’ordre au lieutenant-de-roi,
s’il eft dans la place, quoique le gouverneur foit
I préfent.
Lorfqu’on dit que le major fait fa ronde dès que
[ Tordre eft donné , on entend feulement qu’il ne
la faitqu’après ; car il n’y a point pour lui d’heures
précifes : il eft bon même qu’il là fafle à des heures
incertaines, afin de tenir toujours le corps-de-garde
alerte; mais il faut toujours qu’il faffe la première
pour vérifier l’ordre dans touts les corps-de-garde.
L’officier doit auffi recevoir delà même manière
! la ronde du gouverneur & celle du lieutenant-de-
I roi ; augmentant le nombre des fufiliers avec lef-
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quels il la reçoit, en proportion de la dignité de
celui qui la fait ; & s’ils la faifoient plufieurs fois
dans une même nuit, il doit toujours la recevoir
de la même manière.
L’infpeifteur-général qui fe trouve dans une place,
peut auffi faire fa ronde ; l’officier doit lui donner
le mot, fans oue l’infpe&eur foit obligé de mettre
pied à terre s il eft à cheval. L’infpeaeur-particu-
lier peut auffi faire la Tienne ; mais il eft reçu par
un caporal, comme une fimple ronde.
A l’égard des fimples rondes, dès que la fentinelle
qui eft devant le corps de garde les voit pa-
roître ,on leur demande qui.va-là ? on lui répond
ronde. La fentinelle leur crie demeure-la ; caporal .
hors de la garde, ronde. Le caporal de pofte vient
recevoir la ronde , & demande qui va-là? on lui
répond ronde. Il dit avance qui a l'ordre. La rende
avance & donne le mot à l’oreille au caporal qui
la reçoit l’épée à la main , la pointe à l’eftomac
de la ronde. Si le mot eft bon , le caporal reçoit le
numéro, &. le fait mettre dans la boîte ; il fait
figner celui qui fait la ronde , fuivant l’ufage particulier
de la garnifon , & la laiffe paffer. Si le mot
n’eft pas bon, il doit l’arrêter, & en rendre compte
à l’officier qui examine ce que c’eft.
Lorfque deux rondes te rencontrent fur le rempart
, celiq qui la première a découvert l’autre , a
droit d’exiger l’ordre, à moins que ce- ne fût le
gouverneur , le commandant, le lieutenant - de-
roi ou le major qui la fifTent; car en ce cas on le
leur doit donner. On fait faire des rondes dans
une place, tant pour vifiter les fentinelles & les
empêcher de s’endormir, que pour découvrir ce
qui te pafte au dehors : c’eft pourquoi dans les
: places où il n’y pas un chemin au-delà du parapet,
il faut que celui qui fait la ronde marche fur
la banquette, & qu’il entre dans toutes les guérites
pour découvrir plus âifément dans le. fofle ,
& qu’il interroge les fentinelles s’il y a quelque
chofe de nouveau dans leurs poftes , & leur fafTe
redire la configne.
Plufieurs gouverneurs obfervent une très bonne
maxime , qui eft de faire une rende un peu avant
qu’on ouvre les portes. Comme il eft déjà grand
jour , cette ronde eft très utile , parce qu’on peut découvrir
du rempart, qui eft très élevé, ce qui fc
parte dans la campagne.
Le tiers des officiers qui ne font pas de garde ,
doivent faire la ronde toutes^des nuits à des heures
marquées par le gouverneur, & doivent tirer
touts au fort, fans diftin&ion du capitaine ou du
lieutenant, l’heure à laquelle ils doivent la faire ;
& le major de la place a foin de faire écrire, fur
un regiftre , le nom de touts les officiers dé ronde9
8c l'heure à laquelle ils doivent la faire,afin de pouvoir
vérifier fi quelqu’un y a manqué. Les officiers
doivent la faire, à peine, pour ceux qui y manquent
, de quinze jours de prifon, & de la perte
de leurs appointements pendant ce temps-là , qui
font donnés à l’hôpital de la place, ( f )